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Pelléas et Mélisande

12272728698?profile=original« Pelléas et Mélisande » est un drame en cinq actes et en prose de Maurice Maeterlinck (Belgique, 1862-1949), publié à Bruxelles chez Paul Lacomblez en 1892, et créé à Paris au théâtre des Bouffes-Parisiens le 16 mai 1893.

 

"Je ne connais aucune oeuvre dans laquelle soient enfermés autant de silence, autant de solitude, d'adhésion et de paix, autant de royal éloignement de toute rumeur et de tout cri" (Rainer Maria Rilke, 1902). La pièce la plus célèbre de Maurice Maeterlinck doit une part de sa notoriété à l'adaptation musicale de Claude Debussy créée à l'Opéra-Comique le 30 avril 1902, sous la direction de Messager, en dépit des démêlés survenus entre l'auteur et le compositeur. Une nouvelle édition modifiée conformément aux représentations de l'Opéra-Comique paraîtra chez Paul Lacomblez en 1902. Très mal accueillie par la critique mais soutenue par une jeunesse enthousiaste, l'adaptation de Debussy restitue parfaitement l'atmosphère ésotérique de l'oeuvre. Par son dépouillement volontaire qui manifeste un retour à la simplicité classique, Pelléas et Mélisande marque une date importante dans l'évolution du drame symboliste.

 

Le prince Golaud, un homme d'âge mûr, rencontre une jeune fille en larmes au bord d'une fontaine. Il ignore qui elle est, d'où elle vient et pourquoi elle pleure, mais une couronne au fond de l'eau ainsi que ses vêtements indiquent une origine princière. Golaud épouse Mélisande et la ramène au château "très vieux et très sombre [...] très froid et très profond" où l'attendent son père Arkël, son demi-frère Pelléas et son fils né d'un premier mariage, Yniold (Acte I).

 

Pelléas conduit Mélisande près d'une fontaine dite "des aveugles" où la jeune fille laisse tomber l'anneau d'or offert par Golaud. La frêle Mélisande avoue son malheur, dont elle ignore la cause: "Je vais mourir si on me laisse ici" (Acte II).

Pelléas doit quitter le château pour se rendre au chevet de son ami Marcellus. Avant de partir, il veut embrasser Mélisande et la surprend, à la fenêtre d'une tour, coiffant sa longue chevelure qui inonde le jeune homme: "Je t'embrasse tout entière en baisant tes cheveux." Arrive Golaud qui met fin à ce qu'il appelle des "jeux d'enfants", mais demande à Pelléas d'éviter Mélisande, prétextant sa délicatesse et son émotivité; il se sert du petit Yniold pour savoir ce que se disent les jeunes gens en son absence (Acte III).

 

Pelléas fixe un dernier rendez-vous à Mélisande: "Il faut que tout finisse [...]. J'ai joué comme un enfant autour d'une chose que je ne soupçonnais pas [...]. J'ai joué en rêve autour des pièges de la destinée." Pelléas et Mélisande s'avouent enfin leur amour et s'embrassent, lorsque, dans la nuit, surgit Golaud qui tue Pelléas. Mélisande s'enfuit épouvantée (Acte IV).

Au matin, les servantes découvrent les corps de Mélisande et de Golaud devant la porte du château. Mélisande n'est que légèrement touchée: "Ce n'est pas de cette blessure qu'elle meurt, un oiseau n'en serait pas mort [...] ce n'est donc pas vous qui l'avez tuée [...] elle ne pouvait pas vivre", dit le médecin à Golaud, fou de remords, implorant son pardon et réclamant toute la vérité sur l'amour de Pelléas et Mélisande. Un amour que la jeune femme avoue très naturellement. Cet aveu trop facile torture Golaud: "La vérité, la vérité", hurle-t-il. Mais Mélisande est déjà trop loin et Arkël demande qu'on la laisse en paix: "Il faut parler à voix basse [...] l'âme humaine aime à s'en aller seule." Le petit être silencieux et mystérieux s'éteint sans un mot (Acte V).

 

Le drame "banalement passionnel", pour reprendre l'expression de Maeterlinck, d'un amour fatal qui conduit à la mort est mené ici selon une lente et irrésistible progression des sentiments. L'évolution de Pelléas et Mélisande n'est marquée que par une succession d'états d'âme, sans aucun éclat dramatique ou effet lié aux événements. L'action ne provient que du resserrement progressif de l'emprise du destin sur les personnages: le schéma dramatique est donc essentiellement émotionnel. Pelléas et Mélisande ne prennent que tardivement conscience de l'amour qu'ils se portent. Si dès l'acte I leurs paroles sont révélatrices de leurs élans inconscients, de leur muette attirance, c'est l'épisode de la fontaine, où Mélisande, jouant avec l'alliance offerte par Golaud, la laisse tomber dans l'eau, "peut-être aussi profonde que la mer", qui éclaire les jeunes gens, confirmés dans leurs sentiments après la scène de la tour, où la longue chevelure de Mélisande inonde Pelléas comme autant de liens inconscients. Mais ce n'est que lors de son agonie que Mélisande accédera à une révélation totale. Elle est parvenue, grâce à l'amour, à un niveau de perception qui l'éloigne définitivement du monde des humains; d'où son incompréhension face aux cris de Golaud réclamant vérité et pardon.

 

Si Golaud incarne le jaloux mis à nu avec sa soif de domination totale sur l'être aimé, avec son obsession de la vérité, son désespoir d'homme à qui tout échappe, Mélisande, elle, reste mystérieuse jusqu'au bout. Ambiguë et troublante, elle est la figure même du destin; malgré sa beauté funeste elle n'est pas un être de chair, mais avant tout une âme - et en même temps une poupée mue par une force obscure, Dieu, ou la fatalité.

Aucune véritable péripétie dans cette pièce de "théâtre immobile", qui conduit inexorablement ses héros vers la mort. Dans ce texte où pourtant existent l'amour, la jalousie, la colère, les personnages parlent comme dans un songe, se touchent à peine, sont incapables de nommer les choses et se contentent de proférer des paroles transparentes, chargées pourtant de symboles, et qui semblent arrachées à une incommunicable rêverie intérieure. La pièce se nourrit d'actes banals, dénués en apparence de toute signification. C'est le quotidien dans ce qu'il a de plus dérisoire et d'écrasant qui comble le silence de ce théâtre dont l'auteur n'a "d'autre intérêt que celui qu'inspire la situation de l'homme dans l'univers".

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  • Arnold Schoenberg,Pelléas and Mélisande

     

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