Mardi 28 mai 2019: les Rencontres Littéraires de l'Espace Art Gallery nous emmènent ce soir en voyage "aux bords des eaux" d'écrivains dont les liens avec l'élément aqueux sont étroits, intimes: symbiose, attachement, aquarelles, décor d'enfance, l'eau aux coeurs...
Cinéaste, metteuse en scène, auteure de courts-métrages, animatrice et formatrice en ateliers d'écriture, écrivaine de "la mise en mots de ce que l'on porte en soi", Frédérique Dolphijn nous conte ce soir "Là où l'eau touche l'âme", histoire née au bord d'une rivière "alors que regardant l'eau qui dévalait, je me disais qu'elle n'était jamais la même". Un roman intense nous relatant les relations et les non dits d'un groupe de femmes qui a choisi de s'isoler dans un chalet afin de vivre la pêche à la mouche.
Auteur de récits et de nouvelles, peintre et enseignant (les mathématiques et les sciences), Michel Van den Bogaerde nous présente quant à lui "La Promenade d'Ostende", un ouvrage littéraire constitué de nouvelles qui en fait forme un tout. Déclaration d'amour, absence, stupéfaction, une voix parlant pour deux, la métrique des pas, le poids des lettres, les traces matérielles du temps écoulé, les frontières du dialogue, "tout ce qu'une vie n'est pas, parce qu'on a pris d'autres routes", les chemins suivis par l'auteur nous surprennent, nous interpellent.
Homme de théâtre, poète, écrivain, chanteur et parolier du groupe musical Géminides, Aurélien Dony a choisi de nous toucher avec "Le Coeur en Lesse"; Dinant, ses Copères, sa Collégiale, sa citadelle et les alentours nous sont racontés au travers d'un recueil-hommage aux arbres, aux oiseaux, aux amis... L'enfance d'un côté (Anseremme), l'adolescence de l'autre (Dinant),et une infinité d'aventures apparemment banales qui ont façonné son coeur...
Jovial et d'une belle spontanéité, Michel Van den Bogaerde nous explique qu'en fait tout est dit avec le premier récit. Le présent, les souvenirs, de singuliers fantasmes, des méditations à l'aspect arithmétique parcourent ce récit d'un amour manqué, non exprimé mais imprégné d'une poésie qui touche le coeur et l'âme. Son oeuvre est parfaitement construite bien que largement élaguée par son concepteur; s'y glisse notamment une interrogation sur l'art. Un questionnement à découvrir.
Expressive et d'une grande aisance, Frédérique Dolphijn place la rivière au coeur de son histoire: elle traverse ce roman à la fois poétique et polyphonique construit en trois journées, de nombreuses femmes émaillant son récit telles que Olivia, la leader, une ambitieuse, Georgia l'artisane, femme plus effacée mais généreuse, Fanny et bien d'autres, un drame se préparant, que le lecteur ne manquera pas de percevoir. Au départ cela aurait dû être un long métrage, un chat mort jouant également un rôle non négligeable dans le roman où se côtoient pour le meilleur narration, descriptions et dialogues, le tout imprégné ici aussi de poésie et les distances prises par rapport aux personnages sont variables.
Volubile et souriant, souvent direct, Aurélien Dony nous offre un recueil de nouvelles d'une grande sensibilité, la question de l'intégration abordée, de purs instantanés d'existence le parcourant. Auteur "de la nature", Aurélien Dony nous plonge au coeur de l'identité wallonne, amitié et transmission faisant notamment partie des mots-clés de son ouvrage. Le tragique est présent, les paramètres sociaux en cause. Animateur des Rencontres Littéraires, Gérard Adam, pensif, nous évoque subitement sa première rencontre avec l'auteur, lorsque celui-ci n'avait que 22 ans, à Namur lors d'un Salon de Poésie. Un singulier souvenir.
Souvent, au cours de ces Soirées à l'Espace Art Gallery, les souvenirs font ou refont surface, surgissant des eaux vives et profondes des auteurs en présentation, des eaux point dormantes. Du choc des idées jaillit inéluctablement la mémoire du passé, du vécu.
Et, en conclusion, il nous faut absolument mentionner l'implication et l'investissement indéniable de Nicolas Coeck, comédien, qui, chaque mois, nous lit au moins deux extraits de chaque livre présenté, installé à la même table et non loin des écrivains. Une soirée inspirante? Aux eaux de vie!
Commentaires
Michel Van den Bogaerde
Frédérique Dolphyn
Aurélien Dony
Nicolas Coeck: une lecture lors des rencontres littéraires de Bruxelles
Pour Michel,
Avec Michelle, les paroles de la chanson de Jacques Brel: "Une Ostendaise" peuvent rythmer les frontières des dialogues par deux sortes de temps.
Comment découvrir les questionnements si ce n'est par la lecture...?
J'ajoute quelques lignes à ce thème "au bord des eaux" :
Je veux regarder la Sambre du haut du pont . Je sais que l'endroit est rarement fréquenté et le soir encore moins. Trois quarts de lune jettent des éclats de lumière sur l'eau. Je regarde comme si, tout à coup, allait surgir le signe révélateur d'un mystère enfoui dans la profondeur de la rivière.
Extrait de ma nouvelle ""L'homme sur le pont"