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HENRI DE MAN (1885-1953)

D'origine bourgeoise, Henri de Man adhère très jeune au mouvement socialiste. C'est en Allemagne que s'achève sa formation, avec un doctorat en philosophie à l'université de Leipzig. C'est en allemand que paraît son premier texte important, écrit en collaboration avec Louis de Brouckère et consacré au mouvement ouvrier en Belgique, texte critique dans lequel les coauteurs sont respectivement très sévères pour l'action coopérative et pour l'action parlementaire des socialistes belges. Malgré la polémique ainsi ouverte, Émile Vandervelde appelle Henri de Man à la direction de la Centrale d'éducation ouvrière, créée en 1911, l'année même de cette publication. En 1917, il accompagne en Russie Vandervelde, qui encourage le gouvernement Kerenski à poursuivre l'effort de guerre. En 1918, il participe à la mission envoyée aux États-Unis par le gouvernement belge afin d'y étudier les méthodes d'organisation scientifique du travail. L'expérience des premières années du siècle, marquées par la guerre et aussi par l'échec de la social-démocratie allemande d'inspiration marxiste, inspire alors un livre écrit et publié en anglais : The Remaking of a Mind (Londres, 1920), dont une version abrégée paraît à Bruxelles la même année sous le titre : La Leçon de la guerre . Après un second séjour aux États-Unis, Henri de Man prend, à la fin de 1920, la direction de l'École ouvrière supérieure, à Bruxelles, qu'il quittera deux ans plus tard, ne laissant guère de regrets à ceux qu'inquiètent à la fois son « révisionnisme » et son indéniable supériorité intellectuelle. Il passe alors dix ans en Allemagne, enseignant à l'Académie du travail de Francfort puis occupant, de 1929 à 1933, la chaire de psychologie sociale nouvellement créée à l'université de Francfort. Au cours de ces années d'intense production intellectuelle, plusieurs livres importants paraissent. Tout d'abord Zur Psychologie des Sozialismus (Iéna, 1926) ; ce livre paraît en français en 1927 à Bruxelles sous le titre Au-delà du marxisme , en italien en 1930 sous le titre suggéré par Benedetto Croce, Il Superamento del marxismo ; Mussolini écrit alors à l'auteur : « Votre critique du marxisme est bien plus pertinente que celle des réformistes allemands ou italiens : elle est définitive aussi, parce qu'elle vient après les événements de 1914-1919 qui ont démoli ce qui restait de « scientifique » dans le marxisme. » Puis La Joie au travail , enquête fondée sur des témoignages d'ouvriers et d'employés (éd. allemande en 1927, éd. française en 1930). Et enfin L'Idée socialiste (éd. allemande en 1933, traductions néerlandaise en 1933 et française en 1935). Henri de Man devient un théoricien en vue du révisionnisme et du planisme caractéristiques de ces années. Sa critique du marxisme, de son matérialisme, de son économisme et de son ouvriérisme, repose sur une conception visant à consacrer des valeurs spirituelles, à faire sa place à l'apport de la psychologie et à prôner l'alliance de la classe ouvrière et des classes moyennes. A peine paru, Die sozialistische Idee est brûlé le 10 mai 1933 sur la place de l'hôtel de ville de Francfort. Henri de Man regagne Bruxelles pour donner à l'université un enseignement de psychologie sociale et prendre la direction du bureau d'études, nouvellement créé, du Parti ouvrier belge (P.O.B.). Il rédige le Plan du travail , projet d'organisation d'un régime d'économie mixte, de lutte contre le chômage et de réforme de l'État et du régime parlementaire, que le P.O.B. adopte officiellement à son congrès de Noël de 1933 et dont il fait, à partir de novembre 1934, une condition de sa participation à un gouvernement. Et pourtant en 1935, il fait partie d'une nouvelle coalition sans que cette condition soit réalisée. Henri de Man est ministre des Travaux publics et de la Résorption du chômage de mai 1935 à juin 1936, puis ministre des Finances jusqu'en mars 1938. Le 28 juin 1940, en Belgique occupée par les troupes du IIIe Reich, Henri de Man adresse aux militants de son parti un manifeste où ayant constaté que « la guerre a amené la débâcle du régime parlementaire et de la ploutocratie capitaliste dans les soi-disant démocraties, [que] pour les classes laborieuses et pour le socialisme, cet effondrement d'un monde décrépit, loin d'être un désastre, est une délivrance [et que] la voie est libre pour les deux causes qui résument les aspirations du peuple : la paix européenne et la justice sociale » (« La paix n'a pas pu sortir de la libre entente des nations souveraines et des impérialismes rivaux ; elle pourra sortir d'une Europe unifiée par les armes, où les frontières économiques auront été nivelées. La justice sociale n'a pas pu sortir d'un régime se disant démocratique mais où, en réalité, régnaient les puissances d'argent et les politiciens professionnels, régime devenu de plus en plus incapable de toute initiative hardie, de toute réforme sérieuse. Elle pourra sortir d'un régime où l'autorité de l'État est assez forte pour saper les privilèges des classes possédantes et remplacer le chômage par l'obligation pour tous de travailler »), il les invite à continuer « l'activité économique de nos oeuvres » mais à considérer « le rôle politique du Parti ouvrier belge comme terminé [et à] entrer dans les cadres d'un mouvement de résurrection nationale, qui englobera toutes les forces vives de la nation, de sa jeunesse, de ses anciens combattants, dans un parti unique, celui du peuple belge, uni par sa fidélité à son Roi et par sa volonté de réaliser la Souveraineté du Travail » Après l'échec de tout projet de gouvernement royal en Belgique occupée, Henri de Man contribue à la constitution de l'Union des travailleurs manuels et intellectuels le 22 novembre 1940, qui organise la collaboration syndicale, lance à l'occasion du 1er mai 1941 un message plein d'ambiguïtés et se consacre quelque temps mais en vain à la création d'une nouvelle force politique. Engagé activement dans la collaboration avec l'occupant en 1940-1941, Henri de Man cesse ensuite toute activité politique dans un quasi-exil en Savoie, avant l'exil définitif en Suisse. Ses dernières œuvres importantes, autobiographiques : Après coup (Bruxelles, 1941), Cavalier seul (Genève, 1948), mêlent amertume et lucidité dans la relation d'un destin tout en contrastes et en contradictions.
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