C’est en 1957 qu’André Breton fait paraître « L’art magique » Après s'être demandé dans " Le surréalisme et la peinture" si le Surréalisme devait vraiment changer l'ordre des valeurs du monde, Breton reprend ici cette question élargie en s'efforçant de remonter jusqu'aux origines. Sollicité de préciser cette notion qui lui est essentiellement familière d' "Art magique", il la sent se dérober à l'essai d'une définition rationnelle. L'auteur se réfère à l' occultisme dans lequel il voit un animisme universel agir dans le monde par correspondance, par sympathie, par symbolisme. La magie, qui pour les sociologues, les ethnologues, les historiens ne correspond qu'à une aberration des facultés imaginatives, apparaît à l'auteur comme un principe de dépassement aussi mystérieux que l' inspiration , fondement du Surréalisme.
Breton affirme que l'oeuvre d' art tire son origine de la magie, étant création au même titre que le monde est création. Pour Breton, tout art est magique, puisqu'il nous apporte l'espoir dans son domaine propre de "résoudre l'énigme du monde". André Breton nous donne ici une illustration de ce qui est selon lui, le "Beau magique". Après avoir évoqué l' art des Primitifs, il part dans l'ère moderne de Jérôme Bosch et de Léonard de Vinci, dans les oeuvres de qui il voit "la double image". Plus près de nous apparaissent Gustave Moreau pour son "symbolisme mythique" et le Douanier Rousseau, dont il fait un des représentants majeurs du Réalisme magique. Parmi les contemporains, plus que le cubisme et le fauvisme, il découvre Münch, Chirico, Duchamp et Kandinsky, et Max Ernst, Miro, Tanguy, surréalistes dont les rapports avec les poètes sont très étroits. Dans la seconde partie de l'ouvrage, André Breton, en collaboration avec Gérard Legrand, reprend, pour mieux la situer et l'approfondir, cette sorte d'histoire personnelle de l' art. Enfin Breton ouvre une vaste enquête aussi bien chez les spécialistes que les poètes, les artistes et les philosophes, afin de savoir ce que chacune d'eux pense de l' "Art magique". On trouve ici publiées les réponses de Heidegger, Jean Paulhan, Claude Lévi-Strauss, Roger Caillois, Jean Wahl, Julien Gracq et quelques-unes des personnalités les plus importantes de notre époque. Beaucoup acceptent l'expression d' "Art magique" parce qu'elle aboutit à un pouvoir d'enchanter la Nature. "Qui donc avant vous, va même déclarer l'auteur à André Malraux, avait donné aux mots "Art magique" la résonnance qui justifie que l'on consacre à cet art, dans une collection générale, la même place qu'à l' art classique?".
Commentaires
"Laisser passer en soi la nature, ce n'est pas pour l'homme tenter ou feindre de retourner au nerf ou à l'inerte, ni essayer de se démettre des pouvoirs qui lui sont échus. C'est, au contraire, les approfondir, les exalter et les contraindre à de nouveaux devoirs", Roger Caillois.