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Nous nous sommes compris et sommes devenus très vite amants, Juliette fut tout aussi vite enceinte!

 

Je pense qu'elle l'avait voulu. Nous nous sommes donc mariés et une sorte de bonheur s'est installé.

 

Il y a maintenant 5 ans que notre fils a convolé lui aussi! Il a terminé des études brillantes de commerce et s'est mis dans l'affaire familiale avec son oncle, il semble heureux mais pas décidé à faire des enfants au grand dam de ma femme! Quant à Julie, notre fille, elle file le parfait amour avec un comédien et se défend dans le journalisme, elle est encore bien jeune, seulement 23 ans et rêve de carrière et de voyage. Je pense parfois que c'est elle le garçon de la famille, tellement elle vit dans le présent et ne se préoccupe pas d'autre chose, elle est le contraire de sa mère! C'est sans doute logique.

 

Cloué dans ce lit j'ai enfin tout mon temps pour réfléchir et cela fait longtemps que je ne m'étais vraiment penché sur ma vie. Je me souviens l'avoir fait une fois, juste avant l'accident et je me demande même si la distraction causée par mes réflexions n'est pas à la base de ce fatal carambolage?

 

J'écoutais la radio sur la route du Zoute où j'allais rejoindre ma femme en cette fin de semaine du mois d'août. Le spaeker commentait les livres les plus vendus pendant ces vacances d'été qui tiraient sur la fin, et j'entendis un nom qui remua quelque chose de très enfuit dans ma mémoire, quelque chose qui s'apparentait à un remord ou un regret, je ne savais pas trop bien, c'est alors que le camion que je dépassais à déboité! Après c'est le noir, jusqu'à aujourd'hui...

 

Le prix fémina qui a été décerné à Jeanne Bricourt pour son roman "Toujours là pour toi" est en tête des ventes cet été.

 

En une seconde en écoutant cette petite phrase, je me suis pris le mois de juin 1957 au travers de la gueule, 40 ans après! Et le beau regard de Jeanne brillant de fierté et de larmes retenues.

 

Dès que je la vis, je l'ai désirée, c'était une si belle plante! Mélange de coquetterie, de retenue, de maturité et de candeur! Sa résistance fut vive et je n'y étais pas habitué, je n'eus donc de cesse qu'elle m'eut cédé! C'était un jeu stupide de jeune homme trop gâté et pour elle qui éprouvait la même attirance mais sans expérience, j'étais simplement l'Amour...

 

Début juillet, je partais en vacances à Palma de Majorque, je voulu rompre avant mon départ et me sentir léger! Ah, ce regard et cette absence de reproche! Puis cette lettre brève et déchirante, même pour le petit salaud que j'étais. Cette lettre qui se terminait par ces mêmes mots...Quoiqu'il puisse arriver, je serai toujours là pour toi...

 

Je me souviens avoir secoué les épaules et avoir mis la lettre dans une boite où je gardais les photos de mes conquètes!

 

A Palma, j'ai rencontré Danielle et j'ai oublié Jeanne, jusqu'à cette petite phrase à la radio...

 

Maintenant que cloué sur ce lit, j'ai retrouvé ma conscience sans le faire savoir, j'ai tout mon temps pour me souvenir! Quel luxe!

 

De tous les visages que j'évoque, je dois bien reconnaître que finalement, c'est celui de Jeanne qui me parle le plus. Pourquoi si longtemps après? Mon franc décidément a mis beaucoup de temps à tomber! Ou, et c'est l'explication la plus plausible, avec le poids de l'expérience, se sentir vraiment aimé est sans doute la chose la plus importante au monde! Mais qui me dit que Jeanne serait encore vraiment là pour moi?

 

Le titre d'un livre, c'est peut-être sa façon à elle de tourner une page, de sourire des excès de sa jeunesse? Et bien non, plus j'y réfléchis et plus j'y crois. Et maintenant curieusement, c'est la seule chose qui me donnerait encore envie de me battre pour vivre.

 

Mais je dois prendre quelque distance... C'est vraiment bon de rêver, il y a peu de temps je ne l'aurais jamais cru!...

 

J'émerge à nouveau d'un sommeil lourd et peuplé de songes étranges, plus vrais que la réalité! J'étais dans cette chambre, la chambre de Jeanne que je redécouvrais...

 

Une belle armoire de chêne occupe presque l'entièreté d'un mur. Face à elle un grand lit sommier traité comme un divan. Il est recouvert d'un couvre-lit de gros coton d'une blancheur impeccable et de quelques coussins bleu et blanc... Au dessus sur le mur un tableau d'inspiration fauviste représente un bouquet de dahlias jaune sur un fond bleu. Devant la fenêtre une table pliante supporte des livres et cahiers et au dessus de tout, bien visible en livre de poche, c'est "L'Antigone" d'Anouilh, la pièce que nous répétions elle et moi au cours d'art dramatique. J'étais Créon et elle Antigone. Je l'écoute à nouveau murmurer : Quel sera-t-il mon bonheur? Quelle femme heureuse deviendra-telle la petite Antigone? Quelle pauvreté faudra-t-il qu'elle fasse elle aussi jour après jour pour arracher avec ses dents son petit lambeau de bonheur?...

 

Et puis je nous vois sur la blancheur du couvre-lit et je découvre le rouge qu'y a laissé son sang lorsqu'elle est devenue femme, ma petite femme lui ai-je susurré... Et j'entends alors son rire heureux!

 

Je suis en sueur, face à moi-même si longtemps après!

 

Je réalise que j'ai loupé ma vie et cette autre petite phrase me hante... Je serai toujours là pour toi... Je ne rêve pas, c'est bien le titre de son livre!

 

Cependant, maintenant je le sais, je le sens, jamais nous ne nous reverrons!

 

Cette phrase, c'est mon pardon et c'est ma mort qui vient... Je vais partir vraiment apaisé en murmurant son nom comme dans un film... Jeanne...

 

FIN

 

J.G.

 

 

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Commentaires

  • Chers Ami(es),

    Si contente d'avoir pu vous intéresser avec mon histoire courte un peu plus longue!... Je pense à la 14ème et je vous souhaite une super semaine pleine d'inspiration.

    Très amicalement

    Jacqueline

  • Histoire triste, mais racontée avec légèreté. Bravo Jacqueline !

    Anne

  • Waoum ! Que c'est beau et bien écrit : j'y étais.  Félicitations sincères.

  • Tragique ce Dom Juan condamné à vivre comme un légume! Il est pourtant très touchant, sincère dans ses aveux, et sa façon de voir l'échec de sa vie! Un homme très fragile, c'est vrai! Tout simplement humain! Belle histoire Jacqueline! Confessions intérieures d'un homme instable?!...

  • Il y a plein de "petites histoires" dans l'histoire d'une vie d'homme ! C'est au moment du "grand saut" que, souvent, des vérités s'imposent....avec un pincement au coeur ! Un beau récit très touchant, Jacqueline, amitiés, blanche !

  • Il arrive que parfois nous fassions des mauvais choix et qu’un prix soit à payer.

    Vaut mieux avancer et garder les bons souvenirs que de vivre avec les remords.

    Je me suis réjouie de te lire, chère Jacqueline.  Merci pour ce partage.

     

     

  • Chavirante histoire d'amour, Jacqueline,

    En tant que lectrice ,  j'aurais aimé donner une  "seconde chance" à cet homme dont la conscience ne s'est révélée finalement que pour s'éteindre aussitôt...

     Le principal étant qu'il ait eu cet éveil de conscience... qui nous le rend plus humain  .. et tellement fragile ...

    Belle fin de semaine  et merci du partage  sur Arts et Lettres !  Nicole

      

  • ouhhh c'est terrible j'en ai des frissons et la chair de poule sur la fin... ah l'Amour c'est si puissant , c'est si la seulle chose qui compte vraiment...

    Vite je cours à ma femme lui dire , comme tous les jours, à quel point je l'aime

    Merci Jacqueline pour ce beau moment partagé

    Olé~

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