Statistiques google analytics du réseau arts et lettres: 8 403 746 pages vues depuis Le 10 octobre 2009

des amours de province. 8 et 9. Jeudi. A demain.

                                      8

 

Julie avait déposé l’écouteur après que Pierre eut raccroché. Elle avait mal compris ce qu’il lui avait dit. Elle lui demanderait de s’expliquer à son retour.

Elle eut un frisson. Elle n’était pas certaine qu’il allait revenir. Sa vie venait de basculer, elle le pressentait.

Le lendemain, elle comprit qu’il ne reviendrait pas. C’était une certitude que son corps refusait d’admettre mais dont son cerveau était persuadé.

Elle mit de l’ordre dans la maison. Elle téléphona au bureau pour dire qu’elle avait pris froid.

- Ne soyez pas étonnée, madame Belain, Monsieur Pierre a du s’absenter d’urgence.

Devait-elle téléphoner à monsieur Halloy et s’étonner de ce que Pierre ne se soit pas présenté au bureau. Qu’elle était inquiète, est-ce qu’il était malade ? Il aurait raison de penser qu’elle était stupide. Elle se souvenait des funérailles de Gérard. De l’animosité qui l’entourait.

Deux jours plus tard, elle retournait au bureau. Il était temps de reprendre les choses en mains. Julie était une femme de caractère.

La société Leroy et fils dont elle était devenue la propriétaire était située sur un des boulevards extérieurs de la ville. C’était une grosse maison qui s’élevait au fond d’une cour pavée. Là, se garaient les voitures tirées par des chevaux aux débuts d’une entreprise plus que centenaire. Monsieur Leroy, le père de Gérard, après que le magasinier y avait porté les marchandises, comme son père le faisait avant lui, accompagnait ses clients jusqu’à leur camionnette. La dernière poignée de mains consolidait les liens commerciaux. Gérard, plus timide, avait eu une attitude plus distante.

- Ce sont mes produits qu’ils achètent.

Julie reprit les habitudes de son beau-père. Les affaires s’en portaient bien, et elle avait l’occasion d’entendre ce qui se disait en ville. Pourvu que les marchandises fussent bonnes, personne ne posait des questions embarrassantes. Gérard n’avait pas la cote auprès de ses clients, sa mort leur était indifférente.

Les bruits qui avaient couru évoquaient un fait-divers qui les excita durant quelques jours mais comme à la télévision l’imagination avait fini par brouiller les visages. A devenir moins précise, la rumeur qui s’était amplifiée était en train de se dissiper. 

Julie chargeât madame Belain d’engager un représentant commercial afin de reprendre les tâches effectuées par Pierre. Pas toutes. Les initiatives que prenait Pierre, monsieur Tordoir ne souhaitait pas les prendre ni des décisions qui étaient celles d’un patron. C’était prendre des responsabilités au-delà de celles qu’on affiche.

Etienne Tordoir était un homme de quarante-cinq ans qui venait d’un négoce similaire. Il était marié et il avait deux enfants. Madame Belain avait bien soupesé toutes les hypothèses envisageables. Julie signa son contrat d’emploi sans hésitation.

De toute manière, s’il fallait assister à des Foires Commerciales, elle avait résolu d’y aller seule, il ne s’agissait pas de déplacement de détente.

Quand on aime vraiment, faut-il souhaiter la mort de l’amant plutôt que d’accepter qu’il vous abandonne, qu’il soit vivant ? Heureux peut être ? Avec une autre ? Des réflexions de toute nature lui traversaient l’esprit lorsqu’elle n’était pas occupée avec des clients ou en train de lire ses comptes. En revanche la nuit lorsqu’elle apaisait les pulsions de son corps, c’est à Pierre qu’elle songeait. Puis, elle le haïssait à nouveau lorsque son corps était plus ou moins apaisé.

Un jour, à Paris où elle se rendait de temps à autre pour respirer l’atmosphère d’une grande ville, et qu’elle sortait de l’hôtel, elle passa devant une boutique où on vendait de la lingerie fine. A l’intérieur, c’était des objets érotiques qui étaient exposés. Un instant, elle avait été tentée de sortir. Puis, sans dire un mot, elle désigna à la vendeuse un vibro-masseur.

- Vous avez une préférence pour la tête ?

Elle s’en servit quelques fois mais n’en était pas réellement apaisée. Elle le glissa dans le tiroir de sa table de nuit. Tout au fond.

Liliane avait vraisemblablement raison. On aime avec son cerveau, et on aime avec son corps. Les deux, pas nécessairement en même temps. Alors, l’amour ?

Liliane, la pharmacienne que le docteur Meurisse lui avait conseillée, était devenue une amie. L’officine fermée, elle venait passer la soirée chez Julie. Elles parlaient souvent des hommes. Julie, de Gérard et de Pierre alors que Liliane parlait d’un grand nombre d’entre eux.

C’était une jolie femme à l’aspect un peu vulgaire qui excitait la plupart des hommes. Une nymphomane, disait-on d’elle, mais personne ne lui connaissait de liaison. Ce sont ses propos et une certaine façon de rire qui lui donnaient cette réputation.

- Je sais ce que c’est que d’être jetée.

Elle disait : jetée. C’était plus parlant qu’abandonnée. A son tour, elle jetait ses amants lorsqu’elle avait épuisé leurs ressources. Ou pour le plaisir. Et s’il fallait les payer d’une manière ou d’une autre, comme on dédommage une prostituée, elle le faisait sans hypocrisie. On paye bien un repas.

- Tu vois, tu vois.

Julie venait d’éclater de rire à la description des habitudes d’un monsieur connu.

- Il me demande toujours des préservatifs de la taille la plus grande. Et il en consomme deux par jour. J’espère que je peux compter sur votre discrétion, me dit-il. En réalité, c’est sur moi qu’il veut faire impression.

C’était devenu une habitude. A deux, le soir, elles vidaient une bouteille de vin rouge dont elles jugeaient de la qualité comme de véritables amateurs. Puis, elles parlaient d’elles-mêmes lorsque la bouteille était presque vide, leurs pommettes rouges et les yeux brillants.

Liliane aimait ces conversations qui s’achevaient très souvent par des anecdotes salaces racontées avec naturel. Julie pensait que c’était du à sa formation médicale. Pour les médecins, parait-il, c’était un dérivatif d’après opérations. Avant de se quitter, elles s’embrassaient chaleureusement. Ce n’était pas désagréable.

A plusieurs reprises, Liliane passa prendre Julie à l’heure du déjeuner. Elles avaient décidé de faire tous les restaurants de la région. Il parait, disait-elle, qu’un bon repas contribue à atténuer les peines de cœur. Ne dit-on pas que l’offre d’un dernier verre constitue une invitation à se mettre au lit ? Il existe une intense relation entre le cœur et l’estomac, c’est Liliane qui l’affirmait.

L’endroit qu’elle préférait était le restaurant situé près de l’abattoir communal. Les viandes y étaient succulentes. La clientèle était constituée de bouchers, ceux de l’abattoir au calot blanc sur la tête, ceux qui tenaient boutique et venaient de passer leur commande, de quelques hommes seuls et parfois d’un ou deux couples dont l’ambiance et l’odeur de l’endroit excitaient l’imagination. On y parlait assez fort mais on y entendait rarement des grossièretés.  

Très vite, Julie y devint aussi familière que Liliane. Le gérant du restaurant et les bouchers leur faisaient un salut de la main en disant :

- Bonjour madame Julie

Ou

- Bonjour madame Liliane.

Elles occupaient souvent la même table auprès de la fenêtre ou, lorsque le temps était beau, sur une petite terrasse proche du fleuve.

Personne ne fit jamais une remarque déplaisante à l’endroit de deux jeunes femmes qui appréciaient cette atmosphère d’hommes robustes aux rires faciles, et aux mains qui avaient trempé dans du sang un peu plus tôt.

Julie n’avait connu que Pierre. Il avait été le seul qui l’avait transformée tant physiquement que mentalement. Elle n’avait jamais pensé qu’elle pourrait devenir amoureuse d’un autre homme. Ni même d’en désirer un autre sinon lors des fantasmes insaisissables du rêve.

Liliane avait eu une vie amoureuse agitée mais seulement après la mort de son mari. Avant son mariage, durant ses études elle n’était pas très farouche  Pas davantage en tout cas que nombre d’étudiantes soucieuse d’un mariage honorable.  Elle ne songeait pas à épouser. Elle aimait répéter son histoire à Julie afin de lui démontrer à quel point les hommes sont menteurs. Son mari avait été plein d’attentions au début de leur mariage. Liliane avait été sa laborante. Elle sortait tout juste de la faculté de pharmacie. Elle avait à peine 24 ans. Il en avait trente cinq de plus ? Il était veuf. Il aimait la bonne chère, le vin, l’alcool et le sexe. Tout en Liliane lui donnait envie de la prendre à n’importe quelle heure du jour. Il lui disait :

- Tu vois l’effet que tu me fais. Tu peux le dire, tu sais. Je te fais bien l’amour, hein ?

Un malade, dit-elle. Plus que de l’attirance pour sa femme, il voulait manifester sa virilité. Et qu’elle le dise quand ils recevaient des amis.

Il avait fait installer un poste de télévision sur une petite table en face de leur lit. Couchés, ils regardaient ensemble les films pornographiques des chaines spécialisées ou des cassettes qu’il ramenait de ses déplacements d’affaires. Son mari disait :

- Cela réveille l’appétit.

- Crois-moi, Julie. Le sexe est la préoccupation de tous les hommes

Depuis sa mort, elle avait eu des aventures qu’on dit sans lendemain. Sans en refuser beaucoup.

- La vie est courte, Julie. Le jour où je n’en aurai plus, c’est que mon corps sera devenu tellement moche que ça ne vaudra plus la peine de vivre. C’est le regard des hommes qui te rend belle.

Avant de rentrer, en l’embrassant, le corps abandonné contre celui de Julie, elle ajoutait :

- Fais-toi belle, toujours. Moi, je me parfume partout, ça les rend fous.

 

                                      9

 

Julie n’avait jamais interrogé les amis de Pierre pour savoir si l’un d’entre eux l’avait rencontré. Il vivait dans sa mémoire où il continuait de ressembler à l’homme qui l’avait tenue dans les bras le jour de son départ. Il était immobile comme le sont les personnages dans un film qui s’arrête soudain. Depuis ce soir-là, la pellicule ne s’était jamais remise à défiler. Elle-même était fidèle à cette image. Elle ne convoitait personne d’autre. Dans ce film-là, lui non plus ne tenait jamais une autre femme dans les bras. Même le sexe s’était stratifié. C’était une idée, rien qu’une idée.

Un jour, Jean Cormier lui avait parlé de Pierre. Elle dînait au restaurant de l’abattoir avec Liliane. Jean Cormier, l’inspecteur de la police judiciaire, un ami de Liliane, un ami de Pierre, ils étaient quelques uns que l’adolescence avait réunis dans les mêmes clubs de sport ou la même discothèque à la mode, vint les embrasser.

- Vous déjeunez souvent ici ?

Il s’était installé à leur table, et il avait fait un signe au patron. 

- Tu ne devineras jamais qui j’ai vu avant hier ?

Il avait regardé Julie qu’il n’avait jamais tutoyée jusque là. Les deux femmes firent semblant de ne pas entendre. Liliane allait dire quelque chose. Ce fut Julie qui posa la question.

- Tu as vu Pierre ? Il va bien ?

 Jean fut rassuré. Il avait craint un instant d’avoir commis une gaffe. Il le dit en s’excusant. Liliane n’avait pas l’air de le croire. Jean n’oubliait que rarement qu’il était un policier. Il parla très vite.

- Nous nous sommes croisés. J’ai cru qu’il voulait m’éviter. J’ai crié, Pierre ! Il est revenu sur ses pas.

- J’ai failli ne pas te voir.

En vérité, Jean s’en était douté, Pierre ne voulait pas risquer de rencontrer quelqu’un qu’il connaissait. Qui l’aurait interrogé avec une arrière-pensée. Ou bien c’est lui, Pierre, qui aurait posé des questions dont il aurait craint les réponses.

C’est ce qu’il avait dit en levant les mains avec cette vanité des inspecteurs judiciaires.

Le gérant du restaurant lui avait apporté un verre de whisky dont il regarda la couleur.

- On se demande pourquoi. ?

Ni Julie ni Liliane ne l’interrogèrent. Elles ne semblaient pas intéressées. Jean parla d’autre chose. Il se leva et les embrassa avant de partir.

- A un de ces jours.

Il joue au flic de cinéma, dit Liliane.

Jean Cormier n’avait pas raconté tout ce qu’il savait.

Les relations de Pierre avec Clotilde n’avaient pas été difficiles à connaitre, ni son mode de vie. Mais la vie de Pierre lui appartenait, Jean ne la découvrit pas. Il voulait seulement montrer qu’il savait des choses que d’autres ne savaient pas. Des choses qui suscitaient leur curiosité. Parce qu’il était inspecteur à la police judiciaire, il était censé connaitre la face cachée des choses. Des choses anodines et des choses redoutables. Elles lui donnaient un pouvoir de séduction dont il avait parfois envie d’user.

Pour Julie, Pierre, ce personnage immobile d’un film qui avait cessé de défiler après le coup de téléphone qu’il lui avait donné, se remit à marcher. Le film défilait, et elle en devinait le scénario.

Ce qu’elle savait sans avoir besoin de l’imaginer, c’est que Pierre faisait l’amour à d’autres femmes avec autant d’ardeur sans doute qu’il en avait manifestée quand il la tenait entre les jambes.

Liliane lui avait dit :

- Qu’est-ce que tu crois ? Qu’il était entré au couvent ? C’est un homme comme tout le monde. Cela n’a rien à voir avec l’amour avec un grand A. Et toi, tu n’as jamais de besoins ? Le vibro-masseur te suffit ? 

Durant deux jours, elles avaient cessé de se parler.

A l’approche des vacances du mois de Juillet, Liliane lui proposa de passer huit jours au Club Méditerranée au Maroc, un endroit à la mode.

- Tu verras, ça change les idées.

Ce fut Liliane qui s’occupât des réservations.

Leur chambre située au rez de chaussée s’ouvrait sur la piscine et la terrasse. Tout près d’une piste de danse. Liliane, le soir, était sur la piste, le paréo autour des reins. Elle avait beaucoup de succès.

- Tu devrais danser. C’est agréable et ça ne t’engage à rien de plus.

Un des animateurs, un soir, invita Julie à danser. C’était un bel homme qui aimait à montrer ses muscles, toujours souriant et constamment agité par le rythme de la musique.

- Tu aimes le club ?

Il était torse nu, vêtu de son seul paréo. Il la serrait contre sa poitrine et il avait porté son ventre contre le sien. Elle n’avait pas tenté de s’écarter, et lorsqu’il lui dit en souriant :

- Tu viens dans ma chambre ?

Elle n’avait rien répondu mais elle l’avait suivi.

Depuis, Liliane et elle se sentirent plus proches l’une de l’autre. Julie, dans l’intimité de la nuit, voyait en elle même un aspect de Liliane qu’elle avait repoussé jusque là.

A vingt kilomètres de la ville sur la grand’ route, il y avait une discothèque fréquentée par des dragueurs et des femmes qui souhaitaient se faire draguer. Les jeunes gens qui ne songeaient qu’à boire et à danser se rendaient plutôt au disco-bar, un peu plus loin. Des frontières impalpables, comme dans la vie réelle, se constituaient dans le monde de la nuit selon les affinités et les âges. Chez les plus âgés, souvent, les sentiments s’exprimaient dans l’urgence. La distinction paraissait évidente à des yeux avertis.

Liliane y rencontrait parfois le videur de la discothèque, un robuste personnage, fruste d’aspect, d’une animalité impressionnante, surnommé el Toro. Un homme que personne ne connaissait très bien. Il l’emmenait dans sa chambre, et sans échanger beaucoup de mots, c’est elle qui en disait le plus, ils faisaient l’amour.

Parce qu’elle le lui avait demandé, c’est Julie qu’il avait emmené dans sa chambre, un grenier aménagé d’une table, d’une chaise, d’un poêle et d’un lit métallique. Elle avait dit à Julie, un soir qu’elles avaient trop bu :

- Allons-y ensemble. Lorsque tu avales un médicament, tu te poses des questions particulières ? Tu verras comme on raisonne mieux lorsque le corps est calmé. Même l’amour qu’on porte à un autre homme devient plus vrai. La première fois, il suffit de fermer les yeux.

Le jour n’était pas encore levé quand Julie réveilla Liliane qui sommeillait dans la voiture, une couverture tirée jusqu’au cou. Elle pleurait. Elle voulait rentrer au plus vite. Elle se dégoûtait. Elle voulait se laver. 

- Classique.

Au bout de quelques jours Julie se regarda sans honte dans le miroir. C’est vrai que les caresses amoureuses de quelque nature que se soit ne laissent pas de trace. Le viol le plus insupportable est celui qui marque le cerveau.

Elles recommencèrent l’expérience plusieurs fois. Avec des hommes de hasard qu’elles n’avaient jamais rencontrés ailleurs qu’à la discothèque. Pour Julie, ce ne furent pas des réussites dont on reste marquée. Même lorsque ce fut avec El Toro. Avec El Toro, elle eut la preuve que Liliane avait raison. C’était comme une amère médication. Le premier jour, les réflexions avaient été nombreuses et contradictoires. A un moment de la nuit, en fermant les yeux, la tête sur le côté, elle s’était efforcée de penser que c’était Pierre qui la prenait. A un autre moment, elle avait eu le sentiment que c’était bien lui, Pierre, qui était dans le lit, mais que c’était une autre femme qu’il prenait. Avec la même vigueur qu’El Toro la prenait.

La première fois aussi, comme si la symbolique de la transaction avait atténué l’intensité de ses réactions, elle avait déposé quelques billets de banque sur la table. El Toro avait secoué la tête pour dire : non. Puis, parce qu’elle avait insisté, il avait demandé en souriant : 

- Encore ?

C’est le jour où il l’avait retournée sur le ventre, et qu’il l’avait frappée sur les fesses qu’elle s’était promise de le tuer. Parce qu’elle ne s’y était pas opposée. Il y a des hommes qui ne méritent pas de vivre, pensa-t-elle. Ceux pour qui les femmes ne sont que l’instrument de leurs fantasmes honteux. L’objet soumis et humilié de leurs obsessions. Ceux qui…C’était Liliane qui avait trouvé la définition la plus juste.

- Des hommes en trop.

Elles étaient dans l’arrière-boutique de l’officine. Là où Liliane serrait dans une armoire les substances dangereuses, drogues et sans doute quelques poisons. Des boites de poudre, de petites fioles au liquide incolore que distinguait seulement l’inscription qui figurait sur l’étiquette.

Elles étaient retournées deux fois encore à la discothèque. La seconde fois, elles avaient appris qu’El Toro avait été retrouvé mort dans son lit. Un arrêt cardiaque, semblait-il. On ne lui connaissait personne de proche. On ne connaissait pas son nom véritable. Il travaillait illégalement. Quelques jours plus tard, il avait été enterré dans la partie du cimetière réservée aux indigents. Le patron de la discothèque avait engagé un autre videur. Un robuste gaillard que les clients baptisèrent : el Toro.

Liliane, une fois de plus avait eu raison. Le corps apaisé, comme peut l’être celui de tous les mammifères, la pensée devenait plus claire. Julie n’avait pas le sentiment de tromper Pierre. Elle acceptait qu’il ne soit pas un saint dépourvu de besoins. Ce sont ces besoins précisément dont elle se souvenait. Même s’il en caressait une autre, c’est à Julie qu’il pensait. Chacune des parties de son corps le savait : c’est l’autre qu’il trompait.   

Envoyez-moi un e-mail lorsque des commentaires sont laissés –

Vous devez être membre de Arts et Lettres pour ajouter des commentaires !

Join Arts et Lettres

Commentaires

  • Finalement un grand sentiment de tristesse émane de cette partie de la nouvelle.

    Quel gâchis pour ces femmes. Et que d'ennuis .... soit disant "Au nom de l'Amour" Oui mais lequel ?

    Mais comment avez-vous fait pour avoir une telle connaissance des femmes ?

    C'est hallucinant et vous écrivez vraiment fort bien. L'on s'y  croit.

    Bonne soirée. Rolande

This reply was deleted.

Sujets de blog par étiquettes

  • de (143)

Archives mensuelles