La musique rock pour les battements du cœur et changements de scène, des comédiens lumineux pour l’histoire, où soufflent le rêve… et l’horreur
Encore jusqu’au 6 mars, au théâtre des Galeries. La pièce « Lady Camilla » de Pascal Vrebos retrace avec brio l’histoire très véridique qui se joue dans les coulisses du célèbre ménage à trois de Buckingham : le prince Charles, sa maîtresse envahissante, Camilla et sa jeune femme amoureuse, Diana.
Porteuse de bonnes et mauvaises nouvelles, il y a l’oreille gourmande du majordome, porteur de théières fumantes dans tous les coins du palais. Attentif à tout bruit qui court, il note, photographie et enregistre, en vue d’un scoop planétaire qui le rendra multimillionnaire. Il rêve de s’acheter une île grecque et prendra à son service, domestiques et majordome à son tour! La reine, toujours de glace, préfère cyniquement ses chiens. La jeune première, Diana, éduquée par Barbara Cartland, déçue dès les premiers mois de la cour fort peu entreprenante que lui concède son prince, est vite effarouchée devant les principes obsolètes qu'on lui impose et devra revisiter sa mythologie amoureuse. Mais le rêve d’être princesse dépasse tous les scénarios de Barbara Cartland ! Elle ira même chasser s’il le faut ! Apprendra à se former au langage compassé et aux gestes stéréotypés d’une future reine. Le port du sac, c’est quelque chose ! Le prince, c’est autre chose : gauche, emprunté, raide, coureur de jupons perfide, il passe sa vie à mentir royalement et à s’occuper des plantes de son orangerie. La future princesse deviendra vite l’idole du peuple. Et la chronique d’une mort annoncée de se profiler sur l’horizon bleu, rouge et banc du vaudeville royal. L’atmosphère d’annus horribilis est très bien rendue, l’humour est grinçant à souhait, les morceaux d’angélisme public de lady D et ses colères homériques sont absolument délicieux.
La plastique particulière des très beaux tableaux vivants - les personnages qui posent dans tous les coins du plateau- reste longtemps dans l’esprit, ce sont presque des scènes cinématographiques. Ce qui s’y dit est pure hypocrisie, ou pure violence. Et l’ombre de Shakespeare n’arrête pas de chuchoter, « Hamlet, lady Macbeth, Ophélie … ». Quelle persévérance dans les us et coutumes du royaume ! L’interprétation des rôles féminins est particulièrement croustillante, l’ineffable James est à croquer. Mais tout doit rentrer dans l’ordre, a dit la reine, et la mâchoire du piège se refermera pour faire place nette. La monarchie a quelque chose d’inébranlable, et d’indestructible en Grande-Bretagne ! Pas une minute d’ennui, lors de ce spectacle extrêmement rondement mené !
Avec Stéphanie Van Vyve, Nicolas Buysse, Ingrid Heiderscheidt, Freddy Sicx et Louise Rocco. Mise en scène : Fabrice Gardin Décors : Anne Guilleray / Costumes : Françoise Van Thienen
Location : 02/ 512 04 07
Commentaires
extrait de la critique de Catherine Makereel, Le Soir 21 /02/ 2011
Le minimalisme du décor d'abord – quelques chaises cossues pour évoquer les palais ou deux rambardes pour convoquer une croisière sur le yacht royal – suggère finement le grand vide qui caractérise les personnages.Ils ont tout mais manquent de l'essentiel : l'amour d'un mari pour Diana, l'amour d'une mère pour Charles. A ce propos, Louise Rocco est épatante en Elizabeth. Plus forte qu'Helen Mirren dans The Queen, la comédienne est une reine formidablement guindée, insensible et froide. De son côté, Stéphanie Van Vyve, peu aidée par une perruque caricaturale, apporte aussi un souffle vivifiant en Diana, tourbillon de désirs et de nerfs.
Par contre Nicolas Buysse (un Charles presque autiste) et Ingrid Heiderscheidt (une Camilla frigide) nous ont moins convaincus dans un jeu censé évoquer des pantins sans cœur mais paraissant juste artificiels. La touche comique viendra du majordome (le pince-sans-rire Freddy Sicx), à la fois narrateur, serviteur et voyeur de cette histoire qui se laisse regarder grâce à son rythme vif mais ne fait certainement pas avancer le monde.