Un endroit hors de la civilisation, sur un coin de terre où la nature sauvage se couvre de beauté, d’éclat, de bonheur. Des forêts, des lacs à en perdre le sens du temps. Ils s’étendent là sur des espaces vierges, intactes d’innocence.
Au petit matin, une brume légère couvre la terre, le soleil apparaît timide et les nuages se cachent pour ne pas léser le bleu du ciel. Un joli lac est posé dans ce coin de paradis, couvert de bleu, entouré de roseaux se balançant au gré du vent. Il vit là, immuable. Le léger bruit de son remous ne dérange personne. Il est seul, un peu isolé dans cette grande forêt protectrice.
Les voisins, des batraciens lui rendent visite et en font leur nid quand le besoin s’en fait sentir. Alors le destin se met en mouvement et le bruit de la vie renaît. A la saison des amours, ils sont parfois des centaines à revenir chez lui et lui rendre la vie qu’il leur a donnée. Dans son sein vivent des poissons centenaires qui disparaissent aux moindres bruits, aux moindres murmures..
Souvent des oiseaux s’arrêtent le temps de reprendre leur souffle avant de continuer leurs migrations. Des oies sauvages, des canards, des cols verts, des hérons, tous sur le chemin de l’exode annuel, salvateur, cherchant la chaleur des pays lointains et fuyant le froid et le gel.
Chaque année, à la même époque se posent des cygnes migrateurs, gracieux, augustes, par leur éclat parfait, d’un blanc immaculé, irréprochable. La beauté éthérée à l’état angélique. Seul le bec, les yeux, les pattes montrent un peu de couleur. La grâce dans ce qu’elle a de plus beau. Leur long cou à la fois souple et royal tient la tête à bonne distance et le regard fier, il regarde au loin, se déplaçant chaque jour comme dans une chorégraphie digne de Tchaikovsky...
Le soir, à la tombée de la nuit, le soleil couchant couvre le petit lac d’un voile scintillant d’étoiles, faisant balancer les ombres, les silhouettes. Dans la pénombre de la nuit dansent les ballerines blanches des ballets de jadis.
Cette année encore, un couple royal de cygne majestueux vient se poser sur ce coin de lac gardé par les dieux. Ils ne sont plus jeunes, les années sont là, déjà lourdes à porter. Leurs regards s’associent encore, facilement. Ils vivent ensemble pour la vie. Un trait de caractère à cette espèce d’oiseau monogame qui trace ainsi son chemin.
La vie en communauté se veut discrète, réservée. Le cygne est un animal silencieux et sa vie est faite d’herbage, de petite pêche et de voyages. Il émet un cri dans une et seule circonstance. Un cri, un chant qui lui vient de la nuit des temps. Certain l’appelle le chant du cygne.
L’histoire se grave dans les mémoires comme un avertissement, comme une affirmation que la vie est toujours un mystère ainsi que l’amour.
Après une vie bien remplie, le grand cygne se meurt. Dans un cri venant de ses entrailles, il rompt le silence et se met à chanter. On peut l’entendre à des kilomètres. Un son poignant comme celui d’un cor, d’un instrument symphonique. Il entame alors une lamentation plaintive, un hymne encore plein de ferveur et de tristesse. Sa compagne le regard, le cou baissé, les yeux dans l’eau. Les autres membres du clan se sont éloignés. A l’écart, ils l’observent sans bouger, sans se déplacer.
Sa compagne de vie sait que le dernier rite commencé ici sera funeste. Un rite à la vie, à la mort. Le son de ce chant devient pénétrant, cruel, inéluctable même. Il perce les oreilles et les cœurs.
Dans cet étrange chant d’adieu à la vie, le cygne meurt et rejoint son étoile. Sa fidèle compagne le regarde une dernière fois et s’éloigne des lieux, laissant le corps de son ami seul et à la dérive pour disparaitre à jamais. Elle-même à sa part de tradition dans cette mort, et à son tour, après avoir jeté un dernier regard derrière elle, prend son envol et quitte le lac maudit. Le cœur triste, elle part et se sépare de sa communauté pour toujours. L’histoire le veut ainsi. Elle ne reviendra plus.
Commentaires
Merci Marcelle pour ton commentaire. Le ballet de la mort du cygne est extraordinaire. Je suis allée le voir à Bruxelles avec les danseurs du Bolchoï. C'était magnifique
Amicalement
Josette
J'ai pensé à ce merveilleux ballet et la musique prodigieuse qui l'accompagne ...
C'est très beau Josette, je suis émue par ce conte poétique.
Amicalement
Marcelle
Merci Nicole . En effet , le monde des oiseaux est parfois étonnant et peut donner des leçons aux hommes..
Amicalement
Josette
Merci Sandra de ton commentaire . Belle journée ensoleillée
Josette
Bel hommage au monde des oiseaux et des eaux ! Bravo Josette ! Cordialement, Nicole
Conté ou dansé le chant du cygne ou la mort du cygne nous donne des frissons. Merci de ton commentaire Rolande.
Bonne soirée
Josette
Le dernier chant du cygne a toujours hanté notre imaginaire et, dans cette jolie parabole, il prend un sens tout particulier.
Le lac des Cygnes .... qui n'en a jamais rêvé de voir revoir et rerevoir ce magnifique chef d'oeuvre.
Bonne soirée et merci. Rolande.
Merci Jean Daniel pour le partage
Amicalement Josette
C'est vraiment très humain et la parabole est très subtile. Cela fait mouche!
Bonjour Jacqueline. La nature est remplie de petits trésors sous la forme d'animaux, des plantes, de tout ce qui vit. Et c'est toujours sublime de s'en intéresser .
Merci de votre lecture
Amitiés
Josette