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La Poésie, ultime courage

La Poésie, ultime courageSi le poème, comme l'a écrit Paul Celan, est « main tendue », son salut par la lecture ne semble pas gagné d'avance - ce que Franz Kafka avait déjà pressenti au début du XXe siècle : « Les poètes tendent les mains vers les hommes. Mais les hommes ne voient pas des mains amicales, ils voient des poings crispés visant leurs yeux et leurs cœurs. »Hostilité ? Indifférence ? Face aux prétendues grandes affaires de ce monde, il est facile de discréditer la poésie à cause de son faible suffrage ou parce qu'elle ne participe pas à la logique du divertissement qui semble aujourd'hui triompher.Pourtant, malgré son extrême fragilité, elle n'est pas encore éteinte. Sa mythologie continue de fasciner. Lorsque Michel Houellebecq a remporté en 2011 le prix Goncourt pour son roman La Carte et le territoire (Flammarion, 428 p., 22 €), il a confié qu'il plaçait la poésie au-dessus de tous les genres littéraires et qu'il souhaitait être aussi reconnu pour ses poèmes. Entre éclat et oubli, la poésie survit. Mais aux yeux de l'opinion, elle reste un art méconnu, souvent décrié : « La plupart des hommes ont une idée si vague de la poésie que ce vague même de leur idée est pour eux la définition de la poésie », disait Paul Valéry.Pour dissiper ce flou qui masque la nature réelle de la poésie, et dessiner son territoire, il faut lire l'essai que lui a consacré Fabrice Midal : Pourquoi la poésie ? Docteur en philosophie, il est l'auteur d'un ouvrage sur le rapport entre la modernité et les arts (Comprendre l'art moderne, Pocket, 250 p., 8,90 €) et de textes sur la recherche d'une spiritualité qui mêle l'expérience esthétique et la méditation. Dans son nouveau livre, Fabrice Midal questionne l'origine de la poésie et ses conditions de survie - dans un monde où « le bavardage et le discours » menacent à tout instant son existence. Mais l'auteur ne se contente pas d'en raconter l'histoire. De Virgile à Artaud, il cherche cette intention intemporelle, qui constitue le foyer de la poésie, par-delà les époques et les genres.Mythe fondateurQu'est-ce qu'une expérience poétique ? Pour Fabrice Midal, il faut revenir au mythe fondateur. A la figure d'Orphée qui prit le risque de descendre aux Enfers pour retrouver son amour Eurydice. Telle est la situation du poète : trouver le lieu de l'origine, prendre le risque de regarder le monde à rebours en le nommant dans une langue qui défie la parole commune, délivrée de tout projet de communication ou d'idéologie. Et les oeuvres qui sont habitées par ce risque (celle de Dante, Rimbaud, Char, Celan...) rejettent la rêverie naïve, le lyrisme bébête, tout ce à quoi l'on associe volontiers le poète quand on n'y comprend rien ou qu'on lit de la mauvaise poésie.Lorsque Marina Tsvetaeva (1892-1941) dit que la poésie, « partant de la terre - c'est le premier millimètre d'air au-dessus d'elle », elle exprime le soulèvement ténu qu'elle est capable de susciter. A partir d'« un frisson à propos d'une goutte d'eau » (Henri Michaux), et rien de plus, le poème peut ouvrir un chemin nouveau dans notre condition. Et comme l'explique Fabrice Midal, la poésie est un mouvement essentiel qui nous « libère des calculs de la rentabilité, de la crispation des concepts, de la bêtise des émotions [...]qui trop souvent nous tiennent lieu de viatique. Elle est le courage même ». Le courage de se déprendre de notre savoir pour accéder enfin à une expérience authentique du monde.« Pourquoi la poésie ? L'héritage d'Orphée »Fabrice Midal
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