Une exposition exceptionnelle au Musée d’Ixelles jusqu’au 10 janvier 2010
En collaboration avec l’asbl Les Amis de la Forêt de Soignes et Les Amis du Musée d'Ixelles.
A l’occasion de l’exposition, un catalogue bilingue de 128 pages, rédigé par le commissaire Emmanuel Van de Putte, préfacé par Serge Goyens de Heusch et abondamment illustré, est édité aux éditions
Racine.
Dans la seconde moitié du XIXe siècle, où l’industrialisation suscita par réaction un intérêt croissant pour la nature, des artistes trouvèrent leur source d’inspiration dans les paysages brabançons à la manière des peintres de Barbizon dans la forêt de Fontainebleau, où certains se rendirent d’ailleurs. Recourant au plein-airisme, plusieurs groupes d’artistes firent de la forêt un sujet de prédilection : « l’école de Tervueren », les peintres de Rouge-Cloître à Auderghem, la « Vallée des artistes » à Linkebeek et les peintres regroupés sous l’appellation d’ « Uccle Centre d’Art ».
Cet intérêt pour la nature suscita le développement d’un réseau ferroviaire et routier qui amena le touriste d’un jour au cœur de la forêt. S’y développèrent hameaux, lieux de villégiature et guinguettes assidûment fréquentés par les artistes.
Non l’artiste, le genre ou une école seront ici particulièrement privilégiés, mais plutôt le site en fonction de son accessibilité au départ de Bruxelles, site que les Bruxellois ont très tôt considérer comme leur poumon vert, comme « le jardin de Bruxelles » en quelque sorte. L’exposition est donc envisagée suivant quatre sections en fonction des voies d’accès : de Bruxelles à Tervueren (avenue de Tervueren), de Bruxelles à Auderghem/Notre-Dame-au-Bois/Overijse (chaussée de Wavre), de Bruxelles à Ixelles/Boitsfort/Hoeilaart (chaussée de La Hulpe) et de Bruxelles à Uccle/Linkebeek (chaussées de Waterloo et d’Alsemberg).
C’est donc à une promenade en forêt de Soignes, à travers la peinture de paysage de 1850 à 1950, que convie cette exposition inspiré en cela par le Guide du promeneur qu’édita le premier président de la Ligue des Amis de la Forêt de Soignes et peintre René Stevens en 1914.
Historique
De tout temps la forêt de Soignes a inspiré dessinateurs, graveurs, liciers et peintres. Ses frondaisons
incitèrent à la piété et à la fondation d’abbayes et prieurés, tels La Cambre, Forest, Val-Duchesse et
Sept-Fontaines, également propices aux activités intellectuelles, les scriptoria du Rouge-Cloître et
Groenendael étant mondialement célèbres pour leurs reliures et enluminures. Haut lieu cultuel et
culturel, la forêt de Soignes abrita le talent du primitif flamand Hugo van der Goes qui réalisa au
Rouge-Cloître sa Mort de la Vierge (vers 1470). Citons encore les célèbres tapisseries dites des Chasses
de Maximilien d’après les cartons de Bernard van Orley (Musée du Louvre) qui, toutes, mettent
admirablement en scène la forêt de Soignes au XVIe siècle, prémisses des peintures de paysage dans
lesquelles excelleront notamment Denis van Alsloot, Lucas van Uden et Jacques d’Arthois, ainsi que
les graveurs Hans Collaert, Paul Vitzthumb et Paul Lauters aux siècles suivants.
La forêt de Soignes, aux portes de Bruxelles, a toujours fait l’objet de l’attention particulière des
gouvernants qui se sont succédés à la tête de nos provinces. C’est sous le régime autrichien (1713-1794)
qu’une première intervention paysagère, conçue par l’architecte Joachim Zinner (qui aménagea
également le Parc de Bruxelles), a lieu avec la création de larges drèves à travers ce qu’on appellera la
« hêtraie cathédrale », et ce pour faciliter l’accès à la forêt aux carrosses de la Cour lors des grandes
chasses. Entre 1822 et 1843, la forêt sera littéralement dépecée par la Société Générale, qui en a reçu
la gestion de Guillaume Ier : 60% en sera défrichée et répartie entre les communes environnantes, ce
qui rendra l’accessibilité à la forêt encore plus grande et l’exploitation forestière encore plus intense.
Les voies de communication vont se développer et la circulation en forêt ira en s’intensifiant.
La forêt sera désormais, et de plus en plus, également perçue comme un lieu de promenade et de
délassement. La notion de « tourisme » prend forme à cette époque, le mot est accepté par l’Académie
française en 1878. La notion nouvelle de tourisme contribuera à nourrir le goût du paysage ; le
promeneur y verra la forêt comme un site unique à préserver, tandis que le peintre, lui, y verra un
atelier grandeur nature.
Souhaitant sortir de l’académisme d’atelier, les artistes vont peindre dorénavant sur le motif. Ils
quitteront donc la ville pour le plein air, dans les environs. Le « motif sonien » s’impose aux artistes qui
passeront par la capitale belge et qui transformeront ce site fortement « artialisé » en « forêtmusée».
« Les Amis de la Forêt de Soignes »
C’est dans le cadre du centenaire des « Amis de la Forêt de Soignes », la plus ancienne association de
protection de la nature de Belgique, que se tiendra l’exposition « Les peintres de la Forêt de Soignes.
Jardin de Bruxelles : 1850-1950 » au Musée d’Ixelles, en collaboration avec les Amis du Musée
d’Ixelles et Les Amis de la Forêt de Soignes.
Le souci d’esthétique lié à de timides préoccupations écologiques aboutira en 1909, à l’instar de la
Société des Amis de la forêt de Fontainebleau en 1907, à la création de la Ligue des Amis de la Forêt
de Soignes.
C’est le 26 octobre 1909 que des personnalités bruxelloises se réunirent au restaurant de Rouge-
Cloître pour fonder officiellement la Ligue. Parmi les membres fondateurs, on compte notamment les
députés Emile Vandervelde et Henri Carton de Wiart ainsi que l’ancien bourgmestre de Bruxelles,
Charles Buls, des écrivains parmi lesquels
Emile Verhaeren et des artistes dont le peintre René
Stevens, surnommé le Sylvain.
Toutes ces personnes fondatrices de la nouvelle association avaient en commun un profond amour de la
nature et une grande admiration pour la forêt qu’ils désiraient protéger à tout prix. Ils étaient en cela
les interprètes d’un large courant d’opinion qui grandissait de jour en jour à Bruxelles en faveur de la
forêt de Soignes, qui venait de subir des amputations sensibles pour la création de deux hippodromes
ainsi que la construction d’un réservoir d’eau de la CIBE et d’un sanatorium et qui était l’objet d’une
foule d’autres menaces.
En 1911, la Reine Elisabeth, en reconnaissance des services rendus par la Ligue, lui accorde son haut
patronage.
Pendant les deux décennies qui vont suivre, la Ligue fut — avec le Touring Club de Belgique et le
groupement « Natuur en Stedeschoon » à Anvers — parmi les premières associations à se soucier de
la nature au sens large.
L’objectif de départ était la protection et la défense des aspects esthétiques et culturels de la forêt de
Soignes mais, déjà avant les années 1930, l’association avait élargi ses objectifs en prenant en compte
les fonctions sociales et écologiques de celle-ci, mettant progressivement l’accent sur les problèmes,
toujours actuels, que sont la pression immobilière sur les lisières, l’extension des réseaux routiers et
ferroviaires et la surfréquentation de certains sites.
Les Amis de la Forêt de Soignes
Rue Jean Blockx 14/8
1030 Bruxelles
http://www.amisoignes-vriendenzonien.be
Emmanuel Van de Putte, commissaire de
l’exposition
Emmanuel Van de Putte (1979) est licencié en sciences politiques et sociales (Université d’Anvers). Il
s’est toujours intéressé aux passerelles entre l’art et la politique en Belgique et a consacré son mémoire
de licence aux rapports entre la politique et les artistes peintres, à la lumière de la germanisation ou de
la communautarisation pendant la Première et la Seconde Guerre mondiale. Après ses études, il s’est
dirigé vers le marché de l’art. D’abord responsable de la salle de ventes Kunsthaus Lempertz à
Bruxelles, il est aujourd’hui spécialiste en art impressionniste et moderne pour Christie’s à Bruxelles et
Paris. Il est également administrateur de l’association « Les Amis de la Forêt de Soignes ».
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