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spectacle (23)

12272743274?profile=originalEn 1967, le philosophe et cinéaste Guy Debord publiait "La société du spectacle", "la seule théorie (selon lui) de la redoutable révolte de mai", qui inspira de fait plus d'un soixante-huitard. Vingt ans après, ses Commentaires sur la société du spectacle prolongent sa critique radicale du mode de vie et de pensée en vogue dans les sociétés contemporaines. Ennemi déclaré de l' "ordre" établi, Debord dénonce dans ce qu'il appelle "le Spectacle" un processus universel (et multiforme) de mystification sociale, à l'oeuvre dans toute société moderne quel qu'en soit le régime politique. Ce que Marx appelait "aliénation" ou "idéologie" atteint aujourd'hui son comble, son stade suprême, à l'époque précisément de la prétendue "fin des idéologies".

Le capitalisme en gloire, ou la tyrannie du Spectacle.
Pour Debord, l'apparition de la "société spectaculaire" (dans les années 20) constitue l'avènement du siècle, "et aussi celui qu'on s'est le moins aventuré à expliquer". Ses "Commentaires" s'ouvrent même sur un constat désabusé: depuis mai 1968, l'empire du Spectacle n'a cessé de s'étendre et de se renforcer.
Qu'est-ce que le "spectacle" au sens de Guy Debord? Ce n'est pas seulement l'omniprésence des médias, de la télévision, de la "communication" ou du divertissement, le règne des images, mais plus généralement un certain rapport social entre les personnes, médiatisé par des apparences et des images. Séparés du réel, de nos semblables et de notre être véritable dans la consommation d'un bonheur individuel et factice, nous ne vivons aujourd'hui qu'en représentation. Socialement, nous ne sommes plus, nous paraissons être et ne sommes que pour paraître. Le Spectacle est l'essence illusoire, fantasmatique, mensongère de toute la société moderne. Plus que jamais, la vrie vie est absente.
Cette conception de la vie moderne comme aliénation radicale repose sur une analyse de la société industrielle et marchande d'inspiration hégéliano-marxiste. Pour Debord, le capitalisme moderne a fondé une véritable religion terrestre: le culte de la Marchandise, de la Production pour la Production; le fétichisme de la valeur d'échange (dont l' argent est l'image symbolique et sacrée). Dans cette idolâtrie des produits échangeables, c'est la puissance du Capital lui-même qui se réalise sur le mode ostentatoire. Et la société entière, avec toute sa technique, tout son équipement, l'infinie profusion de ses biens matériels, n'en est que la représentation "spectaculaire" et triomphale.
Qu'est-ce alors que la marchandise-devenue-spectacle, sinon la forme très concrète de l'illusion sociale, la présence réelle de la fausseté, l'expression matérialisée d'une pure Idéologie, sans nom ni contenu, qui imprègne la pseudo-collectivité? Qu'est-ce que le "spectacle", sinon la dissipation de toute société réelle et le camouflage de la lutte des classes?
"L'expérience pratique de l'accomplissement sans frein des volontés de la raison marchande aura montré vite et sans exceptions que le devenir-monde de la falsification était aussi un devenir-falsification du monde."

Le nouvel ordre spectaculaire.
Or cette société où "le spectacle s'est mélangé à toute la réalité, en l'irradiant", correspond plus précisément au stade "post-moderne" du système de la "domination spectaculaire": celui du "spectaculaire intégré, qui désormais tend à s'imposer mondialement".
Dans "La société du spectacle", Debord distinguait "deux formes, successives et rivales, du pouvoir spectaculaire, la concentrée et la diffuse". Le "spectaculaire concentré" était représenté par les sociétés bureaucratiques totalitaires, qui entretenaient en fait un véritable capitalisme d' Etat, concentré idéalement autour de la personnalité d'un dictateur-vedette (Staline, Hitler, Mao, etc.). Le "spectaculaire diffus", quant à lui, correspondait aux sociétés libérales bourgeoises, sociétés d'abondance au mode de vie plus ou moins américanisé.
Mais, dès 1967, il était clair pour Debord que ces deux formes rivales en apparence reflétaient seulement le développement inégal d'un seul et même Système spectaculaire universel. Vérité qu'aurait pleinement vérifiée l'apparition récente, dans les Etats avancés, du "spectaculaire intégré", "unificatin fructueuse" des deux formes précédentes sur la base d'une victoire général de la forme "diffuse".

L'administration du mensonge.
Les "Commentaires" dégagent alors les caractéristiques particulières du "spectaculaire intégré", ou les "nouvelles techniques de gouvernement" d'un pouvoir "centralisateur par la force même des choses, et parfaitement despotique dans son esprit".
"Tendance la plus manifeste de ce siècle", la "fusion économico-étatique" est devenue le moteur du développement économique avancé. Progrès technique oblige: la gestion de la production et de la société requiert l'intervention de cohortes en tous genres. Mais ces derniers servent surtout de caution scientifico-médiatique aux décisions du pouvoir réel. Car tout projet important relève en fait des choix arbitraires et incontrôlables d'une poignée de décideurs-technocrates, qui sont les vrais "propriétaires du monde".
Du coup, la prétendue "communication" se fait toujours à sens unique. Leurre "spectaculaire" par excellence et simple monologue de l' ordre existant, elle "fait paisiblement admirer la décision déjà prise". D'une manière générale, l'information "autorisée", ponctuelle et invérifiable, n'est qu'une perpétuelle "désinformation", destinée à falsifier radicalement notre perception des choses.
Au fond, la toute-puissance du spectacle se mesure moin à ce qu'il montre qu'à ce qu'il cache. Debord l'affirme sans ambages, le spectacle "a fait triompher le secret", cet envers du décor spectaculaire. "Le secret domine ce monde, et d'abord comme secret de la domination." Les services secrets et tous les réseaux d'influence (y compris ceux de la Mafia!) ont des beaux jours devant eux.
Enfin, le "spectaculaire intégré" est le fossoyeur de toute pensée critique: "Jamais censure n'a été plus parfaite." Car, dans le monde dit "libre", il ne peut plus exister de vrai parti d'opposition, ni de programme politique vraiment alternatif. On voudrait même faire croire à la "fin de l'Histoire". Mais sur quoi repose ce très fallacieux "consensus spectaculaire", si l'on y regarde bien? Sur le recul de la conscience historique, l'appauvrissement d'une "pensée" engluée dans "un présent perpétuel" et en lui-même insignifiant. Sur la "paresse du spectateur", fasciné par le flux des "images(s) construite(s) et choisie(s) par quelqu'un d'autre", et qui fait ainsi "(l') expérience concrète de la soumission permanente". Et donc sur la liquidation du jugement, la "dissolution de la logique", la fin du dialogue et de la dialectique.
"Car in n'existe plus d'agora (...); nulle place où le débat sur les vérités qui concernent ceux qui sont là puisse s'affranchir durablement de l'écrasante présence du discours médiatique, et des différentes forces organisées pour le relayer."
L' opinion publique, est non seulment trompée, mais même impuissante à se constituer. Où est-tu, Démocratie?
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administrateur théâtres

12272731683?profile=original« LE CIRQUE INVISIBLE » AU THÉÂTRE SAINT-MICHEL  

Les portes sur le rêve s’ouvrent, nous allons rencontrer deux créateurs d’irréel.   À l'inverse du cirque traditionnel  où la prouesse acrobatique, le divertissement et les numéros spectaculaires crèvent l’affiche, ici la recherche d’une esthétique et la poésie se donnent la main pour présenter une vision artistique, vivante et continue d’un couple de   deux vedettes étoiles particulières : Victoria Chaplin et Jean-Baptiste Thierrée. Fille et  beau-fils de Charlie Chaplin.

Voici une œuvre en soi, pas un simple spectacle. Cette réinvention du cirque renoue délibérément avec le théâtre, l’illusion, le drame, la chorégraphie.  Le chapiteau a disparu, tout se passe sur un plateau, après un lever de rideau pour un spectacle frontal. Musique, lumières, costumes, danse,  mimes, paroles – plutôt  rares – (hop !), prestidigitation contribuent à l’illusion qui se veut féerique. Le pas vers le monde burlesque et drôle  d’Alice au pays des merveilles est vite franchi. On est de l’autre côté du miroir,  pour plonger dans le fantastique et le  surréalisme : les objets s’animent, les animaux se métamorphosent, les frontières disparaissent,  l’univers poétique  explose.

 

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 Les artistes cultivent le  non-sens qui réveille l’émotion de chacun. Et pourtant, si peu de mots ! Chaque fois, une nouvelle installation visuelle,  vivante et dynamique défie notre imagination, nos rêves et nos vaticinations.      Et à chaque fois que la secrète intention de l’artiste se fraie  un chemin dans notre imaginaire, c’est un sentiment de victoire qui nous inonde grâce à  la découverte émouvante  de l’autre. Comme dans la poésie de Raymond Devos.  On redécouvre aussi cet héritage commun de sentiments et de mythes  qui  nous lie entre humains,  quels que soit notre âge,  nos origines et notre parcours.

 

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 De leurs  fils de soie invisibles les artistes harponnent  un peu plus  notre cœur, et on le leur donne avec gratitude.  Les spectateurs, par leurs rires, alimentent  en continu ces artistes fabuleux et agiles qui  opèrent  sur le modèle d’emboîtement  des poupées russes, tout en construisant surprise et émerveillement  de plus en plus grands, à la façon d’un feu d’artifice. Les voilà devenus de vrais  créateurs d’irréel, à travers leur propre être de chair et d’os car ils ne jouent pas un personnage, ils sont des magiciens qui  appellent la magie et les métamorphoses sans fin. Le public est médusé par les innombrables tiroirs secrets soudains mis à découvert,  le foisonnement de formes et de couleurs, comme dans un immense kaléidoscope. Et ils ne sont que deux !

 

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 Ce qui  rend  aussi leur art  encore plus authentique, c’est l’autodérision, les ratés, une certaine humilité.  Ciselage méticuleux de chaque  proposition, soi n  extrême du détail, variété du cadre musical, changements de costumes magiques et  instantanés, tableaux vivants flirtant avec l’art plastique. On est ébahi par tant de  beauté,  par   l’inventivité  et l’humour de ces enchaînements à couper le souffle.  Car on est enchaîné et on ne quitte le spectacle qu’à regret, les yeux pleins de possibles. Et comme pour un concert, les artistes nous offrirons de multiples bis, chatoyants  d’émotion, devant une salle comble,  debout pour applaudir.

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Visiter leur site: http://www.karavane.pro/16/le-cirque-invisible/

http://www.karavane.pro/wp-content/uploads/le_cirque_invisible-dossier_fr.pdf  Extrait :

« Un origami vivant. Avec son corps de petite fille, Madame Chaplin se transforme en origami vivant, contorsionnant ses membres caoutchouc dans des numéros qui défient les lois de conservation de la masse.

Emmitouflée dans un costume triangulaire qui tourne comme un cerceau, elle se fait soudain engloutir par un vorace cœur d'artichaut. Plus tard, elle revient dans un vertugadin qu'elle transforme en cheval de velours. Tour à tour, femme-ombrelle, femme-oiseau, femme-orchestre ou femme-vélo, l'acrobate crée un bestiaire digne de Lewis Carroll. Comme un clin d'œil à son père en prise avec les machines dans Les Temps modernes, Victoria dompte les mécaniques les plus étranges, de l'horloge sur patte au paravent mobile.

Face à cette équilibriste silencieuse, Jean-Baptiste Thiérrée joue le clown illusionniste aux coups foireux, aux accessoires bricolés et aux costumes excentriques, en rayures de zèbre ou tapisserie ancienne. On sourit quand il allume une bougie, croque dedans, mâchouille et fait soudain apparaître une flamme rouge dans son ventre. On glousse quand il fait chanter toute une chorale de marionnettes accrochées à ses genoux et à ses fesses et on s'étonne de voir apparaître sa ménagerie d'oies et de lapins géants convoquée par magie.

Finalement, pour du cirque invisible, c'est plutôt remuant et coloré! De quoi donner des ailes pleines de plumes roses à notre imagination. Peu importe notre âge.

Laurent Ancion » LE SOIR 2008

 

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administrateur théâtres

Le Géant de Kaillass ( Atelier Jean Vilar )

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Atelier Jean Vilar                      Le Géant de Kaillass
Du 15 mars au 1 avril 2011       Compagnie Arsenic

texte de Peter Turrini


Au Parc à Mitrailles à Court-Saint-Etienne
Sous chapiteau numéroté – Navettes au départ de Louvain-la-Neuve
Avenue des Combattants, 19b – 1490 Court-St-Etienne
Représentations à 20h30 sauf le jeudi à 19h30 et le dimanche 27/03 à 15h

Ensuite le spectacle sera visible à L’esplanade Saint-Léonard (Liège) du 26 avril au 4 mai

Tél. gratuit : 0800/25 325  E-mail : reservations@atjv.be

 

 

Un théâtre qui se déplace, qui va vers les gens, qui part à la rencontre des publics c’est le théâtre sous chapiteau. Ce théâtre renoue avec la fête, le conte et le mythe.

 

Dans le village de Kaillass vit un jeune géant qui pleure. Il est le souffre-douleur des villageois moqueurs, qui l’accusent de tous les maux qui les accablent. Il  rêve d’une vie à sa mesure, du  vaste monde au-delà des esprits étroits, qui aurait quelque chose de grand à offrir, un Ailleurs : L’Amérique, lieu de tous les possibles? Un lieu large comme deux bras ouverts, un lieu au large de l’espoir d’exister tel qu’il est. Il est en même temps écrasé par l’impératif de ressembler aux autres. Ainsi son vain souhait de réintégrer la chorale des petits chanteurs de Kaillass, dont il a été exclu, va lui donner le désir chimérique d’acheter «  un pré si grand qu’assis dans l’herbe, il y paraîtra enfin petit. »

  

 Une naine rondelette et délectable, Irmeline tombe amoureuse de lui : voilà l’amour impossible qu’il accueille  certes, mais qui  ne l’empêche pas d’accomplir une odyssée aride qui le mènera de ville en ville à travers l’Europe, de champs de foire en cours royales de Prusse ou Angleterre, jusqu’au  au pied de la tour Eiffel, à la poursuite de son rêve d’enfant.

 

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 Son voyage  héroïque sera comme un conte initiatique, mais hélas un voyage intérieur qui ne le mènera nulle part, tant le trou dans sa poitrine demeure béant et triste. Il s’agit de quitter l’enfance, il faut rompre avec la mère, il faut cesser de croire à la légende par laquelle elle le berce d’une origine mythique et fabuleuse : celle d’un arbre. Il faut, et c’est le comble pour un géant, se décider à grandir, alors qu’il rêve de rapetisser! A peine parti, il veut rentrer dans son village natal. Le géant, bébé sans nom dira : «  Dedans moi, il fait noir. J’ai un tel désir. Laissez-moi de nouveau être avec vous. Est-ce que je peux de nouveau chanter avec les petits chanteurs ? 

 

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 « C’est loin l’Amérique ?  » Grandir est pénible, il tousse, il est chétif malgré son format extraordinaire, et son compagnon de voyage est terriblement avide. « Je veux retourner chez Hannia » « Tu es maboule ? Toutes les célébrités de Berlin rivalisent pour te rencontrer ! Un empereur est assis sur tes genoux et toi, tu veux rentrer dans ce trou perdu ? ». Et le géant alors : « Le trou dans ma poitrine est de nouveau là. » Peut-on combler ce trou avec un cœur qui bat ? Las, l’amour et  la musique sont absents.  Son guide intéressé lui répète sans cesse qu’il n’y a pas d’argent et qu’il faut « avancer ». Un impératif de production fait du géant maladif et incapable de quitter l’enfance une victime de choix, et le tue à petit feu. Il s’éteindra dans le champ originel,  les bras aimants  de sa mère, vaste pré d’amour. Elle n’a jamais reçu d’argent de l’ignoble Crochetailleur.   Mais au-delà de la mort, il y a cet autre amour inaltérable, celui  d’Irmeline  la jeune naine, l’amour au-delà de la mort, qu’elle a perçu tout au fond de ses yeux… Voici une histoire triste comme celle du « Meilleur des Mondes » de Aldous Huxley où John le Sauvage, incapable de se conformer aux impératifs de la société, s’éteint dans son phare. Ici cynisme absolu, les braves villageois récupèreront son image et en feront de juteux bénéfices pour la sainte ville de Kaillass. 

 

 

                                          Très beaux, ces  costumes de cirque ambulant. Belle, la  musique de fanfare joyeuse des bateleurs – le soubassophone étonne – et les voix « d’oiseaux »féminines. Magnifiques, la mise-en-scène et la mobilité corporelle de tous les artistes: une œuvre théâtrale pleine de recherche et d’authenticité. Un spectacle total, fait pour toucher et émouvoir, malgré l’humour grinçant et l’accumulation de scènes grotesques que d'aucuns adorent pour leur dérision.

 

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