Il m’est tant ardu, même après deux lectures, d’évoquer sans émotion le dernier livre de Thierry-Marie Delaunois. Au départ, j’avais cru à un simple roman tendre et imaginatif… à son image. Mais c’est beaucoup plus que cela.
Si je devais comparer ce roman, et surtout ce qu’il dégage, je n’hésiterais pas une seule seconde à faire le parallèle avec « Le Petit Prince », d’Antoine de Saint-Exupéry. Au-delà de la notion des personnages d’Oscar (qui semble encrouté dans sa condition d’outsider ronchon) et de Colibri (qui parait vivre sa vie comme un rêve, bien en recul de tout concept de réalité, en faisant tout pour ne pas grandir), il grandit au fil des pages une autre dimension. Ou plutôt devrais-je dire, d’autres dimensions.µ
On découvre qu’Oscar est un brave type que la vie (et surtout l’amour…) ont tant brisé qu’il lui est impossible de vivre sans jouer les vieux amers ou en faisant le clown. Que Colibri (de son vrai nom Juliette) reste cantonnée dans les merveilles de l’enfance pour faire face au plus grand deuil qui soit. Que chez chaque personnage, principal ou secondaire, les apparences sont trompeuses, et que derrière toute attitude dite « normale », se cache une blessure intime.µ
Au départ, j’avoue que j’étais un peu déçue, tant les personnages semblaient rester sur leur « quant-à-soi ». Mais en cours de lecture, quelle ne fut pas ma stupeur en découvrant peu à peu que dans ce petit village perdu, chacun porte son secret et tente de le dissimuler derrière des rumeurs fort campagnardes. Les premiers chapitres sont des constats, mais l’histoire évolue sur les notions de perte, de deuil, de sacrifice. D’ailleurs, le sacrifice ultime d’Oscar sera celui de sauver Colibri des flammes. Il y perdra la vie, elle y perdra sa capacité de rêve et l’innocence de son jeune âge. On a peur pour elle… Elle avait déjà perd sa mère bien avant le commencent du récit, et l’incendie lui arrachera son père et ce vieil Oscar, qui éprouvait pour elle le seul lien tendre, pur et désintéressé qu’il n’avait plus connu depuis des siècles.
Pourtant, cet opus est loin d’être un drame, même s’il m’a tiré quelques larmes des yeux. Dans le fond, derrière les deuils, se cache les notions de changement et d’évolution, et malgré le chagrin, Thierry-Marie nous fait entrevoir une lueur d’espoir au travers de chacun des destins qu’il dépeint.
Car il nous faut avouer que c’est bien là le sujet principal (en tout cas, en regard de ma propre subjectivité) : que le changement, que tout changement est souvent dû à un acte radical ou à un traumatisme, et que sans eux, personne ne peut évoluer.
Certes, Oscar meurt, le père de la petite aussi, mais c’est cela qui lui apporte le désir d’une réalité plus forte, de rêves moins factices. Et restent aussi un certain nombre de points de suspension : malgré son début de rébellion face à ses chimères passées, on doute fort qu’elle ne se remette jamais à rêver. Simplement car c’est bel et bien dans sa nature profonde, quelles que soient les embûches de la vie.
Mon conseil serait le suivant : lisez deux fois « Raconte-moi Mozart ». Et optez pour deux niveaux de lecture. Le premier étant l’émotion pure face à un récit riche en philosophie de vie et d’émotions sincères, le second comme une réflexion sur la destinée. Et si une méchante larme vous vient aux yeux, ne l’essuyez pas, ne la niez pas. Car elle vient directement de votre cœur.
Virginie Vanos – 23 mars 2014
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