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Les ailes du mal

Je m'appelle Jack Barrow, policier, et l'histoire que je vais vous raconter n'est pas une fumisterie, une galéjade, tout juste bonne à effrayer les petits enfants trop crédules, mais est malheureusement bien réelle, trop réelle certains soirs. Mon cauchemar commença, il y a maintenant cinq mois, alors que j'enquêtais sur un meurtre inexpliqué; toutes les méthodes d'investigation s'étaient révélées vaines. Aucun motif apparent, la victime ne paraissait n'avoir d'ennemis que dans sa tête dérangée. Tout portait à croire à une nouvelle crise de délire paranoïaque, affection dont elle était coutumière et qui avait déjà nécessité un placement dans un institut psychiatrique, à la joie de ses proches trop contents de se débarrasser d'une relation aussi gênante et d'une héritière susceptible de leur rafler le pactole sous le nez. A plus d'une occasion, elle avait manifesté une peur panique, se sentant oppressée, épiée puis mentalement vidée, anéantie. Alors, prostrée, dans sa chambre épurée, qui ressemblait plus à une cellule carcérale inhumaine et froide, elle restait des heures les yeux dans le vide, absente. Les infirmières, inaptes à s'occuper d'elle, tentaient bien de lui faire ingurgiter un maigre repas ou de lui faire boire un peu de lait, mais rien n'y faisait, c'était comme nourrir une morte. Aussi brusquement qu'elle avait plongé dans l'abîme de ses pensées, elle revenait à elle, se levait, renversant tout, comme une somnambule pathétique. Aucune visite évidemment n'était accordée et, de toute manière, personne n'en aurait sollicitée. Les mêmes thèmes revenaient décelables à travers ses propos incohérents : des bruissements d'ailes, une figure angélique, pure qui rayonnait dans la nuit, percée par les yeux incarnat vif, malévolents qui la pénétraient jusqu'aux tripes. Jusqu'à ce qu'une clameur vienne se superposer à son malaise, ses propres hurlements, dont elle prenait enfin conscience. De la bave translucide perlant à ses lèvres en un filament visqueux la ramenait à la réalité, preuve de sa transe morbide. Elle finissait par s'endormir, lasse de lutter, sans que d'autres visions chaotiques ne viennent perturber son repos. Un soir que la surveillance s'était relâchée, elle en profita pour s'emparer d'une fourchette, qu'elle dissimula sous sa blouse, un sourire malsain éclairant son visage. Elle se passa la langue lentement, délicatement, vicieusement sur les lèvres, en pensant à ce qu'elle pourrait faire d'un instrument aussi anodin et ô combien fatal.
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