La mémoire retient ce qui nous a charmé
Ou donné de la joie en des jours de souffrance,
Notre lucidité nous tenant alarmés.
Certains vers sont porteurs d'un courant d'espérance.
En l'An quarante-et- un, au lycée, un matin,
Je lus, au tableau noir, en entrant dans ma classe,
Alors que je manquais d'allégresse et d'entrain,
Un étonnant écrit, perçu comme une grâce.
Citoyenne atterrée d'un espace envahi,
Je me sentais contrainte à garder le silence.
Je me souvins alors des gens de mon pays,
Qui s'étaient insurgés contre l'obéissance.
Fut conservé ce long poème: L'aiguillon,
Alors que peu de choses au cours du temps perdurent,
Détruites ou emportées par divers tourbillons.
Tous ses mots sont intacts. De cela je suis sûre.
21 janvier 2015
L'aiguillon (extrait)
Ah ! France ! As-tu du cœur ? As-tu des yeux pour voir ?
As-tu des dents pour mordre ? As-tu, sans le savoir,
Du sang, encor du sang, en ta veine épuisée ?
As-tu dans ton carquois une flèche aiguisée ?
Ou, serpent sans venin, qui rampe en son sillon,
N’as-tu plus que la langue au lieu de l’aiguillon ?
Dis, France, m’entends-tu ? France, si tu sommeilles,
Faut-il parler plus haut, pour toucher tes oreilles ?
Quel mot faut-il donc dire, ou ne te dire pas,
Beau pays du clairon ? ô vierge des combats,
Habille-toi de fer, qui jamais ne se rouille !
Relève ton armure, et non pas ta quenouille
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Edgar Quinet
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