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Boulevard des trop tard



Boulevard des trop tard



Nous avons rendez-vous boulevard des souvenirs.
Toi et moi, seuls, avec nos vieilles histoires
Assis, immobiles et silencieux, un seul regard
Pour mille pleurs, pour mille désirs.
Si nous partions vraiment, là-bas, plus loin
Que l’horizon au crépuscule des amants.
Viens, tu me disais, viens
Et je venais, avec mes valises de chimères.
Je déballais pour toi des tapis de fougères
Où la source attend toujours de surgir.
Et l’oiseau-lyre, l’entends-tu encore
Sur la branche trop haute, chanter
Pour l’anémone qui dort ?
Viens, disais-tu, dessinons les saisons
Et le vent dans les arbres et la pluie sur les champs.
Viens et je venais, je venais pour t’aimer.
Mais de mes malles ne sortait que des songes.
Dans l’ombre, qui voyait les loups ?
A deux, nous oubliions tout, le monde et son temps.
Viens, disais-tu, et je venais du passé
Habiter ton présent, vivre ton avenir.
L’écume de la mer, au loin, grondait,
Si loin de nous, trop loin pour l’entendre.
Sa rage montante, à nos yeux invisible,
Était vorace. Elle rognait les rêves à coups de vagues.
Elle brisait chaque pierre érigée. Elle gagnait,
Famélique, le cours de nos pays imaginés.
Elle était une armée contre nos dagues.
Viens, disais-tu, et elle est arrivée, la gueule baveuse,
Le ventre avide de nos amours fraîches.
Je me souviens encore du grincement des pontons
Croulant sous cette ogresse. Je me souviens,
Ici, au milieu du parc à souvenirs,
D’avoir disparu dans ses gorges profondes,
Sans un cri, sans un bruit.
La fée est morte un soir, avec tes bras pour linceul.
Nous avons rendez-vous, boulevard des trop tard,
Et je suis seule, sans valises, sans songes, sans chimères.
Le banc des amoureux est toujours là ;
Les réverbères se mirent, comme à leur habitude,
Dans les eaux trop grises des étangs glauques.
Je suis seule, sans illusions, et près de moi,
Alors que j'y crois à peine, que je n'y crois pas,
Un nid de jeunes fougères pointe le nez.
Viens, me diras-tu viens, maintenant ?



Arwen Gernak
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