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12273001463?profile=originalIl s'agit d'un roman de Jean Giono (1895-1970), publié à Paris chez Grasset en 1932. Des fragments avaient préalablement paru dans diverses revues: «Jeunesse» (chap. 1, 2 et 3) dans Europe le 15 novembre 1932, «la Femme du boulanger» dans la Nouvelle Revue française le 1er août 1932 et «les Musiciens» dans Marianne le 16 novembre 1932.
Après avoir publié, depuis Colline, plusieurs romans qui ont assis sa réputation d'écrivain, Giono aborde un genre nouveau avec Jean le Bleu, puisqu'il s'agit cette fois d'un ouvrage autobiographique. Le texte prend cependant place parmi les oeuvres romanesques. Dans sa Préface de 1956, l'écrivain affirme en effet: «J'ai autant inventé ce livre-là que les autres.» L'expérience vécue de l'enfance en constitue malgré tout la matière première: «L'invention y est cependant fondée plus qu'ailleurs sur le réel: j'étais un des personnages et je racontais ma jeunesse. Il serait peut-être intéressant néanmoins de départager un peu le réel et l'imaginaire» (ibid.). Quant au titre, Giono l'explique en ces termes: «C'était simplement parce que très souvent on me parlait de mes yeux bleus, et en même temps il y avait le côté rêveur du personnage» (entretien avec R. Ricatte, septembre 1969).
Le père du petit Jean est un vieux cordonnier plein de sagesse (chap. 1). Sa mère est repasseuse. Le père sympathise avec la cause anarchiste et prête assistance aux pauvres et aux malades (2-3).
L'enfant, grâce à deux hommes vivant dans la maison voisine, la «maison des errants», découvre la musique. A la suite d'une grave maladie, il effectue un long séjour au village de Corbières, chez le berger Massot (3-6). Jean entre dans l'adolescence, éprouve les tensions qui accompagnent la naissance du désir et connaît les joies de la lecture. De retour à la ville, il rencontre un nouvel habitant de la maison des errants, le poète Odripano. La découverte de l'amour et de l'amitié précède de peu le départ de Jean pour la guerre (7-9).
A travers le récit de divers épisodes de son enfance - le texte propose en effet une juxtaposition de séquences singulières, significatives et pittoresques, plutôt qu'il ne restitue le vécu dans sa continuité -, Giono célèbre surtout, dans Jean le Bleu, le souvenir de son père. Celui-ci se nomme aussi Jean, ce qui accentue, au sein du rapport de filiation, sa valeur de modèle, et constitue la figure dominante de l'oeuvre. L'écrivain avait d'ailleurs un moment songé à intituler son livre Mon père ce héros.
Beaucoup moins de pages sont consacrées à la mère, et la répartition, tant géographique que symbolique, de l'espace romanesque la confine au rez-de-chaussée de la demeure familiale alors que l'atelier du père est situé à l'étage le plus haut. La figure paternelle est en outre redoublée par la présence de divers personnages qui en démultiplient le rayonnement: un violoniste et un flutiste, Décidément et Madame-la-Reine, font découvrir la musique au jeune Jean, «l'homme noir», un malheureux secouru par le père, l'initie à la lecture durant son séjour à Corbières et enfin le poète
Odripano, par ses récits, fait voyager son imagination dans un univers où la frontière entre la réalité et la fiction est indiscernable. Tous vivent dans la «maison des errants», ainsi nommée en raison de la pauvreté et de la marginalité de ses habitants. A la fois misérable et sublime, elle est une sorte de palais des merveilles que l'enfant se plaît à contempler, et aussi le théâtre de drames entrevus ou imaginés à travers des fenêtres: celui d'une prostituée, d'une Mexicaine adultère et meurtrière, d'une petite fille morte.
Le père du petit Jean, en raison de ses idées libertaires et de son comportement frondeur - il héberge quelque temps un anarchiste recherché par la police (chap. 3) -, appartient à la même famille symbolique des errants. Peu soucieux des normes et des conventions, il se situe lui aussi en marge de la société. Il inculque à son fils, par ses actes tout autant que par ses paroles, une sagesse pourvoyeuse de liberté et fondée sur l'espérance: «Méfie-toi de la raison [...]. Avec la raison, on n'arrive pas à grand-chose. [...] Avec l'espérance, on arrive à tout» (chap. 8).

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Commentaires

  • L'espérance est trompeuse, la raison ne s'en méfie pas toujours suffisamment. Il faut la garder en éveil, elle évite de graves déceptions.En se fiant à la chance, on peut finir dans la détresse.

  • Merci Monsieur Paul pour ce partage, sans espérance tout s'arrête.

    Bien cordialement..

    Adyne

  • Oh que j'aime !!! Merci Robert Paul
  • C'est l'espérance folle...

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