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D’après l’ébauche de texte envoyé à Béatrice J. rédigé

en l’honneur du jour anniversaire de sa naissance datant de Novembre 2013

 

Et alors, j'ai pris feu dans ma solitude car écrire c'est se consumer...

 L'écriture est un incendie qui embrase un grand remue-ménage d'idées

et qui fait flamboyer des associations d'images avant de les réduire

en braises crépitantes et en cendres retombantes.

Mais si la flamme déclenche l'alerte, la spontanéité du feu reste mystérieuse.

 Car écrire c'est brûler vif, mais c'est aussi renaître de ses cendres. »

Blaise Cendrars

 

 

I.

Préambule :

 

 

« Écrire, c'est avoir une très haute conscience de soi-même, et c'est avoir conscience que l'on n'est pas à la hauteur, que l'on n'y a jamais été[1] » déclare « l’Homme joie », le lumineux Christian Bobin, sorte de Merlin l’Enchanteur de notre chère langue française empreinte de beauté-bonté à la François Cheng[2], renforçant son propos par ce précepte « C'est même chose que d'aimer ou d'écrire. C'est toujours se soumettre à la claire nudité d'un silence. C'est toujours s'effacer», apportant ainsi, un autre éclairage à cette aspiration d’un devenir meilleur, l’espoir de toute conscience un peu haute, surenchérissant sur la pulsion et motivation initiale de telles confessions intimes délivrées à son prochain, cependant qu’elles pourraient demeurer éternellement silencieuses, dévoilant leurs secrets à l’aide de l’encrier virtuel, qu’en faveur de la page soudainement noircie, censée combler une insatisfaction… :

 

« On commence à écrire. Ce n'est pas pour devenir écrivain qu'on écrit. C’est pour rejoindre en silence cet amour qui manque à tout amour. C’est pour rejoindre le sauvage, l’écorché, le limpide. On écrit une langue simple. On ne fait aucune différence entre l'amour, la langue et le chant.

Le chant c'est l'amour. L'amour c'est un fleuve. Il disparaît parfois. Il s’enfonce dans la terre. Il poursuit son cours dans l'épaisseur d'une langue. Il réapparaît ici ou là, invincible, inaltérable. »[3]

 

La traduction de la pensée allouée par la graphie- « l’esprit cherche est c’est le cœur qui trouve », devisait en elle-même George Sand- n’est-ce pas là un procédé pour conjurer l’effroi du vertige provoqué par l’évocation du retour au néant qui précède à la germination de notre entité, au sein du cocon-giron maternel, le premier lieu de vie nous offrant l’hospitalité ?:

 

 « On écrit pour ne pas mourir entièrement, pour ne pas mourir tout de suite puisque tout dépérit. Et je crois que parmi toutes ces raisons, les deux raisons les plus fortes d'écrire sont bien celles-ci : Faire partager aux autres l'étonnement, l'éblouissement d'exister, le miracle du monde et faire entendre notre cri d'angoisse à Dieu et aux hommes, faire savoir que nous avons existé. »[4]

 

Oui, écrire, n’est-ce pas une figure de discrimination à fleur de mots, des plus florissantes, l’un des exutoires, antidotes des plus puissants participant à résister à la haine, afin de tenter d’évacuer ressentiments et frustrations de nos actes manqués ou susciter son versant opposé, l’amour, tout en congédiant la tiédeur, sans autre forme de procès, à l’instar du conseil d’Anton Tchekhov qui tend à nous instruire, en parlant à ce qui nous reste d’humanité, réitérant que : « l’indifférence est une paralysie de l’âme, une mort prématurée » ?

 

Pour ma part, et bien que souscrivant à ces allégations sagaces, il me tient à cœur de témoigner, en livrant mon parti pris des choses[5], brodant à loisir sur ce thème et variation de l’acte de l’écriture, activité qui, selon ma perception ne constitue pas nécessairement une vocation, ni encore moins un « métier » à proprement parler, dont il nous faut apprendre les rudiments, mais un credo jaillissant de son for intérieur, de sa psyché, geste de spiritualité, « feu sacré » inhérents à la vision d’un porte parole littéraire de valeur, notre géniale « Faunesse de Saint Sauveur en Puisaye », la sensitive Colette :

 

« Cette répugnance, que m'inspirait le geste d'écrire, n'était-elle pas un conseil providentiel ? Il est un peu tard pour que je m'interroge là-dessus. Ce qui est fait est fait. Mais dans ma jeunesse, je n'ai jamais, jamais, désiré écrire. Non, je ne me suis pas levée la nuit en cachette pour écrire des vers au crayon sur le couvercle d'une boîte à chaussures ! Non, je n'ai pas jeté au vent d'ouest et au clair de lune des paroles inspirées ! Non, je n'ai pas eu 19 ou 20 pour un devoir de style, entre douze et quinze ans ! Car je sentais, chaque jour mieux, je sentais que j'étais justement faite pour ne pas écrire. […] Quelle douceur j'ai pu goûter à une telle absence de vocation littéraire ! Mon enfance, ma libre et solitaire adolescence, toutes deux préservées du souci de m'exprimer, furent toutes deux occupées uniquement de diriger leurs subtiles antennes vers ce qui se contemple, s'écoute, se palpe et se respire… »[…][6]

 

 

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Détail de l'Énigme de Gustave Doré


[1] : Formule extraite de « Lettres d'or » de Christian Bobin coll. folio

[2] : Évocation de l’ouvrage de F. Cheng « Cinq Méditations sur la Beauté »…

[3] : Citation provenant de l’ouvrage La Part manquante de Christian Bobin

[4] : Devise d’Eugène Ionesco tirée de son ouvrage « « Antidotes »

[5] : Détournement d’un titre de recueil poétique de Francis Ponge

 [6] : Fragment issu du texte de « La chaufferette », Journal à rebours de Colette, Arthème Fayard, 1941

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