On entend, de loin en loin "Je suis déçue, elle me déçoit,…": Qu’est ce que cela signifie véritablement ? Il y a des amertumes qu’on se fabrique tout seul, d’autres qui sont des désenchantements vrais.
Oui, on peut être déçu de n’avoir pas atteint un objectif alors qu’on pensait sincèrement avoir tout mis en œuvre, y avoir impliqué toute son énergie et son cœur. Parfois, c'est simplement les occurrences, une sorte de fatalité, mises en travers du chemin. La déception, toute légitime qu’elle soit, porte alors plutôt vers l’action, à réagir pour faire échec à ce qui nous a fait obstacle. Notre persévérance finira par triompher!
Les défaites, de toute manière, proviennent de l’essence de l’humanité. La désillusion n’est parfois que le reflet de notre manque d’humilité, de n’avoir pas voulu reconnaître ce qu’on n’est pas … Il faut accepter que rien ne soit parfait.
Et puis, on dit que les échecs font grandir, et c'est souvent vrai.
En tout cas, je n’appellerais pas déception l’échec d’un projet qui survient tout simplement parce que l' on n’a pas mis en jeu toutes ses potentialités, pas été au bout de l’effort ; qu'en plus, on "n'a pas eu de chance"! Tant pis, alors. Il me semble qu’il y a une certaine mauvaise foi à "se dire déçu" de l’issue. On ne dit pas ce qu’on croit, et on ne croit pas ce qu’on dit. Il arrive naturellement ce à quoi il fallait s’attendre. Plutôt la " chronique d’une déconvenue annoncée"…
En fait, les déceptions les plus douloureuses sont peut-être celles qui nous échappent...Oui, on a le droit d’être déçu si "l’autre", en qui on avait investi une certaine confiance ou affection, agit mal envers nous, un peu gratuitement, et en sachant qu'il fait mal ; par des actes ou des paroles, ou par simple légèreté ou négligence quasi voulues.
Mais attention, l' égocentrisme serait pour une grande part responsable de la déception si on avait placé dans autrui, sans respect pour ses préoccupations et sa nature propres, des attentes disproportionnées ; lorsque la perception de l'autre ne s’accorde pas entièrement avec l’image qu'on en avait modelée.
Il faut bien se garder alors de ne pas réagir de notre côté par dépit, d’une manière qui pourrait vraiment "décevoir", de ne pas faire refluer comme une marée sans cesse grossissante les rancœurs, un cycle sans fin.
Mais sans céder à trop de complaisance ; à trop s’accommoder des manquements, à trop consentir, on finit par assécher la relation. Un équilibre subtil et fragile à atteindre, entre exigence et indulgence …
Quoiqu'il en soit, les vraies déceptions ne rendent sans doute pas meilleur, mais peut-être plus profonds, en nous incitant à nous remettre en cause et quelquefois, à faire le choix de se détourner de l’autre.
Martine Rouhart
Commentaires
Je ne sais pas si les déceptions rendent plus profond, elles laissent de fait de grands vides, de l'idéal ne reste que le spleen, celui du temps que l'on ne rattrape pas.
Bonjour Martine,
Je pense que les déceptions et les frustrations sont une dimension incontournable de la condition humaine dans la mesure où il est impossible de réussir tout ce qu’on entreprend, impossible d’entreprendre bon nombre de choses qu’on aimerait faire faute de temps, faute de moyens, faute de compétences suffisantes, faute à nombre de choses et d’aléas qu’on ne peut pas maîtriser, dans la mesure aussi où la plupart de nos entreprises ne dépendent pas seulement de notre seule action, mais des autres qui peuvent tout autant les faire réussir que les compliquer, les saboter ou les faire capoter, les ruiner.
Ceci étant dit, la vie devient triste, déprimante, accablante, insupportable quand trop de déceptions, trop de frustrations, prennent le dessus et vous font perdre toute confiance en vous, et dans les autres. Il s’impose donc de réfléchir sur ce qu’on peut faire pour s’éviter telle situation. Je pense qu’il faut envisager deux choses. La première, c’est peut-être bien de trouver ce qui peut nous faire réussir davantage et de voir comment on peut s’éviter bon nombre de déceptions, la seconde, c’est peut-être bien d’apprendre à gérer ses déceptions, ses frustrations car on ne pourra pas ni tout entreprendre de ce qu’on aimerait faire, ni réussir tout ce qu’on entreprend. Malheureusement, je pense que la société actuelle est totalement disqualifiée pour ce qui est d’apporter ces choses-là, disqualifiée pour ce qui d’apporter aux gens des satisfactions, de la confiance en eux et dans les rapports avec les autres, une culture du savoir-faire pensé, réfléchi, efficace et intelligent. En tout cas, je pense qu’il faudrait vraiment revoir ce qu’on enseigne aux enfants et aux adolescents, et donner une place importante à une pédagogie de la mise en situation, du projet, du savoir-faire un objet, un événement, au lieu de vouloir en faire de braves soldats d’une république aux valeurs frelatées qui ne sait pas faire grand-chose pour que les gens soient un minimum contents, satisfaits et puissent avoir le temps de respirer et d’avoir des projets bien à eux.
Bonne journée. Amitiés. Gil
Un sujet difficile très bien traité dans ce texte.
Merci Martine.
Bonne soirée.
Amitiés.
Adyne
merci, Monsieur Paul! Bonne après-midi à vous