Faites entrer les lauréats… (affiche)
La ville de Paphos, un petit port tranquille de la côte sud-ouest de Chypre, a été choisie comme capitale européenne de la culture 2017 (avec Aarhus au Danemark).
Aussi ai-je décidé tout au long de cette année de vous présenter quelques aspects de la culture chypriote, riche de tant de siècles passés, variée de tant de cultures brassées.
Et comme le thème général retenu « Lier les continents, créer des ponts entre les cultures » me semblait fort à propos pour un site comme le nôtre…
Dans cette introduction je vais m’attacher à mettre en avant quelques peintres et sculpteurs chypriotes.
Yiota Ioannidou
Sol Alter
(bronze, 2016)
Ouvrons notre horizon…
Avec cette sélection forcément suggestive, et ce à plusieurs titres.
D’abord, seulement huit artistes contemporains ont été retenus par un jury dont je ne faisais évidemment pas partie.
Ensuite par le thème imposé pour cette exposition inaugurant l’année culturelle « Au départ les mythologies. »
Enfin, une seule œuvre par artiste était choisie.
Un choix restreint donc, mais qui a le mérite d’être celui des Chypriotes eux-mêmes.
Cette exposition montre toute la vigueur de l’art chypriote. Chypre, un pays meurtri certes, toujours envahi, mais qui sans cesse se relève et avance. Chypre creuset de tant de cultures. Chypre d’aujourd’hui et de toujours.
Voici donc les artistes et les œuvres honorés pour commencer la saison culturelle...
Christos Foukaras (né en 1944). Après s’être formé à l’architecture à Nicosie, il poursuit ses études à Moscou, se spécialisant dans l’art décoratif (fresques, mosaïque, peinture murale, vitrail…) avant de s’installer quelque temps à Athènes puis de retourner à Chypre comme professeur d’art plastique, pour enfin pouvoir se consacrer à plein temps à son art.
Les aïeux
Tradition et modernité. Des demoiselles d’honneur qui ne sont pas sans rappeler les Ménines telles qu’interprétées par Picasso.
(huile sur toile, 1996)
Christos Christou (né à Paphos en 1950). Diplômé des Beaux-Arts de Paris, son cœur maintenant balance entre notre capitale et l’amour de son pays. Il mêle avec bonheur influences byzantine, Renaissance et modernisme.
La naissance d’un ange
(acrylique et feuille d’or, 2010)
George Kotsonis (né en 1950). Peintre de la grâce et du bonheur, il a étudié à Londres puis en Chine et à Prague avant de retourner vivre et travailler à Paphos.
Léda et le cygne
(acrylique, 2014)
Léda, un thème éternel, ici revisité avec élégance et sensualité.
Léda, épouse du roi de Sparte Tyndare, se baignait toute nue dans le fleuve Eurotas, quand un cygne s’approcha. Tonnerre ! C’était Zeus en personne ainsi métamorphosé qui déjà s’échauffait. Zeus, tout feu, tout flamme, qui faisait flèche de tout bois en ce temps-là, ne tarda pas à s’unir à Léda. Un œuf elle trouva, d’où éclot la Belle Hélène. Et d’un même élan conçut les Dioscures (« fils de Zeus »), les jumeaux Castor et Pollux.
Andras Charalambides (né en 1939). Après s’être orienté vers une carrière sportive dans une école de gymnastique d’Athènes, il bifurque et entre à l’Académie des Beaux-Arts de la ville. Il s’installe à Paphos où il adopte un style abstrait jusqu’à l’invasion turque de 1974. Il complète alors sa formation à Redding en Angleterre avant de retrouver la mythologie grecque et l’art byzantin comme sources d’inspiration et vivre paisiblement le reste de sa vie.
Le secret de l’Oracle
(acrylique et feuille d’or, 2005)
Andy Hadjiadamos, dit « Adamos » (1936-1960). Peintre, sculpteur, graveur et auteur né à Paphos. Il étudie en Afrique du Sud avant de retrouver son pays fin 1972 pour le quitter pendant les évènements tragiques de 1974. Il revient en 1980 s’installer dans sa ville natale. Si sa sculpture est imprégnée du travail de Henry Moore, sa peinture de l’art brut d’un Dubuffet, on sent ici l’influence prépondérante d’un Gauguin ouvrant ses bras au monde, ou d’un Munch.
L’homme jaune
Pacifique et rédempteur
Ecoutez son cri contre la Ligne Verte
(peinture sur bois, 1999)
Costas Economou, né en 1925. Il s’est formé à Morfou (aujourd’hui Güzelyurt dans Chypre occupé) puis à Londres avant d’enseigner à Nicosie. C’est un artiste réputé qui privilégie l’aquarelle sans pour cela dédaigner l’huile.
Le royaume des oiseaux
A la manière de Chagall, un rêve en couleurs.
(huile sur toile, 1999)
Stass Paraskos (1933-2014). Formé à Leeds. Influencé aussi bien par l’art byzantin que par celui d’un Matisse ou d’un Gauguin, qui décidément laissa son empreinte sur les îles.
Printemps païen
(huile sur toile, 1968)
A ces sept peintres d’aujourd’hui s’ajoute la présentation d’une sculpture fort symbolique de Kypros Perdios.
Phoenix, oiseau mythique (albâtre gypseux, 1983)
Né d’un volcan, toujours occupé, humilié, écartelé, brûlé, Chypre à chaque fois renait de ses cendres et se régénère. Même si, comme l’écrivait Albert Camus*, devait revenir « l’heure des martyrs, aussi inlassables que l’oppression, et qui finissent par imposer à un monde indifférent la revendication d’un peuple oublié de tous, sauf de lui-même. »
Hors les murs, deux œuvres de Yiota Ioannidou récemment installées ont été immédiatement adoptées par la population locale. La première, Sol Alter, accueillie comme étant « La Dame qui veille sur le port de Paphos. » Au pied de la seconde, j’y ai vu des messages de paix et de fraternité déposés par les passants.
Le petit pêcheur
(bronze, 2016)
Yiota Ioannidou (née en 1971) est une jeune artiste formée à Athènes et habitant Paphos. Un talent multiforme à l’étonnante maturité.
Puisse cet article vous donner l’envie de découvrir ce pays, et Chypre retrouver, avec cette génération d’artistes, son Âge d’or.
Un des thèmes annexes pour 2017 est « Mythes et religion » (avec « Voyageurs du monde » et « Scènes du futur »), voilà donc un axe que je me propose d’emprunter tout au long de cette année. Nous aurons donc d’autres rendez-vous sur l’île d’Aphrodite…
Michel Lansardière (texte et photos)
* Chypre était alors possession britannique. Camus réclama en vain la grâce de Michalis Karaolis dans un article pour L’Express du 6 décembre 1955, « L’enfant grec », qui fut pendu le 10 mai 1956. Il avait 23 ans. Devenue République indépendante en 1960, et malgré son intégration à l’Union européenne depuis le 1er mai 2004, Chypre reste amputé de 37% de son territoire, comme anglaisé d’une partie vive occupée par les Turcs depuis 1974. Sa capitale, Nicosie, est toujours coupée en deux…
Nota : le journal Beach News de Paphos m’a été bien utile pour la rédaction de plusieurs des courtes biographies données ici.
Commentaires
Chef-d'oeuvre, n'exagérons rien, mais cela fait toujours plaisir. Un peu de reconnaissance cela fait toujours du bien, moi qui me suis vu entendre que je n'avais "pas le profil" pour un poste de documentaliste en lycée après mon accident et ma maladie.
Je reviendrais bientôt à Chypre et en Grèce pour de nouveaux articles consacrés à l'art héllénistique.
Merci Joelle.
Encore une fois merci à tous pour votre soutien.
Je prends un petit congé et vous reviens bientôt pour la suite des aventure de O'Riley et de McLaughlin.
Et vous promets d'autres billets consacrés à la culture hellénistique (j'ai une pensée pour Aphrodite...)
Amitiés..
Bonjour Michel,
Quel beau voyage vous nous offrez là, j'aime ces découvertes que vous nous offrez dans vos billets d'un endroit à l'autre du monde. Merci beaucoup
Olga
Quelle chance nous avons de pouvoir découvrir par votre intermédiaire toutes ces merveilles qui nous viennent de cultures différentes. Parmi ce flot incessant d'images venues de partout dans le monde vous réussissez à capter notre attention par ce côté didactique qui caractérise vos billets. Merci encore.
J' aime beaucoup ton commentaire ,mais ma préférence ,les sculptures sont superbes Amitié
Merci à tous pour vos marques d'intérêt et d'amitiés.
Superbe, merci
Merci Michel de nous permettre de découvrir cette île riche de son passé. C'est la naissance de l'ange qui retient le plus mon attention hormis toute ton attention à nous enrichir régulièrement. Amitiés et Joyeuses Pâques
Merci Michel pour ces ajouts toujours intéressants qui complètent cette période à Chypre, de très belles sculptures misent en situation.
Bonne fin de semaine.
Amitiés.
Adyne
Ouf ! j'ai réussi. Merci pour vos conseils !
Je vais pouvoir proposer des billets encore mieux illustrés.
En attendant voici celui-ci complété.
Merci à tous ceux qui me soutiennent.