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12273072876?profile=originalDe tous les traités et oeuvres de circonstance de Calvin, c'est, sans doute, un des plus vivants, où l'ironie du Réformateur se donne libre cours. Le titre complet indique assez le dessein de l'oeuvre. Par son propos, le "Traité des reliques" tient une place importante dans l'exposé de la doctrine de l' "Institution chrétienne". C'est à un aspect assez particulier, et passablement ridicule, du culte rendu aux saints, que Calvin qualifie l' idolâtrie, qu'il s'attaque ici.

Lorsqu'il l'écrit, Calvin est de retour, cette fois, définitivement à Genève, où ses partisans l'on fait rappeler (1541), après que son intransigeance, l'âpreté de sa logique et de son zèle l'en aient fait chasser. Sa position est bien affermie, Genève est déjà devenue la Rome de la Réforme française, et Calvin le chef de la nouvelle confession, dirigeant de loin le mouvement en France et dans les pays de langue française. Il est certain qu'en s'attaquant au culte des reliques, il a beau jeu et que son triomphe est facile. C'est pour lui une oeuvre de salubrité qu'il entreprend, c'est aussi et seulement une oeuvre préalable, un "avertissement".

Calvin se contente de citer les faits qu'il connaît personnellement ou qui lui ont été rapportés, il ne cherche nullement à faire un inventaire complet des reliques. Il demande au contraire qu'on le fasse: ce serait, s'ils le voulaient, l' "office" des princes chrétiens. Mais pour limitée que soit sa documentation, elle est plus que suffisante pour démontrer les fraudes et l'inanité de ce culte. D'une part, adorer des reliques est faire preuve d' idolâtrie, rendre un culte aux créatures et non au Créateur; il dénonce ceux qui, "au lieu de chercher Jésus en sa parole..., se sont amusé de ses robes, chemises et drapeaux". Mais il y a plus grave, aucune de ces reliques ne présente de garanties d' authenticité. La plupart d'entre elles sont apparues au plus tôt au VIIIe et IXe siècles. Quelle vraisemblance t a-t-il qu'on ait gardé cachés, pendant tant de siècles, des objets aussi précieux? Comment se fait-il que la tradition apostolique n'en souffle mot? Qui plus est, étant donné le sac de Jérusalem, les invasions arabes en Palestine, comment a-t-on pu conserver toutes ces reliques? 

Passsant à l'examen détaillé d'un grand nombre de reliques vénérées dans les Eglises de France, d'Italie et d'Espagne, Calvin souligne, en ce qui concerne les morceaux de la vraie Croix par exemple, que "si l'on voulait ramasser tout ce qui s'en est trouvé, il y aurait la charge d'un bon grand bateau"; quant à la couronne d' épines, il faut conclure que les "pièces ont dû en être replantées pour reverdir; autrement je ne sais comment elle pourrait être ainsi augmentée". Il existe trois corps de Lazarre, deux corps de Marie-Madeleine, quatorze clous de la Croix; le fer de lance, qui perça le sein de Jésus sur la Croix, existe en quatre exemplaires. Où Calvin est inimitable d' humour, c'est quand il rapporte l'existence des reliques, dont le moins qu'on puisse dire est qu'elles sont étranges et irrévérencieuses: tel le prépuce de Notre-Seigneur, qu'on vénère à l' abbaye de Charroux dans le diocèse de Poitiers, aussi bien qu'à Saint-Jean de Latran à Rome; ou encore la forme de ses fesses "qui est à Reims, en Champagne, sur une pierre, derrière le grand autel". Qu'en conclure, sinon que les prêtres sont des imposteurs, des "abuseurs", des "séducteurs""? Ils mentent "à gueule déployée". Non seulement le culte des reliques est une absurdité, mais on s'expose en vénérant les corps saints à adorer les os "de quelque brigand ou larron, ou bien d'un âne, ou d'un chien, ou d'un cheval".

Calvin conclut en disant qu'il a voulu seulement ici ouvrir les yeux aux âmes de bonne volonté et il les exhorte instamment à entendre la vérité et à revenir, sur ce chapitre, à la simplicité des moeurs de l'Ancien Testament et de l'Eglise primitive.

Le Traité se développe selon une rigoureuse logique qui n'exclut ni la passion, ni l'humour. Le style vigoureux et une peu sec de Calvin n'a pas vieilli et sa langue nous semble beaucoup plus moderne que celle de Montaigne, dont, en revanche, elle n'a pas le charme.

Le succès du "Traité" fut immense: traduit par Nicolas des Gallars en latin en 1548, il se répandit dans toute la chrétienté. Peu après, il fut traduit en allemand, en anglais et en hollandais.

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