"Même quand tu ne chantes pas, quand tu accompagnes les autres, on sent que tu le vis très fort ... ton corps le montre"
M'a dit, à peu près, avec ses mots, dimanche dernier, une amie qui avait assisté, la veille, à la soirée-cabaret, à Thuin, au "Carpe Diem".
Faut dire ...
Sur scène, nous étions six chanteurs. Nous nous alternions. C'était un chouette système. Un choix délibéré (de notre pote Philippe), auquel on avait tous adhéré : un maximum de trois morceaux pour chacun ... ainsi, y avait suffisamment de temps, d'espace, par la suite, pour que d'autres artistes, dans la salle, puissent s'exprimer, se faire valoir en scène ouverte.
Quand j'étais sur scène, avec les potes, et que ce n'était pas mon tour de chanter ...
Assis sur une chaise (sur scène), j'écoutais les morceaux des potes. Entre une flûte traversière, un ukulélé, une guitare (de gaucher), un piano, une autre guitare, je me ressourçais, je me laissais porter. Je baignais dans une multitude de morceaux, que je (re)découvrais, pour la plupart. "Imaginez-rouge" de Philippe (Mai), "Il a réponse à tout" de Véronique (Laurent), "La branche du charme" de MLichel (Stennier), "La salopette" de Georges Chelon, reprise par Jean-Marie (Dollé), "Delphine" d'Aurélien (Belle). Je fondais en ces morceaux. Je me relâchais en eux. Peut-être plus (du moins, ce vendredi), que dans mes propres morceaux. Je fermais les yeux, les paroles me venaient aux lèvres. A certains moments, c'est simple, je ne me trouvais plus à Thuin. Mes fibres s'envolaient vers un château, un chemin de campagne ou ... une gitane égarée dans les Ardennes (à laquelle - et à elle toute seule - je chantais, recréeais l'aubade ou la sérénade).
"Même quand tu ne chantes pas, quand tu accompagnes les autres, on sent que tu le vis très fort ... ton corps le montre"
Je n'en suis pas dupe. Restons lucides.
Cet état de fait peut aussi me poser problème.
Je suis conscient de ma présence, de mon "aura'" sur scène. Pas mal de gens m'en parlent. Quand je me vois sur des clips, des photos, j'en prends conscience. Le nier, pour ne pas attraper la grosse tête, ce s'rait inutile (je dirais même plus : je ne m'assum'rais pas). Je m'efforce aussi de rester modeste avec ça, de prendre ce "don",; cette caractéristique comme un cadeau ... que la vie m'a donné.
Je suis conscient de l'impact de mes mimiques, sur scène, envers pas mal de personnes dans le public.
Ainsi, quand un autre chante, et que, porté par l'élan de la chanson de quelqu'un d'autre (que je ressens), je me mets à fredonner (sur scène), en écho, la chanson de l'autre (par souci de participation) ...
J'ai peur de me mettre en porte à faux envers l'autre qui s'exprime et de lui voler les regards.
Même si ce n'est pas intentionnel, les répercussions peuvent aller dans ce sens. Je dois redoubler de vigilance.
Je devrais, en connaissance de cause, rester tranquille quand un autre passe.
Mais là aussi, un autre problème se pose.
L'idée de rester immobile, pendant un certain temps, quand un autre chante (comme des gosses, dans une classe, qui risquent la punition ou la remontrance, s'ils ne sont pas sages), ça m'est pratiqu'ment impossible. Nerveus'ment parlant. Mes nerfs s'atrophient. Ca risque aussi de ressortir sur mon visage et mes mimiques, ça risque aussi de se voir dans le public, ça risque aussi de desservir un autre artiste qui preste à ce moment-là.
De deux mots, choisissons le moindre.
Alors ... pendant qu'un autre artiste chante son morceau, je lâche prise. Je chante (le plus discrèt'ment possible) le morceau en même temps que lui, je m'imprègne de son atmosphère, j'en attrape franch'ment la chair de poule, j'accède à son coeur, je communie un peu avec lui, je participe (enfin) activ'ment, avec mes repères à moi, à sa créativité et j'espère de tout coeur qu'il le sent.
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