Le bonheur, tout le monde en rêve. Les marchands de bonnes affaires ont fondu dessus, s'en sont emparés, en ont fait un produit de consommation qu'ils vendent quotidiennement contre paiement. Le bonheur est donc devenu une monnaie d'échange confondu avec le plaisir éphémère. Confusion évidemment entre la jouissance procurée par l'acquisition d'un bel objet et un état permanent où l'objet n'a plus sa place., où il ne procure plus de jouissance précisément. Le bonheur ressemble alors à un nuage léger, un nuage de vacances, affranchi des désirs qui ne cessent de frapper à la porte, un état de pleine conscience où chaque instant est à lui-même le cadeau essentiel sans nul besoin d'autre cadeau. La clef du bonheur réside donc dans la plénitude de l'instant dépourvue de toute pensée, de tout jugement, de tout rapport au passé, de toute projection illusoire.. Ainsi cette clef joyeusement et précieusement enveloppée de vacuité ouvrira la porte de ce bonheur tant désiré.
Pourquoi la nature a t-elle tant horreur du vide qu'il faille la suivre dans son raisonnement et penser que le plein de choses soit le secours à toutes nos souffrances ? L'expérience que l'on exerce à se détacher de tout conduit au bonheur, encore faut-il accepter de suivre ce chemin sans la peur ou la frustration d'abandonner tout les construits, les vécus, les habitudes, les "bricoles " inutiles et paradoxalement les soucis mortifères et nostalgiques ayant inévitablement contribué à le polluer. Se défaire des encombrants comme ceux de notre maison et veiller que ce qui y entre soit à tout instant la bonne clef ! Il s'agit donc bien de parvenir à la délivrance par le discernement et la circonspection. Dire paraît facile dirons nous, faire demande beaucoup de temps comme de bâtir un exercice devant conduire à une connaissance nouvelle. Heureux est possible, c'est une quête où la foi prend toute sa place au sein de nos multiples possibilités.
Pensée du jour 02/07/2018
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"Rien n'est précaire comme vivre
Rien comme être n'est passager
C'est un peu fondre comme le givre
Et pour le vent être léger
J'arrive où je suis étranger
Un jour tu passes la frontière
D'où viens-tu mais où vas-tu donc
Demain qu'importe et qu'importe hier
Le coeur change avec le chardon
Tout est sans rime ni pardon
Passe ton doigt là sur ta tempe
Touche l'enfance de tes yeux
Mieux vaut laisser basses les lampes
La nuit plus longtemps nous va mieux
C'est le grand jour qui se fait vieux
Les arbres sont beaux en automne
Mais l'enfant qu'est-il devenu
Je me regarde et je m'étonne
De ce voyageur inconnu
De son visage et ses pieds nus
Peu a peu tu te fais silence
Mais pas assez vite pourtant
Pour ne sentir ta dissemblance
Et sur le toi-même d'antan
Tomber la poussière du temps
C'est long vieillir au bout du compte
Le sable en fuit entre nos doigts
C'est comme une eau froide qui monte
C'est comme une honte qui croît
Un cuir à crier qu'on corroie
C'est long d'être un homme une chose
C'est long de renoncer à tout
Et sens-tu les métamorphoses
Qui se font au-dedans de nous
Lentement plier nos genoux
Ô mer amère ô mer profonde
Quelle est l'heure de tes marées
Combien faut-il d'années-secondes
À l'homme pour l'homme abjurer
Pourquoi pourquoi ces simagrées
Rien n'est précaire comme vivre
Rien comme être n'est passager
C'est un peu fondre comme le givre
Et pour le vent être léger
J'arrive où je suis étranger."
Louis Aragon