24 septembre 2019, 19h, les prémices d'une soirée de Rencontres Littéraires "bien de chez nous" au coeur de l'Espace Art Gallery où se côtoient désormais Arts et Lettres.
Gérard Adam, l'animateur hors pair et profondément investi des Rencontres, a formulé la thématique de cette soirée: "Ceux de chez nous", les trois écrivains sous les feux des projecteurs: Rose-Marie François, Daniel Charneux et Bozidar Frédéric, une fois de plus un choix judicieux.
Poète, philologue, romancière et dramaturge ayant à son actif une trentaine de livres dont plusieurs traduits en plus de dix langues, Rose-Marie François nous présente son roman "La Belle Enceinte, Nos amours de Flandre et de Picardie", l'oeuvre étant préfacée par l'écrivain et académicien Jacques De Decker. Le jeune Jan Frans a fui sa campagne rongée par la famine pour trouver fortune dans les charbonnages de Picardie; Jean-François, lui, est professeur d'hébrec (hébreux + grec), mais les deux (faux) frères aiment la belle Victorine... Une écriture hors du temps d'une écrivaine passionnée dès l'enfance par les langues étrangères.
Romancier et nouvelliste, auteur inspiré de deux romans, directeur de publication de nouvelles montoises, Daniel Charneux nous propose "Maman Jeanne", un roman imprégné d'abandon et de folie nous relatant le destin tragique d'une femme sans grâce qui a vécu un amour interdit. La parole est donnée à Jeanne, l'épouse d'un négociant qui se retrouvera rapidement veuve avec trois fils sur les bras, dont un lourdement handicapé. Charneux a obtenu un prix pour son roman "Une semaine de vacance."
Un Master en sciences du travail en poche ainsi qu'une formation en ressources humaines et en sophrologie, formateur en langue française, récitant et animateur de rencontres littéraires, Bozidar Frédéric nous présente ce soir "Ciel Seraing", un premier roman polar se déroulant dans un cadre social. Nous suivons ici l'enquête ultime et poignante d'un commissaire de police proche de la retraite. Le décor: le Seraing de Frédéric du temps de la fermeture de la phase à chaud. Né sur une île de Croatie, Bozidar y a passé son adolescence avant de réaliser son rêve: pouvoir naviguer en tant qu'officier de marine.
"Trois excellents livres!" nous annonce d'emblée Gérard Adam qui nous citera Georges Brassens au passage. Trois récits qui nous évoquent des statuts et situations de femme peu enviables et même pénibles.
Avec "Maman Jeanne", nous assistons à la reconstruction d'une vie, l'auteur utilisant ses propres souvenirs parfois imprégnés de secrets, une émotion à fleur de peau, quelque chose de Maupassant enveloppant son oeuvre. La forme du monologue n'est point absente; discret et posé, l'auteur nous révèle que, désoeuvrée, Jeanne entrera au service d'un curé auprès duquel elle trouvera tendresse, bonté et compréhension, ce qui ne sera pas sans conséquence car naîtra un quatrième enfant. L'enfant du péché. Charneux s'est ici inspiré de son arrière grand-mère pour son personnage de Jeanne, il nous l'apprendra.
De la traque sous différentes formes, des personnages "en miroir" - Jan Frans qui semble fuir alors que Jean-François est en quête -, d'autres encore traités par deux tels Rose et Victorine, le textile et la porcelaine en écho, "La Belle Enceinte" de Rose-Marie François est tout à la fois un conte, un récit, une épopée irracontable selon les dires de Gérard Adam, un labyrinthe habité également de nombreux méandres. Vive et volubile, François nous décrit non sans feu Victorine, femme à poigne, un des principaux personnages de son oeuvre qui ne manque point d'un certain ésotérisme, une descente dans les profondeurs de l'âme et une recherche de lumière s'offrant à nous en parallèle. En singulier contraste.
Qualifié de polar gigogne par notre animateur, "Ciel Seraing" est lui habité de tension, la présence de Ninjas dans le récit n'étant point faite pour nous rassurer. Autres particularités: le thé y est très présent, en cérémonie très codifiée; notre commissaire aime quant à lui pouvoir se ménager des siestes qui se révèlent inspirantes, constructives, mais ce n'est pas tout. D'un naturel pittoresque, Frédéric nous présente son ouvrage comme étant un polar aussi politique que social, et il trouve son origine dans le petit monde d' une entreprise pendant sa chute, sa fin, l'auteur se plaçant sans hésiter aux côtés des victimes de cet effondrement.
En fin de compte une soirée entre passé et présent? Effectivement nous avons bien voyagé et avec ceux de chez nous! Le prochain périple? Le 29 octobre à 19h!
Thierry-Marie Delaunois, le 27 septembre 2019
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