C’est une nouvelle de Vercors publiée en 1943. "Qui fut coupable envers Thomas?". Le mensonge, répond Vercors, une atroce méprise.
Première marche à l' étoile, sous la bannière de la foi et de la lumière. Thomas Muritz naît en 1866 d'une famille de parpaillots vosgiens émigrée à Presbourg, famille d' armateurs cossus, installée. Mais Thomas est amoureux de la France; il lit, pêle-mêle, Hugo, Dumas, Balzac, Sue; amoureux de la France, de la Liberté, de la Justice. Le suicide de son cousin Latzi, fils d'une juive, précipite son destin. Thomas sacrifie bonheur et repos, la chaleur d'un foyer, un avenir facile et sûr. L' enfance est terriblement sérieuse. L'aube vit Thomas sur la route, par-delà le Danube, qui mène à Vienne, qui mène à Paris. Il y parvint; il passa la frontière à Delle, le jour de la Saint-Jean. A l'aubergiste qui l'interroge: "Tu as fichu le camp", il répond "La France est un pays libre, citoyen". Et l'aubergiste, le "brave petit rouquin", ému, lui ouvre les portes de la France: "Tu es l'un des nôtres."
Seconde marche à l'étoile, mais cette fois-ci sous le règne des avares. Thomas, français, doit aller jusqu'au bout de son destin. André son fils, le plus jeune officier de France en 1914 ne tarde pas à devenir son plus jeune mort. Mais Thomas n'oublie pas le visage de son aubergiste roux: "les rouquins m'ont toujours porté bonheur", la France les lui déléguait en ambassadeurs. Le temps passe, une autre guerre. C'est l' armistice. L'étoile n'est plus au bout de la route, mais sur la poitrine de Thomas qui ne renie pas une mère juive. La France délègue son dernier ambassadeur, un dernier petit rouquin, gendarme cette fois-ci, qui le mène vers le peloton d'exécution. "Il regardait le gendarme, le rouquin, avec des yeux dilatés, et il bredouillait sans fin: non, non." Toute la détresse, le désespoir, l'horreur, l' agonie de l' amour assassiné. Vercors clôt sa nouvelle sur le regard de Thomas, ce bref regard posé sur le visage du mensonge, ce visage que nous portons tous en nous.
Commentaires