Pour la saint-Valentin, offrez-lui ce spectacle magnifique !
René se souvient de ses vacances chez sa grand-mère à Soignies, berceau de la pierre bleue. « Je joue avec une petite fille dont j’ignorais le nom. » La grille du cimetière où ils jouaient se ferme. Elle a disparu.
Voici un huis clos qui évoque de façon ludique la vie de René Magritte, l’homme au chapeau boule, vue par Georgette, sa femme, sa muse chérie, son exclusive égérie, sa complice éternelle, son unique modèle...
Magritte peint dans la vie mais ne peint pas dans la pièce. La pièce c’est « la » pièce. La pièce où ils vivent, dans chacun des lieux où ils ont vécu de leur premier logement en passant par Paris, jusqu’à la rue des Mimosas, près du parc Josaphat, où Magritte s'éteindra à 69 ans, le 15 août 1967 à 15 heures. Voici des tableaux vivant la banalité de la vie de tout couple, et pourtant une alchimie particulière, un mystère extraordinaire. Surréaliste ? Aucune figuration des peintures de Magritte: sa vie de peintre est entre parenthèses. Avec des comédiens de 2011, ce couple revisité, est vraiment touchant. Cela a quelque chose de jeune, de dynamique, d’innovateur, d’éternel, cela a le charme de Roméo et Juliette. Dans l'air, il y a l'énigme de tous les couples qui durent.
L’image du père fait ombre, elle se veut prophétique comme une scène d’Hamlet ou de Don Juan, elle représente le bourgeois de 19e siècle engoncé dans ses certitudes, muré derrière ses habits de circonstance, avare de paroles. Léopold Magritte, « prohibant le sabir wallon dans sa maison, marchand tailleur et affairiste, brade, vend, écoule. Coureur de jupons, frimant et plastronnant, il lui souffle : «M’as-tu vu bedonnant, d’un chapeau boule coiffé, cravaté, pocheté, costumé, tel un bourgeois sapé, tu me ressembleras, René !’ Cet homme à femmes, le mari de sa mère qui se suicide dans la Sambre, inondera le fils de sa culpabilité. A l’école, Magritte se décrit comme le fils de la noyée. « J’avais 14 ans, elle en avait 40.» Malheur indicible qui le corsettera à vie. Georgette : « De la perte cruelle, René se remet à peine. Je suis sa petite mère, Il est tout à moi ! »
La mise-en-bouche est de Patrick Rougiers : les mots dansent dans le tableau du théâtre. L’écriture rimée, parsemée vocables belgo-belges comme des touches de peinture, donnent une forme fantaisiste à la pièce. L’humour fait loi. Georgette: « J’ai fait une fausse couche, ce fut une froide douche. » Assonances, allitérations, associations musicales ou rythmiques, tout cela laisse un magnifique espace pour le jeu des postures, des regards, le brillant du rouge à lèvres Diorescent de Georgette assorti à l’ourlet de sa robe mobile, le magnifique film et les arrêts sur image qui encadrent les personnages. La mise en scène ciselée de Monique Lenoble met carrément en scène toute la lumière et les couleurs de Magritte, ce sont autant de moments de beauté, qui donnent de l’appétit, du plaisir artistique. Cette comédie picturale diffuse un plaisir rare. Aurore Rougiers et Baptiste Blampain sont éblouissants. Le quatuor de comédiens nous livre une musique qui n’est pas une musique. Ne vous en privez pas !
Du 27 janvier au 27 février 2011, le Poème 2 vous propose:
Commentaires
Dans La Libre Belgique 29/30 janvier 2011
Georgette et René, portrait vivant
Camille Perotti
Mis en ligne le 29/01/2011
Sept scènes, comme sept tableaux, composent la pièce de Patrick Roegiers donnant vie à Georgette et René Magritte. L’auteur, essayiste et dramaturge belge vivant à Paris, s’est toujours intéressé à ce peintre surréaliste mystérieux et lui a consacré une rétrospective photographique présentée en 2005 à Bruxelles et à Paris. Avec "La femme de l’homme au chapeau boule", il réhabilite le rôle de la femme de Magritte, la muse, l’épouse avec qui le peintre de génie a passé sa vie et dédie le rôle à sa fille, Aurore Roegiers, qui interprète un de ses premiers rôles d’envergure au théâtre.
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