…« Je suis née en Algérie de père vietnamien et de mère belge. Quand mes parents se sont séparés, nous sommes venus vivre à Mons avec ma grand-mère maternelle qui développait un racisme totalitaire. Nous représentions le “péril jaune”. Pour elle, éduquer un enfant consistait à l'empêcher de rire, de jouer, d'avoir des secrets. L'adulte avait le pouvoir absolu », raconte la comédienne toute menue.
Devant l’immense mur de briques du théâtre surgit une véritable enchanteresse, légère comme une plume en robe ethnique noire, épaules et pieds nus, cheveux tirés comme une ballerine. Une phrase soudaine détonne dans son cœur fou de vivre. Une phrase innocente de la femme-oiseau, une voisine maghrébine, chaleureuse mère de famille nombreuse chez qui elle se réfugie de temps en temps. Une permission de vivre et d’ouvrir les yeux : « Il faut de tout pour grandir » dit-elle à la petite fille comme la bonne fée… « Pourquoi as-tu besoin de la musique de l’oiseau en cage au bord de la fenêtre?» demande-t-elle, elle qui d’habitude muselée, n’ose que de rares pourquoi. « Pour retrouver mes ailes » répond la voisine sibylline. Son professeur de piano lui disait : « Ecoute le chant, raconte l’histoire, même dans une gamme… ». Mais elle a dû apprendre à rire en silence. Et à fuir sur la pointe des pieds.
Vy en vietnamien veut dire « tout petit », c’est le nom de sa poupée de bois, son doudou, qui raconte ses déboires avec humour et douceur et s’échappe par le verbe gracieux et tendre par-dessus les murs de silence hostile. C’est cette poupée qui a pleuré silencieusement quand la grand-mère a coupé sauvagement les magnifiques cheveux de sa sœur. « J’ai cru que j’allais vomir ! » nous confie-telle, pour l’atteinte symbolique à l’intégrité de sa sœur, en attendant son tour. Touches par touches l’enfance et l’adolescence se disent sur les pages blanches du cahier d’écolière cent mille fois visitées par l’ancêtre curieuse et méchante, comme dans les contes de fée. La poésie, la grâce vont faire d’elle une artiste de gestes et de mots. C’est le conte de fée. Au fond d’elle il y a cette détermination de vie de la mauvaise herbe, « de cochon jaune », oserait persifler la marâtre … et une jeune fille amoureuse de la danse, de la musique et des mots en train d’éclore et de briser sa coquille.
Parfois, dans son lit elle s’écrie en silence « Dis-moi papa je ne sais plus me servir de mes ailes, je ne sais plus où est le ciel». Yen l’hirondelle est au bord du désespoir. Mais quand elle a vu Ismaël, un ange aux yeux si brillants, amoureux des oiseaux, elle a senti « ce battement d’ailes de ce frémissement du ciel ». Au comble du malheur elle dit avec une douceur de papier de soie « la vie est un rêve, je vais me réveiller ou mourir ! » … Et jamais elle n’accusera, pas d’amertume, car elle a découvert la Vie en elle, devenue comédienne … et facteur. Et quoi de plus beau : la Vie ! Les Lettres ! Avec amour, sur la croix noire de sa grand-mère elle grave avec le crayon doré de ses plus beaux poèmes un message de paix:
« Elance ton âme vers le ciel … Vis ! »
« Vy » de et par Michèle Nguyen, Atelier Théâtre de la Vie, 45 rue Traversière, 1210 Bruxelles
Commentaires
Commentaire de Deashelle Il y a 1 seconde Supprimer le commentaire
Vous rêvez? Vy! Revit!
28 Février 2012 >> 28 Février 2012
au centre culturel Jacques Franck
VY a reçu le Molière du spectacle « Jeune public » 2011
C'est l'histoire de Vy, une petite fille «jaune » qui débarque avec sa soeur et ses frères chez sa grand-mère« blanche ». C'est l'histoire de sa maladresse, de son besoin de silence, de sa passion des mots, de son secretamour qui la mène vers ses origines. C'est l'histoire de son envol surtout. Un voyage vers l’enfance, unerencontre avec la puissance des mots… Michèle Nguyen ouvre grand le livre du passé et interprète, on ne peut plus librement, son enfance bercée par la féroce présence de sa grand-mère. Elle nous parle de sa maladresse, de son besoin de silence, de sa passion des mots, de son secret amour qui la mènera vers ses origines. Vers la paix aussi.
Une marionnette l'accompagne silencieusement dans ce voyage souterrain. Elle est tout autant la fragilité de l'enfance qu'un rien pourrait casser que le vieil enfant qui résiste en nous, tyrannise et tire les ficelles pour ne pas grandir.
« Le texte de ce spectacle, je le conçois comme une partition, la partition d'un moment de ma vie : mon enfance. Celle-ci est tout autant le thème avec lequel je m'amuse, que l'instrument dont je joue, le silence qui s'impose, la corde qui vibre, l'oreille qui accorde son temps. »
Michèle Nguyen
mardi 6 mars 2012 20h30
Centre Culturel de Woluwe Saint-Pierre 93 avenue Charles Thielemans à 1150 Bruxelles
T 02 773 05 81
Théâtre de la Montagne Magique57 rue du Marais
1000 Bruxelles
Contact & Réservations :
02 210 15 90
Belle fin de journée !
Bien à vous,
Théâtre de la Balsamine
1, avenue Félix Marchal – 1030 Bruxelles
Tél. : + 32 2 732 96 18
Fax : + 32 2 733 23 02
Réservation : + 32 2 735 64 68
valerie.proces@balsamine.be
www.balsamine.be
Tu trouves les mots justes et y mets ton coeur, ta finesse, ce qui nous donne envie d'aller découvrir ce spectacle. Hélàs, c'était la dernière représentation ce dimanche!
Mais une autre fois sera possible je pense.
J'aime beaucoup la programmation du Théâtre de la Vie, j'y ai vu quelques magnifiques spectacles.. un théâtre proche de l'humain.
Bien cordialement,
Pascale