Confidences trop intimes de Jérôme Tonnerre
Parce qu'elle s'est trompée de porte, Anna s'est retrouvée à confier ses déboires conjugaux à un conseiller fiscal, William Faber, coincé, cravaté et blême. Touché par sa détresse - troublé aussi - l'homme n'a pas le courage de lui avouer qu'il n'est pas psy, contrairement à son voisin de palier. De rendez-vous en rendez-vous, de confessions en confessions, un étrange rituel s'instaure entre eux, les rendez-vous s’amoncellent. L’addiction mutuelle s’installe. William est à chaque fois ému par la jeune femme, et fasciné d'entendre ce qu'aucune femme ne livre jamais. Qui est donc Anna ? Qui est dupe ? Qui joue quel jeu ? Le psy qui habite à côté, finit par faire une thérapie d’Anna par procuration en recevant William contre espèces sonnantes et trébuchantes. Ce sont les moments les plus savoureux ! Le psy est point pour point celui qu’on imagine dans les caricatures les plus délirantes. Le psy : « N’oubliez pas, le premier organe sexuel, c’est l’oreille ! » Et alors que William veut soudain abandonner son aventure amoureuse à peine amorcée…il lui souffle : « La pureté analytique vous interdit de changer de rôle ! » Et autres balivernes succulentes de psy.
Ce sont donc les deux personnages secondaires qui donnent du relief à ces rencontres: l’ex- femme de William : Jeanne, chaleureuse, et gentiment jalouse de la mystérieuse visiteuse, et ce psy magnifiquement campé, caustique à souhait et interprété avec excellence par Michel Israël.
Mais à la manière des thérapies, la pièce piétine, barbotte un peu. Il y a de bons mots, de fines réparties, des mystifications. Mais la succession des scènes alternativement dans le même décor des appartements jumeaux dotés des mêmes meubles - une fois chez le psy une fois chez le fiscaliste - rendent l’affaire un peu monotone. Soulignons par contre la qualité de la musique : entre valses de Vienne, Hitchcock et « in the mood for love », celle-ci donne à l’ensemble un modelé pittoresque.
La valse hésitation de William s’éternise cela fait rire intérieurement ou attire la compassion sur ce personnage grave qui a oublié de vivre. Affublé d’une cravate sévère, vieux garçon rangé et méthodique, il ne se départit que rarement de son sérieux d’enfant sage et triste, comme s’il était puni par la vie et imperméable au désir. Deux fenêtres blêmes deviennent presque des personnages à part entière. Elles l’ont vu naître, le surveillent et le feront enfin sortir de ses gonds.
L’air de rien, sans y toucher, c’est quand même lui, William, qui a patiemment reconstruit Anna, incapable de se passer de ses cigarettes jusqu’à sa guérison. Anna est son Pygmalion, mais on aurait néanmoins souhaité à William une rencontre avec une fille de plus d’épaisseur, de verve et de charme, pour faire drôle plutôt que doux-amer. Qu’elle eût été plus malheureuse de sa relation perdue avec son mari, plus affolée, plus désespérée aurait donné un peu de sauvagerie à ce vaudeville de divan par ailleurs bien mené.
CONFIDENCES TROP INTIMES
de JÉRÔME TONNERRE d’après le film de PATRICE LECONTE
Mise en scène: BERNARD YERLÈS / avec ALAIN LEEMPOEL, CATHERINE CONET , HÉLÈNE COUVERT et MICHEL ISRAËL
DU 27/10/11 AU 03/12/11
Commentaires
Bientôt:
Avenue Paul Hymans, 251
1200 Woluwe St Lambert