Statistiques google analytics du réseau arts et lettres: 8 403 746 pages vues depuis Le 10 octobre 2009

Alvéoles - Le voyage de Judith (10)

Sur le conseil de Daniel, Faustine accepte l'idée d'aider sa fille Valérie à se souvenir de son cauchemar, pour qu'elle puisse enfin se détendre et dormir. Mais Valérie a d'autres projets.

 

Faustine avait bien dû admettre que son mari n'avait pas insisté, et que c'était Valérie qui était elle-même revenue sur le sujet. Ils avaient trouvé de quoi faire des crêpes, ce qui malgré les circonstances avait ravi toute la famille. Les signaux de satiété aidant, le sentiment de sécurité avait fini par s'imposer, et contribué à détendre tout le monde.
— Tu peux le faire, tu sais, maman.
Le silence qui s'était imposé avant avait laissé à Faustine tout le loisir d'anticiper les propos de sa fille, mais malgré cela, la jeune femme s'était accordé quelque temps avant de répondre.
— Si tu le souhaites, je suis d'accord, ma chérie. Mais je voudrais savoir comment tu te sens, maintenant.
— Mal à la tête et des trains qui passent un peu partout, répliqua-telle, utilisant la métaphore enseignée par son pédiatre quelque temps plus tôt.
— Et très fatiguée ?
— Ça va, dit sa fille avec une indifférence feinte.
Daniel avait souri en s'éloignant. Il se souvenait comme d'hier du temps où sa fille avait décrété que la sieste et aller coucher tôt, c'était pour les bébés.
— Je crois qu'un petit somme me fera le plus grand bien, moi. Ne faites pas trop de bruit, hein, les filles.
Valérie avait regardé sa maman d'un air complice :
— Je parie qu'il va tout écouter.
Faustine, qui en était persuadée, avait demandé si cela la dérangeait, ce à quoi Valérie répondu, en levant les yeux au ciel :

— Mais non. C'est juste que je n'ai pas trop envie de pleurer.

 

(...)

 

Valérie se détendait peu à peu.
Elle s'était allongée à plat sur le canapé. Ses pieds effleuraient l'accoudoir, et le sommet de son crâne flirtait avec la cuisse gauche de sa maman, assise à côté d'elle.
— Tu es bien ?
— Oui.
— Bien. Tu veux bien me rappeler ce que tu aimerais que je fasse ?
— Je voudrais que tu m'aides à me souvenir de mon rêve.
— Tu voudrais que je t'aide. Et te souviens-tu de comment nous pouvons faire ? Tu peux le dire ?
— Oui, tu vas m'aider à ouvrir ma mémoire, et je vais pouvoir me souvenir.
— Tu vas pouvoir te souvenir de quoi, exactement ?
— De mon rêve, où j'ai vu la femme de Dominique. Je veux m'en souvenir, parce qu'à la fin, c'est devenu un cauchemar. Je veux m'en souvenir pour ne plus avoir peur de dormir et de refaire ce rêve tout le temps.
— Comme pour monstre-placard ?
— Oui, comme pour monstre-placard.
— Tu veux te souvenir de ton rêve, et pour cela tu vas écouter ma voix, qui est là pour t'aider. Tu veux bien écouter ma voix ?
— Oui.
— Je fais ma voix toute douce, comme tu aimes quand on se raconte des choses avant de dormir. Tu te souviens ? Tu entends ma voix, et avec elle tu n'as pas peur. Tu peux me dire cela ?
— J'entends ta voix et n'ai pas peur.
— Bien. Que vois-tu derrière tes paupières ? De l'orange ?

— Oui.
— C'est le soleil au-dehors qui donne cette couleur. Un beau soleil tout chaud. Tu aimes l'orange derrière tes paupières ?
— Oui.
— Tu aimes quand il fait chaud ? Tu voudrais que la chaleur t'accompagne ?
— Oui.
— C'est d'accord. La chaleur restera avec toi et avec moi. Je voudrais que derrière l'orange que tu aimes, tu puisses apercevoir notre maison, un peu comme dans le brouillard. Tu peux faire apparaître notre maison ?
— Oui. Je vois notre maison.
— C'est très bien. Nous allons entrer dans la maison, toutes les deux, et la chaleur et la douce couleur orange vont nous accompagner. Tu veux bien ouvrir la porte ?
— Oui.
— Elle est ouverte ?
— Oui.
Petit à petit, la voix de Valérie était venue s'accorder aux intonations douces de sa maman. Ses affirmations ne furent bientôt plus que de simples ponctuations dans le discours de Faustine.
— Merci. Je vais t'accompagner partout dans la maison, jusqu'à ce qu'on trouve ton rêve. Tu veux bien chercher avec moi ?
— Oui.
— D'accord. Allons voir dans la cuisine. Tu crois que ton rêve s'y trouve ?
— Je ne sais pas.
— Tu es dans la cuisine ?
— Oui, avec toi.
Faustine se concentra. Elle ne devait pas laisser sa fille avoir le moindre doute quant à sa présence à ses cotés.
— Avec toi dans la cuisine. Tu as faim ?
— Non.

— Dans ce cas, nous pouvons quitter la cuisine. Je t'accompagne. La chaleur aussi, pour nous envelopper et nous protéger. Sais-tu où se cache ton rêve ?
— Je crois.
— Tu peux me le dire ?
— Dans ma chambre.
— Dans ta chambre. On va y monter ensemble, avec la douce chaleur orange ? Tu veux bien ?
— Oui.
Faustine perçut la petite vibration dans la voix de sa fille.
— Tu as peur ?
— Un peu.
— Tu entends ma voix et tu as un peu peur ?
Un petit sourire vint se peindre sous les yeux clos de la jeune fille.
— Oui, c'est idiot, dit-elle. Je n'ai pas peur. Pas maintenant.
— Je comprends. Ma voix reste avec toi, et moi aussi je reste avec toi, tout près, et la chaleur aussi. On monte les escaliers ?
— Oui.
— On va compter les marches, tu veux bien ? Combien y en a-t-il ?
— Dix-sept.
— Exact. On compte jusque dix-sept, au bout de dix-sept marches, nous serons face à la porte de ta chambre. Tu es prête ?
— Oui.
— Alors c'est parti. Un... Deux...


Envoyez-moi un e-mail lorsque des commentaires sont laissés –

Vous devez être membre de Arts et Lettres pour ajouter des commentaires !

Join Arts et Lettres

Commentaires

  • Chère Lili, vous êtes prise au piège?

    Alors il me faudra vite donner une suite à l'histoire... :-)

    Promis, elle vient.

    Mais quant au dénouement...

  • Bonjour Eric!

    Merci pour la suite! petite question..puis-je trouver ton livre seulement par internet? je pensais la FNAC ou autre ici à Lille, tu comprends j'ai des bons culture à dépenser! Bon dimanche! Catherine

  • Parce que le coeur m'en dit ...me voilà prise au piége ...

    Merci Eric !

    Bon dimanche à toi .

    Amitiés.

This reply was deleted.

Sujets de blog par étiquettes

  • de (143)

Archives mensuelles