Du gothique à l'hydraulique...
Le bâtiment des moines, qui devint filature au XIXe siècle, et le canal creusé au XIII siècle.
L'abbaye vous ouvre les bras...
Démantelée à la Révolution, son église démolie, transformée en filature, délaissée... et pourtant quelle majesté !
Lors de sa contruction, l'église était un vaisseau de clarté. Pensez... une nef de 106 mètres de long pour 28 mètres de haut, inondée de la lumière de ses innombrables vitraux. Avec son choeur à sept chapelles rayonnantes, voilà un dispositif vraiment royal. Un couronnement.
Démantelée... misère !
(vitrail du réfectoire, détail)
Nonobstant, l'abbaye de Royaumont, fondée en 1228 par Louis IX (1214-1270), avec la bénédiction de sa mère Blanche de Castille, présente à certains égards un aspect austère...
Normal, au-delà des injures de l'histoire, elle devait répondre aux règles de l'ordre cistercien.
Le cloître, son jardin à la française restauré en 2010,
avec vue sur la sacristie et la salle capitulaire.
L'abbaye royale fut donc destinée aux moines cisterciens, adeptes d'un ordre traditionnel qui renouerait avec la règle de saint Benoît de Nursie, dont les bénédictins s'étaient un peu trop éloignés, et que soutenait avec âpreté saint Bernard de Fontaine, abbé de Clairvaux (1090-1153).
Benoît (ca 480-547) prônait le recueillement et le dénuement, la journée monacale devant harmonieusement se répartir entre la prière (sept offices tout de même), l'étude (la lecture divine) et le travail (aménager, bâtir, cultiver).
Sur ce dogme, Robert de Molesme (ca 1029-1111) fonda l'ordre cistercien. Cîteaux, mère de Royaumont.
Le cloître et le cellier (à gauche).
De l'église, il ne subsiste que le mur attenant au cloître.
Mais la règle se relâche, certainement ce que l'on appelle avoir du mou dans le cordelier.
Saint Bernard resserre les noeuds, développe l'ordre cistercien dans un strict retour à la règle, fonde Clairveaux, prêche pour une deuxième croisade... tendre férule.
Et Louis IX ira régulièrement faire retraite à Royaumont. Comme un moine prie et reçoit la Discipline.
La légende de Saint Louis était née et allait perdurer pour l'édification des masses.
Le cloître, sa galerie avec ses aériennes colonnettes en délit et chapiteaux à crochets.
Royaumont est donc ordre, rigueur, pureté face au faste de Cluny.
Une abbaye d'hommes, dans la même ligne que celle de Chaalis (voir "Le domaine royal de Chaalis" sur A&L ) toute proche, fondée par Louis VI le Gros (1081-1137), et le pendant de celle de Maubuisson, réservée aux femmes.
Elle fut aussi la dernière demeure des princes, les rois ayant leur nécropole à l'abbaye de Saint-Denis. Curieusement, les sépultures princières furent transférées à Saint-Denis pendant la Révolution.
Une architecture austère et majestueuse ? alors qu'un strict plan l'aurait voulu simple, pure et légère, toute baignée de lumière ? La contradiction est dans le coeur des hommes, mais le roi est Dieu sur terre.
Une abbaye richement dotée donc, sous l'apparente simplicité de l'appareil.
Au point que l'abbé fut chapitré en 1253 pour les exubérances décoratives de l'abbaye, avec rappel à l'ordre de saint Bernard qui condamnait les représentations figuratives.
Il fallait rogner sur les outrances. Prêcheur n'est pas pécheur.
Et la vie monacale reprit son train, le roi Louis le Prudhomme meurt en 1270 et sera canonisé en 1297. A bon roi, bon droit.
Et Louis IX, dit le Prud'homme, devint pour tous Saint-Louis, juste et preux roi.
Saint-Louis rend la justice à Vincennes
(cathédrale de Senlis, à quelques lieues de là, détail d'un vitrail dû à Claudius Lavergne, 1863).
Le réfectoire et son pavement restauré en 2002.
Le grand orgue date de 1864. Installé ici en 1936, il a été entièrement restauré en 2007 et doté d'un buffet.
La guerre de Cent Ans passe, l'abbaye décline. Aux malheurs de la guerre succèdent les ravages, Charles le Mauvais allant jusqu'à la rançonner, famines et incendies la menacent de ruine...
Les cuisines (à droite) et le réfectoire des convers, plus austère,
depuis le "jardin des neuf carrés".
Suite de la visite dans un prochain numéro...
Michel Lansardière (texte et photos).
Commentaires
Merci Nicole. Heureux de voir la série Royaumont avoir recueillie autant de réactions positives, surtout pour ce premier épisode. A bientôt pour un autre feuilleton !
Merci Marie-Jo de t'être arrêtée ici à nouveau et d'y avoir porté ton appréciation.
C'est très gentil Viviane.
Tu pourras découvrir les deuxième et troisième partie de la visite sur le site, avec toujours beaucoup d'histoires, la petite et la grande mais que j'essaye de toujours conter sur un ton léger (une 4e sur les collections est en préparation).
Amitiés
Mémoire des pierres, en effet Michel ! que d'histoires à nous raconter si elles pouvaient parler .
C'est aussi un bel hommage rendu à tous ces compagnons qui ont oeuvré à ce bel édifice.
Toujours un plaisir à lire tes billet.
Bien content que ce billet connaisse un certain succès en cette période de vacances. Merci Michèle.
J'ai beaucoup aimé ce lieu qui incite au recueillement et à la sereinité. Beauté de l'architecture, beauté des jardins... A voir et à revoir !
Ben dis donc, Michel, je n'aurais pas commenté !!!
Je manque à tous mes devoirs, mais il est vrai que je fus sevrée d'internet dès le 4 juillet, à mon grand désespoir !
J'adore tes jeux de mots cordeliers !
Beau billet ! Merci du partage !
Merci aussi à Georges, si discret mais toujours fidèle à mes petits papiers.
Lieux de paix propices à la création. Bien content que cette halte ait été appréciée. Merci Sandra.
Merci pour cette appréciation Françoise. La troisième partie est bientôt prête et je pense même en ajouter une quatrième sur les collections de Royaumont.