Les grèves sont devenues un fait du quotidien dans beaucoup de pays du monde et les grévistes appartiennent à tous les secteurs de l’économie et à toutes les catégories professionnelles. Les grèves ont pour but la revendication de meilleurs salaires et de meilleures conditions de vie, et il est intéressant de savoir quels furent les plus anciens conflits entre patrons et travailleurs dont l'histoire ait gardé la trace. Ils eurent lieu en Égypte ancienne.
La toute première grève dont il y a mémoire historique eut lieu lors de la construction de la Grande Pyramide de Chéops (environ en l’an 1580 avant notre ère). D’après l’historien grec Hérodote (Hérodote, Historia, Livre II, 124-126), les artisans qui construisaient les pyramides recevaient une partie de leur salaire en ail et aussi une ration quotidienne de la plante, afin d’améliorer leur performance physique et de faire face aux maladies, car l’ail est depuis l’Antiquité réputé et cultivé pour ses vertus médicinales. À cause de diminution puis de suppression des rations quotidiennes d’ail, ils arrêtèrent de travailler.
Une autre action gréviste considérée par certains comme étant la première de ce genre eut lieu pendant la 29e année de règne de Ramsès III (environ en l’an 1152 avant notre ère), le dernier grand pharaon du Nouvel Empire, et cet épisode est mentionné dans le Papyrus de la Grève qui se trouve au Musée Égyptien de Turin, en Italie. Selon ce document, les artisans chargés de la construction du tombeau du pharaon protestèrent contre le retard de ravitaillement de certains produits – notamment l’huile et la farine – en faisant un arrêt de travail, puis en s’adressant au vizir (l’équivalent du premier ministre de nos jours) pour lui demander de présenter leur revendication auprès du pharaon. Une fois la situation résolue, les ouvriers reprirent le travail. Il peut paraître étrange à nos yeux d’appeler à la grève à cause de produits tels que l’huile et la farine, mais l’huile protégeait leur peau du climat agressif du désert, et la farine était l’ingrédient principal des différentes sortes de pain qui constituaient la base de leur alimentation.
Les raisons pour lesquelles les artisans ne recevaient pas leurs rations habituelles ne sont pas claires, il est toutefois connu que la rareté des produits alimentaires était à l’époque une conséquence de l’énorme corruption de la classe dirigeante. Les ouvriers étaient sensés recevoir mensuellement une certaine quantité de céréales, mais le texte du document laisse comprendre que cette ration subit fréquemment des retards pendant le règne de Ramsès III.
Commentaires
Merci Michel pour ce renseignement précieux. Je suis férue d'Histoire.
Merci pour ce joli billet. Le papyrus de Turin décrit également les mines de Ouadi Hamâmât. Reste gravé dans la mine de Dagbag le nom de Renni, le premier mineur dont l'histoire est conservé le souvenir.