Carnaval d’été…dans les ruines
Préambule : L’école de Cirque Pré en Bulle accueille les enfants afin qu’ils tâtent des différentes techniques de jongleries et de funambulisme. Autour, imaginez une vaste plaine d’échoppes gourmandes où l’on croise des licornes blanches, des hérissons bipèdes et un géant qui joue avec une danseuse juchée sur un énorme ballon rouge. La fanfare des oies est suivie par un public souriant comme au carnaval. Pas une goutte de pluie, l’organisateur, Cédric Monnoye, a vraiment eu la main heureuse.
Mais le but du jeu est évidemment de parcourir les splendides ruines de l’abbaye de Villers-La Ville. Se faisant surprendre par les éclairages, on pose le regard sur le passé médiéval et l’on ressent que le goût et la curiosité pour un spectacle qui rassemble des familles au grand complet n’ont pas changé depuis le temps des troubadours. S’envoler et planer. Le rêve de porter des ailes n’est-il pas un rêve qui nous hante depuis l’antiquité. « Léger et libre dans le ciel azur. Divin et calme sur la mer en volant l'oiseau est roi. Ses yeux regardent le triste monde. Son âme pleure la belle solitude.» Valsapena.
On se promène donc en imaginant le parcours le plus adéquat - les oiseaux sont partout dans les ruines - pour aller au plus vite s’émerveiller des prouesses de clowns, saltimbanques, trapézistes et acrobates, ces artistes maîtres de l’art du mouvement. Se poser est difficile. Il n’y a pas de sièges pour ces plus de 5.000 visiteurs qui reviennent chaque année avec leur marmaille éblouie pour applaudir le rêve et ses exploits. On est debout, ou assis dans l’herbe si on a la chance d’approcher les premiers rangs. A vous de choisir entre une vingtaine de collectifs d’artistes venus de Belgique et d’ailleurs : L. Vidal, Grand frisson, Circo Pitanga, Circ Panic, Circlou, Au Fil du vent, Circolade, Cirque Hirsute, Couzin, Chilly and Fly et Natacha Blandine :
«Suspendue à ses fils l’acrobate tisse. Son corps, tel un crochet, danse, glisse et chute, forme son ouvrage, sa toile: Un attrape-rêves. Un battement d’aile éphémère, une image de grâce. Une larme, un sourire, une émotion, un instant d’illusion, un battement de cœur en suspension. Je suis l’image d’un elfe trublion, mon tissu est mon cocon, le jour fini, papillon de nuit, je suis. »
D’un point de vue artistique on retiendra surtout les virtuosités singulières très accomplies de Natacha Blandine dans son numéro de tissu aérien, celles de l’attachant couple du Circo Pitanga dans son chapiteau de cordes, qui oscille entre tours de force et humour et humilité des sentiments dans des performances de haute voltige et surtout le dernier spectacle qui rassemble le public dans la cathédrale pour admirer le couple canadien qui va jouer aux hirondelles sous les ogives pendant près d’un quart d’heure. Beauté, puissance duelle, audace, et partage d’amour. Aucun flash n’est permis pendant cette séance de haute voltige, où chacun retient son souffle et où même la musique s’arrête. Un spectacle qu’un public surchauffé a attendu longuement par des salves d’applaudissements répétés. Chilly and Fly, alias Alexandre et Emilie dans la vie, se sont rencontrés il y a 7 ans dans la passion du spectacle. Alexandre a débuté sa carrière à l'école du Cirque de Montréal où très vite il s'est révélé comme un prodige de la roue Cyr. Puis rapidement son cœur a penché pour le cadre russe qu’il nous est donné d’applaudir ce soir. Emilie, gymnaste confirmée a participé aux JO de Sydney en 2000. Elle a ensuite intégré le Cirque du Soleil et a donné pas moins de 4000 représentations dans le monde. Ils ont commencé à travailler il y a un an et demi ensemble au sein du Roncalli Circus, et très vite ont rencontré le succès en décrochant le Pierrot d'or au festival international de cirque de Budapest en 2012. Le superbe travail de ces deux artistes québécois illustre l’évolution du cirque contemporain tourné vers la poésie, la création et le sport de haut niveau au sein des disciplines des arts de la piste.
Le retour vers les voitures est l’occasion de commentaires amusés des noctambules. Cela fait aussi partie du jeu : où garer autour de ce site prestigieux? Le plus près est parfois à plus d’un kilomètre! Et une fois votre véhicule retrouvé, armez-vous de patience pour rejoindre l’autoroute au pas! Il faut l’avouer, parquer très loin du site n’est pas une si mauvaise idée, pour ceux qui s’impatientent derrière le volant! Consolation de taille pour les mélomanes : celle de ne pas rater sur Musiq 3 la proclamation des résultats du concours Reine Elisabeth, en direct.
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