Le tableau de Gavrila
Antonia Iliescu
C’est quoi le chiffre trois?
Un triptyque de Van Eyck? La Bible, ou la croix
rappelant Père, Fils, Saint Esprit dans le jardin d’Eden
qui nous mènent en douceur vers l’éternel Amen?
Mais nous sommes toujours trois, avec nos langues clouées
dans des palais de bouches... On dirait unité...
Un vif triptyque qui cache sous des couleurs de soie
dans un mystère biblique tout homme, lui, toi et moi.
Trois cloches dans l’azur qui raisonnent dans les cieux
avec leur langues muettes de métal mystérieux,
par la porte bleue des yeux, largement ouverts
nous apportent de là-haut toute la musique des sphères.
Odeur blanche d’encens, odeur de bois séché
qui brûle et déchiffre les signes indéchiffrés.
Je me demande: la main qui tire les cloches,
Cette main vêtue de blanc, absente sur la toile,
pourtant présente partout et qui enfante l’harmonie,
Cette main qui nous unit, cette main... c’est à qui?
- C’est la main de Messie.
Cachée sous l’œil magique du peintre de génie,
avec un peu de blanc, avec un peu de jeu,
elle nous a conduits
vers le Grand Inconnu,
où règne le rêve bleu.
(extrait du volume « Nãscãtorul de perle » (L’enfanteur de perles ») de Antonia Iliescu, Ed. Pegasus Press, Bucarest 2010)