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Alvéoles - Le voyage de Judith (7)

Dans l’extrait précédent, Judith perd espoir, et plonge vers l’obscurité.

 

Le ciel était très clair, comme au beau milieu de l'été, et pourtant des milliers d'étoiles y brillaient. Judith n'aurait pu dire où était le soleil, bien qu'elle en sentît les bienfaits sur sa peau. La jeune mariée était posée là, immobile et nue, au beau milieu d'une prairie d'un vert intense. Tout autour d'elle était figé, jusqu'au moindre brin d'herbe. Aucun bruit ne semblait pouvoir troubler le monde où elle venait d'atterrir, à tel point qu'elle se mit à douter de ses capacités auditives.

Jusqu'à ce qu'une voix lui dise :

— Tu m'as fait peur.

(…)

Judith aurait donné une fortune pour pouvoir sursauter en entendant la voix qui l'avait interpellée, mais elle était restée immobile, à l'image de tout ce qui l'entourait. Elle s'étonnait même d'avoir pu entendre quelque chose, tant le monde où elle s'était retrouvée lui avait paru figé. Une vague de soulagement l'envahit lorsqu'elle put s'entendre dire :

— On se connaît, non ?

Les lèvres de Judith n'avaient pas bougé. Ses poumons n'avaient pas expulsé la moindre particule d'air. La réponse était pourtant venue immédiatement :

— Oui, j'étais avec maman dans la grande salle où il y avait tous ces gens malades. Pourquoi tu t'es battue avec les docteurs ?

La jeune fille apparut enfin dans le champ de vision de Judith. Elle s'assit, cligna des yeux comme si elle était gênée par un hypothétique soleil, et regarda Judith comme une maman son enfant malade. Elle avait le visage rond, de vilaines cernes sous les yeux. Elle pouvait visiblement se mouvoir librement dans cet environnement d'une totale immobilité.

— J'avais des convulsions, dit Judith.

— Des quoi ?

— Des convulsions. Un peu comme le hoquet, mais en beaucoup plus fort. En fait, je ne pouvais pas contrôler ce qui m'arrivait. Mes bras et mes jambes faisaient ce qu'ils voulaient. Dis-moi, tu n'as pas une mine de petite fille en pleine forme, toi. Tu manques de sommeil ?

— Je suis malade. J'ai le virus de Justine Henin, mais maman m'a dit que je m'étais trompée, que c'est la grippe.

À nouveau, Judith ressentit comme un sursaut immobile. H1N1. Elle serait comme moi ? Dans le coma ?

— Tu es malade ?

— Je vais mieux, a dit le docteur. Comme papa, il va mieux aussi.

— Tu vas mieux ? Tu es sûre ?

— Oui, oui, d'ailleurs, j'ai faim, j'aimerais bien que maman m'apporte quelque chose à manger, mais elle est loin.

— Tu t'appelles comment, encore ?

— Valérie.

— Valérie, je ne peux pas bouger. Tu veux bien faire quelque chose pour moi ?

— Tu voudrais savoir si je suis vraiment vivante ?

Judith marqua un temps avant de reprendre.

— Tu lis dans mes pensées ?

— Je ne sais pas, répliqua la jeune fille après une courte hésitation. Ta bouche ne bouge pas.

— Mais tu m'entends ?

La jeune fille émit un petit rire amusé :

— Ben oui, sinon, je pourrais pas te répondre !

— Bon, tu veux bien ?

— Je dois faire quoi ?

— Approche ton poignet de ma bouche, juste contre mes lèvres, comme si j'allais lui donner un bisou. Je ne peux pas bouger, mais je vais peut-être pouvoir sentir si ton cœur bat.

Valérie considéra la jeune mariée avec des yeux ronds.

— Pour quoi faire ?

— Je voudrais savoir, Valérie. Je suis docteur, donc je suis curieuse.

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Commentaires

  • Merci beaucoup!

  • Merci Eric, il ya beaucoup de délicatesse dans ton écriture. J'aime beaucoup.

     

    Merci encore

    Assia

  • Merci Eric, j'ai lu avec beaucoup d' intéret ton "voyage de Judith",le 7éme épisode. Mieux, je suis plongée dans celui! J'irai  lire toutes les autres épisodes. Il faut du temps..pour moi!

    Merci Liliana

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