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Faire part burlesque voué à « commémorer » une certaine date fatidique 

En cette veille d’éclosion, d’incarnation charnelle de figures gémellaires venues du néant

sous la constellation de Castor et Pollux, ces Dioscures énigmatiques,

 et ce, au deuxième jour de leur avènement…

 

 

Bien que nos renseignements soient faux,

Nous ne les garantissons pas.

Érik Satie

 

 

 

                           Figurez-vous qu’à l’heure où sonne la célébration de soi, où il serait de bon ton que soit révéré de manière officieuse ou fastueuse, s’est selon, un certain couple émérite descendant de nos lointains parents Adam et Ève, nous, tandem indéfectible et indissoluble constitué de Félicité et Prudence, à la fois nonne et bacchante, sœurs jumelles nées sous le signe des gémeaux, comme l’ont fredonné les deux héroïnes des Demoiselles… de Jacques Demy, décidâmes d’accorder à l’unisson nos violons, en empruntant le mode majeur, faisant en prime, vibrer nos cœurs en forme de fraise vilmorinesques [1], nos splendides organes de sosies au registre de contralto colorature dotés d’un large ambitus, afin de saluer l’exploit commun des tendres tourtereaux auquel il s’avérerait que nous devons le souffle, si nous en croyons notre livret de famille établi par les instances suprêmes et assurément, les dires des époux !

 

                         Sachez, chers amis, que du repos dominical consacré à louer le Seigneur, jusqu’au dies Saturni ou Sambati dies, comme il vous plaira, venant clore notre semainier, nous ne saurions faillir à la tâche, puisque sans relâche, nous rendons gloire à ceux qui nous ont conçu avec ferveur, dans un élan d’amour le plus responsable, le plus hautement préparé, nous ont-ils toujours certifié, leur dédiant en conséquence, maintes litanies, maints cantiques spirituels psalmodiés en latin, depuis notre prie-Dieu gothique sculpté en forme d’ogive ayant appartenu à la reine Blanche de Castille, le tenant elle-même de sa grand-maman, la souveraine Aliénor d’Aquitaine, petite-fille du premier poète d’Occitanie, le troubadour, Guillaume IX, comte de Poitiers, mais ceci est une autre histoire, que nous nous garderons de narrer présentement…

 

                          Hier encore, nous ne manquâmes point de remercier par une génuflexion des plus cérémonieuses, des plus dévotes, nos père et mère, qui, dans un lointain, lointain passé, déjà historique, que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaitre, se sont alliés avec la bénédiction éclatante de nos augustes aïeux, bancs publics de l’épithalame à l’appui succédant aux accordailles, béats et confits de gratitude envers dame Fortune, la remerciant chaque heure que Dieu fasse, pour leur avoir souri et qu’ainsi, la lignée soit enfin perpétuée, puisque les malheureux étaient victimes de la malédiction de sterilas plantas touchant les douze autres petiots de la maisonnée maternelle, le treizième poupon quant à lui, étant chargé de la redoutable mission de la survie de la dynastie, pour peu que son amoureux se montre à la hauteur de la situation et le délivre du terrible sort jeté sur la parentèle par une rivale, ennemie jurée de la trisaïeule guérisseuse morvandiote, à l’appendice tortueux de Carabosse, mais douée d’imposants pouvoirs surnaturels, à tel point que l’un des membres de sa géniture qui prétendait se divertir en allant guincher avec, suspendue à son bras, une belle de nuit captive, en fut pour ses frais de toilette de gentilhomme campagnard, matériellement inquiété par des hallucinations fauvesques, revêtant les contours d’une ribambelle de… matous en robe d’ébène, se jetant littéralement entre ses jambes, pour l’empêcher d’aligner trois pas en direction du bal, où sa Dulcinée, cotillon court et souliers plats l’attendait au son des flonflons de l’orchestre de babalaïkas!!!

 

                          Comme l’aurait dit un Honfleurais truculent, de la veine satiste, le sieur Alphonse Allais :

                          Saint Bol, priez pour nous !

 

                           Mais foin des sortilèges, de la magie noire caractéristique du Berry profond de la Mare au Diable sandienne ! Reconnaissons loyalement, sans l’once d’une vanité, que nos fabricateurs, jardiniers chevronnés ont magistralement œuvré, n’ayons pas peur de l’admettre, se montrant en tous points dignes de la branche de l’arbre généalogique de leurs blasons respectifs, afin que leur fécondité soit couronnée de succès, ne lésinant en rien sur leurs efforts dans le dessein louable que la graine tant désirée lève de ce terreau prospère, soit que leur double chef-d’œuvre voit le jour, en provenance d’une île heureuse à la Chabrier[2], contrée pour lors inconnue des simples mortels, non sans avoir au préalable sacrifiés à la sacro-sainte institution du mariage, mœurs de l’époque oblige, convolant en justes noces, sous la condition expresse et incontournable de bénéficier de la protection de sa grâce l’Archidiacre de Macédoine,[3] promis au titre d’évêque du Monomotapa après traduction de son bréviaire en langue zoulou, éminence grise de Feu la Mère de Madame[4] dite la tante aux cent millions, riche héritière d’une tribu de Rockefeller de province, chercheurs d’or noir ayant assis la fondation de leur patrimoine aux confins de Knokke-le-Zoute, depuis leur déracinement de Vesoul et qui, suite à l’exploitation de cette précieuse mine, virent la vie en rose, de générations en générations...avant que le dernier descendant de la race, croque intérêt et capital à la roulette russe d’un casino pour les beaux yeux de la Dame Monte-Carlo*



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Une partie de la dynastie de la Tante aux cent millions en compagnie du général Boum

et du futur grand Archidiacre de Macédoine, alors simple confesseur de Crevant aux fins fonds de la Creuse

Tableau de Fernando Botéro, 1967

 

                          Alors, nous interrogerez-vous, soucieux de faire montre d’une courtoisie de fins diplomates ou de réel intérêt à l’endroit de notre duo de donzelles un doigt baroques, vous ne pouvez que jubiler de votre création, fruit des Amours de vos chers parents et devez véritablement être comblées de votre séjour terrestre ? Une telle harmonie semble se dégager de vos personnalités gémellaires, que nous présageons combien vous vous complétez, à quel point vous unissez vos rimes masculines à vos rimes féminines, et lorsque Prudence est trop timorée, Félicité doit l’exhorter à sortir de sa coquille et vice versa ; si cette dernière est un chouya exaltée, extériorisant ses sentiments à un rythme effréné, son alter ego en plus réservé, la sagesse incarnée, l’incite à embrasser davantage de modération. En vertu de quoi, poursuivrez-vous, pétris de bonnes intentions, nous sommes intimement persuadés que vous saluez à chaque nouvelle aurore, l’immense privilège et agrément d’avoir rejoint cette fraternelle humanité !

 

                          Que nenni ! Détrompez-vous ! Oui, désolées de vous décevoir, mais c’est que nous attendons toujours l’envoi d’un carton d’invitation, et bien que n’étant guère protocolaires, en accord de l’aphorisme du philosophe Lessing, qui proclamait que la pompe et l’étiquette font des hommes des machines, nous nous demandons pourquoi, depuis la mandorle maternelle qui nous servait de refuge, là où le sein nourricier nous abreuva à l’envie de sa Fontaine de Jouvence laiteuse coulant à flots, nous n’avons pas été conviées à nous exprimer sur nos aspirations à rejoindre cette planète terre, car, autant qu’il nous en souvienne, de notre antique patrie des hommes pour paraphraser le fameux Sigmund, métaphore désignant l’existence intra-utérine, à aucun moment nous n’avons été consultées sur la suite des évènements, ni même avons alloué le plus infime des consentements !

 

                          De notre Pays de Cocagne, Jardin des délices où il fleurait bon vivre, à l’abri de la moindre tension tellurique et qui nous laisse aujourd’hui en proie à une incurable nostalgie, certes, nous nous entretenons en secret, auprès de notre analyste préféré féru de thérapies holistiques, dans un demi-sommeil bienfaiteur allongées sur le divan de son cabinet serre tropicale à la végétation exubérante, proche d’une toile du Douannier Rousseau, lui confiant notre rêve de renouer avec ce véritable Paradis perdu originel, asile de quiétude de l’Innocence, nous délivrant des déboires et tourments auxquels notre psyché est continûment exposée depuis qu’a retenti la sentence de notre éviction, priées sans tambour ni trompette de libérer ce cocon mythique, chassées à jamais de ce cadre d’élection enchanteur constituant notre bonheur, comme des malpropres, tels des hôtes devenus soudainement importuns, encombrants, tandis que notre inclination nous portait à éprouver une élation[5] narcissique, cette impression de bien-être ineffable, de fonctionnement organique spontané, idéal, de complétude, béatitude gratifiante, sentiment d'existence élargi jusqu'à l'infini (correspondant à celui océanique dépeint par R. Rolland), lié à une sensation de grandeur, d'autonomie et d'unicité[6]

 

                         Ah, Morbleu, la chute n’en fut que plus rude, surtout que nous venons de prendre conscience ce que notre inconscient, le cruel, tentait de nous dissimuler : l’ampleur des failles, des névroses touchant à notre Age d’or ou souvenance idéalisée, cette Vie antérieure* précédant notre apparition au monde !

 

                        C’est la raison pour laquelle, il nous tient à cœur, autant que faire se peut, de recouvrer la clé des songes, la clé des champs, des temps et des vents, sorte de passe-partout incantatoire, de sésame ouvre toi libérateur magique, que nous mettrons en bouche en n’ayant cure de déflorer le charme de son nom, sous peine de le prononcer : enfance.

 

                       Bien que nous sachions en l’occurrence que reconquérir ne serait-ce qu’un semblant, un pan de cet état de grâce ancestral est peine perdue et représente une vaste utopie… L’enfance de l’art, dites-vous ? Oh probablement, oui, un jeu d’enfant pour celui qui cultive à outrance le culte du Môa. Mais pour les créatures vulnérables parce que sensibles jusqu’à l’hyperesthésie, la complexité de la chose est bel et bien là : nul remède miracle à escompter. Le salut, si salut il y a, se trouve, à notre sens, dans des « soins palliatifs » usant des vertus médicinales de l’humour, de l’autodérision, facteur de guérison, privilégiant une forme d’amour authentique reliant les Hommes de bonne volonté [7], de beauté-bonté à la François Cheng[8] de chaine généreuse de solidarité et de partage humaniste que nous nous plaisons à baptiser d’Art thérapie, épousant cette perle de la pensée nietzschéenne :

 

« L'art et rien que l'art,

nous avons l'art pour ne point mourir de la vérité. »

 

renforcée de celle d’Auguste Rodin :

 

L'art, c'est la plus sublime mission de l'homme, puisque c'est l'exercice de la pensée qui cherche à comprendre le monde et à le faire comprendre.

 

Les sœurs jumelles Félicité et Prudence

alias Valériane d’Alizée, Le 21 Mai 2012

 



Un Voyage au cœur de notre état germinatif :

Précédé de l’Épithalame de nos chers parents prononcé

en avant première de leurs accordailles

 


Fête Nuptiale[9]



Nous nous marierons aux petites chaleurs.
L’aube viendra toucher ton épaule nocturne.
Source vêtue de grave nudité, le chant du coq allumera tes voiles.
Il aura plu hier, et de la terre sainte naîtront des jeunes filles au langage de sœurs.
La cloche sonnera. Des mortes bien en chair se presseront dans la petite église, ouverte aux délices du lait.
Le prêtre arrivera quelque peu en retard, âgé de presque deux mille ans. Un enfant portera son genou à la bouche et le mordra jusqu’au sang.
Paix ma colombe. Paix mon très blanc mystère.
Il neigera sur un royaume de ce monde.
Le lys aura vaincu la folie des tombeaux.


René de Obaldia



II)


Les Jumeaux de La Nuit

 

 

Dans le ventre de maman

Nous avons cohabité

Ma petite sœur et moi

Un automne et un été.

 

Ah quel singulier bonheur !

Quel superbe appartement !

Loué à l'année, au mois

Selon le rythme des cœurs.

 

Ç'aurait pu être à Deauville

À Stockholm, Saint-Sébastien

À la montagne, à la ville

Non, c'était dans le jardin.

 

Un jardin très suspendu

Rempli de folles odeurs

On se baladait tout nus

Dans de grands intérieurs.

 

Je me souviens très très bien

De tournesols inouïs

Et de tas de souterrains

Et de villes englouties.

 

Ma petite sœur et moi

On se trouvait là si bien

Que l'on chantait à deux voix

Les chants les plus grégoriens.

 

Ah! oui, quelle joie !

Le ventre chaud de maman.

Et comme on avait la Foi

Dans la suite des événements.

 

Une très douce lumière

Rayonnait dans notre nuit

Comme des roses trémières

Qu'on effeuillerait sans bruit.

 

Ma petite sœur Élise

Savait pas encore son nom

Je l'appelais Brise-bise

Elle m'appelait Garçon.

 

Ah! le ventre bel et bon !

Ah! la merveilleuse tour

Où Brise-bise et Garçon

Se jouaient de jolis tours !

 

 

N'étions pas du tout pressés

De prendre l'hélicoptère.

Savions de manière innée

Qu'il faudrait pleurer sur terre.

 

On a dû mettre les fers

C'est maman qui nous l'a dit.

Ça marchait tout de travers

Pour sortir du paradis !

 

Ma petite sœur et moi

Avons, paraît-il, grandi

Mais nous restons dans l'émoi

À ces souvenirs exquis.

 

René de Obaldia

(Pièce issue du recueil Innocentines,1969

Sous-titré : Poèmes pour enfants et quelques adultes)




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Le Tournesol de Gustav Klimt,1907



[1] : Emprunt au poème de Louise de Vilmorin intitulé Violon faisant partie du corpus les Fiançailles pour rire écrites à la suggestion du compositeur ami Francis Poulenc, ayant pressenti le don poétique de la romancière et qui choisira certaines d’entre-elles pour son cycle de mélodies homonyme…

[2]  Allusion à la mélodie jubilatoire du compositeur français Emmanuel Chabrier, œuvre pour chant et piano écrite sur un poème d’Ephraïm Mickaël…

[3] : En référence à une trouvaille de René de Obaldia au sein de sa poésie intitulée « Faire-part », recueil Innocentines que l’auteur dédia de cette manière : Poèmes pour les enfants et quelques adultes

[4] : Pillage dû à  la pièce de théâtre Georges Feydeau.

* : La Dame de Monte-Carlo : emprunt au titre du poème de Jean Cocteau mis en musique par le compositeur Francis Poulenc.

[5] : Terme anglais elation francisé dû à Béla Grunberger au sein de son œuvre traitant du rôle de la vie intra-utérine, chapitre nommé Situation analytique et narcissisme…Se reporter à l’article concerné : http://www.carnetpsy.com/Library/Applications/Article.aspx?cpaId=295

[6] : D’après les propos de Pierre Dessuant, 1999, op.cit

* : Allusion au fameux titre du poème de Charles Baudelaire, in Les fleurs du Mal

[7] : En référence au père de l’Unanimisme, Jules Romains.

[8] : Formule de l’écrivain François Cheng issue de son œuvre poétique Cinq Méditations sur la beauté ayant pour objectif de nous éclairer sur les mystères de l’harmonie entre l’art, l’homme et la nature. Citons comme modèle de son propos, l’adage d’Henri Bergson, ensuite commentée par l’auteur : « L’état suprême de la beauté est la grâce » or, développe F.Cheng, dans le mot grâce, on entend la bonté, car la bonté est la générosité d’un principe de vie, qui se donne indéfiniment. Donc à travers le mot grâce, beauté et bonté ne font qu’un.” Miraculeusement, “grâce” en français veut dire à la fois beauté et bonté, qui viennent tous deux du latin, bellus et bonus, lesquels viennent d’un seul mot indo-européen : dewnos…

  [9] : Œuvre du jeune écrivain René de Obaldia tirée de son premier livre «Les richesses naturelles »1952, recueil de contes et proses poétiques, dont la singularité, mélangeant l’absurde et l’irrationnel à des descriptions du quotidien, attire sur lui l’attention de la critique.

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Commentaires

  • Chère Dame d'Alizée,

    Enfin je peux prendre le temps de me régaler à savourer votre verve, belle amie,

    la beauté de votre langue française si pure et exceptionnelle.

    Votre humour est toujours présent à regarder par dessus l'épaule de son alter-égo

    et votre imagination n'en est que plus débordante pour illustrer la richesse démultiplier 

    de nos géminesques natures.

    Je vous verrais bien vous lancer dans une nouvelle ... mi-burlesque mi-romanesque.

    Vous nous avez tant nourris de vos magnifiques poésies choisies que votre absence me manque !

    Bien à vous

    La Lily Lyre d'Alizé

  • Prudence et Félicité, dualité?  Dédoublement de la personnalité ou jumelles de chair ?  Quoiqu'il en soit, textes et poèmes réunis m'ont fait passer un agréable moment.  Bonne soirée à vous deux et à bientôt. :-)  Amicalement, Claudine.

  • Riche faconde emplie d'humour... L'histoire sans cesse recommencée du vivre pour en mourir. Grandir, vieillir, avoir perdu le souvenir du paradis mais en être toujours hanté jusqu'à ce que la terre nous le fasse retrouver. J'ai beaucoup aimé le Botero ainsi que les deux poèmes de René de Obaldia sans parler de la gaieté des tournesols de Klimt (un de mes peintres préférés).

    Merci pour cet hommage humoristique à l'ascendence, au ventre , au pays de Félécité et de Prudence.

  • Valériane, je m'incline devant pareil discours, et je m’émerveille encore devant celle langue française que vous maniez avec un incomparable brio, et surtout, avec esprit.

  • Je rends grâce à celle ou celui (le pluriel est possible!) qui vous a conduit sur le chemin du site :Arts et Lettres afin que je puisse y savourer vos si beaux mots,ainsi que les aventures de Prudence et Félicité. Merci et Bravo.

  • Rendons grâce à nos  chers parents d'être nés et surtout de s'être "trouvés"... sans lesquels, ma foi, c'est un truisme  que de  l'avouer, nous ne pourrions exister, ce qui serait une faute de goût monumentale, étant donné l'envergure du chef- d'œuvre qu'ils ont engendré !!!

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