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On peut toujours rêver.


CHANGER L’HOMME, POUR CHANGER LE MONDE

Si j’étais magicienne… Supposition merveilleuse qui permet tous les espoirs. Du moins à première vue car les souhaits les plus humanistes sont des arbres qui cachent une forêt d’exigences. Les meilleures intentions du monde se bornent trop souvent à des vœux pieux.

Je saisis ma baguette magique et je clame « Que chaque être humain mange désormais à sa faim ». Plus facile à dire qu’à faire, ricane aussitôt un diable  réaliste et philosophe. Vaincre la faim dans le monde suppose que les intérêts économiques des plus forts cessent de faire la loi. Les cultures intensives qui rapportent à quelques-uns devraient céder le pas aux cultures propres à nourrir les populations locales. Les champs d’arachides, de soja ou les légumes exportés du Sénégal, du Maroc, du Kenya et d’autres pays africains, cultivés au profit des nantis de l’Occident, devraient disparaître pour que renaissent les produits qui formaient la base de l’alimentation traditionnelle de ces contrées. 

Il faudrait aussi que les conflits entre les pays, avec leur cortège de factions et
l’antagonisme des intérêts économiques des uns et des autres, soient bannis à jamais. Que le pétrole cesse de faire flamber les convoitises. Que l’or, le diamant, le platine, l’uranium et n’importe quel minerai mirobolant encore à découvrir ne se conquièrent plus au prix du sang et de la souffrance humaine. Que la guerre soit donc mise hors la loi car si elle tue, torture et nous détruit, elle ravage tout autant nos maisons et nos champs, les  pâturages et les troupeaux. Elle induit le déracinement des peuples, les contraint à l’exil, en fait des réfugiés économiques qui ont perdu leur force de travail. Trop souvent ces malheureux sont contraints de survivre grâce à une aide humanitaire. Cette aide, indispensable pour parer au plus pressé dans l’urgence,  ne résout pas les  problèmes de fond qui sont l’exploitation de l’homme par l’homme et l’accaparement des richesses par les plus forts La condition d’assisté fait mauvais ménage avec la dignité humaine.
Les maux surgis de la boîte de Pandore ne sont rien en regard des monstres vomis par la guerre, au nombre duquel il faut encore compter la délation, le marché noir, le viol, le déchaînement des pulsions les plus sombres, la porte ouverte à tous les sadismes et à toutes les exploitations.

Les seuls à profiter vraiment des conflits, ce sont les marchands d’armes qui rivalisent d’ingéniosité pour détruire, mutiler, anéantir, empoisonner leurs prochains, avec un maximum d’efficacité. Il n’y a pas de guerre propre, comme on voudrait nous le faire croire, en parlant de frappes « chirurgicales ». La guerre est sale, inhumaine, abjecte. Ce qui est interdit en temps de paix : tuer ou nuire à son voisin, est hautement recommandé et même obligatoire pour les combattants censés défendre leur pays. Tout cela est bien noir en regard de la magie blanche de tous les Merlins du monde. La lampe enchantée d’Aladin en perd toute sa clarté.

Aurais-je plus de chance avec mon deuxième vœu ?
En Belgique, comme dans la majorité des pays développés, nous sommes tous un peu thaumaturges. Même si nous n’en sommes pas conscients. Nous jouissons, en effet, riche ou pauvre, d’un privilège exorbitant, celui de disposer d’eau potable, sur un simple geste, celui  d’ouvrir un robinet.
Réconfortée, je reprends ma baguette magique et souhaite qu’il en soit ainsi partout dans le monde. Hélas ! Les forces maléfiques sont tellement fortes que ma baguette magique baisse le nez, rouge de honte et de colère. Plouf ! La voilà qui se noie dans un océan d’écueils. Les pauvres gens de partout, avec les femmes en première ligne, continueront  à faire des kilomètres à pied chaque jour, avec une bassine sur la tête, pour aller recueillir une eau saumâtre ou polluée, avec laquelle étancher leur soif, se laver et faire la cuisine. Même si cette eau les rend malades et tue les plus faibles d’entre eux. Cet or bleu, indispensable à la vie, est accaparé par les plus forts, à leur seul profit, gaspillé sans vergogne, quand il n’est pas vendu par ceux qui disposent d’un puits dans les lieux où l’eau manque cruellement.

De braves gens se dévouent pour creuser de nouveaux puits, installer des canalisations, réparer les installations usées. On dessale de l’eau de mer à grands frais, on creuse des canaux, on puise dans les fleuves mais des millions d’hommes ont toujours soif car le bétail et les cultures doivent boire également.  Un nouveau « couac » pour ma baguette magique, impuissante devant le réchauffement climatique, la désertification et l’égoïsme.

C’est le moment de tirer ma troisième et dernière cartouche. Je pourrais peindre le ciel d’un bleu inaltérable, faire luire le soleil en pleine nuit et exiger des quatre saisons qu’elles se muent en printemps éternel.
Foin de ces fantasmes enfantins ! Attaquons-nous enfin au problème de fond.

Que les hommes changent ! Que l’argent et la réussite matérielle ne soient plus l’objet de leur désir le plus ardent ! Devenons plus solidaires, plus fraternels et prêts à contribuer à l’établissement d’un monde plus juste. Alors et alors seulement tout deviendra possible. Chacun mangera à sa faim, étanchera sa soif, gagnera sa vie, vivra paisiblement et en bonne santé. Le chômage et l’angoisse de l’avenir disparaîtront. On retrouvera les vertus du rire et de la bonne-humeur.
Chacun aura alors le loisir d’être amoureux, du cultiver des roses, de chercher le bonheur, de créer, de construire, de jouir de sa courte vie terrestre, au mieux de ses convictions philosophiques ou religieuses. Sans compter sur un paradis hypothétique, après la mort.
Quadrature du cercle ou  miracle remis aux calendes ? Vaincre la violence en douceur ? Quel beau paradoxe !


MARCELLE DUMONT

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Commentaires

  • voilà un texte utopique, mais un texte si humain et si nécessaire. merci pour ce cri du coeur. toutes tes réflexions sont si justes. Mais comme l'homme n'est pas du tout un animal raisonnable, je pense qu'il faudra beaucoup de patience pour voir s'améliorer les choses. Et puis, nous ne sommes plus à l'abri des catastrophes, nous les nantis. Pensons aux malheureux habitants de Fukushima qui ne pourront pas échapper à un avenir en raison de la contamination de la région. Cette année, des chevaux et des sangliers sont morts sur des plages françaises, victimes des proliférations d'algues consécutives à nos inconséquences. Demain ce seront des hommes. Sans compter ce qu nous ingurgitons chaque jour comme molécules dangereuses à long terme, et dont les risques n'émeuvent pas les apprentis sorciers qui les commercialisent. Il ne s'agit pas de revenir à la bougie et au moyen âge, comme l'agitent les partisans du tout consommer. Il s'agit dépargner notre terre nourricière qui, si nous continuons, ne pourra plus assurer notre survie et nous serons condamnés à disparaître. Mais quoi d'étonnant? Nous ne somme qu'un maillon infime de la grande évolution générale, qui a vu régner, puis disparaître, des millions d'espèces dont le règne semblait assuré pour une éternité. Peut être que dans notre comportement, nous ne faisons qu'obéir à cette grande poussée de l'évolution qui a décidé que le règne de l'homme devait bientôt se terminer. La Terre a encore, normalement, quelques milliards d'années à vivre avant que le soleil agonisant ne signe sa fin. Il serait présomptueux, vraiment, de croire que nous durerons aussi longtemps..... Il n'empêche que malgré tout cela, la solidarité reste le seul moyen à terme pour l'homme de prolonger sa présence sur la terre, associée à une extrême parcimonie et une rigueur dans la consommation de nos matières premières. merci pour ce beau texte. 

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