Statistiques google analytics du réseau arts et lettres: 8 403 746 pages vues depuis Le 10 octobre 2009

Dans « Le Printemps noir » (1946), receuil de nouvelles de Henry Miller, la première nouvelle -Le 14e district"- donne le ton de tout le livre. Vingt-sept pages faites avec rien (le souvenir des gamins du 14e disctict), mais un rien essentiel. "Le grand changement. Dans notre jeunesse nous étions entiers et la terreur et la douleur du monde nous perçaient de part en part. Il n'y avait pas de séparation aiguë entre la joie et le chagrin, ils se fondaient en un tout comme notre vie éveillée se fonde avec le rêve et le sommeil. On se levait entier le matin et le soir on plongeait dans un océan, complètement englouti, accroché aux étoiles et à la fièvre du jour écoulé." La révolte de Miller sera, comme celle de Rimbaud, une révolte logique commandée par cette double constatation: avant c'était la vie, la vraie vie pleine et entière, sans compromis, sans limite et maintenant il n'y a plus rien, c'est-à-dire que "le monde est devenu un labyrinthe mystique, érigé au cours de la nuit par une nuée de menuisiers. Tout est mensonge, tout est truqué, Carton pâte." Tout se passe donc somme si, soudain, toutes les perspectives avaient été renversées: "Puis vient un temps où soudain tout paraît renversé. On vit dans l' esprit, dans les idées, par fragments. Nous ne buvons plus à la farouche musique extérieure des rues." L'exigence qui commande la plume de l'écrivain est, à la lettre, vitale. C'est tout ou rien. Et il est bien évident que pour restituer ce tout (ce monde sauvage) tous les moyens sont bons: "Je cherche tous les moyens d'expression possibles et imaginables et c'est comme un bégaiement divin. Je suis ébloui par le grandiose écroulement du monde." C'est cette exigence d'une insoutenable pureté -ou d'une insoutenable impureté- que l'on retrouve dans toutes les nouvelles de "Printemps noir", abordée sous tous les angles, celui de la folie ("Je porte un ange en filigrane"), du rêve fantasmatique ("Plongé dans la vie nocturne"), du souvenir autobiographique ("La boutique du tailleur") ou de l' humour dans la nouvelle intitulée "Un samedi après-midi" qui est une incomparable dissertation sur les pissotières.

Envoyez-moi un e-mail lorsque des commentaires sont laissés –

Vous devez être membre de Arts et Lettres pour ajouter des commentaires !

Join Arts et Lettres

Commentaires

  • « La joie », « le chagrin », «le rêve », et «le sommeil ». Et pour finir, voilà « un océan complètement englouti », un vrai coquetel de « rêves » presque épineux ! Ou à vrai dire, sont épineux dans le vrai sens. Et c’est vraiment « Le Printemps noir » !
    Et dire « On se levait entier le matin » ! Alors là, c’est rassurant, et donne un grand soulagement !
    Et dire encore « on vit dans l’esprit, dans les idées, par fragments », alors là, c’est la belle fuite !
    Oui, c’est vrai, c’est la belle fuite, puisque elle a donnée naissance à un chef-œuvre inestimable, « Le Printemps noir », instructive et riche en visions métaphoriquement luxueuses. (D’après les parties de textes situées dans cette belle présentation).
    Un grand merci s’impose à Mr Robert Paul de nous avoir présenté ce bel chef-œuvre, avec beaucoup d’élégance, et avec un grand humour et beaucoup de poésie.
    Cette œuvre est vraiment remarquable, et qu’il faut lire tout entier.
    Pour moi c’est une très belle découverte. Et aussi, c’est un très beau cadeau pour moi, pour tous les amis de notre réseau bien aimé « Arts et Lettres », et pour tous ses visiteurs.
    Merci encore.

    Amicalement,

    Abdeslem Sbibi
    Le 16-09-2010
This reply was deleted.

Sujets de blog par étiquettes

  • de (143)

Archives mensuelles