Le réseau des Arts et des Lettres en Belgique et dans la diaspora francophone
DIMITRI SINYAVSKY : LA NATURE ENTRE L’AME ET LE TEMPS
Du 16-01 au 03-02-13, l’ESPACE ART GALLERY (Rue lesbroussart, 37, 1050, Bruxelles) a le plaisir de présenter une exposition intitulée FLUX DU TEMPS, consacrée à Monsieur DIMITRI SINYAVSKY, un jeune artiste Russe qui depuis son enfance a noué avec le temps, un dialogue incertain.
DIMITRI SINYAVSKY est un jeune paysagiste Russe qui peint depuis 2008. Au fur et à mesure de la conversation qui s’installe avec lui, il nous révèle l’invraisemblable : il a commencé par l’abstrait ! De l’abstrait au paysage…voilà un parcours autant singulier qu’à contre-courant. Car, en règle générale, c’est le contraire qui se produit. Quoique...! Si par « abstraction » nous entendons des plages de couleurs éclaboussant le blanc de la toile, force est de constater que tout cela n’apparaît nullement dans les œuvres de l’artiste. Si, au contraire, nous entendons par « abstraction » l’introspection proustienne par rapport au temps, à l’intérieur de l’âme humaine, alors peut-être que l’œuvre de DIMITRI SINYAVSKY demeure parfaitement « abstraite » (du moins, dans l’esprit), malgré la présence de la nature, à la fois foisonnante et majestueuse, voilée, néanmoins sous un fond de solitude.
La prise de conscience du temps qui passe. L’existence du temps en tant qu’expression d’un sentiment qui nous définit. Voilà, sans doute, une définition supplémentaire à cette « marque déposée » au début du 20ème siècle par une critique avide de sensationnalisme, sans pour autant entrevoir la confusion que cela allait engendrer dans les esprits. Absence de figure humaine ou de tout élément identifiable par notre vocabulaire le plus courant, serait synonyme d’ « abstrait ». Or, à la vue de l’œuvre de DIMITRI SINYAVSKY, au demeurant, parfaitement « classique » dans sa forme, nous sommes intrigués par cette répétition de la présence de la nature, conçue comme un leitmotiv, pour souligner la nostalgie d’un « âge d’or », où elle n’était pas encore asservie par l’Homme.
Nature et solitude de la nature sont les fondements de son discours, à la fois philosophique et pictural. Balançant entre l’Ecole Russe et l’Impressionnisme français, il y a dans son trait autant de SAVRANOV ou de SHISHKINE que de PISSARRO.
Tout un héritage remontant à la fin du 19ème siècle dont nous retrouvons les traces en chacune de ses œuvres. Même lumière, même luminosité et amour pour les grands espaces empreints du mysticisme de la nature, concernant l’Ecole Russe. Même disposition du cadrage à l’intérieur duquel se déroule la scène, comme dans l’Impressionnisme français, concrétisé par des successions à peine perceptibles des plans ainsi que des points de fuite, permettant au regard de prolonger l’espace.
VERT PETIT DANS LES FRIMAS (59 x 44 cm)
et PROVENCE SOUS LE BOURRASQUE (79 x 39 cm)
se situent à l’intersection entre une décharge des sentiments à vif dans le silence d’une nature foisonnante et de l’étude analytique de cette même nature.
Si l’on s’attarde sur VERT PETIT DANS LES FRIMAS, on remarquera ce détail qu’est la présence du feuillage souligné de façon appliquée comme lorsqu’on trace une calligraphie, contrastant avec le fait que ce même feuillage est situé loin par rapport à la persistance rétinienne. Illusion d’optique ? Non. Simple mise en exergue d’une nature dévoilant sa présence dans tous ses atours. Au fur et à mesure que le regard s’avance, bien des détails apparaissent, notamment l’existence cachée de différents plans, alternant discrètement le rythme de la composition, ainsi que des points de fuite sur lesquels le visiteur risquerait de passer sans même les remarquer.
Rarissime est la présence de la figure humaine dans l’œuvre de ce paysagiste. Cette absence résulte d’un bannissement de l’Homme par la nature. Toujours est-il que sa présence neutre, presque miraculeuse, confère un équilibre à la composition.
Néanmoins, dans LE RAMASSEUR (20 x 31 cm),
la possibilité d’une réconciliation entre l’Homme et la nature s’affirme dans une communion entre dégradés de couleurs, lumière enveloppante et jeu de perspective.
Car DIMITRI SYNIAVSKY est décidément un maître de la perspective. Même si le personnage du « ramasseur » fait partie intégrante de la composition, il demeure ostensiblement en retrait, en étant volontairement décentrée par rapport au cadrage. Le plan représente une clairière. Divers points de fuite (bien que très discrets) s’offrent au regard. Une lignée de bouleaux placés en ligne droite (sur la gauche) s’oppose à une autre lignée de bouleaux (sur la droite), placée en oblique, créant ainsi un déphasage dans la perspective. Un jeu subtil s’installe entre la solitude de la nature luxuriante à souhait et l’invitation adressée au regard du visiteur à se perdre pour trouver sa liberté, dans un savant dosage appliqué aux nuances du chromatisme pour déterminer la profondeur du champ visuel.
Un jeu discret dans la fonction de la lumière est apporté par les réverbérations des lampions accrochés aux branches des arbres, à mi-plan de SOIR A BRUGES (31 x 39,5 cm),
se réfléchissant sur l’eau noire.
Un contraste intéressant s’établit entre la zone médiane du tableau, illuminée, comprise entre deux zones dominées par le noir de la nuit (le ciel nocturne et l’eau du canal).
Nous retrouvons toujours cette conception scénique de l’œuvre picturale, campée entre différents plans, laissant deviner des points de fuite.
Il est impressionnant de constater qu’à l’exception de trois tableaux, toutes les œuvres de cet excellent artiste, exposées à l’ESPACE ART GALLERY, datent de l’année dernière. Ce paysagiste, coté « Drouot » préfère, pour des raisons de meilleure lisibilité, l’utilisation de l’huile.
L’origine de sa démarche est à chercher, notamment, dans l’œuvre cinématographique du metteur en scène Danois LARS VON TRIER (particulièrement dans la dialectique qu’offre son film DOGVILLE) où l’être humain, existant, se voit mis à l’écart, puis abandonné, voire sacrifié par la société. La nature, c’est l’âme dans la souffrance de l’abandon et les endroits sauvages deviennent une image de l’intemporalité (le biotope inviolé), prise comme démarche politique de la nature. Un autre artiste, extrêmement présent dans la quête intellectuelle du peintre, est le compositeur Russe SCRIABINE qui (à l’instar de MOUSSORGSKY) désirait hardiment incorporer les éléments dans sa musique. Le parfum de l’herbe fraîche devrait, selon l’artiste, se dégager à la vue d’une scène champêtre. Car le tableau avec la peinture qui le recouvre participent déjà de la nature. Et cette nature, dans son expression la plus organique, vient se loger au cœur de l’émotion.
DIMITRI SYNIAVSKY a touché un peu à tout dans le domaine de l’Art. Il a notamment tâté de la vidéo lorsqu’il était encore en Russie. Arrivé en France, il a été fortement encouragé par le peintre SERGUEI TOUTOUNOV à s’engager dans la voie de la peinture.
Passer devant son œuvre picturale est un acte d’une immense responsabilité, car l’on passe devant une myriade de scènes analogues. Or, chaque scène est le témoin d’une émotion particulière interprétée de façon différente.
Ce qui, une fois encore, tend à prouver qu’une œuvre d’art (quelle que soit sa nature) ne se regarde pas : elle se lit !
François L. Speranza.
Une publication
Note de Robert Paul:
Promenades fleuries sur des oeuvres de Dimitri Sinyavsky
Accompagné par une sonate de Scriabine, musicien affectionné par le peintre.
Proposé et réalisé par Robert Paul
La page de Dimitri Sinyavsky sur Arts et Lettres
N.-B.:
Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, administrateur général d'Arts et Lettres
Commenter
L’artiste russe Dimitri Sinyavsky a exposé ses œuvres dans la galerie en 2013. Et son billet d’art du critique d’art François Speranza à été publié dans le « Recueil n° 2 de 2013 » par « Les Éditions d’art EAG » dans la Collection « États d’âmes d’artistes » en 2015.
Lien vers la vidéo lors du vernissage de son exposition dans la galerie :
Très joli Andrée
Très beau,
bonjour
merci de nous faire partager ces oeuvres magnifiques
mes amitiés
véronique benzazon
Grand merci pour cette vision d'un monde délicieux donnée par des teintes dispersées et des émotions déversées !
J'aime particulièrement le paysage doré, dont le flou, me rappelle TURNER.
Mes compliments artistiques vous ont offerts.
Au crepuscule du Val de Mar
En effet, à chacun son interprétation.
nature en transparence , atmosphère ouatée , beauté de l'instant figée sur la toile...Merci Mr Paul!!
Bienvenue dans
Arts et Lettres
L'inscription sur le réseau arts et lettres est gratuite
Arts et Lettres, l'autre réseau social, créé par Robert Paul.
Appel à mécénat pour aider l'éditeur de théâtre belge
"Faisons vivre le théâtre"
Les Amis mots de compagnie ASBL
IBAN : BE26 0689 3785 4429
BIC : GKCCBEBB
Théâtre National Wallonie-Bruxelles
Musée belge de la franc- maçonnerie mitoyen de l'Espace Art Gallery
Billets culturels de qualité
BLOGUE DE DEASHELLE
Attention!: lire nuit gravement à l'ignorance.
Nouveau: Partenariats multilingues:
7 partenariats à plusieurs mains
-87 billets
-16 billets
Voies et chemins antiques de la Grèce
-19 billets
-39 billets
-38 billets
-5 billets
Ancien Testament
En préparation
I. 1830-1880 : Le romantisme embourgeoisé
II. 1880-1914 : Un bref âge d’or.
III. 1914-1940 : Avant-gardes et inquiétude
IV. 1940-1960 : Une littérature sans histoire
V. 1960-1985 : Entre hier et demain
Max Elskamp, dit "L'admirable", poète à qui est dédié le Réseau Arts et Lettres
-27 billets
Menneken-Pis. Tenue de soldat volontaire de Louis-Philippe. Le cuivre de la statuette provient de douilles de balles de la révolution belge de 1830.
(Collection Robert Paul).
© 2023 Créé par Robert Paul.
Sponsorisé par
Vous devez être membre de Arts et Lettres pour ajouter des commentaires !
Rejoindre Arts et Lettres