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HENRIETTE FRITZ-THYS : DE LA LUMIERE A LA LUMINESCENCE
Du 16 – 10 au 03 – 11 – 13, l’ESPACE ART GALLERY (35, Rue lesbroussart, 1050, Bruxelles), a le plaisir de vous présenter une exposition consacrée à l’œuvre de Madame HENRIETTE FRITZ-THYS, intitulée LUMINESCENCE.
HENRIETTE FRITZ-THYS est une artiste Belge, qui au cours d’un long cheminement, est passée d’un style à un autre pour aboutir aujourd’hui à un langage où la lumière prime dans sa dynamique.
Elle a débuté par le figuratif, particulièrement en tant que portraitiste, en se basant sur des photos de famille et des tableaux de Maîtres pour découvrir et affiner sa technique. A partir de là, elle a dû trouver sa voie personnelle. Et cette voie ce fut celle d’une abstraction donnant libre cours à un univers de formes inconnues de la culture figurative du visiteur.
Les moteurs qui animent sa création sont essentiellement la Philosophie et la Psychanalyse. La Philosophie lui a fourni les questionnements sur la notion du mouvement. Quant à la Psychanalyse, elle lui a posé la question du transfert dans l’exploration picturale du manque pour en cerner ses arcanes.
L’élément architectural n’est pas exclu de son œuvre (HELICE – 100 x 120 cm –huile – 2010)
exprime le sentiment du refuge. Cette composition à l’architecture affirmée se veut la projection d’un désir, celui d’un bungalow issu du tréfonds onirique de l’artiste. L’élément poétique anime l’architecture. La géométrie assure la spatialité de la surface picturale. L’œuvre, témoigne d’une subtilité des couleurs très tendres, telles que le vert-clair, le rose ou le bleu azur. Elle assume une volonté cubiste créée à la base tel un socle qui nous propulse vers le haut, là où se trouve précisément l’hélice, laquelle fait penser à une aile calme et majestueuse. Il y a là l’expression d’une recherche de la sérénité, soit acquise, soit sur le point de l’être. Jamais l’élément figuratif n’est recherché.
La spécificité de cette exposition est celle de distinguer deux périodes cruciales de l’artiste : celle qui a trouvé son expression picturale de 2002 et l’actuelle.
Un premier exemple illustre éminemment cette première période, celui de OSIRIS (80 x 100 cm – huile - 2002),
lequel repose sur une structure mythique dont la base (que l’on retrouvera, bien qu’exprimée différemment, dix ans plus tard dans l’œuvre précitée, HELICE, sur laquelle repose la composition) représente un pentagramme en attente de notes musicales.
La cosmologie égyptienne est représentée par le disque solaire (celui du dieu Râ). Une dynamique sous-tend l’ensemble de l’œuvre, une rythmique musicale, soulignée par le papier à musique. La musique est d’ailleurs le compagnon de l’artiste lorsque celle-ci s’adonne à la création. Face à la toile, elle affectionne surtout le Baroque (particulièrement Haendel).
Il s’agit d’une œuvre à la fois sobre et extrêmement structurée. Une œuvre où l’on sent l’apport granuleux de la matière déposée sur la toile. Adéquation totale entre matière et géométrie, ce tableau évoque le mariage mystique entre le chtonien (la Terre) et l’ouranien (le Ciel), en une musique qui se nourrit des éléments. La Terre, proche de l’œil du visiteur (de sa perception) par rapport au soleil, situé plus loin dans le cosmos. Cette matière, travaillée et tactile ajoute à la dimension mystique de l’image.
OSIRIS est le produit d’une technique mixte, composée notamment, de sable, de plâtre et de fusain pour la division de l’espace. A partir de cette étape, un duel s’impose entre l’artiste et la matière qu’elle manipule, en ce sens que comme celle-ci sèche très vite, une lutte contre le temps s’engage pour la vie de l’œuvre. Cette lutte contre les éléments chimiques se retrouve très souvent dans le processus créatif de beaucoup d’artistes. On ressent physiquement la matière labourer la toile. La même démarche technique se retrouve avec PYRRHON (80 x 100 cm –huile – 2002).
Démarche technique mais aussi philosophique car si Osiris est le dieu de la vie, de la mort ainsi que des crues du Nil, s’unissant à Isis, symbolisant l’harmonie cosmique, le philosophe Grec du 2ème s. Av. J. C., Pyrrhon d’Elis, représente l’intrusion du doute dans sa consistance philosophique et créatrice.
En ce qui concerne la période actuelle (2012-13), le même rapport vital à l’œuvre s’installe mais il diffère néanmoins, dans le soin apporté à la recherche pour le déplacer vers plus de mécanicité. Il n’est plus question de mettre en avant une quelconque notion de transfert mais bien de se poser un questionnement sur le monde moderne, « froidement » comme le dit l’artiste, « statistique », « calme », car tout est à plat.
Nous avons dit plus haut qu’outre la Psychanalyse, la Philosophie guidait également sa quête. Ce passage entre l’extériorisation du transfert vers le questionnement calme sur le Monde, s’apparente à la conception nietzschéenne du dionysiaque vers l’apollinien. Le calme se manifeste ici par un agencement recherché des couleurs en quête d’équilibre.
TUMULTE (80 x 100 cm –huile – 2013)
Tout baigne dans la brillance. La forme éclatée, au centre de la composition, assure une dynamique centrale, interagissante, qui se propulse sur le reste. Ce tableau constitue d’un point de vue chromatique une véritable mosaïque aux multiples couleurs vivaces, avec en son centre, une forme dilatée qui par le jeu précis du trait s’ « agrippe » à la toile, telle une araignée pour la coloniser.
Nous sommes frappés par la mise en contraste entre les couleurs, rehaussées par la brillance apportée. L’artiste est ainsi passée d’une démarche personnelle aux extrêmes les plus fous. Elle invoque Gustav Klimt qui fait habiter des espèces avec des mondes différents qui n’ont plus rien à voir avec l’idée de la forme conçue à l’origine. A titre d’exemple, si l’on observe LE BAISER (1907-8), nous nous rendons compte de l’existence de deux dynamiques : une dynamique du geste (l’homme enlaçant la femme – premier tableau) et une dynamique des couleurs, vibrant dans leur brillance, créant à elle seule un second tableau. C’est une dynamique du geste et de l’enveloppant. L’artiste appuie son propos en évoquant la lumière d’une bougie que l’on fixe jusqu’à ce qu’elle ne soit plus elle-même mais bien une forme distordue.
FACETIES (80 x 100 cm –huile – 2012)
constitue également une mosaïque faite de contrastes, mais bien plus calme, travaillant principalement sur les tonalités bleu, vert et violet, où chaque tesselle se fond dans l’autre, créant des modulations vibratoires.
Si pour la période précédente l’artiste a dû se battre contre le temps, dévoreur de matière, cette nouvelle phase la voit dans la contrainte de devoir s’adapter aux propriétés des produits chimiques trouvés sur le marché, censurés pour des raisons de sécurité mais avec lesquels elle assurait un travail excellent, ce qui l’oblige à une réadaptation forcée.
LA NAPPE (80 x 100 cm – huile – 2011)
est inspirée de l’esthétique du Bauhaus, étape artistique pour laquelle l’artiste éprouve un grand respect. Si elle s’est permise de surenchérir sur l’esthétique de Klimt, en ce qui concerne l’étape du Bauhaus, axée sur le côté artisanal, très proche du peuple dans son design, elle ne change rien et l’accepte pleinement. Par la représentation d’un outil domestique, l’artiste aborde le langage d’un mouvement artiste et intellectuel, une étape au service du peuple, alliant pour le bonheur collectif, esthétique et fonctionnalité.
Pratiquant également la sculpture, HENRIETTE FRITZ-THYS qui a été formée à l’Ecole Nationale Supérieure d’Arts Visuels de la Cambre de Bruxelles, est avant tout une peintre de la lumière, ou comme l’explicite éminemment l’intitulé de l’exposition qui lui est consacrée, de la luminescence. Lumière-luminescence. L’une peut-elle aller sans l’autre ? La luminescence est l’explosion de la lumière. Sa force atomique. Elle exprime l’infini de son origine. Sa cosmicité.
Lettres
N.-B.:
Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement.
A lire également:
Quelques critiques de François Speranza, Historien d'art - Cinquième édition revue et augmentée (proposé et réalisé par Robert Paul)
Les billets critiques de François Speranza deviennent de plus en plus connus et attendus avec impatience par les artistes qui font l'objet de commentaires ainsi que par ceux qui ont pu contempler de visu toutes les oeuvres mentionnées et qui attendent des suppléments d'informations afin de compléter leurs ressentis, et d'approfondir leur rencontre avec les artistes.
Il s'agit là d'un précieux corpus qui amplifie nos connaissances et enrichit indubitablement le réseau.
Robert Paul
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L’artiste belge Henriette Fritz-Thys a exposé ses œuvres dans la galerie en 2013. Et son billet d’art du critique d’art François Speranza à été publié dans le « Recueil n° 2 de 2013 » par « Les Éditions d’art EAG » dans la Collection « États d’âmes d’artistes » en 2015.
Lien vers la vidéo lors du vernissage de son exposition dans la galerie :
Tumulte et Facéties sont des toiles magnifiques à mes yeux
Quand miroitent de lumière tous les verts et tous les bleus.
j'aime beaucoup particulièrement tumulte, beaucoup de vibrations. Merci
magnifique Henriette. De la mosaïque! J'apprécie votre travail!
Merci François pour tes textes et tes critiques toujours éclairées .
Tu nous ouvre des horizons nouveaux à chaque fois.
Merci à François Speranza, pour toutes ces informations, nous éclairant, sur les démarches artistiques des artistes.
Bonne journée.
Adyne
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