” Suis-je profondément bon “, voilà la bonne question
Qu’il faudra bien un jour se poser
Lorsque toutes les courses auront cessé
Et quand des signes de fatigue apparaîtront ?

Il faut admettre en définitive qu’on le veuille ou non
Que vu la durée bien courte de nos actions,
Cette interrogation deviendra inévitable
Et sonnera comme un glas inarrêtable.

Soudainement à un instant précis voici que l’homme
Qui a trahi, menti, usurpé, dérobé, tout raté en somme,
Rien compris à ce qu’il pouvait apporter d’exemplaire,
Corrompu, donc coupable de faiblesse ordurière
Se réveille de son long sommeil de prétendu adulte
Pour tomber à genoux devant une statue froide et inculte !

Lui, si fort, si confiant, si sûr de lui-même
Invoque tous les saints, Dieu lui-même
Ne croyant guère vraiment qu’ils l’écoutent
Mais après tout, eux seuls, pense-t-il, restent sur sa route !

Que va- t-il devenir maintenant sur le point d’être raide
Raide comme la justice, cette fois présente à son aide ?
Voilà qu’il tremble, mais oui, c’est la peur qui le gagne.
Tout abandonner aux autres, toute cette vie de bagne !
Il a tout oublié et crie partout qu’il fut sans reproches
Qu’il a donné aux pauvres, prié , même vidé ses poches.

Non, faux, il n’avait pas la moindre monnaie
Au bienheureux mendiant lui souhaitant la bonne journée !
Et ne se souvient plus ce qu’il disait à son sujet ;
Lui rappeler, dans son état, ce serait l’achever !
” Suis-je profondément bon ” ? Voilà qu’il se demande
Si un paradis tout exprès, tel une ” commande ”
L’accueillera au son des trompettes de gloire
Pour son après-vie rêvée comme une belle histoire !

Vite, appelez un commissaire du Ciel
Il va tout dire, tout avouer au Père Eternel !
Confession ultime à celui occupé à des tâches grandioses
Qui n’avait pas averti ce quidam de son bilan morose.

Il est bien tard de maquiller la façade.
Tromper les autres n’est qu’une ballade.
Se tromper soi-même, voilà le piège à éviter
De cette angoisse finale peu à peu accumulée.

A l’heure du bilan chacun sait qu’il n’est plus temps
De retenir les choses ni les gens.
Et que l’horloge qui a fait son tour de cadran
Pour l’homme profondément bon sonne la fin de ses tourments.


6 Mai 2011