On est au cinéma! Et quatre personnages vont crever l’écran, en live ! Ils jouent la Chose debout contre la toile et parfois, juchés sur des tabourets. C’est leur âme et leur sensualité qui feront le reste! Pas le moindre artifice ou accessoire, juste des jeux d'ombres et de lumière très parlants. L’essentiel : un lent crescendo vers un aveu difficile pour les femmes et encore plus pour les hommes. Les deux jeunes couples sont craquants de sincérité et … de mauvaise foi. Ils sont tous amoureux à leur façon, là n’est pas la question, leur intention à chacun est de faire plaisir à l’autre, mais il y a un hic : leur plaisir à chacun est … mitigé. Culpabilité à la clé.
La société accommode le sexe, sujet rabattu, à toutes les sauces. De la publicité à l’art de vivre, le sexe est omniprésent et une réalité qui touche de plus en plus jeune. Mais quoi ? Il reste un vrai mystère. Il fallait oser le dire. C’est le parti qu’a pris Susann Heenen-Wolff, docteur en philosophie et psychanalyste clinicienne en écrivant cette pièce de théâtre pour disséquer adroitement ce sujet encore fort tabou malgré son étalage médiatique. Ce qu’on connait ne fait-il pas moins peur, c’est sans doute le mobile qui a poussé la psychanalyste à prendre la plume ? Une écriture très humoristique et à la fois très pédagogique, documentée, truffée de citations éclairantes qui passent très bien la rampe. Elle explique : « Depuis longtemps, on parle dans les revues conçues pour femmes de leurs difficultés spécifiques à atteindre l’orgasme par la seule pénétration. Mais on a beau expliquer les raisons de ce « trouble », on a beau proposer des « traitements » pour y remédier ( cure psychanalytique , thérapie sexologique , thérapies d’inspiration féministe), il semble que cette difficulté reste bien présente et soit plutôt structurelle : il ne s’agit donc pas d’un « trouble » qui relève d’une histoire individuelle, mais qui se niche dans la nature même de la sexualité de la femme... »
« Tout le monde ment. Bien mentir, voilà ce qu'il faut. » dirait Albert Camus. On se ment à soi-même pour se consoler et à l’autre, pour faire plaisir! Mais l’auteur s’en abstient. Au contraire, vous reconnaitrez dans les dialogues la vérité du vécu, la petite phrase anodine qui pourrait être prononcée par n’importe qui, homme ou femme… « Dommage que tu veuilles toujours dominer… » Elle ne croit pas si bien dire l’importance du verbe, l’importance de l’imagination, d’autres approches. Face au noir ou blanc, il y a la recherche de toutes les nuances de gris…. Celles que l’on retrouve dans les marbres miroitants du Taj Mahal…pour ne pas rester de marbre ! Comme en politique, chaque mot a son importance.
Sur scène, on revoit avec un plaisir immodéré Stéphanie Van Vyve dans le rôle de Charlotte. Elle fut Fantine dans les Misérables joués au pied de la butte du Lion de Waterloo. Elle a mis en scène et joué Diotime et les lions d’Henry Bauchau. On retrouve avec émotion le très nervalien (El Desdichado ?) Fabrice Rodriguez (applaudi dans Hammelin). Ils sont tous deux ici des comédiens merveilleusement complémentaires. L’autre couple composé de Mathilde Rault et de Quentin Minon, n’ont rien à leur envier. La connivence du quatuor est si évidente que l’on pourrait croire qu’ils improvisent sur scène. Voilà donc un travail d’équipe exemplaire.
En dehors de l’excellence absolue de son casting, la metteuse en scène, Christine Delmotte a plus d’une corde à son arc. Qu’on se souvienne avec délices de plusieurs de ses productions comme Le sabotage amoureux ou La comédie des illusions. Elle rentre dans l’abîme du sujet par la lecture de citations très instructives d’une masse d’auteurs qui se sont intéressés à « la Chose ». Lunettes au bout du nez, Sandrine, l’un des personnages, fait doctement la lecture aux autres sur sa main, à la façon d’enfants qui jouent… « Sandrine prend son carnet dans son sac » : en effet, les notations scéniques – les didascalies - sont récitées face au public comme si cela pouvait aider le spectateur à se distancier un peu du sujet brûlant. Car tout le reste est d’une intimité brûlante. Les supports musicaux sont d’une actualité flagrante mais on ne vous dévoilera rien !
Vous voulez une phrase de mecs ? « On ne peut pas parler d’autre chose ? » Et vous aurez tout compris ! Les personnages s’animent et se figent quand la tension devient trop forte, gelés ou bouillants de l’envie de comprendre et de savoir, mais jamais ils ne quittent vraiment la scène. Adultes, ils égrènent (face au public encore) tout ce qui se dit et se fait dans la vie sociale codifiée bon chic bon genre. Authentiques, ils se dévoilent avec tendresse retrouvée lorsqu’ils jouent entre eux l’intimité souvent tue par dérision. Vous l’aurez compris, ce spectacle fourmille de nuances. Il est enraciné dans le bon goût et la recherche généreuse du bonheur de l’autre. Et les joueurs de bridge seront aux anges. Car le but de ce jeu n’es-il pas de jouer le plus intelligemment possible avec le jeu qui vous est donné, sans faire confiance au hasard ou à la chance ? Un jeu où l’on peut gagner, sans avoir toujours les meilleures cartes ?
http://www.theatredesmartyrs.be/pages%20-%20saison/atelier/piece1.html
&
http://www.biloxi48.be/spectacle_Je_mens_tu_mens.php
"Je mens, tu mens!" Crédit photo Anna Giolo Du 25/09 au 26/10/2013
Les mardi et le samedi 19/10 à 19h
Du mercredi au samedi à 20h15
Dimanches 29/09 et 13/10 à 16h
Au Théâtre de la place des Martyrs
22, place des Martyrs
1000 Bruxelles
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en tournée!
Susann Heenen-Wolff - Cie Biloxi 48
Du 05.11 au 06.12.2014
Réservez en ligne
http://www.theatredesmartyrs.be/index2.html
R E P R I S E ! http://www.biloxi48.be/spectacle_Je_mens_tu_mens.php
Du 5 Nov. au 6 déc. 2014
Les mardis et le samedi 22/11 à 19h
Du mercredi au samedi à 20h15
Les dimanches 09 et 30/11 à 16h
Au Théâtre de la place des Martyrs
22, Place des Martyrs - 1000 Bruxelles
Stéphanie Van Vyve est nominée au Prix du Théâtre 2014 - catégorie meilleure actrice, pour son interprétation du rôle de Charlotte dans « Je mens, tu mens! » de Susann Heenen Wolff. Un spectacle de la Compagnie Biloxi 48, mis en scène par Christine Delmotte. Si vous ne l’avez pas encore découvert, celui-ci sera repris du 5 novembre au 6 décembre 2014 dans la petite salle du Théâtre de la place des Martyrs et prochainement en tournée dès février 2015 !
Pietro Pizzuti est nominé au Prix du Théâtre 2014 - catégorie meilleur comédien, pour son interprétation du rôle de Bérenger 1er dans "Le Roi se meurt" d'Eugène Ionesco, dans une mise en scène de Christine Delmotte. Une tournée est prévue à partir de septembre 2015 !
Youkali: Tango Habanera- My Brightest Diamond
Composer: Kurt Weill
Lyrics: Roger Fernay
Lyrics to Youkali :
C'est presque au bout du monde
Ma barque vagabonde
Errante au gré de l'onde
M'y conduisit un jour
L'île est toute petite
Mais la fée qui l'habite
Gentiment nous invite
A en faire le tour
Youkali
C'est le pays de nos désirs
Youkali
C'est le bonheur, c'est le plaisir
Youkali
C'est la terre où l'on quitte tous les soucis
C'est, dans notre nuit, comme une éclaircie
L'étoile qu'on suit
C'est Youkali
Et la vie nous entraîne
Lassante, quotidienne
Mais la pauvre âme humaine
Cherchant partout l'oubli
A pour quitter la terre
Su trouver le mystère
Où nos rêves se terrent
En quelques Youkali....
Youkali
C'est le pays de nos désirs
Youkali
C'est le bonheur, c'est le plaisir
Youkali
C'est la terre où l'on quitte tous les soucis
C'est, dans notre nuit, comme une éclaircie
L'étoile qu'on suit
C'est Youkali, c'est Youkali, c'est Youkali.