"Le bruit des os qui craquent " Suzanne Lebeau
Du 27 septembre au 22 octobre 2011, à 20h30, au Théâtre de Poche.
L'histoire de deux enfants-soldats en fuite et celle d'une infirmière qui témoigne. Une pièce pour tous, dès 14 ans. De Suzanne Lebeau, mise en scène de Roland Mahauden. Avec : Aïssatou Diop, Olga Tshiyuka-Tshibi, Angel Uwamahoro
Le cahier ou la kalachnikov
Quel que soit l’âge où leurs yeux se fermeront pour la dernière fois, ils resteront désorientés et perdus, ces enfants volés par des barbares, ces enfants dont on a volé le corps et parfois l’âme. Que peuvent en effet faire les enfants-soldats que l’on a traqués, drogués, et à qui on n’a appris qu’à tuer, brûler et piller, …lorsqu’enfin leur pays accède enfin à la paix ? Ils n’ont ni éducation, ni moyens de subsistance. Aucun avenir. Quelle école les sauvera de la prison ? La question est grave et choquante.
Elikia, arrachée à 12 ans à sa famille et à son village est l’un de ceux-ci. Mais vivre avec les rebelles ses nouveaux frères assoiffés de sang et de diamants, constitue un perpétuel danger de mort. Quitter le groupe maudit l’est tout autant. Comment garder sa dignité, elle qui est née enfant libre ? « La tête haute chez les rebelles, c’était la mort.» Seule l’obéissance maintenait en vie. Mais Elikia décide quand même de sauver son âme et fuit avec une compagne d’infortune plus jeune qu’elle, qu’elle force brutalement à la suivre. « Toute seule, j’ai trop peur ! » Elle est convaincue que « si le fusil tue le corps de celui qui a peur, il tue aussi l’âme de celui qui le porte ».
Un an d’errance dans une forêt tropicale hostile, avec pour tout bagage, une gourde, sa kalachnikov reçue en cadeau de mariage de son époux, le chef des rebelles, et la fragile Josepha. Sans son arme Elikia se sentait « comme un oiseau fragile avec le bruit des os qui craquent. » Elles ont 14 et 10 ans. La nuit elles marchent sans la moindre indication d’orientation, le jour elles se cachent des militaires et des rebelles. « Elikia, mais comment reconnais-tu l’ennemi ? » demande Josepha de sa voix douce. Réponse : « il n’y a pas de bons, rien que des méchants ! » Elle met militaires et rebelles sur le même rang. Assoiffés de pouvoir et de cupidité.
Elles ne parlent pas le même dialecte mais se comprennent. La grande protège la petite et des sentiments humains refont surface. Plus la petite est épuisée par la faim, la soif, la marche forcée vers la mer, plus la grande sent battre en elle un cœur de grande sœur, jusqu’à lui proposer ses bottes. « La mer ? Je ne sais pas où elle est, je l’imagine. Je ne connais pas le chemin, mais j’en suis sûre » dit Elikia pour consoler Josepha exténuée.
Après avoir enfin rejoint l’hôpital de Kena, tout ceci sera consigné par Elikia dans un cahier, que l’infirmière Angelina lui donnera après maintes tractations en échange du talisman mortifère de la kalachnikov. Angelina raconte avec tendresse : « Elle ne parlait que quand son monologue intérieur débordait. » Elikia écrira donc « car les mots de bouche sont trop près de la haine et de la vengeance. » Elikia souhaite livrer un témoignage juste de cette réalité insoutenable, un témoignage qui interrompe la chaîne de violence dans laquelle elle a été entraînée. Un texte fort, souple, cru, intense. La jeune adolescente ne pourra pas se présenter devant la commission d’examen. Le cahier ne sera pas pris en compte, car écrit de la main d’un enfant.
L’enfant et le cahier glisseront dans l’oubli, à moins que vous n’écoutiez avec votre cœur cette petite voix duelle et solidaire, que vous ne soyez touchés par leur espoir démentiel, et que vous ne décidiez de dénoncer l’insoutenable. Changer l’avenir de milliers d’enfants comme elles. Comme eux.
Trois comédiennes généreuses, craquantes de soif de vivre, de compassion et de colère justifiée investissent à fond l’admirable texte de Suzanne Lebeau sur les planches du Poche : Aïssatou Diop (l’infirmière), Olga Tshiyuka-Tshibi, Angel Uwamahoro. Voici un début de saison fracassant, qui fait ouvrir grand les yeux, les oreilles et le cœur. Le rôle essentiel du théâtre.
La genèse de la pièce
(Interview de Suzanne Lebeau) / …/ J’ai ensuite passé presque deux années à faire des recherches, en lisant notamment les écrits de la journaliste belge Colette Braeckman. Je suis allée jusqu’en Belgique, au GRIP, le Groupe de Recherche et d’Information pour la Paix. Mais quand je suis arrivée à la fin de l’écriture, je me suis mise à douter de manière extrêmement violente de la possible résilience de ces enfants-là. Je suis donc partie cinq semaines à Kinshasa pour écrire les récits d’ex-enfants soldats.
C’est là que vous avez rencontré Amisi et Yaoundé...
Suzanne Lebeau: Je passais chaque jour 3 ou 4 heures à noter les récits qu’ils me faisaient. J’écrivais en pleurant et je pleurais en écrivant. Tout ce qu’ils avaient vécu pendant les 5 années où ils avaient été enfants soldats était insupportable, pour la femme, pour la mère, pour la personne qui sait à quel point l’enfance est une période de formation, décisive pour ce que l’être humain peut développer de pire et de meilleur. C’est grâce à eux que j’ai pu terminer la pièce et y croire. Le jour où j’ai mis le point final, j’ai eu le sentiment de retrouver ma respiration normale.
Quand on parle d’enfants soldats, en général, on pense à des garçons.
Suzanne Lebeau : Pour moi, prendre un personnage de fille, c’était aller au bout de l’horreur. Parce que le sort des filles soldats est 100 fois plus terrible que celui des garçons. Quand elles reviennent dans leur village, ce sont comme des marchandises dévaluées.
http://www.poche.be/saison1112/le_bruit_des_os_qui_craquent/index.html
Commentaires
CALENDRIER DE LA TOURNEE DU SPECTACLE « LE BRUIT DES OS QUI CRAQUENT » EN R.D.C./BURUNDI/RWANDA
FEVRIER 2012
Mardi 31 janvier 2012
Voyage Bruxelles/Kigali – 3 personnes
Voyage Olga TSHIYUKA-TSHIBI Kinshasa/Kigali – 1 personne
Voyage Elvir Nsinga Kisangani/Kigali – 1 personne
Mercredi 1er février 2012
Remise en place du spectacle à l’Ishyo Arts Centre
Jeudi 2 février 2012
Répétition générale publique à l’Ishyo Arts Centre en présence des artistes locaux
Vendredi 3 février 2012
Représentation à l’Ishyo Arts Centre à 19h
Samedi 4 février 2012
Représentation à l’Ishyo Arts Centre à 19h
Dimanche 5 février 2012
Route Kigali/Bujumbura en minibus – 6 personnes
Lundi 6 février 2012
Rencontre et atelier avec les artistes de Bujumbura
Mardi 7 février 2012
Représentation au CCF à 19h
Mercredi 8 février 2012
Représentation au CCF à 19h
Jeudi 9 février 2012
Route Bujumbura/Bukavu en minibus – 6 personnes
Vendredi 10 février 2012
Atelier et représentation à la salle de l’Alliance française à 19h
Samedi 11 février 2012
Atelier et représentation à la salle de l’Alliance française à 19h
Dimanche 12 février 2012
Bateau Bukavu/Goma – 6 personnes
Lundi 13 février 2012
Avion Goma/Kisangani – 6 personnes
Atelier à l’Espace Ngoma
Mardi 14 février 2012
Atelier et représentation à l’Espace Ngoma à 19h
Mercredi 15 février 2012
Atelier et représentation à l’Espace Ngoma à 19h
Jeudi 16 février 2012
Avion Kisangani/Kinshasa – 5 personnes
Vendredi 17 février 2012
Représentation au Centre Wallonie/Bruxelles à 19h
Samedi 18 février 2012
Atelier et représentation au Centre Wallonie/Bruxelles à 19h
Dimanche 19 février 2012
Représentation au Théâtre des Intrigants à 19h
Lundi 20 février 2012
Représentation au Tarmac à 19h
Mardi 21 février 2012
Route Kinshasa/Matadi en bus – 6 personnes
Mercredi 22 février 2012
Atelier et représentation au Centre culturel de Matadi à 19h
Jeudi 23 février 2012
Route Matadi/Kinshasa en bus – 6 personnes
Vendredi 24 février 2012
Retour Kinshasa/Kigali via Goma de Angel UWAMAHORO – 1 personne
Retour Bruxelles – 3 personnes
Les dates de représentation à Kinshasa restent interchangeables
23/01/2012
Evénements autour du spectacle
LE BRUIT DES OS QUI CRAQUENT
Alors que le public et la presse encensent la pièce (voir les extraits de presse ci-dessous) le Poche vous propose une série d'événements autour du spectacle
° Les jeudis 6 et 13 octobre 2011 à l’issue de la représentation
° Le samedi 22 octobre 2011 à l’issue de la représentationLes rendez-vous du bar
Le Poche invite le public à refaire le monde dans la salle du théâtre mais aussi au bar après le spectacle. Ce soir-là des témoins clefs et des experts de terrain rencontrent les spectateurs. Au coin du feu, autour d’un verre, on discute de façon informelle des thématiques de la pièce, de ce qu'elle éveille comme questions chez chacun de nous. On s’échange nos indignations, nos expériences, nos passions et nos propositions d’actions citoyennes.
Les invités du jeudi 6 octobre :
Modérateur Eddy Caekelberghs (La Première « Face à l’info »), Elisabeth Burdot (RTBF - Journaliste grand reporter), Benoit Van Keirsbilck DEI), Frederic Casier (Croix Rouge), Jihan Seniora (GRIP)
Les invités du jeudi 13 octobre:
Modérateur : Benoit Van der Meerschen (LDDH), Arnaud Gorgemans (Solidarité Mondiale), Paul Nsapu (FIDH), Géraldine Liénart (A travaillé avec les enfants soldats), Renaud Galand. (ISSAT)
° Le mercredi 12 octobre 2011 entre 18h00 et 19h00
A l’occasion de la sortie du livre « Théâtre congolais contemporain » les Editions Lansman, le Tarmac des auteurs et Africalia vous invitent à une rencontre et un verre de l’amitié en présence de l’auteur Israël Tshipamba.
° Le samedi 15 octobre 2011 : Journée spéciale !
La Maison Africaine a 50 ans : Spectacle + concert + réception = 10 euros
15h30 : Représentation « Le bruit des os qui craquent »
16h45 : Réception et concert de "Juke Box" African Nostalgie. Plus d’infos : http://www.maisonafricaine.be/
° Le vendredi 21 octobre 2011 à l’issue de la représentation
Soirée-débat « Faut-il juger les enfants soldats? »
Débat organisé par Défense des Enfants International-Belgique dans le cadre de son 20ème anniversaire, animé par Benoît Feyt avec Soizic Gourivaux, doctorante à l’UCL. Plus d’infos : www.dei-belgique.be
Concert "Enfant soldat d’ici et d’ailleurs"
Le Collectif Univerbal permettra au public d’agir concrètement. Les fonds récoltés par la vente de l'album soutiendront un très beau projet prévu pour 2012 : la construction d'une ferme pédagogique agro-écologique, visant la réinsertion d'ex-enfants soldats à travers l'activité agricole à Bukavu en R.D.C. Plus d’infos : http://enfants-soldats.com/
Extraits de presse:
Sans doute un des meilleurs spectacles jamais vus au Poche ! Ce spectacle d'une force exceptionnelle dégage une extraordinaire vérité, suscite dans le public une émotion à laquelle les plus blasés ne se seraient pas attendus. 3 octobre 2011 – Le Soir Colette Braeckman
Trois comédiennes généreuses, craquantes de soif de vivre, de compassion et de colère justifiée investissent à fond l’admirable texte de Suzanne Lebeau sur du Poche. Voici un début de saison fracassant, qui fait ouvrir grand les yeux, les oreilles et le cœur. Le rôle essentiel du théâtre. https://artsrtlettres.ning.com/ Deashelle - le 28 septembre 2011
Le Poche met en scène des femmes émouvantes sur ce drame bouleversant. Le Théâtre de Poche de Roland Mahauden porte toujours haut ce qui n’est pas une utopie : le théâtre peut empoigner le monde et aider à le changer en nous ouvrant les yeux.(...) la mise en scène de Mahauden est sobre et belle, avec des effets de forêt, d’eau qui coule, qui rendent le drame si humain. 30 septembre 2011 – La Libre Belgique – Guy Duplatles planches
Théâtre de Poche - Bois de la Cambre - 1a, Chemin du Gymnase - 1000 Bruxelles. 02/649.17.27 ou reservation@poche.be