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Des funérailles mémorables.

 

 

 

Nous étions nombreux : des parents, des amis et des  retraités. Sans parler d’un club sportif qui avait envoyé un représentant. Depuis longtemps nous ne fréquentions plus ses installations sportives mais nous avions continué de payer notre cotisation. Ce n’est pas comme certains qui cessent de payer leur cotisation dès qu’ils n’ont plus l’occasion de jouir des installations du club ou des facilités du bar.

Albert que nous enterrions ce jour là avait 83 ans. Il avait eu un malaise, il avait tenté de se retenir au buffet, il avait glissé et sa tête avait heurté le coin du meuble.

Heureusement un de ses gendres était médecin. Averti par sa belle-mère il était accouru immédiatement après avoir, l’habitude sans doute, appelé l’ambulance qui transporta Albert dans l’hôpital le  plus renommé de la ville. Celui qu’Albert aurait d’ailleurs choisi s’il avait pu choisir. Un de ses fils, médecin lui aussi, y envoyait également ses patients. Il n’y eut donc pas de controverse.

Albert ne s’était plus réveillé à l’exception de trois courtes périodes durant lesquelles il s’était exprimé. La première fois, il avait dit : où sont mes cigarettes ? La seconde fois, deux jours plus tard, il avait dit : c’est toi ?, en reconnaissant sa femme.

 Emue et en larmes, elle avait répondu : c’est moi mais il avait refermé les yeux.

Inutile de décrire l’indécision de ses proches qui passaient tour à tour de la résignation à l’espoir. Une dernière fois, c’était un samedi, vers deux heures de l’après-midi, il avait ouvert la bouche. Son gendre, sa fille et une de ses petites filles avaient penché leur visage.

- Merde alors !

Ce furent les derniers mots d’un homme dont je peux affirmer qu’il surveillait son langage.

- Il n’en a plus pour longtemps.

 Le médecin de l’hôpital avait raison. Deux jours plus tard son gendre rédigea le faire-part. Lui seul, profession oblige, avait conservé son sang-froid et pris sur lui la charge des démarches à faire.

 Quoi qu’on puisse penser : enterrer ou incinérer, sous le regard de dieu ou celui du grand architecte, il s’agit d’une organisation qui demande de la réflexion et un esprit de synthèse digne de celui d’un ingénieur.

Les vrais vieux n’étaient pas nombreux aux funérailles. Il y avait surtout les jeunes, ceux qui avaient moins de soixante ans, leurs enfants et les amis de leurs enfants. Albert avait toujours rêvé d’être un patriarche avec sa famille tout entière autour de lui. La mort lui avait accordé ce qui était peut être à la fois sa dernière volonté et sa volonté de toujours.  Beaucoup de ceux qui étaient absents l’étaient malgré eux. Ils étaient morts avant lui.

Ce fut une très belle cérémonie pleine de componction.

Dans une salle attenante au crématoire, il y avait du café et des sandwiches. Puis, les invités avaient étés invités dans un restaurant à la mode pour y entourer la veuve d’Albert que sa fille et son gendre, le médecin, ramèneraient chez elle après le repas.

Edouard, un de fils du médecin, qui avait un sens particulier de l’humour glissa

- Ils ont une tête d’enterrement.

On fit semblant de ne pas l’entendre.

J’étais probablement le plus attentif. J’avais le sentiment d’assister à la répétition générale d’un spectacle dont je serais bientôt le héros. 

Les funérailles ouvrent l’appétit. Arnaud, le gendre médecin, avait  concocté un menu équilibré accompagné d’eau pétillante et d’eau naturelle.

C’eut été parfait si Edouard n’avait pas commandé un whisky à titre d’apéritif. Apéritif que commanda Pierre lui aussi mais un whisky de quinze ans d’âge, le repas, devinait-il, serait repris dans ses frais.

Les femmes à l’exception de la veuve, se contentèrent d’un Martini.

- Avez-vous une préférence pour les vins ?

Edouard ajouta :

- Je ne parle pas de champagne. Celui qui s’imposerait serait du «Veuve Cliquot ».

C’est souvent de cette manière que finissent les funérailles. A la fin du repas les joues étaient rouges et les plaisanteries assez vertes. Albert tout compte fait, je le savais, aurait apprécié.

Moi, je mourrai en faisant un dernier mot d’esprit. Je l’avais noté sur un petit carnet.

Mort aux cons !

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Commentaires

  • On croirait y être !! Et ces fameux repas après enterrements ..... Finalement, rien que de bons souvenirs. Avec, chez nous toujours le :même menu, spécialement réservé pour ces occasions.

    Un bon bouillon et un pot au feu mémorable. Miam ! Il m'arrive d'en rêver.

    C'est pas bien çà .... N'est-ce pas ???

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