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légendes (2)

Terres sacrées, pierres de légendes

12273388053?profile=originalCoup de foudre sur la sierra
(paesine, marbre de Florence)

Pouvoir incantatoire des pierres, puissamment évocateur, jeux de la nature, obsidienne, miroir fumant de l’Aztèque, larmes d’Apache, agate, lithophyse, œuf de tonnerre, fulgurite, céraunie, glossopètre, pierre de foudre, cristal de roche, marbre, pietra paesina


Dans ces messages codés, ces signaux de fumée, ces traces laissées par le temps, j’y ai vu d’étranges correspondances…

12273388283?profile=original Pluie de cendres sur un monde perdu
Gioacchino Toma (1836-1891)
(huile sur toile, détail ; La pioggia di cinere a Napoli)

« Les roches elles-mêmes semblent bavarder, fraternelles,
débordantes de sympathie.
Ce qui n’a rien d’étonnant,
nous avons tous les mêmes père et mère. »,
                                                                                               John Muir (1838-1914)

Dès lors poursuivons le dialogue.

12273388656?profile=originalCoup de tonnerre sur les Chiricahua Mountains

(paesine, marbre de Florence)

Il y a très longtemps, par une violente nuit d’orage, Eclair à plusieurs reprises frappa Femme Peinte en Blanc. C’est ainsi qu’elle donna le jour à Enfant de l’Eau. Quand Eclair jugea qu’Enfant de l’Eau était digne d’être son fils, il lui fit don d’une telle force qu’Enfant de l’Eau put anéantir Géant. Ainsi le Peuple des Forêts, tels que les Apaches se nommaient eux-mêmes, put vivre tranquillement, chassant, cueillant pour subvenir à ses besoins.

(Légende apache)

 

On dirait une terre d’orage

Levée en plein ciel

Une terre de rouille et de ruine

D’ombre

Et de marbre

 

Quelque chose de brutal et d’injuste

En pleine nature

Presque une vengeance       sauvage

De l’homme

Comme revenu de lui-même

Arnauld Pontier, Marbre, 2007

 

12273388869?profile=originalTerre apache

(paesine, marbre de Florence)

Cette pierre, née du hasard, ressemble étrangement au mont Graham.

Même profil que cette montagne sacrée, le « Mont Assis » des Apaches,

 Dzit Ncha Sí Án

« Ici, sur cette terre éternellement jeune et formidablement ancienne, [l’homme] se sent à la fois plus petit et plus grand. Ses yeux ont une portée exceptionnelle, car ils sont confrontés avec des choses qui se trouvent dans l’espace depuis des millions d’années. »,

                                                                                         Elliott Arnold (1912-1980)

« Les actes accomplis et les mots prononcés se sont immédiatement pétrifiés, comme l’exigeait une loi mystérieuse,

à jamais incompréhensible. »

id.

 

12273388696?profile=originalLe chant de la foudre

(paesine, marbre de Florence)

C’est aux sommets des monts Graham, Turnbull, Chiricahua et White Mountain, avec le grondement du tonnerre, que viennent se réfugier les nuages et les Êtres Tonnerres. C’est à eux que les Apaches adressent leurs prières. Gibier, récoltes, pluie, longue vie…

Alors les Gans, les Esprits de la Montagne, « ceux qui ne meurent pas », les envoyés d’Usen, le Grand Esprit des Apaches, le donneur de vie, purent danser.

(d’après les textes recueillis et traduits par Claude Dordis, in Voix des Apaches)

 

12273389874?profile=original Crown Dancer

Septaria (San Sebastian, Guipuscoa, Espagne)

(concrétion marneuse indurée dont les veines de rétractation sont emplies ici de calcite)

Le danseur couronné incarne le Gan, l’Esprit de la montagne.

Il « invoque et danse autour du feu et éloigne la maladie.

Il chasse le maléfice et apporte le bien. »,

Elliott Arnold.

Je suis l’Eclair éblouissant et éclatant,

La vie se tient là, dans sa coiffe,

Dans le cliquetis de ses pendentifs il y a la vie,

On entend ce bruit et il résonne

Et mon chant entoure les danseurs

Et les protège.

C’est le chant de la vie sous le soleil.

 

12273390098?profile=original Hilili

Bois flotté (ramassé pour être honnête sur une plage de Crète)

Les Crown dancers sont souvent cinq, quatre Gans représentent les points cardinaux et un clown sacré.

Koyemsi, le clown sacré des Hopis, introduit d’un cri l’entrée du

maître de cérémonie, Hilili

Riez, tremblez…

 

12273390688?profile=originalGrés de Kanab

(Utah, Etats-Unis)

 

12273390490?profile=originalMonument Valley

(Agate paysage du Brésil)

Vision panoramique, profondeur de champ, dans un technicolor éblouissant, on se projette dans un film de John Ford. Les vastes étendues entre Arizona et Utah, tout ça dans moins d’un millimètre d’épaisseur et dans la dimension d’une vignette (4 x 2,8cm).

 

« C’est un miroir merveilleux qui, à un moment donné,

a reçu l’empreinte et reflété l’image d’un grand spectacle…

la vitrification de notre planète. »,

George Sand (1804-1876)

 

12273391673?profile=original Esprit de la Montagne

Bout de terre sacrée

Grès de Monument Valley ramassé au pied d’une butte au cœur du

 Territoire Navajo.

 « Le moindre caillou, niché au fond d’une poche, peut représenter un instant de mémoire absolu. »,

Maurice Rajsfus (1928-2020)

 

 

 12273391295?profile=originalPeinture sur sable Navajo

Phil & Lucinda Benally, Indiens navajos de Shiprock (Nouveau-Mexique)

Le peuple Navajo croit en un monde d’équilibre.

Mais l’homme peut le renverser, provoquant désastre ou maladie. L’homme-médecine peut tenter de rétablir cet équilibre naturel et guérir celui qui y a contrevenu par des herbes, des prières, des peintures sur sable qui seront dispersées par le vent.

Et des chants.

Ho – Na – Dzon – Age – Ne – Yo

Où sont passés tous les miens ?

Chant de Geronimo

 

12273392669?profile=originalYo – l’oiseau

Agates (lithophyses de l’Esterel, Var)

 

12273393684?profile=originalKokopelli

Fac-similé d’un pétroglyphe anasazi incisé dans le grès acquis auprès d’un indien Hopi au Canyon de Chelly (Nevada, USA).

Courbé par la vieillesse et jouant de la flûte, Kokopelli symbolise la virilité masculine autant que l’humidité bienfaisante et féconde de la saison des pluies pour les peuples indiens du sud-ouest des Etats-Unis.

 

12273393890?profile=originalKachina

Hopi (XXe siècle. Racine de yucca, plumes, cuir)

Kachina-Aigle (?).

Les Kachinas-Oiseaux sont des esprits intercesseurs des dieux très aimés des Hopis. Ils dansent en poussant des cris stridents lorsqu’ils entrent dans la kiva (espace cérémoniel).

Ces poupées magiques fascinèrent les surréalistes, notamment Max Ernst et André Breton. Ce dernier, en juillet 1945, sillonna le Nevada, l’Arizona et le Nouveau Mexique, rencontra les Indiens Hopi, collecta ces Kachinas. Effigies des forces de la nature, règnes animal, végétal, minéral.

 

 

12273394478?profile=original Three Mesas, les ruines d’un monde

ou les veines ouvertes de l’Amérique indienne

Septaria

(les fentes de rétractation sont ici juste saupoudrées de pyrite)

 

 

12273395077?profile=originalCrépuscule indien

Jaspe paysage

Comme dans le Joueur de flûte de Hamelin,

 traités et promesses ne furent guère tenus.

On finit par les parquer dans des réserves

Terme de la Longue Marche Tragique

des Navajos et des Apaches

Piste des larmes

des Cherokee

Soleil Hopi.

12273395469?profile=originalPointe de lance indienne

Jaspe.

Utah

 

12273395500?profile=originalGrés paysage

Finitude d’un monde enclavé, étranglé

sur lequel je pleure.

12273395895?profile=original Politique de la terre brulée

Un monde aujourd’hui renait, déterminé.

Grés (Etats-Unis)

 

Apache sèche tes pleurs

Sur la piste

une étoile

a déposé

une fleur

un calice

Pour qu’au firmament

Terre et Hommes puissent

Passer la voute du temps.

M. L.

 

12273396690?profile=originalThunder egg

(lithophyse « œuf de tonnerre », Oregon)

 

12273397478?profile=originalGrés

Mais que sont les mots pour le temps…

 

12273397885?profile=originalLithophyse

Ce temps qui, tel Cronos le Titan, dévore ses enfants.

Cronos armé de sa faucille, Zeus tenant la foudre.

Tous les hommes sont de la même terre pourtant.

 

« Les oiseaux quittent la terre avec leurs ailes,

et nous, les hommes, pouvons également ce monde,

non pas avec des ailes, mais avec l’esprit. »,

Black Elk (1863-1950),

homme-médecine des Lakota oglala

 

Pour vous conter cette histoire j’ai nourri mon imaginaire de ces curieuses formes minérales, quand « la nature imite si bien les productions de l’art » (Patrin) autant que l’art semble imiter la nature.

12273398098?profile=originalPierre de Florence (Pietra paesina)

Peint par Jacques Deseve, gravé par Gérard-René Le Villain pour l’

Histoire naturelle des minéraux de Eugène-Melchior-Louis Patrin (1742-1815)

 

Michel Lansardière

(texte et photos)

 

Glossaire :

Obsidienne : roche volcanique vitreuse

Miroir fumant : miroir divinatoire en obsidienne destiné à invoquer le dieu Tezcatlipoca.

Larme d’Apache : obsidienne guttulaire.

Agate : quartz microcristallin, une calcédoine déposée en couches très graphiques et aux couleurs contrastées.

Lithophyse : nodule d’origine volcanique empli d’agate.

Œuf de tonnerre : lithophyse où l’agate forme souvent une étoile à cinq branches (thunder egg de l’Oregon).

Fulgurite : tube de silice creux formé par la foudre frappant le sable.

Céraunie : objet que l’on croyait d’origine céleste (cela pouvait être une hache de pierre préhistorique, un minéral comme la marcassite, une météorite, un fossile, bref une étrangeté dont on ne comprenait pas l’origine).

Glossopètre : encore un objet que l’on croyait tombé du ciel (nous sommes Gaulois que diantre ! Il s’agissait en fait d’une dent de requin fossile ou d’une pointe de flèche du temps d’avant Taranis).

Pierre de foudre : synonyme de céraunie.

Cristal de roche : quartz transparent et incolore.

Marbre : calcaire métamorphique, cristallin.

Pietra paesina : la paesine (ou pierre de Florence) est une forme de marbre au graphisme pouvant évoquer une ville en ruine (« pierre aux masures », marbre ruinatique). Très prisée à la Renaissance, on la trouvait fréquemment dans les cabinets de curiosités.

 

Nota : Murillo a peint sur obsidienne, des « miroirs fumants » d’origine aztèque ; Orazio Gentileschi, Antonio Carrache, le Cavalier d’Arpin ou Antonio Tempesta sur lapis-lazuli ; Filippo Napoletano, Francesco Ligozzi, Jacques Stella sur paesine… Après tout où trouver plus belle palette que notre planète.

Dans mes compositions seule la nature a œuvré (un sciage a suffi pour en révéler la subtilité, et un polissage parfois pour en sublimer la beauté), laissant libre-cours à l’imagination.

12273398875?profile=originalPeinture sur paesine (Toscane, début XVIIe)

« Il n’y a pas de miracles.

Plutôt tout est miracle. »,

                                                                                        Saint François d’Assise

M. L.

 

 

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Les légendes de la mort en Basse-Bretagne, d'Anatole Le Braz furent publiées en 1893. Désireux de fixer les croyances de la vieille Bretagne, encore si vivaces au début de ce siècle, l'auteur nous entraîne à travers le Goëlo, le Quimpérois et surtout le Trégor, en particulier dans les communes de Begard, de Penvénan et du Port-Blanc. "La Bretagne, dit-il, est pleine d' âmes errantes qui pleurent et guérissent". Les morts n'y sont point les habitants d'un autre monde: ils continuent leur route sans issue parmi les vivants, comme s'ils ne pouvaient se détacher de la terre. Aussi les personnages qu'Anatole Le Braz évoque ici, sont-ils familiers: les morts conservent les mêmes passions que les vivants: on dit par exemple que la veille de la Toussaint, ils vont coucher dans la maison où ils habitaient autrefois. Certains reviennent chez eux pour labourer leur terre, d'autres pour réclamer leur dû à quelque mauvais payeur, quelques-uns tout simplement pour fumer leur pipe!

Toutefois, si l'ancienne Bretagne a le sentiment d'une continuelle présence des morts parmi les vivants, elle ne parle jamais d'eux sans une expression de terreur. Les faits de la maladie, de la mort, ne sont point rattachés à des causes naturelles et physiques, mais à l'action personnelle de l' "ouvrier de la mort", l' "Ankou", qui frappe sans pitié avec sa faux et emporte ses victimes sur sa charrette. Il arrive qu'on le rencontre à la tombée du soir. Parfois c'est un homme décharné, très grand, et dont la figure est cachée par un feutre. Parfois, c'est un squelette drapé dans un linceul: il n'a pas de nez et ses yeux sont comme des chandelles. La Mort a ses auxiliaires: ce sont, en particulier, les "groat'ch", vieilles qui guettent, aux carrefours, le passant attardé. On redoute la mort, on redoute aussi l' âme en peine, l' "anaon", qui déambule dans les lieux où elle vécut et où elle est morte. A la Noël, à la Toussaint, mainte légende assure que le cortège des morts s'ébranle en silence dans la campagne. Sur mer, par les nuits de tempête, les noyés s'appellent entre eux et plus d'un s'attache à la coque des navires. Dans l' âme bretonne qui songe aux morts, la tendresse se mêle cependant à l'effroi et les vivants ont pour les défunts mille gentillesses: comme celle qui consiste, à la Saint-Jean, à allumer des feux pour que les morts puissent revenir s'y réchauffer. Une telle familiarité avec la mort entraîne naturellement une croyance aux sorts, aux malédictions, à la magie noire. Ainsi la légende bretonne fait-elle peu de cas de ce qui est proprement féérique. Elle est au contraire dominée par le souci de fixer l'homme à sa terre, à son village, aux siens. Toujours la légende des morts se déroule dans un cadre familier, celui du village ou de la maison. Et les acteurs sont ceux que tout le monde connaît, les proches parents et les amis du défunt. Sans doute aujourd'hui ces superstitions sont-elles disparues. La poésie des légendes n'en demeure pas moins et, grâce à cet ouvrage, le lecteur moderne peut, en particulier dans les "Cloarec", poèmes pleins de pittoresque et de violence, retrouver cette angoisse de la mort que la Bretagne connaît depuis plus d'un millénaire.

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