Une exposition qui dérange….
C’est encore l’hiver, et pourtant la lumière printanière caresse les verrières des immenses salles Horta, un écrin pour la rétrospective de l’œuvre de LUC TUYMANS dans une unique escale en Europe : Bruxelles. Les curatrices sont deux éminentes expertes, Madeleine Grynstejn, directrice du Musée d’Art contemporain de Chicago et Helen Molesworth, curatrice en chef du Musée d’Art Contemporain de Boston. Elles soulignent l’immense honneur qui leur est fait d’accueillir cette rétrospective dans des salles aussi prestigieuses : « It is an absolutely gorgeous installation. » L’atmosphère architecturale, ainsi que les variations atmosphériques contribuent grandement à faire vibrer les œuvres. Ensemble elles ont fait la sélection des œuvres de Luc Tuymans mais c’est Luc Tuymans qui a présidé à la mise-en-scène et à l’accrochage : un shadow curator. C’est lui d’ailleurs qui a été choisi pour présenter les œuvres de l’artiste belge francophone Angel Vergara, désigné pour le Pavillon belge à la Biennale des Arts visuels de Venise 2011. « Retrospective » est organisée par the San Francisco Museum of Modern Art et the Wexner Center for the Arts, Colombus.
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Luc Tuymans, notre compatriote, est un artiste de renom aux Etats-Unis et en Europe du nord, il est très présent dans de prestigieuses collections muséales de par le monde. Lui c’est l’explorateur du fossé entre la réalité et l’œuvre picturale, l’explorateur du non-dit, du non-peint. Il arrive à révéler la substance mystérieuse qui se loge entre l’écorce et le bois dans la constitution des arbres, sauf qu’au lieu de la vie, c’est la mort qu’il couche sur la toile. Sa palette délavée faites de toutes les nuances de gris, terre, bleutés, vert d’eau, violacés et sables semble vouloir crier à mots muets le noir absolu de certains moments tragiques de notre histoire contemporaine, le noir, une couleur qu’il refuse d’utiliser en peinture. On est dans le paradoxe. C’est probablement que ces moments d’absolue monstruosité sont impossibles à comprendre et à exprimer autrement. Si cette exposition semble reconstruire la genèse du cheminement de l’artiste, elle plonge dans la rétrospective de moments d’histoire ou de quotidien douloureux.
« Ses peintures apparaissent à première vue comme des scènes relativement banales de la vie de tous les jours. Mais derrière ses intérieurs, paysages ou personnages aux allures plutôt innnocentes, se cache presque toujours une autre signification. Les idées et évènements présents dans l’œuvre de Tuymans sont rarement explicites, mais plutôt suggérés par des allusions subtiles. Comme autant de souvenirs voilés, ces œuvres oscillent sans cesse entre cohérence et illisibilité, poussant ainsi le spectateur à remettre en question non seulement ce qu’il voit, mais aussi sa façon de regarder. Dans toutes ces œuvres, Tuymans s’attache à montrer « l’in-montrable » pour rendre les gens conscients de leur rôle de spectateurs et parfois, involontairement, de complices de l’histoire. »
Les thèmes historiques qu’il travaille par prédilection sont la Shoa, les retombées des évènements du 11 Septembre, et l’histoire postcoloniale de la République Démocratique du Congo. Tuymans s’intéresse aux retombées de ces évènements et à la façon dont ils sont relayés par les médias de masse. Il développe les thèmes de la violence, de l’utopie du pouvoir, de la propagande et des abus en tous genres, dont la pédophilie.
Il puise son inspiration dans le rassemblement d’une documentation exhaustive trouvée dans les medias : photographie, cinéma, télévision. Il s’approprie des images de diverses provenances qu’il recadre, encadre, agrandit et décline sous un nouvel éclairage. Un processus qui peut durer jusqu’à 4 mois de gestation pour une réalisation que ne durera pas plus d’une journée. Il punaise ses toiles sur les murs de son atelier de 450 mètres carrés à Mortsel, elles sont mises sur châssis par la suite. Il génère ainsi des natures mortes, des paysages et des portraits, aux demi- teintes pastel dont on ne peut pas considérer seulement la valeur faciale. Pour découvrir la symbolique cachée, l’utilisation du magnifique catalogue, une œuvre en soi, est presque indispensable. Il faut se poser sans cesse la question : « Mais qu’est-ce que j’ai sous les yeux ? » Il faut prendre le temps de s’arrêter sur l’image impassible qui nous est livrée et réfléchir sur le thème proposé. Puisqu’il est vain de penser qu’à notre époque on peut encore être original, dans ce monde où l’on est noyé d’images aux couleurs foudroyantes ou en noir et blanc, tranchantes, coupantes, farcies de millions de pixels.
Adresse
BOZAR – Palais des Beaux-Arts
Rue Ravenstein 23
1000 Bruxelles
Dates
18.02.2011 > 08.05.2011
Heures d’ouverture
De mardi à dimanche, 10:00 > 18:00 / Jeudi, 10:00 > 21:00 / Fermé le lundi
Catalogue Luc Tuymans. Retrospective
Commentaires
Luc Tuymans paints the indescribable. His dark muted scenes seem vaguely familiar, distant, like haunting memories. Drawing his inspiration from grand themes, Luc Tuymans taps into a universal social guilt: from the Holocaust, or imperialism, to child abuse. By minimalising his images, he creates a raw emotion through paint; each painting linking spiritually, somehow instinctively, to the rest.
WITHIN
“Within” is a tranquil vermin metaphor for contamination and disease. A close-up detail of a birdcage, this painting more than conveys feelings of hopelessness and isolation: through its sheer size and potency, it literally traps the viewer, swallowing him into a prison of collective consciousness.
Luc Tuymans et l’ambiguïté des images
Guy Duplat
Mis en ligne le 05/02/2011
http://www.lalibre.be/culture/arts-visuels/article/640742/luc-tuyma...
Luc Tuymans à la Tate Gallery
quote:
The most significant and influential contemporary painters working today. He is one of the key figures of a new generation of figurative painters who have continued to paint during a time when many believed the medium had lost its relevance. In the context of the new information age, many artists felt that painting was a deeply conservative form of expression which did not match the heterogeneous nature of contemporary experience. Tuymans' work specifically addresses the challenge of the inadequacy and 'belatedness', as he puts it, of painting.
Tuymans was born in Antwerp, Belgium in 1958 and began to study fine art in 1976. He concentrated on painting but in the early 1980s he lost faith in the medium and gave up for two years. During this time he worked as a film-maker, and when he returned to painting in the mid-1980s, he introduced new techniques such as cropping, close-ups, framing and sequencing, which remain key elements of his work today.
Tuymans' work is a vast repository of data, drawn from photography, television and film, combining a range of different styles and subject matter. His subjects range from major historical events, such as the Holocaust or the politics of the Belgian Congo, to the inconsequential and banal - wallpaper patterns, Christmas decorations, everyday objects There are also paintings which express abstract emotional states, titled 'Embitterment' or 'Insomnia', which imply existential or philosophical responses to the human condition.
Tuymans' range of imagery deliberately resists categorisation. Events and ideas are not expressed explicitly, but implied through subtle hints and allusions, creating an ambiguous collage of disconnected fragments