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        GILLES BEYER DE RYKE : HORIZONTALITÉ ET VERTICALITÉ, DEUX AXES D’UN MÊME SIÈCLE.

Du 02-10 au 31-10-20, l’ESPACE ART GALLERY (83, Rue de Laeken, 1000 Bruxelles) a eu le plaisir de vous présenter de vous présenter l’œuvre du peintre belge, Monsieur GILLES BEYER DE RYKE, intitulée : VUE SUR LE 21ème SIÈCLE.

Le titre de cette exposition, même s’il est inconsciemment entré dans les mœurs, comporte une particularité pour le moins intrigante : on ignore s’il est envisagé a priori ou a posteriori. Le 21ème siècle n’a que vingt ans d’ancienneté. Or, pour qu’il y ait une vue pertinente sur un siècle, il faudrait qu’il soit, sinon derrière nous, du moins en être arrivé à la moitié. Cette vision, décidément a posteriori n’est pas récente, elle est déjà ancienne d’une dizaine d’années. Que l’on nous comprenne bien, ceci n’est pas un reproche mais une constatation.

En ce qui concerne GILLES BEYER DE RYKE, cette vision est sciemment calquée sur le moment présent du siècle. C’est sous la forme d’un florilège stylistique renfermant des expériences expressionnistes, métaphysiques mais aussi cubistes que l’artiste affirme son regard sur le siècle courant. Pour renforcer son écriture picturale, une forme involontaire de « cinétisme cubiste » s’affirme dans une uniformité axée sur une verticalité que sous-tend une savante dimension perspectiviste, témoignant d’une extrême connaissance de la peinture classique. Mais également une horizontalité, laquelle se retrouve dans des œuvres témoignant d’une aura mélancolique. Les œuvres se divisent en toiles isolées ainsi qu’en diptyques et en triptyques. Chacune d’elles se développe spatialement à l’intérieur de ses proportions.

Envisageons ce triptyque : OUVERTURE (92 x 32 cm-huile sur toile x 3)

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Chaque panneau est pleinement centré sur une section de la scène pour former une entité. Cette fenêtre ouverte sur le littoral (panneau de droite) est construite sur un jeu de perspectives fort intéressant qui trouve son élan à partir de son bord, bien avant que l’œil n’atteigne la fenêtre en tant qu’élément physiquement tangible. L’artiste avance étape par étape. Le rebord s’inscrit à la fois chromatiquement et spatialement à l’intérieur du module du quadrilatère. Il remplace la fonction du cadre. L’on s’en aperçoit en regardant les quatre coins du tableau soulignés par un fort trait noir.

Les bords de ce cadre sont scandés par l’orange du rebord de la fenêtre et le rouge foncé des parois latérale et supérieure du cadre faisant office de mur portant. La fonction des couleurs est celle d’accentuer les effets de perspective : l’orange du rebord amène le regard vers le vert du chambranle, lequel conduit vers le jaune du sable, avant d’atteindre le paysage marin.

Au-delà de la fenêtre, s’ouvre une scène formée par quatre zones chromatiques initiales : le jaune de la plage, le bleu (en dégradés) de la mer, alternant avec le bleu foncé du ciel (dont le reflet s’amorce tout en devenant plus clair à partir du panneau de droite). D’autres couleurs émergent discrètement. Les édifices, de taille variable, varient de l’orage au vert, en passant par le bleu (le premier édifice que la fenêtre ouverte du panneau de droite annonce). Un « champ » d’immeubles, au loin parsemés, confèrent à l’ensemble, un rythme des plus intéressants. Essaimés vers l’arrière-plan, leur hauteur épouse les dépressions du terrain.

TERRE DES HOMMES (70 x 50 cm-huile sur toile)

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Il y a aussi une volonté expressionniste dans l’œuvre de l’artiste. Le titre de ce tableau, agencé avec la vision délibérément expressionniste du rendu graphique, font que cette mégapole prend des allures menaçantes. Qu’est-ce qui rend ce graphisme si expressionniste? Essentiellement le choc de deux couleurs rageusement vives, à savoir le rouge et le jaune des immeubles, conçus comme des sortes de crayons au garde-à-vous, enveloppés par la chape noire du ciel, lequel occupe l’espace extrêmement réduit du coin droit supérieur de la toile. Ce vocabulaire expressionniste rend compte d’une vision pessimiste de l’humanité, sinon future du moins actuelle. La présence de l’édifice se déployant de tout son long, traduit le rejet par l’artiste de l’uniformité culturelle ambiante.

Comme nous l’avons évoqué plus haut, GILLES BEYER DE RYKE est à la croisée de plusieurs styles, forgeant son écriture picturale : l’expressionnisme dicté par l’influence d’Egon Schiele et mais aussi par le symbolisme de Léon Spilliaert ainsi que de l’art métaphysique de Giorgio de Chirico. Sans parler de ses rendus cubistes exprimés de façon cinétique. Mais que l’on ne se méprenne pas, il ne s’agit en rien d’un cubisme et d’un cinétisme volontaires. Le cubisme en tant que tel ne l’a jamais véritablement influencé. Il en va de même en ce qui concerne le cinétisme. Ces deux styles ne sont que le résultat d’une mathématique engendrée par sa maîtrise de la perspective, laquelle demeure toute personnelle, en ce sens qu’en aucun cas elle ne pourrait être comparée avec celle de la Renaissance italienne.   

Il s’agit d’une vue contemporaine revisitant dans un langage contemporain une convention à la fois humaniste et picturale datant du 16ème siècle.

Parmi les références picturales de l’artiste, nous avons, entre autre, signalé le peintre autrichien Egon Schiele. Affranchi de l’influence de Klimt, Schiele apportera une révolution personnelle à la symbolique du corps humain. Il le peindra meurtri et malingre, mettant en parallèle la déliquescence corporelle avec la décadence de la bourgeoisie de l’époque. Outre les élongations et déformations physiques, le chromatisme appuiera cette mise en scène de la décadence psycho-physique par des teintes lugubres, telles que le noir ou le violet.

GILBERT BEYER DE RYKE reprend cette esthétique en l’adaptant non pas aux corps humain mais au corps urbain, en présentant les gratte-ciels comme de longs corps malades, dont l’élévation se termine de manière effilochée, presque filiforme. L’état de pourrissement du corps se transforme en une sombre pathologie urbaine et lugubre.

L’ARC DE TRIOMPHE (92 x 33 cm-huile sur toile)

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Ce diptyque aux couleurs ternes est censé glorifier l’arc de la victoire présent sur le bas du panneau de droite. Sa présence est timide, insignifiante. Il croule sous les édifices squelettiques, en élévation. L’œuvre est bi-chromée : noir et gris, alternant avec le blanc qui recouvre les toits. On peut y voir une « parabole » picturale de l’image du « Triomphe ». Image flamboyante dans son symbolisme mais altérée par la dimension squelettique (mortifère) des édifices, comme un crachat lancé au visage d’une beauté défunte. Notons qu’avant de se consacrer à l’univers urbanistique, l’artiste s’était concentré sur le corps humain en tant qu’expression des tensions humaines.   

ESTACADE DE NIEUPORT (100 x 66 cm-huile sur toile)

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Cette oeuvre traduit la forte influence de Spilliaert. Cette estacade, laquelle de l’avant-plan, traverse l’espace jusqu’au plan moyen de la toile pour se jeter dans la mer, se déploie dans une continuité chromatique faite de couleurs à la fois tendres et ternes qui incitent à la mélancolie. L’association de deux verts (avant-plan et plan moyen) annonce le bleu foncé du large se confondant avec l’horizon, signifié par une zone blanche se déployant horizontalement sur tout l’espace. Le ciel maussade se signale par un contraste entre une zone brune et une zone noire annonçant la nuit.

L’estacade est une longue succession de notes blanches, marron et noires, composant avec le mur en briques bleu-foncé, réalisé en damier, situé en contrebas, sur la gauche. L’ensemble se déclame comme une longue composition cinétique qui apprivoise et emporte le regard. La présence du phare, au loin, terminant la digue est une longue ligne verticale, conçue comme un point de repère, indissociable de la plupart des œuvres marines de Spilliaert. Même si l’artiste l’a peint parce qu’il se trouvait là au moment où il l’a peint, la présence du phare, en tant que point de repère, est une constante dans les marines de Spilliaert. Une lueur au cœur de la nuit.

DIGUE DE NIEUPORT (98 x 97 cm-huile sur toile)

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Nous propose un discours similaire dans une esthétique contemporaine. Ce qui interpelle le visiteur c’est (outre la beauté des couleurs, engendrant une mélancolie sincère) la puissance visuelle de la droite, partant de l’avant-plan pour se perdre au loin, dans un point que l’œil n’arrive plus à atteindre. Cette droite, réalisée en brun-clair, est une piste sur laquelle se réfléchissent les ombres des bâtiments, exceptionnellement conçus en dimensions réduites afin de ne pas l’emporter sur la puissance picturale de la droite, rendue inatteignable.

Nous nous trouvons avec ces deux dernières œuvres, dans une « temporalité » horizontale. Car il s’agit d’un temps de mélancolie, propice à la méditation, laquelle est engendrée à la fois par la scansion des couleurs, à la fois sombres et tendres, mais aussi par cette ligne droite partant de l’avant-plan et s’arrêtant là où l’œil n’a plus prise sur le temps.

DEUX SOUVENIRS (70 x 60 cm-huile sur toile) Nous sommes à la charnière entre la dimension mystique intemporelle, chère à de Chirico et l’écriture personnelle de l’artiste. La structure en pierre, enveloppante entourant la statue équestre à laquelle font face les deux personnages, traduit l’influence du peintre italien. Les lignes droites faisant office de plages de couleurs horizontales, mettent en exergue l’écriture de l’artiste. Le chromatisme de la structure en pierres reste fidèle à l’esthétique de Giorgio de Chirico.  

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ENTRE DEUX MONDES (100 x 66 cm-huile sur toile)

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Dans une écriture décidément contemporaine, l’association entre l’influence séculaire arabo-muslmane traduite par les fenêtres, à l’avant-plan, donnant sur une section de la métropole, géométrique à outrance et déshumanisée, forme un contraste saisissant entre la sécularité culturelle présentée comme l’image d’un passé, révolu dans sa mélancolie poétique et la classification géométrique de l’urbanisme contemporain, ressenti comme l’harmonisation forcée d’un chaos. Il y a dans cette œuvre, l’image d’un dualisme délicatement obsédant qui cherche une issue.

RUE DE LA LOI (70 x 50 cm-huile sur toile x 2)

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A’ l’immense surprise du visiteur, cette œuvre, construite sur deux panneaux se présente comme un jeu de perspectives, aux allures de trompe-l’œil. L’artiste propose faussement deux vues de la ville : une en plan, montrant des gratte-ciels (panneau supérieur). L’autre, en plongée, axée sur un angle créant l’impression (au sens pictural du terme) d’un vertige (panneau inférieur). Ces deux panneaux produisent un effet « en contrepoint » en la présence de deux verticalités distinctes, l’une visuellement opposée à l’autre, créant ainsi une opposition visuelle entre deux dynamiques, à l’origine d’un trouble cognitif. L’erreur que pourrait commettre le visiteur à l’approche de cette œuvre, serait de considérer sa lecture en partant du haut pour atteindre le bas, voire de ne faire aucune distinction entre les deux panneaux en les considérant comme deux instantanés d’une même réalité urbaine. En réalité, il faut considérer cette œuvre comme une étude sur la genèse de la verticalité, présentée ici dans son élan carrément gothique, jusqu’à atteindre le point culminant de son élévation. C’est à partir du panneau inférieur que tout commence l’ascension. A’ partir de différents points dans l’espace, sortent en verticalité des gratte-ciels, lesquels partant du plan moyen, s’élèvent en flèche jusqu’à atteindre le bord du panneau supérieur. Celui-ci les reprend dans une perspective nouvelle pour porter leur verticalité à son terme. Le panneau inférieur témoigne d’une splendide conception de la perspective, usitée comme une focale pour concevoir un cliché photographique.

Elle se poursuit dans le splendide « quadrillé » formé par les fenêtres de l’édifice (dont on ne voit qu’une section), à l’avant-plan. Le côté « réticulaire » des carrés piège la lumière réfléchie par le ciel. Axée sur une plongée, observez l’excellente disposition des voitures dont le débit s’écoule sur des files de trois lignes. Les passants, marchant sur le trottoir, ne sont que des points à peine perceptibles que l’œil distingue à peine.

Nous avons, à l’instar de TERRE DES HOMMES (cité plus haut), affaire à une parabole contemporaine : l’Homme conditionné, écrasé sous le poids de la mégapole.

Les couleurs (vert-clair/foncé, bleu (clair/foncé), jaune, blanc et noir) contribuent à augmenter la perspective de l’œuvre.

Les vues sur ce 21ème siècle (somme toute) débutant sont des « instantanés » reprenant des problématiques (pour le moment) majeures qui le structurent, sur lequel l’artiste se pose, comme il le spécifie lui-même en « augure ». Au-delà d’une vue parfois pessimiste (TERRE DES HOMMES), il accompagne la vision de ce siècle d’une aura de rêve, comme pour lui faire entrevoir, in fine, la possibilité d’un sauvetage moral. A’ partir d’une perspective essentiellement personnelle, l’artiste engage un dialogue humaniste avec son époque.  

GILLES BEYER DE RYKE a une formation académique. Il a fait ses études à l’Académie Royale de Bruxelles ainsi qu’à L’Académie d’Uccle. A’ partir de son écriture picturale actuelle, il estime avoir encore beaucoup de choses à explorer dans ce domaine. Sa technique est essentiellement basée sur l’huile.

Comme nous l’avons précisé plus haut, avant d’aborder cette vision de l’humanité, il était axé sur le corps humain, exprimé en tant que réceptacle des tensions humaines. Ce passage entre le corps et la ville se traduit dans une dialectique composée de lignes horizontales, tournées vers l’élévation et verticales, visant un infini inatteignable, mettant en exergue le tréfonds de l’humain dans l’expression la plus vivante de sa condition. 

François L. Speranza.

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 Collection "Belles signatures" © 2020 Robert Paul

 

N.B. : Ce billet est publié à l'initiative exclusive de ROBERT PAUL, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis. 

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Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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L'artiste GILLES BEYER DE RYKE et François Speranza : interview (masquée !) et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles.

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Photos de l'exposition de GILLES BEYER DE RYKE à l' ESPACE ART GALLERY  

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Du 02-10 au 31-10-20, l’ESPACE ART GALLERY (83, Rue de Laeken, Bruxelles 1000) a le plaisir de vous présenter une exposition consacrée au peintre français, Monsieur OMER AMBLAS, intitulée : DEVOIR DE MÉMOIRES.  

Quelles sont les constantes entre un paysage et un visage humain? Le visage, à l’instar du paysage est un terrain perméable aux émotions car il s’imprime sur l’autre dans les expressions variables d’un état d’âme. Et qu’est-ce qu’un état d’âme sinon l’expression d’un vécu ressenti dans sa réalité immédiate?   

Tels des paysages, les visages d’OMER AMBLAS présentent souvent des régions aux anfractuosités telluriques rappelant les stigmates d’une âme qui interroge ses états progressifs dans sa finalité créatrice.

Le visiteur le remarque au premier regard. Quel que soit le format des toiles exposées, le thème de prédilection de cet artiste est le visage humain. Un visage modelé selon sa volonté en lui conférant une dimension hyperbolique, à la charnière entre peinture et sculpture, concrétisée par la présence du masque. Le volume du visage s’enserre dans le module du cercle. Et l’élément qui confère la ligne de force au faciès est l’élaboration du nez, conçu comme une arête fine, scindant le visage en deux parties distinctes. Les yeux et la bouche ne sont que délicatement esquissés. Un trait, tout aussi léger, souligne la circonférence du visage incluant le nez dans toute sa longueur ainsi que les yeux et la bouche sommairement exprimés. Remarquons qu’à aucun moment la représentation du personnage ne varie tant dans son attitude que dans ses attributs. Néanmoins, le jeu du traitement chromatique impose sa force sur la viabilité de la composition, rendant cette immuabilité identitaire extrêmement parlante et dynamique. L’autre élément contribuant à dynamiser l’œuvre de l’artiste est la matière étalée au couteau sur la toile, laquelle laboure littéralement la surface, accentuant ainsi la présence des chairs, à l’origine d’une forte sensualité plastique. Les couleurs, généralement très vives, accentuent la vitalité de l’œuvre. Y a-t-il une symbolique dans la conception des visages? Force est de constater que nous nous trouvons face à une sphère reposant sur un cou faisant office de socle. La dimension sphérique du crâne n’est pas sans rappeler celle du globe terrestre. Campé au centre de la toile, il surgit de l’arrière-plan, généralement monochromatique, tel un astre.

De plus, sa conception sphérique fait qu’il est comme propulsé vers l’avant, comme s’il voulait sortir de l’espace scénique.

L’artiste traduit ses états d’âme. Cela se remarque par la présence de coups de brosse, étalés sur la surface, « effaçant » presque les éléments caractérisant le visage, tels que les yeux et la bouche. Cette sorte d’ « effacement » se poursuit au tréfonds de l’identité de ses personnages. Certains d’entre eux sont censés être des femmes. Mais aucun indice concernant le genre ne transparait à l’œil. Les seules indications apparaissent dans les titres. Force est de constater que l’artiste a créé des personnages (pour le moins) asexués.  

Situés sur deux niveaux, le premier espace de la galerie propose des œuvres de grandes dimensions. Elles se caractérisent par une série de visages labourés, presque à outrance, par un passage répété par la brosse et le couteau. Les « éléments » se retrouvent dans sa peinture : la terre, ou plus exactement, le sol terreux sont consubstantiels à l’expression de ses états d’âme. L’artiste les expose dans un mariage mystique, triomphant à l’intérieur d’un Moi tout en nuances. Que se soit dans les petites dimensions comme dans les grandes, nous retrouvons la même esthétique. Néanmoins, les grandes dimensions offrent de par leur espace, l’opportunité d’un plus grand développement graphique.

Les états d’âme de l’artiste passent de phase en phase. D’un visage net de supplément de matière, le rendant totalement discernable, OMER AMBLAS passe progressivement vers un visage aux accents tourmentés.

JASE (80 x 80 cm-technique mixte) 

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Cette oeuvre nous propose un crâne à l’aspect d’une planète posé sur un cou lui servant de socle. L’expression est, sinon « heureuse », du moins « sereine ». Rien ne laisse entrevoir l’émergence d’une passion. Mais au fur et à mesure que le visiteur avance à l’intérieur de l’exposition, l’atmosphère devient plus dense. Observons qu’à aucun moment elle ne devient tendue. Elle prend simplement des accents plus « sérieux ».

ARDALOS (100 x 100 cm-technique mixte)

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Cette toile subit un intense traitement au couteau. Son passage sur la surface de la toile a pour but d’aplatir les glacis pour les faire ressortir dans d’infinies variations chromatiques. Les couleurs usités sont le rouge, le bleu, le blanc, le vert et le noir, en dégradés.

MATHILDE (100 x 100 cm-acrylique sur toile)

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Cette image survient telle une apparition. A’ partir du contraste créé par le noir, enserré à l’intérieur du jaune-or, faisant office de « cadre », un visage semble sortir de la nuit.

Nous avons évoqué plus haut le côté « asexué » des personnages. MATHILDE ne déroge aucunement à la règle. Par sa seule sa dimension épiphanique surgissant de la nuit tel un rêve, une féminité inattendue prend naissance. De plus, le contraste réalisé par la note noire à l’intérieur du jaune, confère à l’ensemble l’aspect d’une niche, à l’intérieur de laquelle apparait l’image d’un sacré.  

A’ la manière d’un ectoplasme, les couleurs tendres par lesquelles est conçu le visage le rendent doux. Les traits fins soulignant l’arête du nez ainsi que le contour des yeux et du bas du visage, renforcent cette douceur.  

Les couleurs par lesquelles il est conçu sont le blanc sur la partie gauche du visage (droite par rapport au visiteur), le bleu, le rouge, le noir et le jaune, en dégradés. A’ peine affirmées, elles contribuent à illuminer cette apparition. Il y a, notamment dans cette œuvre, la volonté picturale d’un effacement exprimé dans la conception du visage. Cela traduit le ressenti de l’inachevé, conçu comme le passage d’un rêve, lequel ne peut acquérir la même profondeur qu’une chose aboutie. D’où l’importance de cet effacement que l’on pourrait traduire par le passage physique d’une Mémoire s’estompant.   

ZETHOS (110 x 110 cm-technique mixte)

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Cette œuvre est l’empreinte d’un souvenir de l’artiste. La matière couleur ocre dominant l’entièreté de l’espace jusqu’à la partie gauche (droite par rapport au visiteur) du visage, est en réalité de la terre provenant du Berry, une région très prisée par l’artiste. C’est avec cette terre qu’est réalisée la poterie locale. L’artiste en a été tellement fasciné, qu’il a demandé à ce qu’on lui en donne un peu pour pouvoir l’utiliser dans la réalisation de cet opus. Le résultat est spectaculaire! La dominante ocre confère à la toile un statut carrément sculptural. Et le mot n’est pas trop fort. Car il y a de la « sculpture » dans l’œuvre de l’artiste. Particulièrement si nous considérons ses peintures comme des « masques », tant dans le sens psychologique du terme : la mise en scène de la Persona que dans l’acception culturelle du vocable : l’origine guadeloupéenne de l’artiste fait que l’atavisme africain apparaît comme un lointain appel.

L’artiste a d’ailleurs pratiqué la sculpture sans être sculpteur pour autant. Autant cette œuvre est le fruit d’une expérimentation consistant à utiliser cette terre du Berry comme matériau à appliquer sur sa toile, autant la pratique de la sculpture a été pour lui l’occasion de se frotter à une forme d’art inconnue.

Si le visage humain est conçu en forme sphérique, c’est parce qu’il évoque la vie dans l’avènement de la naissance du Monde. L’artiste ne parle jamais de « portraits » en ce qui concerne ses visages mais bien d’ « états d’âmes anonymes » car ils touchent l’Etre humain dans son tréfonds, tout en les rendant personnels.

Ses visages évoquent dans leur intériorité toutes sortes de joies et de souffrances répondant à la sensibilité de l’artiste ainsi qu’à sa culture personnelle, structurée par ses lectures. La matière est pour lui l’âme du tableau car elle participe à le rendre vivant.

Et le contact avec la matière est tel qu’il peint à quelques centimètres de la toile. Même si la perfection n’existe pas, la peinture est ce qu’il appelle un « jeu » lequel doit le mener à un niveau de satisfaction personnelle. Et cette satisfaction s’accomplit lorsqu’il atteint l’aboutissement pictural dans l’équilibre des couleurs. L’artiste dont le talent fut découvert par sa maîtresse d’école, n’a pas toujours peint des visages. Une fois entré dans le domaine artistique, il a peint des personnages entiers. Le visage est arrivé le plus naturellement du monde. Progressivement, il a séduit un public exigeant qui n’a eu cesse de lui passer des commandes. Autodidacte à ses débuts, il a suivi une formation en dessin. Une fois entré aux Beaux Arts, il s’est inscrit en architecture. Ce passage aux Beaux Arts lui a donné l’opportunité d’étudier l’Histoire de l’Art. Découvert par Jean Porte, il a initié son parcours artistique. Il est très côté à Paris et depuis sa première grande exposition au Grand Palais, en 1981, il continue à faire l’objet de nombreux événements artistiques. L’artiste travaille essentiellement au couteau. Une fois que le fond est en place, la matière arrive sur le couteau le plus adapté. Les glacis sont aplatis par l’instrument pour mieux les faire ressortir. La technique usitée est mixte (poudre de marbre, mortier, huile…). L’acrylique fut sa première forme d’expression. Insatisfait, il s’orienta vers l’huile laquelle permet de l’accoupler avec de la matière telle que de la poudre de marbre (évoquée plus haut) et des médiums. OMER AMBLAS ne se réclame d’aucune influence, sinon celle de la vie de tous les jours. Que l’on nous permette, néanmoins et ce avec tout le respect qu’on lui doit, d’évoquer furtivement, en ce qui concerne la conception de ses visages (particulièrement les yeux et la petite bouche en cœur) le nom du peintre belge Roger Somville.

Nous avons demandé à l’artiste s’il le connaissait. Il nous a répondu par la négative. Bien sûr, l’on ne peut en aucun cas établir une comparaison stricte entre ces deux esthétiques. Néanmoins, ce sentiment émoustille la curiosité du visiteur. Cela fait partie de ces quelques beaux imprévus de la vie.   

OMER AMBLAS est un peintre qui comme tous les excellents artistes, oblige le visiteur à passer et repasser devant chacune de ses toiles. Car ce dernier pourrait avoir la sensation d’une approche « facile » dans son exploration. En réalité, l’œuvre se révèle des plus complexes à interpréter. Enrobée d’une poésie mêlée d’onirisme et de magie, elle nous ramène à notre for intérieur où bien des ectoplasmes, rageurs ou candides pointent leur visage, ivres d’une issue. Ils sont le passage de nos Mémoires.

François L. Speranza.

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Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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L'artiste OMER AMBLAS et François Speranza : interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles

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Photos de l'exposition d'OMER AMBLAS à l'ESPACE ART GALLERY  

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                      JEAN-FRANҀOIS SCHEMBARI OU L’EFFACEMENT INELUCTABLE DU SUJET

Du 07-02 au 29-02-20, l’ART ESPACE GALLERY (Rue de Laeken 83, Bruxelles 1000) a présenté une exposition consacrée à l’artiste français JEAN-FRANҀOIS SCHEMBARI, intitulée : VOYAGE INTÉRIEUR.

Ce qui, chez JEAN-FRANҀOIS SCHEMBARI, frappe au premier regard, c’est la puissance par laquelle sa technique magnifie l’œuvre jusqu’au moindre détail. Cette puissance a pour but de la révéler dans sa matérialité « rustique », exprimée par ce côté « rugueux », brillamment mis en relief par un travail titanesque exercé, notamment, par le couteau et par les brosses. Cette même matérialité trouve son impact dans une manière de peindre comparable à une calligraphie « calquée », à l’intérieur de laquelle la forme trouve sa corporalité.

LE CIRIO (2) (100 x 81 cm- fond laque de garance)

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Cela devient parfaitement flagrant avec LE CIRIO (2), en chaque élément le composant. Observez attentivement le garçon de café lever son bras droit qui saisit quelque chose. Le bras est compris à l’intérieur d’un sillon (conçu de façon translucide) qui l’enveloppe totalement, mettant en exergue la blancheur des chairs ainsi que la tension (même légère) musculaire, appuyant la dynamique du mouvement ascendant. Cette technique qui est en fait une écriture à part entière, laisse au regard le sentiment qu’il s’agit de formes « négatives », émanant de la surface plane. Le chromatisme est entièrement conçu dans des couleurs vives, telles que le rouge, le brun, le vert et le jaune. Le plan moyen de l’espace est dominé par le rouge et le jaune ainsi que sur la zone unissant l’avant à l’arrière-plan (concrétisée par le parquet), associé au rouge vif que l’on retrouve pour assurer la matérialité massive du comptoir. Le tout soutenu par une haute note blanche à l’arrière-plan, conférant à l’œuvre une luminosité rarement égalée dans sa dimension diaphane.

LE CIRIO (100 x 81 cm-fond laque de garance)

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Cette composition est traitée de façon à scander progressivement tous les éléments qui la distinguent. A’ partir de l’avant-plan : la chaise annonçant la table, laquelle annonce à son tour le dossier du fauteuil (rouge en dégradés). Il est suivi par une zone de séparation dominée par le jaune, laquelle divise la scène en deux parties. Le tout aboutissant vers cette haute note blanche (évoquée plus haut), conférant à l’œuvre sa viabilité lumineuse, en permettant l’avènement des contrastes entre les couleurs.

La partie gauche est entièrement plongée dans un chromatisme sombre, lequel reprend le rouge bordeaux largement usité dans le rendu du volume du comptoir. Ce traitement offre une merveilleuse scansion de l’espace.

HOMMAGE A’ MONET (100 x 81- blanc sur blanc),

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Majoritairement dominé par le vert et le jaune, HOMMAGE A' MONET s’inspire de l’esprit des NYMPHÉAS (1914-1926). Incontestablement, nous nous trouvons face à une splendide réalisation technique. Mais quel est son rapport avec l’ « impressionnisme »? Il est évident que l’œuvre flirte avec l’écriture impressionniste des origines. Surtout dans sa conception des couleurs. Néanmoins, le traitement apporté aux formes ainsi que le côté « fluide » créé par la brillance à outrance du vernis nous éloigne esthétiquement de Claude Monet, tout en saisissant parfaitement l’âme des NYMPHÉAS. C’est en cela qu’il s’agit bel et bien d’un « hommage ». Car pour l’artiste toute peinture est une « impression ». Le tout est de travailler vite pour capter l’irruption de la lumière en tant que couleur. Précisons que des clichés photographiques ont servi de base à la réalisation de cet excellent travail.  

LE CIRIO (100 x 81 cm - fond rouge anglais) 

Le rouge est la fabrique de la base du fond permettant l’émergence ainsi que le développement d’un blanc dont la fonction n’est plus d’être une couleur « neutre » mais bien d’être le passage vers l’accomplissement du mouvement. Le serveur apportant les tasses ainsi que la dame (avant-plan gauche) semblent statiques. Néanmoins, le traitement apporté, tant au vêtement du serveur qu’à la coiffure de la dame, conçu à base de stries se suivant en séries, dynamise l’opacité du blanc et le rend « actif » dans une forme particulière de cinétisme.

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SCULPTURE (RUBENS) (100 x 81 cm – fond strié rouge)

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Remarquez la posture altière de la femme statufiée dont le mouvement débute à l’avant-plan pour s’étirer de manière ascendante. Observez la folie dans les entrelacs des plis du vêtement. Ce sont, en fait des stries réalisées par des outils pointus qui créent cette agitation visuelle. Si le nom de Rubens est associé au titre c’est parce qu’il est le précurseur de cette technique appliquée sur le fond. Ces stries permettent la simplification du dessin pour obtenir le volume. Il en va de même pour le « clair-obscur » des autoportraits. L’artiste précise que ce fut le même Rubens à pratiquer cette technique bien avant Rembrandt que nous allons à présent évoquer.             

 

AUTOPORTRAIT COULEUR (17ème siècle (34 x 26 cm - clair-obscur)

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Il s'agit manifestement d'un hommage à Rembrandt. Trois étapes chromatiques structurent le portrait.

  • Le noir, enveloppant l’arrière-plan
  • Le blanc-jaune. Blanc pour la chevelure, jaune pour le visage
  • Le rouge du vêtement

Des glacis ont été utilisés pour créer les ombres sur le visage par rapport au blanc des cheveux et au jaune soulignant les chairs du faciès. 

L’œuvre fait référence du 17ème siècle. Il s’agit d’un autoportrait. L’équation n’est guère difficile à réaliser. S’agissant d’un autoportrait se référant au 17ème siècle, l’œuvre est un hommage à Rembrandt. Comme l’écrivait fort justement Germain Bazin, l’autoportrait est, en matière de peinture, l’expression majeure de l’extériorisation de la conscience dans tous ses états. Rembrandt, en est le  meilleur théoricien. En quoi l’émergence de la conscience se dévoile-t-elle dans ce tableau? Elle se dévoile par la présence du visage de l’artiste. Mais à l’instar de Rembrandt, il ne s’agit pas d’un simple rendu physique mais bien d’un visage transcendé au niveau de l’âme. Cette dernière s’affirme dans une introspection sombre où le sourire est absent. Elle interroge le visiteur qui seul peut oser une réponse. Rembrandt est là mais Schembari aussi ! Si le maître hollandais est présent, il existe principalement dans le rendu émotionnel de la mise en scène du visage. L’expression est intense. Le personnage, campé de face, fixe le visiteur. Il semble sorti d’une sorte de « camera oscura », comme propulsé de l’arrière-plan d’un noir intense. La composition est essentiellement tricolore. Elle superpose simultanément le noir (arrière-plan), le jaune (associé au visage ainsi qu’aux cheveux) et le rouge (alterné de blanc en stries verticales du vêtement).

REMBRANDT : AUTOPORTRAIT DU KUNSTHISTORISCHES MUSEUM (1657)

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Si dans l’autoportrait représenté, les couleurs sont franches et affirmées, l’AUTOPORTRAIT (de petites dimensions) abrité au Kunsthistorisches Museum de Vienne, peint par Rembrandt en 1657, « flotte » pour ainsi dire, dans une luminosité rendue volontairement opaque par le passage répété du pinceau de l’artiste, rendu dans les stries également verticales, effleurant à peine la surface de la toile. Il n’y a pratiquement pas d’arrière-plan, si ce n’est l’espace arrière enserrant la totalité de la composition.

La zone au chromatisme rouge, réservée à la chemise du personnage, renforce le contraste entre le blanc (en dégradés) du visage avec l’ensemble globalement monochromatique de l’ensemble de l’œuvre. Concernant la mise en scène des visages, celui de Rembrandt est campé de face, sur un buste légèrement positionné de trois-quarts. Celui de Schembari s’impose en position frontale. 

JEAN-FRANҀOIS SCHEMBARI a employé trois heures pour réaliser son autoportrait. Campé buste de face, il s’est tenu devant un miroir noir permettant de voir simultanément la lumière et l’ombre sans fatiguer l’œil. La conception de l’ensemble a été réalisée par des pigments qui sèchent très vite, tels que le jaune de Naples pour les chairs du visage. Une économie chromatique a été apportée à la composition : très peu de couleurs pour respecter la palette de l’époque.

Un dénominateur commun unit Rembrandt à Schembari, à savoir l’expression des visages, laquelle est soulignée par un même froncement des sourcils, affirmant la personnalité des sujets. La bouche, fermée, contribue à rendre hermétique l’expression faciale. Bien que, à y regarder de près, la possibilité de l’émergence d’un sourire, frôle à peine le visage de Jean-François Schembari.      

AUTOPORTRAIT (54 x 45 cm - BLANC/BLANC CADRE)

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Cette même couleur blanche conçue de façon presque aveuglante, évoquée plus haut, servant de « négatif » à la forme émergente dans une opposition entre deux types de blanc : un blanc « cassé » donnant naissance à un autre blanc dans une note plus claire à partir de laquelle le personnage issu de cette teinte apparaît dans ce qui donne le sentiment d’être l’empreinte originelle, se retrouve dans cette œuvre.    

Le visage est campé de face, reposant sur un buste représenté de trois-quarts. Nous entrons ici dans le royaume du trait. Le visage est structuré par les principaux éléments le composant, à savoir les cheveux, ressemblant à des fils, finement ciselés posés sur le crâne. Les sourcils laissant apparaître les yeux. Le nez sur lequel reposent les lunettes. La bouche, assez charnue, c'est-à-dire matériellement plus affirmée, se signale par rapport au reste. En réalité, ce sont ces quelques éléments qui confèrent au visage son volume. Le vêtement demeure anecdotique.

Toute la composition est basée sur le rapport « blanc sur blanc », lequel insuffle l’énergie dynamique nécessaire à l’œuvre. Elle est là, présente. Néanmoins, effacée par l’extrême finesse du trait, contribuant en dernière analyse, à faire disparaître le sujet. L’œuvre devient puissamment éphémère.  Les cheveux sont réalisés en creux comme dans une gravure.

Le blanc usité est le « blanc gaufré », plus « arrondi », captant et restituant mieux la lumière. Ce procédé pictural fut adopté jusqu’au 18ème siècle.

JEAN-FRANҀOIS SCHEMBARI a ceci de particulier qu’il possède une grande érudition concernant l’histoire de la peinture, laquelle ne se limite pas à son évolution sur le plan diachronique mais également sur l’histoire des techniques picturales qu’il revisite dans chaque œuvre réalisée.     

La pose de la couleur est pour l’artiste une démarche instinctive dont le but est de capturer l’émotion et la lumière. Il instaure ainsi une dichotomie en la rendant indépendante par rapport au sujet. Cette volonté d’indépendance se retrouve à la fois dans la forme et le dessin, mettant en exergue la liberté du geste. Car la hantise de l’artiste est celle d’être prisonnier du sujet. Au point d’affirmer qu’en dernière analyse, le véritable sujet du peintre n’est autre que la peinture elle-même. Il ne peint plus au pinceau parce que les dessins sont lisses et qu’il privilégie tout ce qui est rigide et permet d’être creusé. De là la différence qu’il instaure dans son interprétation par rapport aux notions d’ « artiste » et de « plasticien ». Selon sa théorie, l’artiste oriente ses recherches sur ce que cache l’image à la différence du plasticien pour qui la peinture survole l’image sans jamais en atteindre la profondeur. La technique est là pour appuyer ses moyens d’expression.

Autodidacte, l’artiste a pratiqué le dessin dès son enfance, pour s’orienter par la suite vers la peinture à l’huile à l’âge de douze ans. Il a néanmoins fréquenté les Beaux Arts en 1975 avant de s’intéresser en 1984 à la photographie, ce qui lui sera indispensable dans sa connaissance de la peinture : la réalisation des nymphéas de L’HOMMAGE A’ MANET (cité plus haut), peint d’après un cliché photographique, témoigne de l’importance qu’il accorde à cette discipline. En fait, la découverte d’un ouvrage de Jacques Maroger (1884-1962), peintre, restaurateur et pédagogue, lui révèle qu’aux Beaux Arts, il n’avait pas reçu la formation ad hoc en tant que peintre.

D’où un divorce d’avec la peinture. Grâce à l’ouvrage de Jacques Maroger, il se réconcilie avec ce médium en travaillant sur le thème de l’invisible, tant par la peinture que par la photo. Il décrochera d’ailleurs un prix international pour un travail photographique basé sur le rapport entre l’invisible et la lumière. Si l’artiste a adopté l’huile, c’est parce qu’il recherche l’épanouissement de ce qu’il appelle « une aventure créatrice », ce que ne permet pas l’acrylique. Car cette dernière sèche trop vite et de ce fait, « termine » en quelque sorte l’acte créateur avant l’heure. L’huile, par contre, de par la lenteur de son séchage, permet à l’artiste de poursuivre cette « aventure créatrice ». Nous avons évoqué, plus haut, son immense culture concernant l’histoire de la peinture. Elle se traduit techniquement par une démarche entrée désormais au sein de l’art contemporain, appelée le fusionnisme.

Il s’agit, comme son nom le suggère, de mettre en exergue le mélange des couleurs, toujours au sein d’une perspective historique que l’on retrouve étalé sur la surface de la toile. Issu de l’esthétique contemporaine, le fusionnisme est né en France, dans les années ’90 à Fontainebleau. Associant styles et techniques en plus des encres, acryliques et outils en tous genres, il inclut dans le processus créatif, le langage gestuel de l’artiste ainsi que sa culture et son imaginaire. Sur base du fusionnisme, l’artiste axe son œuvre au centre d’une recherche picturale qui le mène au cœur de l’histoire de l’Art. Sa technique, résolument contemporaine, est basée sur une recherche oscillant entre les cultures flamande et italienne. Dès lors, le fusionnisme s’étale entre les techniques (écoles) d’Antonello de Messine (15ème siècle), de Leonardo da Vinci (16ème siècle), du Titien (école vénitienne, 16ème siècle) jusqu’aux maîtres flamands, Rubens et Rembrandt (17ème siècle), à l’intérieur de savantes fusions chimiques, telles que le médium d’Antonello de Messine, celui de Leonardo da Vinci, la gelée et le mastic en larmes de Rubens. De par son choix, l’artiste propose une œuvre-réflexion basée sur le moment où du fait de la création d’écoles et de techniques innovantes, la peinture devient, comme il l’affirme, un métier. JEAN-FRANҀOIS SCHEMBARI, nous offre une démarche cultivée et laborieuse, contribuant à restaurer la peinture en tant que « sujet », lui rendant derechef sa fonction de labeur, de culture et de connaissance originelles ainsi que ses lettres de noblesse.

 François L. Speranza.

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Collection "Belles signatures" © 2020 Robert Paul

 

N.B. : Ce billet est publié à l'initiative exclusive de ROBERT PAUL, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis. 

A voir:

Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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 L'artiste JEAN-FRANCOIS SCHEMBARI et François Speranza : interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles.       

12273351290?profile=original Photos de l'exposition de JEAN-FRANCOIS SCHEMBARI à l'ESPACE ART GALLERY

                                   

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                         L’ABSTRACTION ENTRE EXTÉRIORITÉ ET INTÉRIORITÉ : L’ART DE CHRISTIAN HÉVIN.

Du 08-11 au 30-11-19, l’ESPACE ART GALLERY (83 Rue de Laeken, Bruxelles 1000) a eu le plaisir de présenter l’œuvre du peintre français, Monsieur CHRISTIAN HÉVIN, intitulée : DE L’EXTÉRIORITÉ A’ L’INTÉRIORITÉ.    

CHRISTIAN HÉVIN nous entraîne vers une dimension particulière dans le domaine de la forme « abstraite ». Concernant l’œuvre de cet artiste, le terme « forme » prend des proportions particulières, car ce qu’il nous offre, ce sont sinon, des « paysages », du moins des « impressions paysagistes » de conception abstraite dans leur technique. Ces « impressions » baignent dans un brouillard chromatique, enveloppant la partie supérieure et inférieure de la toile, dévoilant généralement un point central, à partir duquel plusieurs zones de couleurs s’imposent en tant que référents visuels, formant le point d’ancrage du regard. Cette zone chromatique centrale tranche nettement avec les couleurs enveloppantes entourant le centre de la toile. Elles sont à la fois extérieures et intérieures à l’œuvre, en ce sens où elles servent de lien entre les zones traitées dans l’espace pictural. Mais, au-delà de cela, l’artiste pose une question, à savoir : « qu’est-ce qu’une forme abstraite ? ». S’agissant d’ « impressions paysagistes », la question n’est qu’effleurée, en ce sens que l’artiste ne s’attarde pas sur des détails. Tout flotte dans un tourbillon aux couleurs chatoyantes. Certes, cette abstraction se fond dans un vocabulaire pictural tributaire, à l’origine, de la peinture figurative, car elle est souvent délimitée par un trait horizontal faisant office de ligne d’horizon. Par conséquent, un système culturel pictural structurant notre manière de lire une œuvre. Cette lecture s’inscrit sur des niveaux variables : parfois la ligne d’horizon occupe la partie médiane du tableau, parfois elle s’élève très haut, atteignant l’orée du ciel. Car si ligne d’horizon il y a, cela signifie  qu’il y a volonté de portraiturer un « paysage » en bonne et due forme avec les conventions de perspective attribuées à l’image de culture occidentale depuis la Renaissance. Et des conventions il y en a : silhouette indéfinissable vue de loin, campée au centre de l’espace, comprise entre l’avant et l’arrière-plan du tableau, témoignant d’une conception spatiale classique. Le chromatisme est essentiellement constitué de couleurs vives. Une fois encore, nous assistons à la transmission culturelle d’une technique par l’explosion des couleurs, dynamitant littéralement le paysage, lequel n’est pas sans évoquer l’intériorité irradiée d’un Turner.

Les couleurs usitées sont le jaune, le bleu, le rouge, le noir, toutes conçues dans des tonalités vives. Le blanc n’est que rarement utilisé.

En réalité, même si certaines toiles représentent des paysages nocturnes, le visiteur se retrouve agréablement perdu, en ce sens qu’il ne sait plus trop où il se trouve. Conscient de se trouver au centre d’un paysage, il est subjugué par la violence vitale des tableaux. La spécificité même de ces couleurs réside dans le fait qu’elles sont à la fois très vives tout en étant très épurées par le traitement par la matière. 

ABSTRACTION 6071 (80 x 80 cm-acrylique sur toile)

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Cette œuvre à dominante blanche, englobe la totalité de la composition. La toile est traversée par un nuage à dominante brun-rouge, au milieu du plan médian. Cette même zone est agrémentée par une note bleu vif, accentuant le contraste. A’ quelle réalité ce mirage pourrait-il bien être ancré? A’ la naissance du jour sur la mer? A’ son crépuscule? Il n’empêche qu’il s’agit de la mer. Une mer transcendée par le sacré de l’abstraction.

ABSTRACTION 6011 (80 x 80 cm-acrylique sur toile)

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est basé sur une opposition entre le ciel opaque matérialisé par les nuages et la partie inférieure de la toile sur laquelle il se réfléchit. La composition est divisée en deux plans par deux fils en cuivre extrêmement fins, faisant office de « rails » sur lesquels figure une image interprétable comme étant celle d’un convoi. Ce convoi joue avec la perception rétinienne, en ce sens que sur les trois éléments (wagons) qui le composent, seul le dernier affichant la couleur rouge vif est tangible au regard. Les deux autres qui le précèdent se fondent dans l’arrière-plan. Le visiteur peut donc concevoir la présence de ce convoi, soit placé dans un temps d’arrêt, comme le souligne la couleur rouge vif du dernier wagon, accrochant dans sa pause, l’œil du visiteur. Soit, par le biais du chromatisme bleu-vert de la motrice et du wagon qui la suit, fondu dans l’arrière-plan, avoir le sentiment que le train sillonne l’espace à toute vitesse et que sa présence ne s’inscrit que dans le rendu du moment observé. Cet effet d’optique est renforcé par la matière appliquée au traitement des nuages donnant consistance à leur matérialité.

ABSTRACTION 9049 (120 x 120 cm-acrylique, métal sur toile)

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On y retrouve   les fils de cuivre extrêmement fins, caractérisant l’écriture picturale de l’artiste, appliqués sur la zone noire centrale, divisant le haut du bas de la toile. Ce trait créatif se révèle, dans la réalité visuelle, être un détail à peine perceptible.  

ABSTRACTION 9336 (120 x 120 cm-acrylique sur toile)

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est une explosion de jaune contrastant avec la partie supérieure du tableau dominé par l’élément sombre, souligné par le bleu (en dégradés), le vert et le noir. La partie inférieure est contenue par le brun uni au rouge. Une ligne de démarcation, associant le brun, le vert et le rouge, sépare la zone jaune (explosion de la couleur) de la partie sombre du haut de la toile. Cette œuvre est (comme toutes celles de l’artiste) dictée par la force de l’émotion. Cela se perçoit par l’explosion de ce jaune, évoquée plus haut, comparable à celui d’un Turner. 

CHISTIAN HÉVIN, qui peint depuis longtemps, a commencé par le figuratif en 1957 (il avait à l’époque sept ans). Il est passé depuis à l’abstraction. Son expérience artistique est multiple. En effet, il a été décorateur pour le théâtre, designer et illustrateur. En tant que peintre, il a évolué dans l’hyperréalisme des années ’70. Au début, il ne voulait pas vendre ses tableaux, il désirait les partager. Il a fini par abandonner les expositions sans jamais abandonner la peinture. Depuis quinze ans, il est entré dans l’aventure de l’abstraction avec, comme il le dit lui-même, un bonheur inégal mais avec, néanmoins, une liberté totale. Il a repris les expositions avec la volonté de vendre ses toiles. Il a peint quelque six-cent tableaux depuis approximativement sept ans. Il a, notamment, exposé à Moscou, au Qatar, à Amsterdam, à Lille et à Paris. Même s’il évolue désormais dans l’abstrait, il ne place aucune ligne de démarcation entre le figuratif et l’abstrait. Cela se perçoit, notamment, avec (6011 – mentionné plus haut) dans laquelle, même noyé dans un brouillard abstrait et déformant, le convoi devient à la fois un point dans le temps visuel et une sensation, à la fois optique et picturale, de la vitesse. Mais c’est désormais un nouveau genre d’abstraction que l’artiste essaie d’atteindre. En effet, il recherche une écriture picturale la plus expurgée de couleur pour arriver à un minimalisme chromatique. Néanmoins, il est assez conscient pour se rendre compte de la difficulté à atteindre une émotion par le biais d’une unique couleur. De même qu’il est également assez lucide pour s’apercevoir que la seule clé lui permettant le passage entre l’extériorité et l’intériorité (Le titre de son exposition), demeure l’abstraction.

L’artiste a utilisé l’huile pendant quarante ans pour se tourner ensuite vers l’acrylique. Sa technique est simple : il utilise le sable, la terre, les pigments pour obtenir une couleur « gesso » (la craie, en italien). Les pigments sont à  base de terre, ce qui aide la matière à supporter la lumière.

Désormais, il utilise le  médium acrylique, porteur d’une grande fluidité. Bien que ce ne soit pas le cas en ce qui concerne l’exposition qui lui est consacrée, il lui est même arrivé d’utiliser de la poussière interstellaire comme pigment provenant de météorites.

Opération qui lui a demandé deux ans de récolte pour obtenir une quantité minime de poussière. Il travaille à la fois sur toile et sur bois. Il utilise de la cire d’abeille encaustique en « technique froide », c'est-à-dire qu’après avoir fait fondre cette cire, dans de l’essence de térébenthine, il l’ajoute à divers pigments.

CHRISTIAN HÉVIN, qui a fréquenté les Beaux Arts à Lille, a suivi des cours de dessin quand il avait douze ou treize ans. En plus de son cursus normal, il a également pris des cours sur les propriétés de l’huile et de la couleur. Parmi ses projets, il ambitionne de s’exprimer à travers la sculpture. Et l’on est d’emblée curieux du résultat. De quelle façon une future œuvre sculpturale pourra-t-elle rendre compte d’une telle volonté d’abstraction? Quel passage le mènera donc de l’extériorité à l’intériorité? Nous attendons cette œuvre avec impatience.

François L. Speranza.

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Collection "Belles signatures" © 2020 Robert Paul

 

N.B. : Ce billet est publié à l'initiative exclusive de ROBERT PAUL, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis. 

Robert Paul, éditeur responsable

A voir:

Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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L'artiste CHRISTIAN HEVIN et François L. Speranza : interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles

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Photos de l'exposition de CHRISTIAN HEVIN à l'ESPACE ART GALLERY    

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                                        L’ÉCHO : CHRYSALIDE DE L’IDÉE. L’ŒUVRE DE JOHANN DAMOISEAU        

Du 03-05 au 26-05-1919, l’ESPACE ART GALLERY (83 Rue de Laeken, 1000 Bruxelles) a eu le plaisir d’organiser une exposition autour de l’œuvre de l’artiste belge, Monsieur JOHANN DAMOISEAU, intitulée : ECHOS FORMELS.

« Echos » et « Formels ». Voilà les tenants d’un titre extrêmement évocateur, en phase totale avec son sujet.  

« Echos ». Comme la musique d’une écriture restée à l’état de trace. D’empreinte fossilisée sur la surface d’un sédiment protecteur. On peut parler d’ « écriture » comme une suite de variations à partir de cette sémantique personnelle, à l’instar de celle proposée par Christian d’Outremont, laquelle, en son temps, fit office de « référent ». Car ces traces démultipliées matérialisent des « signes » sortis de tous les champs sémantiques possibles. Tant par la délicatesse de leur calligraphie que par leur portée symbolique. Hasardons-nous même à dire que cette écriture picturale s’avérerait être l’écriture intime que l’artiste utiliserait dans chacune de ses lettres s’il en avait la possibilité culturelle.  

Cette écriture est constituée de segments minuscules, formant un immense réseau dont la particularité réside dans le fait de tenir dans l’espace circonscrit d’un petit format. Paradoxalement, cette caractéristique procure un sentiment d’ « agrandissement », en ce sens que ce foisonnement graphique associé à un espace réduit, fait que l’imaginaire du visiteur, submergé par cette dynamique cinétique, la fasse « déborder » du cadre. Ouvrant à l’œuvre les grilles de sa prison formelle pour se perdre vers d’autres espaces.  

« Formels ». Puisque, aussi minuscule soit-elle, cette écriture participe de la forme, prise à la fois dans le sens plastique mais également dans son expression symbolique. Car le dénominateur commun à l’œuvre demeure, comme nous le verrons plus loin, une interprétation philosophique de la Nature. Par « forme », il faut entendre un univers sans volume apparent, constitué d’un « bouillon de cultures », mis à plat sur la surface de l’espace pictural. Le chromatisme est globalement monochrome, bien qu’il soit constitué non pas par une seule couleur mais bien par le rouge, le jaune et le bleu, assemblés comme notes de fond constituant la base chromatique spectrale ou pour mieux dire, la Trichromie (théorie élaborée au début du 18èmesiècle), partir de laquelle naissent les différentes couleurs. Les titres des oeuvres  évoquent d'ailleurs cette théorie par l'apparition de trois initiales : RJB (rouge-jaune-blanc). 

A’ quelques rares moments, telle couleur prend le pas sur l’autre, accentuant l’impact de l’effet visuel.

Au fur et à mesure que le regard se rapproche de l’œuvre, au plus la dynamique cinétique (évoquée plus haut) s’affirme.

Partant d’un sentiment de brouillard, la mise à feu se précise jusqu’à imprégner une véritable toile cinétique sur la rétine oculaire. De prime abord, l’on peut penser à une écriture sans évolution. Mais en y regardant de près, l’œil perçoit des variations dans la forme, l’amenant vers un univers de plus en plus « microscopique », jusqu’à atteindre le trait dans son plus total épurement : l’idée avant la forme;

RJB (rouge-jaune-bleu) (40 X 40 cm)

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Mais l’artiste ne s’arrête pas à ce stade, il reprend le trait là où il l’avait laissé, pour le (re)conjuguer dans une dimension plus feutrée, de laquelle il point dans un dédale d’entrelacs. 

RJB (rouge-jaune-bleu) (40 x 40 cm)

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Cette oeuvre représente un véritable tour de force, en ce sens que le trait blanc entrelacé, s’anime sur un fond également blanc. Il ne s’anime que par des stries que l’artiste apporte par sa mine de plomb sur chaque segment pour lui conférer sa propre individualité. 

RJB (rouge-jaune-bleu) 40 x 40 cm)
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Cette oeuvre est, en quelque sorte, le véhicule esthétique de l'artiste dans l’expression de l'idée créatrice de son graphisme.    

RJB  (rouge-jaune-blanc)  (40 X 40 cm)

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RJB (rouge-jaune-blanc) (40 x 40 cm)

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Des compositions telles que celles-ci illustrent parfaitement le discours de l'artiste.

Pourquoi cet art participe-t-il d’une forme de « cinétisme »? Parce que le trait (par exemple de couleur noire) se trouve, pour ainsi dire, « propulsé » par la note blanche se situant dans l’espace qui le sépare d’un autre trait, accentuant ainsi une forme de perspective qui l’anime. Et ce grouillement graphique s’éparpillant sur l’ensemble de la toile fait de sorte que l’œil « court » dans l’espoir de saisir l’animation dans sa totalité. Il peut d’ailleurs se placer sur plusieurs axes de la toile, ce sentiment d’animation microscopique ne le quittera pas. L’œil devient alors le témoin d’une sorte de fermentation dans laquelle la vie essaime dans tous le sens.  

CROISE D'OGIVES (180 x 100 cm)

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Cette pièce est, pour ainsi dire, une « sculpture picturale » laquelle reprend plastiquement dans la matière sculptée ce que le trait du pinceau a laissé sur la toile. Cet ensemble de lamelles attaquées à l’acide (faisant fonction de rouille dans le champ interprétatif), forme un ensemble harmonique, une œuvre « primitive », en ce sens où elle renoue avec le champ mythologique qui anime l’œuvre d’art dans son tréfonds originel.   

Bichromée dans son ensemble (blanc et rouille), l’œuvre est partiellement rehaussée d’une note jaune-or, dans le bas à droite.

RJB (rouge-jaune-blanc) (40 x 40 cm)  

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Ce détail de RJB (mentionné plus haut) confirme une parenté stylistique, voire sémantique, de l'écriture picturale de l'artiste.   

 

Est-ce de l’art « brut »? Les trois sculptures filiformes, conçues à partir de fils de fer surplombées d’une petite pierre et portées par trois pierres de majeures dimensions, appartiennent au vocabulaire contemporain.Sont-ce les personnages à l’origine de l’idée? Leur conception à partir du socle basé sur trois pierres, défie l’essence de l’abstraction, lorsque, tout en tenant compte de la présence imaginaire de trois squelettes filiformes s’élançant, l’on songe aux personnages de Giacometti. Idée et concept se marient dans le traitement à la fois plastique et intellectuel de cette œuvre.12273362476?profile=original

Est-ce de l’art « minimaliste » ? Aux dires de l’artiste, elles pourraient l’être au sens « trivial » du terme, en ce sens qu’elles ne se déclinent que par le noir et le blanc. Néanmoins, le minimalisme se définit surtout par une conception travaillée de la figure géométrique, à la base. De plus, il est dépourvu de symbolique et d’émotion. Son principal attrait est qu’il joue sur les formes et les couleurs. Cela ne se retrouve aucunement dans l’œuvre de l’artiste dont la portée philosophique, symbolique et intellectuelle prime sur le reste. Force est donc de constater que son écriture n’est pas minimaliste.    

L’art de JOHANN DAMOISEAU prend naissance non pas sur le choc visuel mais bien sur la révélation à partir d’une apparition, laquelle se matérialise au fur et à mesure que le regard s’approche de la toile. Cette révélation est pareille à celle d’une existence ayant pris forme jadis, laquelle a laissé son empreinte (sa « trace » comme l’artiste aime à le préciser) dans les résidus de sa matière primale, réduits à l’état de fossile imaginaire. Car les « traces » que l’artiste a laissées sur le papier ou sur le cadre sont les empreintes cosmiques d’éléments ayant participé de la Nature, jusqu’à former une sorte de proto écriture indéchiffrable aux non initiés. Ce langage graphique inondant l’espace, pris comme microcosme, se déploie sur toute la surface jusqu’à « déborder » le regard qui le prolonge à l’infini.

La production de l’artiste se divise en deux espaces visuels sanctionnant deux techniques particulières, à savoir le cadre (pour les petits formats) mettant en exergue l’approche picturale du peintre et la mine de plomb, réservée aux formats plus grands.

A’ côté de la signature du dessinateur, figure confirmée par un chiffre, la consistance de la mine de plomb formant le relief exigé pour l’individualité de l’œuvre. Quant au cadre, il témoigne d’une dynamique gestuelle, en ce sens qu’une fois le geste posé, celui-ci ne varie pas. Le papier, lui, varie.

La démarche de l’artiste est essentiellement philosophique. Le sujet, issu de la Nature, tel que le paysage, le sable ou la roche, prend son autonomie face à sa représentation figurative, pour atteindre une Nature exclusivement humaine. Il s’agit là d’une Nature dont la représentation picturale transcende le figuratif. Cette vision humaniste trouve son origine dans les cartes géographiques du 16ème siècle, essentiellement conçues comme des représentations de sites vus d’en haut, à l’instar des courbes de niveau actuelles.   

Excluant tout sujet rhétorique, la forme est pour l’artiste une unicité plastique qui se décline tant dans la peinture que dans le dessin ou la sculpture. A’ la question de savoir s’il est un peintre qui sculpte ou un sculpteur qui peint, il précise qu’il se trouve à la charnière de ces deux disciplines. Dessinateur à l’origine, il s’est interrogé sur la fonction subjective des choses et de leur rôle dans ce que l’on nomme la « réalité » pour créer une existence faite d’ « apparitions » destinées à laisser une trace sur la surface de l’espace pictural, considéré comme le théâtre d’un imaginaire à recréer, à partir d’une apparition, prise comme l’écho d’un vécu.

La technique de prédilection de l’artiste est l’huile. L’aspect prépondérant de son œuvre est, comme nous l’avons spécifié plus haut, le monochromatisme. Néanmoins, il s’agit d’une illusion d’optique, en ce sens que trois couleurs (le rouge, le jaune et le bleu) sont usitées pour atteindre le gris. Cette technique a quelque chose qui rappelle la composition musicale car il faut très souvent l’alliance de plusieurs instruments pour créer un son. Cette teinte grise est le son sorti de ce kaléidoscope pour atteindre son individualité chromatique. A’ ce titre, l’artiste aime écouter la musique de compositeurs tels que Steve Reich ainsi que des compositions polyphoniques pendant qu’il crée. « Chercheur » devant l’Eternel, il est en totale recherche face à la création. Jamais il ne considère « avoir trouvé ». Son futur projet consiste à poursuivre son expérience créative, cette fois, sur de grands formats. 

Dessinateur de formation, il a fréquenté l’Académie des Beaux Arts de Bruxelles. Il a été l’élève du Professeur Camille Detaye avant de devenir son assistant. Il a ensuite travaillé avec Lucien Massaert pour devenir enfin professeur de dessin aux Beaux Arts. Depuis vingt ans il dispense des cours dans des ateliers ainsi que des cours privés.

L’œuvre de JOHANN DAMOISEAU est un discours phénoménologique sur la perception des choses, établie par la relation entre le trait en fusion et l’œil qui s’acharne à le cerner. Lorsqu’il appréhende la toile ou le cadre, l’œil peut se placer soit devant l’œuvre soit en biais.

La réaction physiologique s’avère immuable : tout fuit. Rien ne reste statique. La Nature demeure l’écho de la trace laissée par son passage.

François L. Speranza.

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Collection "Belles signatures" © 2019 Robert Paul

 

N.B. : Ce billet est publié à l'initiative exclusive de ROBERT PAUL, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis. 

Robert Paul, éditeur responsable

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Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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L'artiste JOHANN DAMOISEAU et François L. Speranza : interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles

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Photos de l'exposition de JOHANN DAMOISEAU à l'ESPACE ART GALLERY 

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                            DE LA NATURE A’ L’IMAGE : LA FEMME DANS L’ŒUVRE DE CORINNE VANDEN BERGHE

06-12 au 29-12-19, l’ESPACE ART GALLERY (83, Rue de Laeken, Bruxelles 1000) a terminé l’année avec une exposition consacrée au peintre belge, Madame CORINNE VANDEN BERGHE, intitulée : FEMMES MONTAGNES # ANGE

Par le biais de cette artiste, nous ressentons la perception primale de l’éternel féminin dans la symbiose entre Femme et Nature. La Femme est ici perçue dans sa dimension sculpturale. Elle occupe le centre de la toile. Sa conception plastique se révèle être, lorsqu’elle figure au centre de l’espace bucolique, celle d’un personnage « statufié », tellement son rendu corporel est proche de la statuaire classique. La spécificité picturale de cette artiste réside dans le fait que le sujet émerge porté par un chromatisme tendre, souvent bi (voire tricolore). Il s’agit d’un traitement, en apparence, « terne » de la couleur. Cela n’est pas accidentel. Il existe dans le but de cerner la Femme à l’intérieur du créé.  

Cette dimension sculpturale se retrouve, par conséquent, dans STATUE (70 x 50 cm-huile sur toile)

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Le personnage féminin est allongé de façon lascive sur un bloc de pierre, rappelant l’image du gisant. Il s’agit d’un gisant à l’érotisme maîtrisé. Le gisant existe dans l’évocation du sommeil éternel et la posture de la Femme évoque ici la volupté de l’abandon, à un point tel que le bloc de pierre (le tombeau) sur lequel elle repose évoque l’image du divan.  

FEMMES MONTAGNES (130 x 95 cm-huile sur toile)

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Cette oeuvre devient la symbiose entre le corps de la Femme et celui de la montagne. Le corps féminin n’existe qu’à partir de la partie médiane de la toile. Elle n’affirme sa présence qu’à partir de son buste, offrant son ventre et ses jambes, à la fois soulevées et ouvertes, comme dans une mise au Monde. La montagne de droite prend naissance à partir de son genou gauche, comme à partir d’une blessure, émergeant dans une verticalité massive et majestueuse. L’avant-plan présente une image « abstraite » qui nous dépasse. Ce n’est qu’à partir du plan médian que le corps de la Femme se révèle. Elle n’est plus que corps. Un corps sans visage. Il y a dans cette scène une dimension mythologique manifeste : la superposition verticale entre la montagne et la Femme. Celle-ci est campée dans le bas de la toile, au niveau du sol ou plus exactement, de la terre car elle devient un élément chtonien, opposée à la montagne culminant à l’ouranien. La Femme devient une terre donnant « naissance » à la montagne.

Si FEMMES MONTAGNES (mentionné plus haut) est une image de l’enfantement, donc de la vie, ICARE s’écrasant sur la montagne après avoir été brûlé par le soleil devient une image de mort. Au commencement, fut la montagne ensuite la montagne avala Icare….c’est le tableau qui décide de la trajectoire. 

ICARE (120 x 80 cm-huile sur toile)

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FEMME MAÏS (130 x 95 cm-huile sur toile)

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La Femme sort, tel un épi du champ de blé. Là aussi le sujet se dégage dans une sobriété chromatique, composée de deux tonalités : le vert à l’avant-plan et le noir à l’arrière-plan. La Femme révèle sa plastique sculpturale, telle une silhouette émergeant du sol pour s’élever vers le ciel. Elle est cadrée de façon à la camper en « contre-plongée », renforçant expressément son mouvement ascensionnel. Notons qu’elle se présente de dos enveloppée dans un pagne qui l’habille du bas jusqu’aux hanches. Le dos est nu et sa chevelure a l’allure d’une tache destinée à la coiffer. Remarquons le traitement de sa robe : elle est conçue d’une série de traits ondulés, conférant la nervosité ainsi que la vitalité qui sied à l’ensemble. La robe est de couleur verte, à l’instar des épis. Néanmoins, la force de ce vert foncé, augmenté de stries blanches, est là pour accentuer le côté épique de la scène. Les épis sont réalisés en vert clair et en blanc. Quant au dos, il résulte d’un mélange de rose évoquant le derme souligné de blanc. Il s’agit plus que d’une œuvre simplement bucolique. Nous avons ici le traitement contemporain d’une œuvre romantique : notons ce ciel noir chargé de notes blanches et furtives comme les accords d’une symphonie. Nous revisitons l’univers du « sturm und drang » allemand du 19ème siècle dans une écriture fabuleusement contemporaine.

La peinture de cette artiste est extrêmement lisse sur le plan de la matière, à l’exception d’ICARE (mentionné plus haut) et de DANS L’HERBE, lesquelles figurent parmi les toiles présentant le plus de matière travaillée au couteau par rapport à l’ensemble pictural. 

DANS L'HERBE (70 x 50 cm-huile sur toile)

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PURE CONSCIENCE (150 x 90 cm-acrylique sur toile)

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Situé à l’intérieur d’une station de métro, cette œuvre brille par la majesté de son cadrage. Il se distingue en trois étapes :

  • un avant-plan en noir très vif bariolé de blanc, soulignant les reflets du néon, permet au regard de prendre son élan avant d’aborder la composition dans son ensemble.

 

  • l’ensemble se structure sur quatre escalators : deux à chaque extrémité de la toile et les deux autres au centre. Le mouvement ascendant s’accomplit grâce aux escalators latéraux, aboutissant vers ce que l’on pourrait considérer une « sphère céleste ». Trois éléments vitaux créent l’atmosphère du tableau, à savoir l’épuration totale du décor, la présence de l’Ange et le rehaussement de la couleur blanche, placée à la fois sur le contour de l’escalator ainsi que sur ceux de l’Ange, agissant ainsi à la manière d’une auréole.

 

  • abordons à présent le sujet. Nous nous trouvons face à une œuvre « métaphysique », en ce sens qu’elle s’extrait du contexte quotidien de sa banalité pour atteindre sa vérité dans la réception humaine, laquelle se produit par l’émergence du personnage féminin, à partir de l’escalator central, à droite. Ce personnage n’est autre que l’artiste. Pour ce faire, elle a posé face à un photographe, pour atteindre cette posture. C’est une posture de soumission. La tête est plongée vers le bas. Ses bras sont tendus le long du corps. Ses traits, conçus dans un chromatisme noir et blanc, sont ceux d’un ectoplasme. Sa silhouette est effacée. Un très beau jeu de perspectives dynamise l’ensemble, à la fois sur les extrémités latérales, dans ces barres soulignant les escalators montants ainsi que dans la mise en exergue des plaques en peigne métalliques pliantes du tapis roulant, conduisant vers le haut. Si, au niveau de l’avant-plan, un espace est offert au regard avant qu’il n’embrasse la composition dans son ensemble, force est de constater que ce sont les escalators qui ferment la composition : à gauche comme à droite, ils se terminent en aboutissant vers les extrémités de la toile. Sur chaque côté, une porte répondant à une autre, accentue la fin de la composition. Des ersatz de lumière se réfléchissant sur le verre des escalators renforcent la présence, à la fois effacée et physique de la Femme. Notons la présence d’une auréole blanche en apothéose vers le haut.

La complexité du cadrage de cette toile nous indique qu’elle est de conception strictement cinématographique. L’artiste a mis trois ans pour réaliser cette oeuvre. 

 

CORINNE VANDEN BERGHE associe Femme et montagne dans une même expérience spirituelle. La montagne ne lui est pas étrangère car elle y a souvent séjourné.   

Si le corps de la Femme lui parle plus que tout, celui de l’Homme (peu présent  dans l’exposition) est plastiquement pensé de la même façon, affirme l’artiste. L’un ne l’emporte jamais sur l’autre. Chacune de ses œuvres est l’image d’un état d’âme. Un état d’âme qui traduit également son amour pour la sculpture, transposé dans la peinture. Elle affectionne particulièrement les petites sculptures représentant des anges dans les cimetières. Son rapport avec la couleur, l’artiste le définit sensuel, passionné, essentiel, surtout si l’on conçoit le fait qu’il se réduit, comme nous l’avons spécifié plus haut, à des tonalités fort tendres, pour un résultat extrêmement efficace. Et l’identité de la Femme dans tout ça? Elle est l’élément central de son œuvre mais lorsqu’on lui demande si sa peinture est « féministe », elle répond, d’emblée, qu’il n’y a selon elle, aucune peinture spécifiquement « féministe » et que le rôle de l’Art est de s’élever par rapport à tout cela.  

L’artiste peint tous les jours depuis vingt-cinq ans. Etant jeune, elle a fréquenté, pendant cinq ans un atelier créatif. Plus tard, elle s’est inscrite à l’Académie de Watermael-Boitsfort pendant un an avant de l’abandonner pour trouver sa propre voie et prendre son envol. Elle peignait à l’huile lorsqu’elle était jeune avant de s’essayer au pastel sec et virer ensuite vers l’acrylique avant de recommencer à peindre à l’huile.  Elle est titulaire d’un Master en Psychologie obtenu à l’Université Libre de Bruxelles.

Femme et montagne se conjuguent dans un discours empreint de l’érotisme issu de la nature féminine, projetée dans un ensemble de situations-portraits-états d’âme. La Nature, sensuelle et nourricière, devient l’essence même de la Femme, telle que l’Art l’a chantée depuis toujours.

François L. Speranza.

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12273356697?profile=originalCollection "Belles signatures" © 2020 Robert Paul

N.B. : Ce billet est publié à l'initiative exclusive de ROBERT PAUL, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis. 

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Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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L'artiste CORINNE VANDEN BERGHE et François L. Speranza : interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles

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Photos de l'exposition de CORINNE VANDEN BERGHE à l'ESPACE ART GALLERY

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KROLIG : LA MER ENTRE ABSTRAIT ET FIGURATIF

                                                          KROLIG : LA MER ENTRE ABSTRAIT ET FIGURATIF

Du 04-10 au 27-10-19, l’ESPACE ART GALLERY (Rue de Laeken 83, 1000 Bruxelles) a organisé une exposition consacrée à l’œuvre de l’artiste peintre française, KROLIG, intitulée : ENTRE DEUX MERS

ENTRE DEUX MERS propose la vision d’une artiste évoluant sur deux univers. Ces deux univers s’expriment à la fois à travers deux écritures picturales ainsi que sur deux lieux extrêmement chers à son cœur, à savoir la Bretagne dont elle est originaire et la Belgique où elle vit. Bretonne de culture, son centre d’intérêt créatif est, bien entendu, la mer. Une première écriture nous indique qu’il s’agit d’une mer inscrite à l’intérieur d’un concept traditionnel, « classique », évoluant vers une autre mer, issue du tréfonds d’un imaginaire assoiffé d’éblouissements oniriques. Ce qui fait qu’au contact de l’œuvre de KROLIG, on éprouve le sentiment que tout « glisse » comme un nénuphar sur l’eau. Tout est reflet pour aboutir à une dématérialisation du sujet par rapport à son milieu originel. En fait, l’artiste fait rejaillir le sujet, pris comme « microcosme », hors de son biotope, pour lui assurer une autonomie plastique. D’un détail, elle en fait un univers pouvant subsister en dehors de tout contexte scénique. Cela se conçoit à partir de l’élément figuratif pris comme point de départ pour aboutir vers une abstraction progressive.  

BI-COQUE (115 x 75 cm-huile sur toile)

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Cette oeuvre est l’illustration même de ce propos. Cette toile présente le bas de la proue d’un bateau reposant sur l’eau. L’image peut sembler banale mais l’artiste la transcende en la découpant d’abord à l’intérieur de l’espace : la proue est divisée en deux parties. Traversées par une diagonale, légèrement oblique pour assurer le cloisonnement des deux parties formant l’angle terminant la proue, celle-ci est immédiatement prolongée par son reflet dans l’eau. Le reflet de la diagonale devient, de la ligne droite qu’elle était, une sorte de serpentin glissant sur l’eau. L’action du reflet a pour effet de « découper » la proue en quatre parties (deux en haut et deux en bas). En réalité, la totalité de la toile est divisée en plusieurs espaces : les quatre parties mentionnées, en plus de trois autres zones ayant chacune leur chromatisme propre. A’ l’avant-plan, une zone bleue rappelle que l’action se déroule sur la mer, suivie d’une autre zone blanche et noire, enjolivée de brun augmentant le contraste.

Sur la partie droite (allant vers le haut), une nouvelle zone blanche renferme la composition. Le chromatisme occupe la fonction d’exacerber les reflets et de devenir également autonome par rapport à l’ensemble de la toile. Le rendu chromatique permet d’englober les quatre zones initiales de la proue dans l’univers du reflet. A’ titre d’exemple, la partie rouge du haut, à gauche, retrouve son reflet rouge issu de l’eau. Tandis que la partie droite accuse un reflet d’un brun total, signe d’un passage vers une zone d’ombre. La même couleur brune sert de reflet à l’amarre qui retient le bateau (à gauche vers le haut). L’artiste utilise des tonalités extrêmement chatoyantes, telles que le bleu, le rouge, le blanc de titane, entrecoupé de noir pour accentuer la luminescence et le brun foncé.

LA BARQUE BLEUE (93 x 163 cm-huile sur toile)

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A’ partir de la matérialité du bateau, renforcée par la couleur bleu de mer, un univers essentiellement bicolore (vert et bleu agrémenté de quelques notes noires et blanches), confère ce sentiment de « glissement ». Par le biais de cet univers kaléidoscopique, trône la matérialité du sujet. Cet élément à la liquidité intemporelle, participe-t-il encore de la « mer » ou s’agit-il de la « mer intérieure » à l’artiste que nous évoquions plus haut? Le bateau occupe l’espace central de la toile. Le bleu de son reflet glisse sur l’eau comme une tache d’huile, ce qui avec l’ensemble chromatique, participe à la dématérialisation du sujet. Ce sujet (la barque) occupe le centre de la toile. Néanmoins, il ne sert en définitive, que comme ligne de démarcation entre deux espaces : celui du haut et celui du bas. Le sujet sépare deux univers dimensionnellement inversés, à savoir le haut, sombre et le bas, clair et  brillant. Quelque part, dans l’imaginaire du visiteur, le haut (le ciel) est clair et le bas (la terre) est sombre. On pourrait penser à un jeu sur la perception immédiate modifiée par l’imaginaire. Néanmoins, s’agissant de l’univers marin, l’eau renvoie la lumière du ciel. Par conséquent, cette œuvre pourrait  également (toutes proportions scientifiques gardées, bien entendu), être un écho lointain rappelant la notion terrestre de la « photosynthèse ». Le bleu de la partie inférieure débute par la couleur même de la barque pour se diluer dans l’eau.

Un dénominateur commun à la production de l’artiste se manifeste par l’image de  l’amarre qui retient le bateau.

COQUE MIROIR (115 x 75 cm-huile sur toile)

12273342662?profile=originalnous offre un ensemble de formes fantasmagoriques que l’imaginaire du visiteur, nourri par la culture, pourrait interpréter comme étant des masques de carnaval. L’artiste, alors prise par son travail, ne l’avait pas remarqué jusqu’au jour où quelqu’un attira son attention sur ce détail. La seule explication à cela réside dans le fait que ce qui l’intéresse dans son interprétation de la mer consiste à traduire la matérialité des vagues par la seule existence du reflet dont elle invoque la magie. D’où la naissance d’un sentiment d’abstraction. 

JEUX D’ONDES 1 (60 x 40 cm-huile sur toile)

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nous offre l’idée de ce que l’artiste songe à créer dans le futur. L’abstraction se manifeste par un reflet, celui d’une bouée sur l’eau trouble. Une tache blanche sur l’eau ensoleillée, irradiée de rouge, agrémentée de brun, de noir et de blanc. Si, à partir d’une réalité tangible l’on peut créer une volonté d’abstraction, comment considérer alors la création d’une image se voulant volontairement « abstraite »?

Cette œuvre nous ramène au cœur même du problème. A’ Kandinsky lui-même, lorsqu’il posa l’acte volontaire de l’ « abstraction ». Abstraction tant dans la forme que dans l’étymologie. La forme devient picturalement et sémantiquement « abstraite », en ce sens qu’elle prohibe toute interprétation culturellement connue et reconnue. Si le reflet sur l’eau tremblante est « abstrait », c’est parce qu’il brouille l’existence d’une forme définissable. Dans ce cas-ci, nous restons soumis à une intangibilité en devenir. Nous sommes encore très éloignés d’une intangibilité factuelle, étant donné que nous partons du figuratif pour n’aboutir qu’à une simple velléité d’abstraction.

Une deuxième écriture (dont nous parlions plus haut), caractérise l’œuvre de l’artiste. De la dématérialisation initiale, nous passons à la mise en scène, voire à l’apologie de la matérialisation.

La masse qui se dégage de la matérialité cyclopéenne de TABLEAU ARRIERE (115 x 75 cm-huile sur toile)

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ainsi que d’ALLIANCES MARINES s’affirme dans la puissance des chaînes ainsi que de ce que l’artiste donne à voir de l’architecture du bateau.

ALLIANCES MARINES (115 x 75 cm-huile sur toile)
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Car, comme nous l’avons spécifié plus haut, ces œuvres s’attachent à prendre le détail d’un ensemble (architectural en l’occurrence), pour se focaliser sur lui de sorte à l’ « agrandir » par le traitement de l’espace, comme à travers une loupe.

Remarquez la façon par laquelle l’artiste précise la matérialité dans le volume des anneaux de la chaîne ainsi que dans la force des boulons consolidant l’architecture. La chaîne, massive, unit deux niveaux de la construction.

Si ALLIANCES MARINES (mentionné plus haut) laisse apparaître un pan de mer démontée, en blanc, TABLEAU ARRIERE, offre au regard des anfractuosités, traitées comme des fenêtres ouvertes sur l’infini, à partir desquelles d’autres univers sont possibles.

LA CHAINE BLEUE (115 x 75 cm-huile sur toile).

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Outre le fait que la chaîne soit bleue, elle se fond avec le chromatisme dominant la composition, alterné par des notes noires horizontales, permettant de passer vers d’autres plages, apportant différents dégradés à la couleur initiale. Le blanc de titane domine la partie supérieure de la toile, confirmant le caractère rageur de la mer, opposé au calme marin de la première écriture de l’artiste. La dématérialisation du sujet affirme une volonté d’apaisement des eaux tandis que sa matérialisation met en branle un processus pulsionnel qui se confronte à la puissance de l’appareil cyclopéen du bateau.

Deux écritures sont, par conséquent, présentes chez KROLIG : une écriture touchant à l’abstrait, axée sur le reflet ainsi qu’une autre écriture visant à la matérialité des choses donc à la légitimité de la figuration.  

Concernant la deuxième écriture de l’artiste, la matérialité du sujet rejoint la volonté d’abstraction de la première par un dénominateur commun, à savoir l’appel de la mer (démontée par rapport à la mer calme) ainsi qu’un deuxième élément constitué par la présence de l’amarre retenant le bateau (évoquée plus haut). Si l’amarre existe déjà en tant qu’ombre dans la partie abstraite, la partie figurative la matérialise formellement.  

Si KROLIG est française, elle se définit comme étant spécifiquement bretonne. Son nom, plus exactement son pseudonyme l’atteste, en ce sens que « Krol » est le diminutif de Carole et que le suffixe « ig » signifie « petite ». C’était là, la façon dont son grand-père l’appelait lorsqu’elle était petite. Son univers est celui des petits ports de pêche bretons. La réalité de son œuvre ne se définit pas dans les paysages maritimes mais dans l’instant constitutif de chaque chose ainsi que dans le rapport entre temps et matière.

Les détails, intemporels, définissant la partie « abstraite » se conjuguent avec la matérialité architecturale des bateaux, attaqués par la rouille.

Malgré cela, tant la partie « abstraite » que la partie « matérielle » sont picturalement traitées de façon extrêmement « lisse » et épurée, en ce sens que la matière est fortement étalée par le couteau et les brosses, une fois posée sur la toile. Autodidacte, elle travaille essentiellement à l’huile. Son chromatisme se concentre sur le bleu, le rouge, le jaune, le blanc et le noir, en tant que vocabulaire pictural basique. Elle a toujours voulu peindre. Grâce à sa rencontre avec l’artiste peintre belge Nadia De Milewski, elle a pu exposer ses œuvres au Mérite Artistique Européen. Elle fut récompensée par l’obtention de la Médaille d’Or en 2012. Comme nous l’avons spécifié plus haut, l’artiste voit son futur artistique dans l’abstraction. Cette abstraction déjà si présente, à l’état embryonnaire, dans l’élaboration de ses reflets.  

KROLIG navigue « entre deux mers » tout en maintenant son cap. Gageons que son voyage l’amènera vers une écriture picturale dans laquelle glissements et reflets entreront dans un univers où la forme se libérera pour atteindre l’abstraction universelle. Car l’œuvre d’art est ontologiquement « abstraite ».   

François L. Speranza.

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Collection "Belles signatures" © 2020 Robert Paul

N.B. : Ce billet est publié à l'initiative exclusive de ROBERT PAUL, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis. 

Robert Paul, éditeur responsable

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Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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L'artiste KROLIG et François Speranza : interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles

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Photos de l'exposition de KROLIG à l'ESPACE ART GALLERY

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DÉFORMATIONS FORMELLES : LE PRISME DE JOEL JABBOUR

Du 06-09 au 29-09-19, l’ESPACE ART GALLERY (Rue de Laeken, 83, 1000 Bruxelles) a organisé une exposition autour du photographe belge, Monsieur JOEL JABBOUR, intitulée : FRESQUES ET FRASQUES.

FRESQUES ET FRASQUES! Voilà un titre au contrepoint musical! L’artiste y ajoute, de surcroît, FRESQUES SYMBOLIQUES. Que n’a-t-il pas opté pour FRESQUES SYMPHONIQUES, voire STÉRÉOPHONIQUES! Tellement la composition musicale est présente dans le rendu graphique. L’artiste, issu du cinéma, a assuré la direction artistique d’un film entièrement composé d’images fixes. Ces images sont, dans la genèse de leur technique, issues du cinéma fantastique et psychédélique des années ’60. Il s’agissait d’un cinéma qui obtenait ses effets visuels par le biais de prismes divers placés sur l’objectif de la caméra. Mais ici, même si la technique peut s’apparenter à celle évoquée, il en est tout à fait autrement, puisqu’il s’agit de réalisations régies par une mathématique efficace. Il y a une forme d’abstraction personnelle dans le rendu graphique, en ce sens que le sujet est géométriquement démultiplié pour se déployer sur tout l’espace.  Mais parallèlement à cela, s’amorce un côté « carré », presque rationnel dans ce qu’il serait convenu de qualifier d’ « irrationalité du propos ». Le cadre s’inscrit dans l’univers architectural sorti du carcan de la ville, en l’occurrence, Bruxelles. Si l’architecture est reine c’est parce qu’il y a surtout un sens immense du volume à l’intérieur du cadrage. Tel édifice, « monstrueux » dans sa réalité plastique devient, une fois photographié, une sorte de vaisseau flottant dans les airs. L’artiste superpose des images d’édifices de façon à les déformer jusqu’à les rendre antithétiques. Cette opposition fait de sorte que le sujet architectural démultiplié se « soulève », conférant une musique carrément stéréophonique à l’image.

Par le biais du traitement photographique, la structure architecturale est mise en exergue dans une recherche soignée apportée au volume ainsi qu’à la lumière, composant le rendu plastique.  

L’édifice vire carrément de direction, en ce sens qu’il effectue, via l’approche photographique, un changement conceptuel de l’architecture : de son identité « contemporaine », elle devient « futuriste » précisément dans le sens cinématographique du terme.

Très souvent, il s’agit de plans en contre-plongée, mettant en relief la structure architecturale soutenue par la voûte céleste jouant son rôle (pictural) d’englobeur de l’espace, à l’instar d’une peinture plafonnante. Il ne s’agit pas d’images simplement kaléidoscopiques mais bien de l’expression vivante d’une pensée visuelle interrogeant l’espace. L’artiste vise le but d’aborder l’esthétique d’une déstructuration pensée du volume architectural prise isolément par rapport au contexte urbanistique. Le sujet représenté n’existe plus que par lui-même. Cette autonomie est soutenue par la mise en exergue de l’élément décoratif, offrant au visiteur le sentiment esthétique d’admirer le vitrail chatoyant d’une église. Car pris isolément, le décor devient « baroque » (dans le sens positif du terme), en ce sens qu’il s’isole du contexte pour n’exister que par sa seule intériorité. Nous rejoignons là une forme de futurisme cinématographique, en ce sens que l’élément isolé et démultiplié dans l’espace, se dilate pour appréhender une forme rappelant l’esthétique de la science-fiction. Songez aux images de soucoupes volantes prises de nuit, en contre-plongée se déployant dans le ciel. Néanmoins, contrairement aux apparences, l’artiste, même s’il a évolué au sein de la sphère cinématographique, s’est en quelque sorte affranchi de son passé, en ce sens que l’utilisation de la contre-plongée n’est pas avatar de cette époque. Elle n’existe que pour mieux enserrer le sujet dans l’espace en exploitant toutes les possibilités offertes par le cadre. Le décor n’est là que pour faire ressortir essentiellement sa fonctionnalité plastique plus que pour mettre en exergue sa présence décorative. En ce sens, il y a fort à parier que l’artiste dépasse de très loin les intentions premières de l’architecte pour qui l’objet n’était qu’ornemental.    

JOEL JABBOUR va très loin dans son œuvre, en ce sens qu’il laisse au visiteur le soin de prolonger le récit photographique par son imaginaire. A’ titre d’exemple, concernant SEE YOU WITH A SMILE, un enfant lui avait fait remarquer, amusé, que l’édifice du haut superposé à celui d’en bas, portait en son milieu une fente triangulaire semblable à un sourire. Si, à notre tour, nous laissions libre cours à notre imaginaire, nous pourrions même aller plus loin en considérant les deux extrémités en demi-sphère comme étant des oreilles déployées.Et interpréter la flèche reposant sur le socle comme étant un chapeau. Nous aurions donc l’image d’un bonhomme souriant.

SEE YOU WITH A SMILE

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Remarquons également le respect carrément scrupuleux que l’artiste accorde à l’espace. Tous les points de correspondance sont parfaitement remplis par le sujet. Rien ne déborde du cadre. Tout est parfaitement ramassé.

Les œuvres exposées sont une volonté d’intégrer différents éléments constitutifs de la ville : bâtiments, problèmes spatiaux et végétation. Le tout intégré dans un univers plastique et mathématique conduisant à l’harmonie et se terminant dans la beauté, aussi tangible qu’abstraite.

UN RASSEMBLEMENT GLORIEUX

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Cette oeuvre s’inscrit dans une contre-plongée faisant coïncider divers détails tels que les drapeaux, l’enseigne décorative en métal s’enserrant dans une armature architecturale retournée. L’on pourrait presque parler de « cubisme abstrait ».

C'EST COMME UN MIRAGE

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constitue un exemple de plan rappelant certains films fantastiques ou psychédéliques des années ’60.

PARLEMENT EN SOUCOUPE VOLANTE

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marie architecture et végétation dans l’effet pyramidal coupé en son milieu par les branches déployées d’un arbre, englobant intégralement l’espace vers le haut de la composition.

JOEL JABBOUR est le créateur d’une œuvre foisonnant de symboles tels que la ville, l’édifice (administratif), le décor, le ciel et l’arbre.

LA VILLE

Bien qu’elle fut, de multiples façons présente, parmi les sujets traités par l’Histoire de l’Art occidental, la ville trouve son autonomie de façon tardive. Ce n’est que vers le milieu du 19ème siècle avec la peinture impressionniste que la ville (voire certaines de ses composantes) devient un « sujet » à part entière. Cela s’explique par l’affirmation toujours plus croissante de la bourgeoisie ainsi que par la montée de la société industrielle, entraînant un développement du paysage urbain. En France, le 19ème siècle voit le triomphe de l’aménagement haussmannien. L’impressionnisme aime tant la ville que le paysage champêtre car elle a permis au peintre de sortir de son atelier pour se confronter à un autre type de lumière. Plus tard, le cinéma s’est intéressé à la ville, soit en tant que sujet expérimental dans des œuvres telles que IMPRESSIONS DU VIEUX PORT DE MARESEILLE de Laszlo Moholy-Nagy (1929), soit en tant que personnage fictionnel. Que l’on se souvienne de THE NAKED CITY (LA CITÉ SANS VOILES) de  Jules Dassin (1948).  

Un dénominateur commun unit ces deux exemples, à savoir la dimension politique de la ville dans son conditionnement sur l’individu.

Dans la dernière interview que Jules Dassin donna de son vivant, ce dernier affirmait que filmer une ville signifie poser un acte politique par excellence.

La photographie n’est pas en reste. Photographier une ville s’avère être également un acte politique. Mais au-delà de cet acte, elle s’impose dans une transformation artistique radicale du sujet. Car par le biais du cadre et du plan, le photographe la recrée à son image.

JOEL JABBOUR en fait un univers lumineux où le verre et l’acier se mêlent dans le prisme féerique de l’objectif. Une image est née : celle de la ville imaginaire.

L’EDIFICE

La spécificité du bâtiment photographié réside dans le fait qu’il s’agit de l’édifice administratif renfermant en son sein les tensions politiques européennes contemporaines, à savoir le siège de l’U.E. Le bâtiment est conçu dans son cadrage de façon plongeante. L'Europe est représentée en Allégorie, brandissant fièrement l'emblème de l'Euro.

VERS LE LUXEMBOURG

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LE DÉCOR

Tout en mettant le contexte en évidence, sa présence acquiert une autonomie de fait. Son présence ne rivalise aucunement avec le sujet exposé. Elle sert de plus-value esthétique à son existence.

LE CIEL

Il renoue, dans son vocabulaire contemporain, avec la peinture de la Renaissance, en ce sens qu’il « englobe » le sujet au sein d’une voûte sacrée, en lui conférant une dimension intemporelle. Une légère touche « surréaliste » baigne la composition dans ce ciel limpide, presque sans nuages lequel, malgré la majesté de l’appareil cyclopéen, enveloppe l’ensemble d’une pleine sérénité.

L’ARBRE

Dans ce contexte, quoique transfigurée, la dimension écologique est représentée comme un élément consubstantiel à l’architecture.

Elle enrobe, voire enlace l’édifice suspendu dans le ciel. L’arbre devient, de par ses branches déployées, les racines dilatées de l’édifice, comme pour chercher quelque ancrage au sein du vide.   

JOEL JABBOUR, de par son cadrage photographique savant, s’apparente ne fût-ce que dans l’esprit, au créateur d’une forme de « dadaïsme contemporain ». Notons que si l’ensemble des édifices photographiés appartiennent à l’architecture contemporaine, celle-ci n’est en rien un « must » déterminant ses choix. Il pourrait, comme il le précise, adapter son esthétique à une maison victorienne.  

Ceci précisé, il n’entretient aucun rapport particulier avec l’architecture. L’édifice en élévation résulte d’une expérience plastique. La géométrie identifiant son esthétique est synonyme d’un rapport ludique qu’il entretient avec le sujet. A’ la vue de ces œuvres, la question que le visiteur pourrait se poser est la suivante : avec quel type d’appareil photographique l’artiste réalise-t-il ses compositions? Ce dernier crée ses clichés avec tous les appareils disponibles. Sa palette va du gsm au vieil Olympus (acheté dans une brocante). Ce qui compte c’est essentiellement la stabilité de la caméra car c’est à partir de celle-ci qu’il adopte les différents cadrages. Il n’hésite pas à cadrer un même édifice sous plusieurs angles. L’artiste compose ses photographies sur support numérique. Mû par une grande honnêteté professionnelle et intellectuelle, il ne retouche jamais ses créations.  

JOEL JABBOUR met en scène de façon souvent humoristique, une architecture prise au centre de son problème existentiel. Car, en dernière analyse, contrairement à ce que pourrait suggérer le titre de cette exposition, il ne s’agit nullement de « fresque et frasques » mais bien d’un hymne visuel à la beauté complexe de l’architecture prise dans une interrogation qui nous dépasse.

François L. Speranza.

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Robert Paul, éditeur responsable

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Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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L'artiste JOEL JABBOUR et François Speranza : interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles

12273371090?profile=originalPhoto de l'exposition de l'artiste JOEL JABBOUR à l'ESPACE ART GALLERY

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                               LE BESTIAIRE ENTRE IDÉE ET FORME : LA VISION CRÉATRICE D’EMMALY

Du 07-06 au 30-06-19, l’ESPACE ART GALLERY (83, Rue de Laeken, 1000 Bruxelles) a consacré une exposition au sculpteur français EMMALY, intitulée : LA MAGIE DES COULEURS.

Le titre de cette exposition semble porter sur un des innombrables éléments qui constituent le travail de cet artiste, à savoir la couleur comme vecteur d’onirisme. Néanmoins, la seule couleur ne suffit pas à caractériser l’œuvre du sculpteur EMMALY, en ce sens qu’elle compose avec la forme sur laquelle elle s’applique. Certes, la couleur est primordiale dans la conception des pièces, mais elle ne l’emporte pas sur la seule ligne. Ligne et couleur forment une entité dynamique, l’une étant tributaire de l’autre. L’œuvre qui en résulte est le mariage entre ces deux éléments. La lumière, issue de la couleur, s’attache à dessiner la forme dans ses moindres recoins. Pour ce faire, l’artiste n’hésite pas à « agrandir » le sujet, voire à le « rapetisser » pour mieux y déceler les arcanes formels.   

LIBELULE (bronze polychromé)12273332876?profile=original

Cette oeuvre rappelle la coupe microscopique de l’insecte vue à travers la loupe grossissante du microscope. Posée sur un socle rotatif, la pièce tourne au gré de la main du visiteur. Vue de face, l’œuvre se révèle par l’appareil oculaire de l’insecte, lequel occupe la totalité de la partie faciale. Il est l’élément principal de la composition. Le deuxième élément apparaît dans la conception des ailes. Les ailes antérieures esquissent un mouvement directionnel vers le bas. Tandis que les ailes postérieures projettent le mouvement vers le haut. L’artiste nous indique donc que l’instant est soit saisi en plein vol, soit que l’insecte amorce son envol. La vue de profil met en exergue la beauté plastique de la conception des ailes. Tant, dans l’intérieur comme dans l’extérieur, les ailes sont porteuses de fines nervures, à peine esquissées. Ce qui appuie, dans le rendu plastique, la force directionnelle du mouvement. La vue arrière insiste sur le corps dans toute son extension. Des stries horizontales alternent, de la base jusqu’à la partie supérieure, pour mettre en évidence la force du corps, conçu comme une cage. Cette vue postérieure nous fait prendre conscience de l’assemblage résultant du contact entre les ailes et la partie supérieure du corps. Bien que tout soit parfaitement poli et soudé, l’œil du visiteur, apprivoisé, s’aperçoit de l’ajout d’éléments sur le haut du corps. Cette pièce est réalisée en six parties, à la cire perdue sur une armature métallique recouverte de plâtre.

Cette même vue fait également prendre conscience de l’aspect « mythologique » des ailes, lesquelles, évoluant sur deux rythmes différents, ressemblent aux voiles déployées d’un vaisseau.      

MARCHE POLAIRE (bronze polychromé)

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La démarche est la même que pour l’œuvre précédente. Le sujet est, comme son titre l’indique, la marche prise  sous plusieurs angles, tant frontal que de profil et postérieur. L’artiste se frotte ici à un aspect lequel a toujours énormément intrigué les peintres et sculpteurs de tous temps, à savoir la représentation du mouvement. Des chevauchées sur les grottes pariétales de Lascaux au « galop volant » de la Grèce antique, en passant par le décorticage du mouvement par le phénakistiscope du début de l’histoire du Cinéma, le mouvement, dans sa rhétorique a toujours été décrypté avant toute volonté de reproduction. La patte arrière droite du plantigrade répond à sa patte avant gauche. Les deux autres pattes (la gauche arrière et la droite avant) stabilisent le mouvement. La patte arrière droite sert de « propulseur », tandis que celle avant gauche ferme, en quelque sorte, le mouvement. Le museau de l’ours est privé d’attributs. La couleur jaune a ici un rôle déterminant, en ce sens qu’elle insiste sur les lignes de forces de la pièce. Cette œuvre, à dominante verte, est sur les flancs ainsi que sur le dos, supplantée par du brun vif dans le but de renforcer l’idée de la masse musculaire de l’animal. Cette même tonalité, agglomérée sur la crête du dos jusque sur le postérieur de l’ours, sert à matérialiser le volume. Le rendu de la pièce est d’une grande élégance.  

ENVOL (bronze polychromé)12273333693?profile=original

Cette pièce témoigne également d’une splendide représentation du mouvement ascendant dans l’effort physique de l’oiseau. L’étirement se produit par l’élongation du cou, à partir du milieu du corps. Cette ligne droite, aboutissant au bec du volatile, est capitale car elle assure le mouvement directionnel à la pièce. Force est de constater la puissance des ailes, plastiquement conçues comme des muscles destinés à porter tout le poids de l’envol. La vue arrière nous offre une ligne droite unissant l’arrière du corps, presque en éventail, en passant par les ailes pour aboutir au cou jusqu’à la tête de l’oiseau, signifiée par le bec. A’ l’instar de l’ours (MARCHE POLAIRE – mentionné plus haut), la tête du volatile est privée d’attributs.  

DUO MARIN (bronze polychromé)

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représente une scène de maternité. Ce qu’il y a de prodigieux dans cette œuvre, c’est qu’il s’agit de la représentation d’une plongée. La baleine et son baleineau plongent dans une synchronisation du mouvement totale, lequel les unit d’un même lien. La polychromie s’étale à partir d’une couleur dorée vers un ensemble de variations raffinées.

LE TOUCAN (bronze laqué)12273335453?profile=original

le corps, vu de profil, est compris entre deux figures hyperboliques, à savoir la queue et le bec. De face, le bec occulte la tête.  Les yeux s’inscrivent dans deux énormes orbites privées de regard. L’oiseau se résume à cela. Au visiteur de concevoir le reste.

Avec EMMALY, nous allons à l’essentiel, l’artiste refuse de se perdre dans des détails superflus. L’absence d’attributs caractérisant la gueule de l’animal sculpté peut se traduire par la volonté de le concevoir, à la fois dans l’idée et dans le volume. Son œuvre se situe à l’intérieur d’une démarche essentiellement figurative, basée à partir d’un travail sur la ligne, d’où ce côté stylisé et lisse caractérisant chacune de ses pièces. L’artiste travaille toujours d’après photo. Deux choses interpellent d’emblée le visiteur : la dextérité du mouvement ainsi que le socle (souvent mobile) sur lequel repose et tourne la sculpture. Même si l’œuvre y contribue dans sa réalisation, c’est l’œil qui détermine le mouvement. Le socle, permettant la rotation, est là pour renforcer la dynamique de ce mouvement dans sa métamorphose mais aussi pour protéger la pièce de chocs éventuels. L’artiste, qui ne s’est jamais attaqué à la figure humaine, demeure éperdument animalier. En cela, il est l’héritier de son père, également sculpteur spécialisé dans le bestiaire, évoluant, néanmoins dans l’abstrait. Extrêmement attentif à l’aspect technique, il envoie ses pièces chez le fondeur. Une fois finies, il les termine en travaillant sur la dichromie, c'est-à-dire sur un travail chromatique centré sur la fusion entre deux couleurs. Mû par la symbiose mystique entre Nature et tonalités, il pratique toujours un chromatisme très proche de celui que l’on trouve dans les différents biotopes. L’artiste est autodidacte et sa technique se résume essentiellement au bronze. Il pense persévérer dans cette voie.

EMMALY nous offre un merveilleux travail où la ligne est à la croisée de la forme et de la proportion. L’élégance se mêle au mystère de l’idée et la matière conduit le regard vers une vérité possible que le visiteur fait sienne.  

François L. Speranza.

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Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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L'artiste EMMALY et François L. Speranza : interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles.

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Photos de l'exposition de EMMALY à l'ESPACE ART GALLERY

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                                     AU-DELA DE L’IMAGE : L’ŒUVRE DE JEAN-FRANCOIS COURBE

Du 01-02 au 24-02-19, l’ESPACE ART GALLERY (Rue de Laeken 83, 1000 Bruxelles) a eu le plaisir de vous présenter une exposition consacrée au sculpteur français, Monsieur JEAN-FRANCOIS COURBE, intitulée : DE L’ARBRE A’ LA SCULPTURE.

Quel lien unit l’arbre à la sculpture ? Celui de l’alchimie faite de matière et de sensualité constituée par le bois. Le bois devient l’intermédiaire direct entre l’arbre et l’œuvre. Le titre de l’exposition est parfaitement fidèle à la vision de l’artiste. Il est des sculptures où le bois disparaît pour révéler la virtuosité de la forme dans toute la complexité de son vocabulaire. Pour cet artiste, l’alliance entre arbre et œuvre s’avère indispensable pour que cette dernière existe.

Dans toutes ses convulsions, circonvolutions et révolutions, LE BATON VERT (bois d’abricotier) donne le sentiment que l’arbre est à l’origine de l’œuvre.

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Que le sculpteur n’a servi que d’intermédiaire à son éclosion. Est-ce l’arbre qui est contenu dans la sculpture ou est-ce la sculpture qui est contenue dans l’arbre? Le visiteur tranchera cette question au fur et à mesure qu’il tournera autour de la pièce. LE BATON VERT est, en fait, la rencontre de deux pièces : un bâton de couleur verte traversant en son milieu un ensemble de bois massif parsemé de cratères et de circonvolutions. L’on sent la patte du sculpteur dans les finitions qui rendent le volume, particulièrement dans les creux et les aspérités. A’ partir d’une base fortement rehaussée, la pièce s’élance dans une ascension tortueuse jusqu’au sommet, constitué d’excroissances mettant en relief l’abricotier dans sa véritable couleur en ses creux. Les réminiscences originelles conférées par la nature (greffe, couleur…) atténuent l’abstraction suggérée par la forme. Cette dernière participe de la matière. Sans doute la transcende-t-elle dans la séculaire communion-compétition entre Art et Nature. La nécessité première de l’artiste concernant cette pièce est celle de créer le mouvement : tout cela étant établi dès le départ des branches. Etant réalisée en abricotier, cet arbre a pour caractéristique qu’il peut être greffé sur le tronc d’un autre arbre solide. Ici, l’arbre greffé est inconnu. 

EVOLUTION (bois d’abricotier)12273340096?profile=original

La symbiose entre le bois et la pierre réside dans le fait que leur traitement permet de mettre en exergue l’idée de la sensualité. Comment, à la vue de ces traits étirés, ne pas évoquer l’image d’une créature féminine dans sa nudité? Comment, au contact de ces longs entrelacs, ne pas succomber à l’image de l’ « Odalisque » allongée, lascive, sur son divan? L’œuvre se structure sur cinq niveaux : deux niveaux sculptés comme des scarifications corporelles et trois niveaux lisses. La pièce se présente donc comme une succession de plans lisses et de plans sculptés.

Bien que cela participe entièrement de l’imaginaire, lui-même expression directe de la culture séculaire, l’on pourrait voir dans cette succession de niveaux, l’image de la mort et de la renaissance. Les plans lisses exprimant l’idée du « renouveau » par rapport aux surfaces rugueuses évoquant l’image de la peau usée. Le titre de l’œuvre (EVOLUTION) aboutirait alors à l’idée incarnée dans la matière.  La seconde étant la servante absolue de la première.                 

DEMETER (chêne)

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est la seule œuvre de l’exposition qui soit totalement figurative. Cette sculpture démontrant l’expérience, la culture ainsi que le professionnalisme de l’artiste, pourrait à l’extrême limite (s’il ne s’agissait d’une sculpture) se lire comme une peinture moderne du début des années ‘30 du siècle dernier. A’ partir d’un tronc conçu en plan, tous les attributs composant la pièce sont décentrés par rapport à l’ensemble. La tête est tournée vers la droite (la gauche par rapport au visiteur). L’épaule droite gauche par rapport au visiteur), légèrement décentrée permet au bras de tomber harmonieusement jusqu’à ce que la main touche la cuisse droite (gauche par rapport au visiteur). Une cassure du rythme intervient dans la posture du bras gauche (droit par rapport au visiteur), lequel reposant sur le genou, occulte l’épaule pour rejoindre la base du cou. Des seins proéminents ainsi qu’une cuisse volumineuse rentrant vers l’intérieur, assurent la stabilité de la pièce dans son volume. L’on pourrait parfaitement faire passer une ligne médiane imaginaire allant de la base du cou vers le bas du ventre, en passant par les seins. Le même phénomène est perceptible sur l’arrière de la pièce. Ici, la colonne vertébrale, à peine esquissée, matérialise cette droite imaginaire, de la base du cou jusqu’au creux des reins. Le visage, tourné vers le haut, porte des traits à peine soulignés, à l’exception du nez massif par rapport au reste, rappelant assez celui des divinités cycladiques. Les yeux, exorbités, sont proches de l’art mésopotamien.   

ENVOL (châtaignier)

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évite de nous poser la question, à savoir si oui ou non, il s’agit d’un oiseau. Car une fois encore, nous nous trouvons face à la matérialisation d’une idée transcendant le sujet : celle de l’envol, concrétisée par une série d’excroissances, sur la gauche de la pièce, se déployant ensuite dans tous les sens.

La plus haute de ces celles-ci part vers le haut. Si le visiteur se place face au dos de la pièce, tout s’embrouille.

Elle prend d’autres aspects tout aussi intéressants n’ayant plus rien à voir avec l’idée de l’envol. Cette œuvre constitue un bel exemple de technique.

Réalisée en taille directe (ronde-bosse) à partir de la matière première, nous remarquons, sur l’extrême droite ainsi que sur le centre, l’apparition de résidus appartenant à la souche.

L’artiste a gardé l’écorce à la pièce comme pour laisser la peau au volatile. Il l’a ensuite badigeonnée avec une teinture conférant à l’écorce, dès que celle-ci vieillira, l’assurance qu’elle deviendra grise. La partie centrale étant mise en valeur en tant que corps confirmé de l’oiseau. Tandis que son extrémité (réduite par rapport au centre) fait office de tête au volatile. L’idée première de l’envol est donnée par l’extrémité arrière gauche, rappelant à la fois les plumes et les ailes équilibrant la pièce. L’arrière, au contraire, présente un « décor » laissant le visiteur à son imagination. Nous nous trouvons face à une pièce laquelle, à la fois, « conditionne » le regardant dans une image donnée par la Nature : l’envol (côté frontal), devenant libre d’interprétation une fois envisagé sur sa face arrière. C’est là toute la dialectique de la sculpture contemporaine : laisser le visiteur libre dans son interprétation à partir d’une idée donnée. L’œuvre de cet artiste participe d’un long discours en ce sens qu’au-delà du thème sculpté, il travaille sur cinq ou six pièces en même temps. Lorsqu’il estime avoir assez travaillé sur une œuvre, il la laisse au repos pour en reprendre une autre quitte à revenir sur la précédente pour y apporter la touche qu’il juge finale. Il y a, par conséquent, interaction entre chaque opus composant une œuvre, quelle que soit sa destination. Chaque création est semblable à un accouchement car c’est de l’arbre que la sculpture vient au Monde. L’artiste est venu à la sculpture par le bois, considérant que le bois, directement issu de la Nature a quelque chose à dire. L’arbre ne s’arrête pas. Il évolue dans l’œuvre créée. Et de ce fait, continue à révéler l’artiste.

JEAN-FRANCOIS COURBE a une formation d’autodidacte. Il a notamment travaillé avec un marbrier qui lui a appris à se servir correctement des outils. Il a jeté son dévolu non sur la pierre mais sur le bois comme mode d’expression.

Par son geste, il atteint la vocation de tout sculpteur : servir d’outil au dessein du Démiurge dans le prolongement de l’acte créateur.

François L. Speranza.

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Collection "Belles signatures" © 2020 Robert Paul

N.B. : Ce billet est publié à l'initiative exclusive de ROBERT PAUL, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis. 

Robert Paul, éditeur responsable

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Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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L'artiste JEAN-FRANCOIS COURBE et François Speranza : interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles

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12273343453?profile=originalPhotos de l'exposition de JEAN-FRANCOIS COURBE à l'ESPACE ART GALLERY

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                       LE SOMMET RÊVÉ DE LA VAGUE : L’ŒUVRE D’ANNETTE LAHAYE-COLLOMB

Du 07-06 au 30-06-19, l’ESPACE ART GALLERY (83, Rue de Laeken, Bruxelles 1000) a eu le plaisir d’exposer l’œuvre du peintre  française, Madame  ANNETTE LAHAYE-COLLOMB, intitulée : ÉVASION MARINE.

Rarement la peinture n’a atteint un degré d’interprétation aussi exhaustive dans l’évocation du sentiment. Concernant ANNETTE LAHAYE-COLLOMB, le sentiment évoqué est celui de l’évasion. L’évasion est avant tout un voyage. Un voyage intérieur. En dernière analyse, il ne peut être qu’un voyage intérieur, car par le biais de l’image, en tant que véhicule, il exige l’introspection. Le thème véhiculé est celui de la mer. Cette mer se singularise par une volonté d’élévation. Tout part du bas, de l’avant-plan, pour atteindre précisément le sommet de cette évasion. Concrètement, pour franchir ce sommet, l’artiste surélève la ligne d’horizon jusqu’à la faire coïncider avec la naissance du ciel. L’effet de gonflement de la mer, associé à la verticalité pensée de l’image, confère à l’œuvre un aspect presque « gothique » dans l’étymologie architecturale du terme : l’élévation de la bâtisse picturale conduisant vers le ciel. Les tableaux intitulés LE VENT SUR LA MER (60 x 60 cm-acrylique sur toille)

12273343871?profile=original et IMMENSITÉ (60 x 60 cm-acrylique sur toile)

12273343696?profile=originals’inscrivent dans cette esthétique.   

              

LES OISEAUX DE MER (30 x 30 cm acrylique sur toile)

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La mer offre souvent des instantanés tels que le vol de mouettes « en suspension » dans l’air, planant entre les vagues. L’émotion est ici « en suspension » car, même si le vol semble » arrêté sur la toile, il se poursuit dans l’imaginaire du visiteur. Cette œuvre met en exergue un tour de force. A’ partir d’une dominante bleu-foncé, délimitant un cadre sombre, celle-ci permet aux mouettes de se signaler plastiquement, donnant même jusqu’au sentiment de sortir du cadre. Cette œuvre se distingue également par le fait qu’elle s’inscrit à l’intérieur d’un petit format. A’ partir du milieu de l’espace, les mouettes entament leur envol, l’une se superposant à l’autre, verticalement. Et cet envol se concrétise à partir la crête d’une vague, coupant l’espace en deux, à partir de l’avant-plan. Les extrémités de la toile sont soulignées de matière bleue, se confondant avec le chromatisme général. Cela donne l’effet d’une « fenêtre », d’un écran, à l’intérieur duquel se déroule la scène.

L’évasion transcende la simple réalité visuelle : s’agit-il de trois mouettes, l’une superposée à l’autre ou bien d’un seul oiseau dont l’envol est démultiplié jusqu’à atteindre le point culminant?

Il est merveilleux d’observer comment, à partir d’une seule note chromatique, en l’occurrence la bleue, les remous soulignés par l’écume sur la mer démontée, s’inscrivent dans la dynamique du mouvement.

Une deuxième écriture vient préciser la démarche picturale de l’artiste. Outre les marines, elle aborde une écriture carrément « abstraite », parfois dépouillée de tout élément cognitif, à l’instar de deux œuvres portant le même titre, ayant les mêmes dimensions et réalisées avec la même technique :

CADRES AVEC 3 PEINTURES ASSEMBLÉES (A) ET (B) (60 x 32 cm-acrylique diluée au pinceau japonais - ce pinceau est spécialement utilisé par les calligraphes).  

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Ces deux œuvres représentent une série de trois miniatures. Chaque miniature représente à son tour deux petits tableaux monochromatiques. Même si le figuratif est absent, l’atmosphère demeure, sinon maritime, du moins lacustre. Car l’on devine, de par l’opacité de la couleur, la présence de la mer. Chaque composition est enserrée par un halot de couleur claire, comme pour l’encadrer une seconde fois.  

Voici une variation sur le même thème. Trois miniatures, contenant un petit tableau vers le haut, ainsi qu’au milieu avec trois petites compositions à la  base, nous montre un carré démultiplié (transformé en losange dans la partie du milieu), formant comme nous l’avons spécifié plus haut, une série de variations sur un même thème. Dominée par le bleu foncé, le blanc et le noir, ils s’inscrivent tous sur un fond  blanc, saupoudré de quelques nuances bleu foncé, parfois à peine perceptibles. Le visiteur ne peut qu’être médusé par la dextérité technique de l’artiste, dominant l’abstrait comme le figuratif, avec une telle sincérité.

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Un dénominateur commun unit les petits formats avec les miniatures, à savoir ce que l’on pourrait qualifier de « côté fenêtre », à travers laquelle la scène se déploie. Les mouettes figurant dans LES OISEAUX DE MER (cité plus haut) ainsi que VUE DES REMPARTS (30 x 30 cm-acrylique sur toile) sont animés par cette même esthétique.

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L’avant-plan de cette œuvre fait penser à deux colonnes portantes, au centre desquelles apparaît le paysage marin.

Trois espaces ou si l’on veut, trois étapes scandent LE LAGON POLYNÉSIEN (80 x 59 cm-acrylique sur toile).

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A’ l’avant-plan, se déploie la plage, à la suite de laquelle s’étale la mer. A’ partir de la ligne d’horizon (placée très haut) prend naissance le ciel.

Observez la façon dont le bras de mer est compris (pour ne pas dire « comprimé ») entre la plage et le ciel. Il n’existe que comme parenthèse. Mais c’est là une parenthèse jouissant de nombreuses variations chromatiques par rapport à l’ensemble de la composition : le bleu (en dégradés), le vert (en dégradés), le noir alternant ça et là, avec des ersatz de blanc, fuyants comme des éclairs.

Par conséquent, cette parenthèse est en réalité, l’élément central de la toile. Sauf qu’à ce stade, il ne s’agit plus du paysage maritime breton mais bien d’une plage située à Moorea (en Polynésie).

LE VENT SUR LA MER (mentionné plus haut), nous offre une vision de l’océan en furie. L’on ressent la poussée de vagues à partir du bas (avant-plan) jusqu’à être projetées, en crête, pour se confondre avec la ligne d’horizon surélevée. A’ cette dominante bleue (en dégradés), deux tonalités issues de la même matrice, s’entrechoquent (le ciel et la mer), séparées par trois entités monolithiques, de couleur brune, séparées l’une de l’autre, représentant des rochers.

IMMENSITÉ (mentionné plus haut) présente un discours similaire mais conçu d’une façon beaucoup plus calme. L’océan monte, partant de l’avant-plan mais contrairement à LE VENT SUR LA MER, l’ascension, grâce aux différences chromatiques (vert, rouge, jaune, blanc et bleu), se fait en quelque sorte, par « étapes ». L’on pourrait, à l’extrême limite, « escalader » les vagues montantes pour arriver au sommet. Chose impossible avec LE VENT SUR LA MER, tellement les éléments sont démontés.

Evoquant CADRES AVEC 3 PEINTURES ASSEMBLÉES (mentionné plus haut) et LE VENT SUR LA MER, qu’ils soient au nombre de deux ou de trois, le dénominateur commun concernant ces petits formats réside dans le fait qu’ils présentent des figures conçues dans le module du carré, parfois conçus en losanges, à l’instar des CADRES.

A’ la vue de son œuvre, la question qui surgit à l’esprit, revient à se demander quel rapport l’artiste entretient avec l’évasion. A’ cela, elle répond que l’évasion est avant tout une façon de vivre. Et cela se ressent, lorsqu’elle nous apprend que sa grande passion est celle de faire de la voile.

Nous évoquions, plus haut, le côté « gothique » de son rendu de la mer, en remontant systématiquement la ligne d’horizon sur chaque toile conçue.

Cela s’explique par le fait qu’elle considère l’horizon comme étant la porte de l’évasion du regard, au-delà duquel s’étale l’infini. Et ce sentiment d’évasion s’exprime par l’emploi de sa couleur préférée, le bleu. Couleur qu’elle définit très difficile à rendre car elle est synonyme d’espace. A’ côté de son activité de peintre, l’artiste est également écrivain.

Ses deux activités créatrices deviennent alors complémentaires si elle veut se livrer complètement. La création est pour elle l’aventure d’un grand voyage qu’elle livre sur la toile et sur le papier. Une aventure complétant ses nombreux voyages. Et lorsqu’elle peint un paysage, elle s’efforce à le peindre non comme une réalité mais bien comme elle l’a ressenti. L’artiste nous restitue le passage de la réalité à la sensation. Elle ne travaille jamais d’après photo.

ANNETTE LAHAYE-COLLOMB, qui peint depuis 15 ans, évolue dans une abstraction personnelle, laquelle ne l’a, néanmoins, jamais éloignée du figuratif. Elle a fréquenté l’Ecole de Beaux Arts de Brest où elle a travaillé le volume ainsi que les mélanges de couleurs, ce qui lui a donné une base solide. Sa technique comprend l’acrylique, les poudres de métal pour réaliser certains rendus et le fusain. Elle aime travailler les épaisseurs au lavis. Le couteau n’est jamais utilisé car il ne procure pas assez de nuances. Il est remplacé par la brosse. Travaillant toujours debout, elle précise qu’il lui est impossible de « reproduire » aucune de ses œuvres, voulant par là évoluer à chaque étape créative. Chaque œuvre est l’étape d’un voyage, à la charnière entre l’odyssée intérieure et la mémoire d’un paysage intensément vécu.

L’artiste nous les livre en une offrande ascendante où ciel et mer reculent à chaque fois les frontières du grand large.

François L. Speranza.

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12273347900?profile=originalCollection "Belles signatures" © 2020 Robert Paul 

N.B. : Ce billet est publié à l'initiative exclusive de ROBERT PAUL, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis. 

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Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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L'artiste ANNETTE LAHAYE-COLLOMB et François Speranza : interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles.

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Photo de l'exposition de ANNETTE LAHAYE-COLLOMB à l'ESPACE ART GALLERY

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                       LES COURBES DE L’AME DANS L’ŒUVRE DE SABINE MORVAN BINDSCHEDLER

Du 30-11 au 30-12-18, L’ESPACE ART GALLERY (83, Rue de Laeken, 1000 Bruxelles), a présenté une exposition consacrée à l’œuvre de la sculptrice française, Madame SABINE MORVAN BINDSCHEDLER, intitulée : LES COURBES DE L’IMAGINAIRE.

L’artiste SABINE MORVAN BINDSCHEDLER qui exposait dans un espace adjacent à celui exposant l’œuvre de son mari, le peintre ERIK MORVAN, nous a étonné par le véritable amour qu’elle témoigne envers les courbes conçues de façon antithétique (voire antagoniste), qui s’inscrivent dans la restitution de la sensualité sensible. Les angles serrés contrastent avec les angles ouverts réalisés dans des attitudes ramassées, rentrées en elles-mêmes. Entre ces deux attitudes plastiques, la ligne affirme une présence effective. Elle se développe  en gardienne comme pour mieux tracer la voie au  volume.  

TRANSFERT (bronze-46 cm)

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répond à cette expérience esthétique en alliant, derechef, la courbe pleine avec à l’avant de la pièce, la forme concave, conçue comme l’image d’un retour en soi-même. Cette partie concave présente trois excroissances, l’une reposant sur l’autre, évoquant presque des créatures dormantes. Sur la droite, en bas, le volume naissant s’achève par une forme connue que l’on pourrait interpréter comme évoquant la pointe d’un sein. L’artiste a tenu à apporter une explication personnelle à cette œuvre : « l’univers sidéral uni à la matière provoque un espace de sensibilité où les êtres peuvent arriver à se comprendre. Les fractures de la vie font sublimer l’esprit.» Ces « fractures de la vie » structurant le volume ressemblent à ces hachures qui fractionnent la pièce dans l’attente future d’une unité.

Les angles aigus se retrouvent, notamment, dans PUISSANCE SEREINE (bronze-42 cm).

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L’artiste pose son intention : « Le repos avant l’effort». Cette démarche est un avant goût à la pensée nietzschéenne, laquelle préconise le « repos apollinien » après l’ « effort dionysiaque ».  Le corps « disparait » en quelque sorte. L’Homme n’est plus qu’une suite de formes synthétiques incarnées dans l’angle en totale métamorphose. La posture du personnage, tendue vers l’arrière, incite effectivement au repos. Les pleins et le vides suggèrent une musculature inexistante.

Le visage est absent, ou plutôt, il somnole dans un espace rectangulaire comportant, en son milieu, une excroissance vertébrale, le séparant en deux axes. L’artiste a-t-elle toujours été sculpteur?

Ce trait, d’une extrême finesse, séparant les zones planes des zones convexes, délimitant les espaces, témoignent d’une grande sensibilité picturale dans la conception de la pièce sculptée.

INTROSPECTION (bronze-16 cm)

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L’artiste précise sa démarche en ce sens : « se concentrer, se retourner contre soi-même, certes c’est une recherche de la vie, de l’éternité. Se protéger contre les agressions, élaborer une carapace de protection pour affronter, sans crainte, le monde qui nous entoure ». Nous sommes, par conséquent, dans l’intime. Dans un intime qui refuse de se dévoiler au Monde. Une intimité qui jamais n’aurait souffert de se manifester dans une œuvre de grandes dimensions. Dans cette pièce, l’intime, pour conserver son humanité, se manifeste dans l’écrin d’une œuvre en réduction.  

Elève à l’atelier Paul Bigorre, au Maroc ainsi qu’à l’atelier Jean-Jacques Hamard, faisant partie de la Fondation Rothschild/Paris-Est, les œuvres exposées expriment à la fois différents états d’âme ainsi que plusieurs étapes qui ont structuré son travail. Après des études littéraires, elle s’est immédiatement dirigée vers la sculpture. Le but de son travail exposé (que l’on retrouve tout particulièrement dans PUISSANCE SEREINE-mentionnée plus haut) consiste dans une stylisation travaillée de la figure humaine. A’ la question que nous nous posions plus haut, à savoir le rôle de la ligne dans le tracé de sa sculpture est certainement le fait d’une influence exercée par sa mère, artiste-peintre. Néanmoins, son souci principal de sculptrice est celui de la représentation de la pièce dans ses trois dimensions ainsi que le rapport harmonieux entre les pleins et les vides. Quant aux ombres et aux lumières, l’artiste s’en sert comme d’un matériau jouant sur la plastique. Sa philosophie de la forme est centrée sur le sentiment libérant le visiteur au contact avec la pièce, en insistant sur le fait que, bien entendu, aucune réponse n’est préconçue et qu’il lui incombe de la vivre. Sa technique consiste dans le bronze, additionné de terre et de résine. L’artiste évite systématiquement toute forme d’influences, voulant garder, comme elle le spécifie, son regard « vierge ». Depuis peu, elle évolue dans une esthétique excluant la forme lisse, apportant à la pièce plus de matière.

L’œuvre de SABINE MORVAN BINDSCHDLER est avant tout un voyage au cœur d’une introspection.

Et cette « introspection », déclamée sur plusieurs niveaux, nous offre, tant dans son « transfert » que dans sa « puissance sereine », un portrait vivant de la sensibilité de cette excellente artiste.   

François L. Speranza.

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12273335875?profile=originalLa sculptrice SABINE MORVAN BINDSCHEDLER dans son atelier 

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                              PAYSAGES DE LA MÉMOIRE : L’ŒUVRE DE LUDOVIC BROQUART

Du 08-03 au 31-03-19, l’ESPACE ART GALLERY (Rue de Laeken 83, Bruxelles 1000) a proposé l’œuvre du peintre français, Monsieur LUDOVIC BROQUART dans une exposition intitulée : LA MÉMOIRE DE L’EPHEMERE.

Dire que LA MÉMOIRE DE L’EPHEMERE est une suite d’instants du sentiment du temps qui passe, équivaut à gloser pour ne rien dire. Le temps devient ici un sujet visuel traduisant sa plasticité dans un chromatisme qui trouve sa consistance dans l’évanescent. L’écriture picturale de l’artiste est d’essence théâtrale, en ce sens qu’elle campe le personnage du temps dans un décor bien précis : celui des paysages du Nord de la France. Des paysages de campagne qui laissent deviner la présence fantomatique de la mer à l’intérieur d’étendues désolées, battues par le vent, rappelant le roulement tragique des vagues sur une mer démontée. Ce qui en outre, fait la force de cette œuvre, provient du fait qu’un chromatisme à la fois doux et tendre arrive à « incarner » une atmosphère aussi morne et désolée que l’on s’attendrait à voir traduite par des couleurs souvent violentes. Ce décor dévoile son essence théâtrale dans sa conception spatiale.  L’œuvre s’élève, si l’on ose dire, du bas vers le haut en ce sens qu’à partir d’une ligne d’horizon extrêmement basse, la composition s’élance dans un embrasement de tonalités grises (en dégradés) recouvrant l’ensemble de l’espace. Ce qui provoque le sentiment fallacieux que cet amas cadavérique écrase, en quelque sorte, l’atmosphère verdoyante du paysage champêtre, ce dernier prenant naissance à partir du deuxième plan en partant du bord de la toile. Ce qui provoque le sentiment premier d’une distanciation par rapport à l’ensemble, lequel s’évanouit extrêmement vite pour se perdre dans les ravages de la brume, personnifiant le temps (qui passe).  

CIELS 1020 (120 x 70 cm- huile et fusain sur toile)

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Il est des œuvres telles que CIELS 676 (120 x 70 cm – huile et fusain sur toile)

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où le vent de la campagne est directement absorbé par le gris du ciel, envahissant la totalité de l’œuvre. Le fait que la scène débute dès le deuxième plan à partir du bord de la toile signifie que la scène est destinée à être lue de loin, éloignant l’espace d’un instant, le visiteur. Cela signifie-t-il qu’il n’est pas invité? Très loin de là! Il fait partie intégrante du décor par le simple fait que soumis à sa propre finitude, lui-même participe du temps (qui passe).  Néanmoins, l’artiste ne l’invite qu’à partir du moment où il entame un dialogue introspectif sur l’humanité de sa condition.

Ce moment devient, dès lors, incontournable à l’émergence d’une prise de conscience car la puissance désolée  du paysage invite à la catharsis.  

LUDOVIC BROQUART est le peintre du vent. Il suffit d’observer l’ondulation des troncs d’arbres et des branches pliant sous le souffle. Ici encore, le vent symbolise le temps, comme la « faucheuse » symbolise la mort :

IMAGE  DE PAYSAGE  978 (116 x 81 cm – huile et fusain sur toile)

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Cette œuvre peut être considérée comme étant la plus « complète » par rapport à l’ensemble des toiles exposées : le premier plan représente un paysage vallonné, occupant la zone verte. Le deuxième plan est centré sur la lumière échappée du ciel (le blanc) par des trouées éparses. Le troisième plan expose l’immensité du ciel, conçue en noir. Chromatiquement, cette toile est une confrontation entre trois couleurs : le vert (à la base), le blanc (dans le plan médian) et le noir (vers le haut). Le passage du vert est techniquement souligné par un conséquent travail au couteau. Il ne va de même pour le volume créé pour accentuer le paysage vallonné. Une constante technique régit l’ensemble des œuvres, à savoir l’absence de matière sur la surface de la toile.

Le titre de l’exposition est intéressant par sa puissance évocatrice. Il juxtapose « Mémoire» et « éphémère ». Si l’éphémère peut-être, de par son essence, l’antithèse de la mémoire, puisque, de par son existence, il en atténue la puissance, paradoxalement il en est aussi le réveil. L’espace d’un moment, l’étincelle d’un souvenir, enflamme la Mémoire. Dès lors, quelle importance l’artiste accorde-t-il à l’éphémère? Il s’en sert comme d’un signet pour mieux appréhender le temps (qui passe).   

Il est agréablement surprenant d’observer la façon par laquelle l’artiste aborde plastiquement l’espace de la toile avec une économie de matière traitée au chiffon. Scéniquement, tous les éléments sont présents : le paysage tourmenté, le tournoiement du vent, les arbres aux cimes décoiffées, les contrastes opposant nuit et lumière. La matière picturale est organiquement présente tout en étant atténuée par l’annulation des excès, en ce sens que rien ne dépasse du cadre. Elle est contenue en elle-même dans l’espace. Au premier contact avec ces œuvres, une question peut tarauder l’esprit du visiteur, à savoir pourquoi aborder le paysage lointain ? A’ cette question, il est impératif de se pencher sur les deux clés formant le titre : « Mémoire » et « éphémère ». Une constante régit l’ensemble de l’œuvre. Le paysage flou à l’intérieur duquel évolue une nature noire et déchaînée. De plus, elle ne se révèle que de loin. Nous n’y entrons pas.  

Du moins, pas comme nous le voudrions, c'est-à-dire de plein fouet. Elle se tient sur ses gardes. C’est là l’allégorie de la Mémoire : l’image floue parce que lointaine et insaisissable.  

Le fait même qu’elle soit torturée par le vent prouve sa fragilité. Et la fragilité est l’image vivante de l’éphémère car elle affecte celui qui en est atteint.

Un autre indice de cette fragilité consiste dans le contraste entre la puissance devinée de l’arbre et le tronc frêle comme un calice qui le soutient.

CIELS 1020 (cité plus haut) exige de la part du visiteur un effort de concentration dans la réception de la lumière. En effet, au plus on s’éloigne de la toile au plus la lumière affleure au regard, irradiant l’espace. Au contraire, au plus on s’en rapproche, au plus elle semble se renfermer dans une intériorité exclusivement faite de ténèbres. Ce qui cause cet effet c’est cette imposante zone noire coupant la toile en son milieu. Elle semble attirer vers elle l’ensemble du chromatisme. La forêt, située en-dessous de la composition semble écrasée par les éléments au point de disparaître.  

C’est tout le contraire de IMAGE DE PAYSAGE 978 (cité plus haut) où la zone terrifiante est « personnifiée » par le ciel recouvert de nuages noirs et lourds.

Tandis que dans CIELS 1020, ce côté « maudit » est symbolisé par la forêt, exprimant ainsi une opposition ciel/terre, terre/ciel par chromatisme interposé. Ceci est dû au fait que les dimensions ne sont pas les mêmes entre les deux tableaux : CIELS 1020 est plus haut que IMAGE DE PAYSAGE 978. L’artiste peut donc se permettre ce genre d’audaces. 

La mémoire est un bloc de granit! On s’y désintègre à l’impact. On ne peut donc que la contourner pour en déceler les atomes. L’artiste la saisit dans l’interprétation personnelle en recherchant l’instant perdu.

LUDOVIC BROQUART, qui a étudié le dessin, la photographie et les Beaux Arts à Dunkerque, peint les paysages depuis environ trente ans. Il évolue dans l’abstraction et le dessin.

Il est aujourd’hui non plus dans le message mais dans l’émotion à travers ce qui pourrait sembler être, à première vue, une symbolique des couleurs mais qui en fait, répond à une démarche non réfléchie. Ce qu’il en ressort, c’est l’éclosion des couleurs essentielles destinées à traduire par le traitement sombre d’un ciel aimé, le sentiment selon lequel l’artiste ne le reverra jamais. Les paysages, l’artiste les emmagasine dans sa Mémoire pour les réinterpréter à l’infini, une fois seul dans son studio et en traduire l’émotion.  

Une fois dépassée la réalité du contact immédiat, le besoin irrépressible du sentiment se manifeste dans la recherche de l’éphémère qui souligne le temps (qui passe).  

LUDOVIC BROQUART traque la Mémoire comme l’on traque l’ombre d’un fantôme assourdi. Dans le dépassement de la réalité, il nous parle infiniment du temps dans des réinterprétations de l’interprété. L’artiste le saisit dans des couleurs douces et simples, issues d’une encre éphémère. L’encre du temps (qui passe). 

François L. Speranza.

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Collection "Belles signatures" © 2020 Robert Paul

 

N.B. : Ce billet est publié à l'initiative exclusive de ROBERT PAUL, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis. 

Robert Paul, éditeur responsable

A voir:

Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

Collection "Belles signatures" © 2020 Robert Paul

 

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L'artiste LUDOVIC BROQUART et François L. Speranza : interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles

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Photos de l'exposition de LUDOVIC BROQUART à l'ESPACE ART GALLERY

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                      LES COULEURS DE L’HUMAIN DANS L’ŒUVRE DE FERNANDO FERREIRA

Du 05-04 au 28-04-19, l’ESPACE ART GALLERY a eu le plaisir de vous présenter une exposition consacrée au peintre portugais, Monsieur FERNANDO FERREIRA dit FERNANDO, intitulée : COMPLICITÉ.  

COMPLICITÉ est, selon l’artiste, un prétexte à mettre en exergue le sujet. Le sujet en question étant l’Autre dans son humanité. Mais, d’emblée, un halo féerique, à savoir un brouillard, apparaît. Un brouillard volontairement posé, exhalant une opacité lumineuse résultant d’un travail sur le clair-obscur, enveloppe l’atmosphère tant intérieure qu’extérieure de la scène. L’œuvre s’inscrit donc comme une philosophie du sujet. Qu’elle soit nocturne ou diurne, l’atmosphère des toiles est soumise à la lumière. Et c’est précisément cette lumière à rendre le sujet vivant. Sa présence détermine celle de tous les personnages. Chacun répondant à l’autre. Cette alchimie des couleurs de laquelle émerge la lumière, permet au chromatisme de structurer plastiquement les personnages à l’intérieur de leur élément. A’ partir d’un visage généralement conçu en brun, les vêtements soulignent par leur couleur chaque partie du corps des personnages. Dès lors, la couleur devient l’architecture de la forme. Cette fonction structurante s’applique à la fois aux personnages ainsi qu’au décor. Il est à remarquer que les intérieurs sont conçus comme des paysages. A’ un point tel que la lumière surgit de partout, sans source précise, du bas comme du haut. Concernant les représentations intérieures, la fenêtre par sa dimension massive, soulignée par un puissant brun-foncé, joue un rôle déterminant pour le cadrage de l’espace. La lumière qui y rentre crée un univers translucide faisant office d’écran, séparant l’intérieur de l‘extérieur. Au-delà de l’impact des couleurs, leur réception fait que le visiteur est comme emporté par la féerie qu’elles dégagent, au point qu’il devient incrédule quant au fait de savoir s’il s’agit d’une atmosphère nocturne ou diurne. La nuit peinte par l’artiste est tellement chatoyante avec ses éclats de jaune vif qui explosent à l’arrière-plan qu’ils laissent une trainée dorée se profilant par le bas à droite, illuminant le sol.

LA PARADE (85 x 8O cm-huile sur toile)

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Le joueur de trompette ainsi que le tromboniste et le petit personnage en costume d’Arlequin, forment à eux trois une variante chromatique qui capture le regard : le costume à dominante rouge du trompettiste, le bleu-nuit du joueur de trombone et le costume en damier multicolore du petit personnage, assurent à l’avant-plan la dynamique narrative voulue pour immerger le visiteur à l’intérieur de la nuit féerique. L’atmosphère nocturne est essentiellement composée de deux éléments (faussement) antagonistes, à savoir la lumière et l’obscurité. La lumière étant le fruit de la couleur et l’obscurité étant réfléchie par les façades sombres (en brun-clair pour adoucir le contraste) ainsi que par le quartier de ciel bleu opaque qui rappelle encore le jour. Comme nous l’avons spécifié plus haut, l’artiste travaille les intérieurs comme l’on travaille un paysage.

PARTIE DE BILLARD (64 x 54 cm-huile sur toile)

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Cette oeuvre se scande sur deux plans :

1) partant du bord de la toile vers le milieu du tableau nous avons le billard imposant et massif.

2) à partir du milieu du tableau vers la fenêtre, incluant les clients au comptoir.

Entre les deux plans, l’espace est totalement vide. Concentrons-nous sur le rôle que joue la fenêtre dans la composition. Elle est séparée en deux parties par le châssis en bois, peint en brun-foncé pour accentuer le volume. Ce châssis massif est essentiel à la mathématique de l’œuvre. Nous le retrouvons, assumant la fonction de ligne de force, dans d’autres toiles comme un trait propre à l’artiste car il est indissociable de la façon dont il gère la perspective. Celle-ci règne en maîtresse : la fenêtre, forcément plus petite par rapport au billard parce que plus éloignée. Cette sorte de « grand angle », tout en gardant sa spécificité picturale, restitue le sentiment d’une prise de vue à l’objectif car, partant de l’arrière-plan pour atteindre le bord du tableau, là où le billard prend naissance dans sa forme, tout s’étale et s’étire à partir d’un éloignement progressif.

Couleurs, armature du billard (brun-foncé), circonscrivent le tapis de couleur verte, lequel ressort comme un élément formel, indépendant, néanmoins constitutif de la composition dans sa totalité.

Soulignons également le rôle joué par l’opacité que rejettent les vitres par le biais de fortes touches blanches. Elles font office d’un écran donnant sur le vide.

La dialectique de la fenêtre-écran se retrouve dans MOMENT PRÉSENT (81 x 75 cm-huile sur toile), laissant transparaître des silhouettes éparses vivant ce moment présent à l’extérieur du lieu.

La présence de ce moment pictural est divisée en deux temps : un temps intérieur et un temps extérieur. Ces deux perceptions d’un même sentiment sont, à l’instar de PARTIE DE BILLARD (cité plus haut), divisées par la présence d’un châssis, cette fois-ci de dimension cyclopéenne. De cette œuvre se dégage un sentiment de grandeur maîtrisée par l’intimité du moment.

TRIO EN BLEU (90 x 80 cm-huile sur toile)

12273324490?profile=original

ainsi que  JOUR DE FÊTE (87 x 68 cm-huile sur toile)

12273325068?profile=original

sont dominés par l’importance vitale de la lumière, laquelle telle de la vapeur, irradie la toile par le haut comme par le bas.

TRIO EN BLEU (mentionné plus haut) prouve la maîtrise de l’artiste. A’ dominante jaune-or, la lumière est filtrée à travers les carreaux de la fenêtre à partir de l’intérieur. Rarement un éclairage conçu artificiellement n’a été capable d’envelopper un espace aussi magiquement.

Tandis que JOUR DE FÊTE (cité plus haut), à dominante blanche, témoigne d’une lumière non altérée par le prisme du carreau, étant donné qu’elle est directement issue de la nature.

MÈRE ET ENFANT (100 x 81 cm-huile sur toile)

12273325668?profile=original

est bâti sur la conception volumineuse du sujet dans son traitement : châssis massif séparant la fenêtre en deux entités, assurant une ligne de force structurant l’espace. Fauteuil volontairement disproportionné dans son volume. Représentation de l’image de l’intimité par la mère et l’enfant. Le chromatisme descriptif est très intéressant : bleu vif pour la mère, rouge vif pour l’enfant. L’ensemble étant absorbé par le noir-foncé du fauteuil démesuré destiné à augmenter l’intensité du moment. La tête de la mère repose sur un coussin de couleur orange. Présence du châssis noir massif. L’avant-plan baigne dans une atmosphère jaune (en dégradés). La fenêtre diffuse une lumière opaque.    

Cette fusion entre couleurs et personnages a pour dénominateur commun l’amour pour l’être humain ainsi que pour tout ce qui l’entoure, à savoir la musique, l’ambiance festive nocturne et le rapport entre les gens à l’intérieur d’un espace fermé baigné par la magie de la lumière tel que le café, traité pour l’exemple, comme un paysage (avec ses perspectives et ses lignes de force) à l’intérieur duquel évoluent les liens humains. D’où le titre de l’exposition : COMPLEXITÉ. Tout est basé sur l’émotion. Les couleurs sont tant dans leur philosophie que dans leur traitement, les vecteurs de cette émotion. L’artiste va donc à l’essentiel. L’essentiel étant l’émotion de l’instant.

L’artiste a commencé à travailler comme ébéniste pour se diriger ensuite vers la décoration et la peinture. Autodidacte, il travaille à l’huile et il s’est affirmé dans sa technique en réalisant des copies de tableaux de Maîtres tout en prenant des cours de dessin pour mieux maîtriser la technique de la perspective. Ses influences sont Rembrandt, Vermeer et les impressionnistes. Cela se constate dans la force des couleurs usitées. MÈRE ET ENFANT (cité plus haut) participe tant de l’impressionnisme par l’intimité de l’atmosphère que de Rembrandt par l’impact avec lequel les châssis massifs jouent en tant que lignes de forces (puissance, chromatisme, division de l’espace). A’ tel point que, selon l’artiste, ce tableau n’est pas vraiment terminé!

L’artiste réintroduit, en la modalisant, une technique picturale de la Grèce antique (fin du 4ème siècle av. J.C.) et redécouverte au 17ème siècle, celle du « clair-obscur », en lui conférant une fonction « enveloppante », pour devenir chaleureuse et féerique. Il ne s’agit plus de simuler le relief mais d’établir un ancrage humaniste et psychologique adapté aux impératifs de son propos.

FERNANDO FERREIRA dit FERNANDO témoigne de son amour pour l’Autre dans une aura joyeuse où la tendresse se confond avec la lumière des nuits oniriques et les vapeurs des cafés où passent les âmes furtives…l’artiste les invite à rester et à vivre!

François L. Speranza.

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                                                        Une publication
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Collection "Belles signatures" © 2020 Robert Paul

 

N.B. : Ce billet est publié à l'initiative exclusive de ROBERT PAUL, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis. 

Robert Paul, éditeur responsable

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L'artiste FERNANDO FERREIRA dit "FERNANDO" et François Speranza : interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles.

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Photos de l'exposition de FERNANDO FERREIRA dit "FERNANDO" à l'ESPACE ART GALLERY

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                      LES COULEURS DE L’HUMAIN DANS L’ŒUVRE DE FERNANDO FERREIRA

Du 05-04 au 28-04-19, l’ESPACE ART GALLERY a eu le plaisir de vous présenter une exposition consacrée au peintre portugais, Monsieur FERNANDO FERREIRA dit FERNANDO, intitulée : COMPLICITÉ.  

COMPLICITÉ est, selon l’artiste, un prétexte à mettre en exergue le sujet. Le sujet en question étant l’Autre dans son humanité. Mais, d’emblée, un halo féerique, à savoir un brouillard, apparaît. Un brouillard volontairement posé,  exhalant une opacité lumineuse résultant d’un travail sur le clair-obscur, enveloppe l’atmosphère tant intérieure qu’extérieure de la scène. L’œuvre s’inscrit donc comme une philosophie du sujet. Qu’elle soit nocturne ou diurne, l’atmosphère des toiles est soumise à la lumière. Et c’est précisément cette lumière à rendre le sujet vivant. Sa  émerge la lumière, permet au chromatisme de structurer plastiquement les personnages à l’intérieur de leur élément. A’ partir d’un visage généralement conçu en brun, les vêtements soulignent par leur couleur chaque partie du corps des présence détermine celle de tous les personnages. Chacun répondant à l’autre. Cette alchimie des couleurs de laquellepersonnages. Dès lors, la couleur devient l’architecture de la forme. Cette fonction structurante s’applique à la fois aux personnages ainsi qu’au décor. Il est à remarquer que les intérieurs sont conçus comme des paysages. A’ un point tel que la lumière surgit de partout, sans source précise, du bas comme du haut. Concernant les représentations intérieures, la fenêtre par sa dimension massive, soulignée par un puissant brun-foncé, joue un rôle déterminant pour le cadrage de l’espace. La lumière qui y rentre crée un univers translucide faisant office d’écran, séparant l’intérieur de l‘extérieur. Au-delà de l’impact des couleurs, leur réception fait que le visiteur est comme emporté par la féerie qu’elles dégagent, au point qu’il devient incrédule quant au fait de savoir s’il s’agit d’une atmosphère nocturne ou diurne. La nuit peinte par l’artiste est tellement chatoyante avec ses éclats de jaune vif qui explosent à l’arrière-plan qu’ils laissent une trainée dorée se profilant par le bas à droite, illuminant le sol.

LA PARADE (85 x 8O cm-huile sur toile)

12273323483?profile=original

Le joueur de trompette ainsi que le tromboniste et le petit personnage en costume d’Arlequin, forment à eux trois une variante chromatique qui capture le regard : le costume à dominante rouge du trompettiste, le bleu-nuit du joueur de trombone et le costume en damier multicolore du petit personnage, assurent à l’avant-plan la dynamique narrative voulue pour immerger le visiteur à l’intérieur de la nuit féerique. L’atmosphère nocturne est essentiellement composée de deux éléments (faussement) antagonistes, à savoir la lumière et l’obscurité. La lumière étant le fruit de la couleur et l’obscurité étant réfléchie par les façades sombres (en brun-clair pour adoucir le contraste) ainsi que par le quartier de ciel bleu opaque qui rappelle encore le jour. Comme nous l’avons spécifié plus haut, l’artiste travaille les intérieurs comme l’on travaille un paysage.

PARTIE DE BILLARD (64 x 54 cm-huile sur toile)

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se scande sur deux plans :

1) partant du bord de la toile vers le milieu du tableau nous avons le billard imposant et massif.

2) à partir du milieu du tableau vers la fenêtre, incluant les clients au comptoir.

Entre les deux plans, l’espace est totalement vide. Concentrons-nous sur le rôle que joue la fenêtre dans la composition. Elle est séparée en deux parties par le châssis en bois, peint en brun-foncé pour accentuer le volume. Ce châssis massif est essentiel à la mathématique de l’œuvre. Nous le retrouvons, assumant la fonction de ligne de force, dans d’autres toiles comme un trait propre à l’artiste car il est indissociable de la façon dont il gère la perspective. Celle-ci règne en maîtresse : la fenêtre, forcément plus petite par rapport au billard parce que plus éloignée. Cette sorte de « grand angle », tout en gardant sa spécificité picturale, restitue le sentiment d’une prise de vue à l’objectif car, partant de l’arrière-plan pour atteindre le bord du tableau, là où le billard prend naissance dans sa forme, tout s’étale et s’étire à partir d’un éloignement progressif.

Couleurs, armature du billard (brun-foncé), circonscrivent le tapis de couleur verte, lequel ressort comme un élément formel, indépendant, néanmoins constitutif de la composition dans sa totalité.

Soulignons également le rôle joué par l’opacité que rejettent les vitres par le biais de fortes touches blanches. Elles font office d’un écran donnant sur le vide.

La dialectique de la fenêtre-écran se retrouve dans MOMENT PRÉSENT (81 x 75 cm-huile sur toile) 

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laissant transparaître des silhouettes éparses vivant ce moment présent à l’extérieur du lieu.

La présence de ce moment pictural est divisée en deux temps : un temps intérieur et un temps extérieur. Ces deux perceptions d’un même sentiment sont, à l’instar de PARTIE DE BILLARD (cité plus haut), divisées par la présence d’un châssis, cette fois-ci de dimension cyclopéenne. De cette œuvre se dégage un sentiment de grandeur maîtrisée par l’intimité du moment.

TRIO EN BLEU (90 x 80 cm-huile sur toile)

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ainsi que JOUR DE FÊTE (87 x 68 cm-huile sur toile)

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sont dominés par l’importance vitale de la lumière, laquelle telle de la vapeur, irradie la toile par le haut comme par le bas.

TRIO EN BLEU (mentionné plus haut) prouve la maîtrise de l’artiste. A’ dominante jaune-or, la lumière est filtrée à travers les carreaux de la fenêtre à partir de l’intérieur. Rarement un éclairage conçu artificiellement n’a été capable d’envelopper un espace aussi magiquement.

Tandis que JOUR DE FÊTE (cité plus haut), à dominante blanche, témoigne d’une lumière non altérée par le prisme du carreau, étant donné qu’elle est directement issue de la nature.

MÈRE ET ENFANT (100 x 81 cm-huile sur toile)

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est bâti sur la conception volumineuse du sujet dans son traitement : châssis massif séparant la fenêtre en deux entités, assurant une ligne de force structurant l’espace. Fauteuil volontairement disproportionné dans son volume. Représentation de l’image de l’intimité par la mère et l’enfant. Le chromatisme descriptif est très intéressant : bleu vif pour la mère, rouge vif pour l’enfant. L’ensemble étant absorbé par le noir-foncé du fauteuil démesuré destiné à augmenter l’intensité du moment. La tête de la mère repose sur un coussin de couleur orange. Présence du châssis noir massif. L’avant-plan baigne dans une atmosphère jaune (en dégradés). La fenêtre diffuse une lumière opaque.    

Cette fusion entre couleurs et personnages a pour dénominateur commun l’amour pour l’être humain ainsi que pour tout ce qui l’entoure, à savoir la musique, l’ambiance festive nocturne et le rapport entre les gens à l’intérieur d’un perspectives et ses lignes de force) à l’intérieur duquel évoluent les liens humains. D’où le titre de l’exposition : COMPLEXITÉ. Tout est basé sur l’émotion. Les couleurs sont tant dans leur philosophie que dans leur traitement, les espace fermé baigné par la magie de la lumière tel que le café, traité pour l’exemple, comme un paysage (avec ses vecteurs de cette émotion. L’artiste va donc à l’essentiel. L’essentiel étant l’émotion de l’instant.

L’artiste a commencé à travailler comme ébéniste pour se diriger ensuite vers la décoration et la peinture. Autodidacte, il travaille à l’huile et il s’est affirmé dans sa technique en réalisant des copies de tableaux de Maîtres tout en prenant des cours de dessin pour mieux maîtriser la technique de la perspective. Ses influences sont Rembrandt, Vermeer et les impressionnistes. Cela se constate dans la force des couleurs usitées. MÈRE ET ENFANT (cité plus haut) participe tant de l’impressionnisme par l’intimité de l’atmosphère que de Rembrandt par l’impact avec lequel les châssis massifs jouent en tant que lignes de forces (puissance, chromatisme, division de l’espace). A’ tel point que, selon l’artiste, ce tableau n’est pas vraiment terminé!

L’artiste réintroduit, en la modalisant, une technique picturale de la Grèce antique (fin du 4ème siècle av. J.C.) et redécouverte au 17ème siècle, celle du « clair-obscur », en lui conférant une fonction « enveloppante », pour devenir chaleureuse et féerique. Il ne s’agit plus de simuler le relief mais d’établir un ancrage humaniste et psychologique adapté aux impératifs de son propos.

FERNANDO FERREIRA dit FERNANDO témoigne de son amour pour l’Autre dans une aura joyeuse où la tendresse se confond avec la lumière des nuits oniriques et les vapeurs des cafés où passent les âmes furtives…l’artiste les invite à rester et à vivre!

François L. Speranza.

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François L. Speranza  

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Collection "Belles signatures" © 2020 Robert Paul

 

N.B. : Ce billet est publié à l'initiative exclusive de ROBERT PAUL, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis. 

Robert Paul, éditeur responsable

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Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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L'artiste FERNANDO FERREIRA DIT "FERNANDO" et François Speranza : interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles

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Photos de l'exposition de FERNANDO FERREIRA dit "FERNANDO" à l'ESPACE ART GALLERY

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                           LES COULEURS DE LA PASSION DANS L’ŒUVRE DE PIERRE PACHE

Du 03-05 au 26-05-19, l’ESPACE ART GALLERY (Rue de Laeken, 83, 1000 Bruxelles) a organisé une exposition consacrée au peintre suisse, Monsieur PIERRE PACHE, intitulée : CASSER L’ARMURE.

Faut-il voir dans l’armure l’image de la carapace épaisse qui nous limite et nous sépare de la réalité humaine nous empêchant d’accéder à la délivrance? La peinture de PIERRE PACHE se distingue par la singularité d’une démultiplication des attributs constituant le sujet : les yeux, les seins, les cheveux…tout ce qui dans l’identité corporelle ainsi que dans le vêtement, se singularise par la démultiplication d’indices considérés comme identitaires.

A’ la première approche, le visiteur, perdu dans cet océan fantasmagorique, ignore si ces éléments constitutifs des personnages se désagrègent ou si, au contraire, ils s’assemblent pour le terminer. Et c’est précisément en cela que s’affirme l’essence picturale de l’artiste. Une deuxième caractéristique de son œuvre réside dans le fait que chacune de ses toiles constitue un univers à elle seule. Rêve et émotion se conjuguent dans un surréalisme à la fois feutré et sauvage. L’on assiste parfois à l’éclosion d’un onirisme à la frontière de la vision boschisante.      

Le chromatisme est constitué de couleurs, dans l’ensemble ténues, telles que le vert virant au turquoise (couleur souvent dominante), augmenté de rouge bordeaux prenant des dimensions fauvistes, à l’instar de LARGUER LA VOILE.

LARGUER LA VOILE (80 x 60 cm-acrylique sur toile)

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Tout cela conduisant vers un vocabulaire surréaliste. Car, si surréalisme il y a, il n’existe exclusivement que par rapport au traitement de la couleur sur le sujet. Le titre des œuvres joue également un rôle prépondérant sur leur réception.

LARGUER LA VOILE (que nous venons de citer), est une parabole sur l’aspiration à la liberté. Tout est « voilé » dans cette œuvre : tant la robe du personnage féminin que la végétation l’entourant. Tout flotte dans l’attente d’être porté par le vent. Le visage du personnage (composante essentielle à l’esthétique de l’artiste) est articulé sur deux parties : la partie supérieure, participant de la végétation (en vert) est séparée, au niveau de la bouche par un trait (une fente) en tant que démarcation avec la partie inférieure, concrétisée dans la matérialité du corps (le buste).

A’ partir de ce niveau, la voile se révèle en se « dégrafant » tel un corset, du buste du personnage, épaississant l’ensemble de la végétation, gonflée par le vent. Et le rêve prend le large!

Le sujet est, par excellence, la Nature transcendée par la dimension onirique et fantastique. Dès lors, nous rejoignons l’esthétique surréaliste où la Nature, gouvernée par l’imaginaire traduisant ses pulsions vitales, rejoint le seul Sacré de l’Homme : celui qu’il porte en lui-même. Cette Nature flottante rappelle l’élément aquatique par la présence de quatre petites bulles (trois sur le coin gauche, en haut) et une sur la gauche, sous le visage du personnage (par rapport au visiteur), rappelant des bulles d’oxygène. Des yeux épars parsèment la composition. Quant aux yeux du personnage, ils sont extrêmement serrés, à l’instar de ceux d’un félin.

Nous les retrouvons d’ailleurs dans BROUILLON DE POULE (60 x 50 cm-acrylique sur toile).
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A’ part l’humour exprimé par le titre, tant la poule que le personnage féminin sont pris dans le tourbillon d’une Nature sauvage. Outre le fait que la présence de l’œuf sur la poule, à l’avant-plan, spécifie l’identité du volatile, il ramène le visiteur au questionnement sur l’origine du Tout. L’œuvre, à dominante grise, offre une série de contrastes, à la fois descendants et ascendants. Partant du bas, la note verte, extrêmement dure, s’amollit progressivement pour mettre en exergue la poitrine du personnage. A’ partir de là, le chromatisme s’éclaircit révélant le visage de la femme, à peine esquissé. A’ noter, une deuxième constante dans l’œuvre de l’artiste, à savoir la démultiplication du regard. A’ ce stade, nous atteignons sous un tourbillon de nuages, le ciel dont le bleu vif de la partie supérieure de la toile, atteint la dominante verte initiale. Le personnage féminin domine la partie centrale de la composition. Dès lors, la lecture procède comme suit : au commencement fut l’œuf, vient ensuite la poule. La Femme préside la Nature. Et le cadre est compris entre le vert de la végétation et le bleu du ciel. Le sujet central de cette œuvre est la Femme-Nature.

L’homme n’apparaît que deux fois dans l’ensemble de l’exposition.

LE FEU AU LAC (60 x 50 cm-acrylique sur toile) est l’illustration, par excellence, de la pulsion sexuelle.

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Comme pour toutes les toiles de l’artiste, le chromatisme a une fonction symbolique essentielle. Le titre est déjà évocateur : LE FEU AU LAC.

A’ la fois mariage mystique entre l’eau et le feu, l’œuvre est également évocatrice par l’étymologie du titre, cette expression typiquement suisse selon laquelle « il y a urgence! ». Mais urgence de quoi? Urgence de s’unir charnellement. Chromatiquement, qui est quoi? La femme endosse un chromatisme jaune vif. L’homme, lui, est conçu dans un vert tirant sur le bleu.   Pour comprendre cette œuvre, il faut considérer la partie droite (par rapport au visiteur), à savoir celle de l’homme, pour s’apercevoir qu’elle irradie le corps de la femme, en fusionnant en elle. Image de la passion : l’érection chez l’homme, l’attitude d’abandon chez la femme. Autre image de la passion : symbolique des cheveux en bataille chez l’homme. Sa main, conçue en vert, prend la couleur jaune de la femme, lorsqu’il lui touche le sein. Il y a fusion, combustion future de l’homme et de la femme en une seule matière.  

L’homme apparaît également dans LE PASSEUR (41 x 33 cm-acrylique sur toile).

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L’œuvre est divisée en trois étapes :

  • Avant-plan : Charon, le Passeur, à droite accueillant les âmes des morts, sur la gauche.
  • Plan moyen : la barque du Passeur permettant aux âmes de traverser le Styx.
  • Partie supérieure : l’univers ténébreux animé par des créatures « monstrueuses » dont les yeux sont mis en exergue.

Remarquons que le Styx est plein de remous. L’artiste amplifie la tradition littéraire, mythologique et picturale qui font de celui-ci un affluent de la haine, un lieu souterrain et dangereux, tout en n’insistant pas sur sa navigabilité périlleuse. La tradition picturale en fait même un fleuve tranquille. Observons également qu’il s’agit d’une composition bi-chrome (brun et jaune en dégradés) donnant une illusion de monochromie. Le regard de Charon est tourné vers le visiteur. Il le fixe. Les attributs de son visage sont comme empilés l’un sur l’autre, de haut en bas, formant une succession de « strates ». Cette accumulation concassée fait que l’expression du personnage devient menaçante. Là, nous sommes au cœur du mythe, car Charon est libre de faire traverser le fleuve à qui il veut, contre une pièce de monnaie.

Il n’éprouve aucune pitié, n’hésitant pas à rudoyer et à chasser les âmes le suppliant de les emmener sur l’autre rive.

Il décide de tout étant seul arbitre de la situation. Le groupe des morts est intéressant car il forme, de par sa mise en scène, une sorte d’ « éclosion » créée à partir de leur état de finitude : ils semblent « naître » à la mort. D’une sorte de chaos pictural fait de crânes en gestation, leurs visages prennent divers aspects, rappelant les masques mortuaires. Ils sortent de ce magma espérant atteindre l’autre rive que sépare le Styx. Tout est parfait dans la fidélité au récit mythologique : Charon, l’air hautain, décide de qui passe et de qui ne passe pas. Les morts, même habités par l’hébétude, semblent se raccrocher à l’espoir. Le personnage du milieu, la bouche ouverte, semble pousser un cri. La composition est fort intéressante : à partir d’un crâne, à peine ébauché (sur la gauche), apparaît le mort à la bouche ouverte. Il est suivi par un personnage aux yeux clos, l’air apaisé. Faut-il y voir une  succession d’états aboutissant à une symbolique résurrectionnelle?

La barque du nocher est réduite à l’état de silhouette. Elle ne représente qu’un détail. Le seul élément qui (comme nous l’avons spécifié plus haut) diffère légèrement avec le récit mythologique et pictural, consiste dans l’image que l’artiste donne du Styx, agité par des eaux noires et bouillonnantes. Mais il s’agit d’une interprétation personnelle et parfaitement légitime de la symbolique. Des formes macabres émergent, à partir du groupe des âmes en attente. Au fur et à mesure que le regard se rapproche, l’œil distingue, juste sous la tête du mort au regard serein, deux formes qui rappellent les masques de carnaval. Ce qui fait la force de cette œuvre, c’est le contraste chromatique entre la lumière jaune  (à gauche vers le haut), de laquelle émergent des créatures fantastiques et la charge sombre, partant de l’avant-plan pour inonder l’ensemble de l’espace. Des seins parsèment également la composition, association explicite du mariage mystique entre Eros et Thanatos. Une constante associe ce tableau à l’ensemble artistique du peintre, à savoir les yeux et les visages démultipliés ainsi que le trait inscrivant la bouche servant de « ligne de démarcation » entre les parties supérieure et inférieure du visage. L’ambiance de cette œuvre est particulière, en ce sens qu’elle en rappelle une autre : celle de L’ILE DES MORTS d’Arnold Böcklin (dont il existe cinq versions peintes entre 1880 et 1885).

La toile du Musée de New-York se rapproche fortement de celle de l’artiste par l’ambiance. L’ILE DES MORTS était (pour la petite histoire) le tableau préféré d’Adolph Hitler. Il y décelait une sorte de mysticisme sordide, soulignant ce qui a toujours régi la psychologie du nazisme, à savoir un érotisme affirmé de la mort. Si nous signalons cette œuvre, c’est qu’au cours de l’interview du peintre, nous l’avons évoquée en la restituant à la beauté de son univers poétique et fantastique.

Une variation sur le visage se remarque dans LES COURANTS D’AIR (55 x 45 cm-acrylique sur toile) par un traitement « en silhouettes » prenant forme dans les recoins les plus « insolites » de l’espace pictural. Ici, la couleur « dissipe » les personnages, en les fondant dans le décor. Des sphères (symbolisant l’infini) parsèment l’œuvre.  

A’ la question préliminaire concernant la symbolique de l’ « armure », il faut répondre par l’affirmative. L’armure, cette carapace humaine, doit être cassée pour accéder à la délivrance. Comme tout véritable artiste, PIERRE PACHE démarre la toile en ignorant ce qu’il  en sera de la création future.

A’ l’instar de Jean d’Ormesson qu’il apprécie beaucoup et qui est « traversé par les mots » envers lesquels il devient le messager de ce qui sera écrit, l’artiste commence par « barbouiller » la toile de couleur pâles jusqu’à ce qu’il trouve ce qu’il appelle « un regard », c'est-à-dire quelque chose qui l’interpelle. Se basant sur des aperceptions, il essaie de faire apparaître une forme. Il lui arrive de se fâcher si cela n’aboutit pas. Sa démarche s’appuie sur le doute et se sert de sa connaissance technique pour en venir à bout. Autodidacte, il a débuté en tant que retoucheur de photographies, ce qui lui a permis de comprendre l’importance de la lumière sur la matière. Concernant la dimension surréaliste qui régit sa peinture, elle est bien évidemment présente mais, comme il l’assure, totalement involontaire. Elle surgit d’elle-même sans avoir rencontré la moindre référence. Son rapport avec le visage humain ainsi démultiplié  n’existe que dans une relation amoureuse concrétisée sur le nombre de bouches à embrasser dans le même personnage. Une empathie lie, par conséquent, l’artiste à son œuvre par l’intermédiaire de son sujet. Quant à son rapport avec la forme, il faut le trouver dans son amour pour la matière, ce qui le rend très tactile dans son contact physique avec cette dernière concernant son travail de création.

Pour lui, la forme ne peut se limiter à n’être qu’abstraite. Le fait que son œuvre soit presque entièrement dédiée à la Femme s’explique par l’image du désir qu’elle évoque. Nous avons évoqué, plus haut, l’impact des titres définissant les œuvres. Là aussi, rien n’est prémédité : il trouve ses titres en cours de route.

Sa technique se concentre exclusivement sur l’acrylique. Il place les glacis, couche après couche, et ajoute par la suite des couleurs opaques pour concevoir les lumières. Il pratique également la mine de plomb. Ses influences évoluent, indépendamment des époques, à l’intérieur d’une même atmosphère, ténébreuse et fantastique. En observant LE CAUCHEMAR de Füssli (1781), chef-d’œuvre du romantisme, associant désir (la femme renversée sur le lit) et peur (la créature monstrueuse sur elle), traduction psychanalytique d’Eros et Thanatos par la mise en valeur du Moi (constante du courant romantique) ainsi que les œuvres du peintre norvégien Odd Nerdrum (1944), regorgeant d’une atmosphère clair obscure, à la limite d’un fantastique à peine contenu, l’on se rend compte de l’impact que ces peintres ont eu sur l’artiste.

PIERRE PACHE, par la profondeur de son cri intérieur et de son talent de technicien de la couleur, permet au visiteur de vivre l’incandescence de son œuvre et de l’exprimer sur la toile de son propre imaginaire, brisant en éclats la prison de son armure.

François L. Speranza.

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Collection "Belles signatures" © Robert Paul 2020

N.B. : Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. 

Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis.

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Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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L'artiste PIERRE PACHE et François L. Speranza : interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours de deux derniers siècles.

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Photo de l'exposition de l'artiste PIERRE PACHE à l'ESPACE ART GALLERY

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            ERIK MORVAN : VARIATIONS PROPHETIQUES SUR LE CINETISME

Du 30-11 au 30-12-18, l’ESPACE ART GALLERY (Rue de Laeken, 83, Bruxelles 1000) a organisé une exposition consacrée au peintre français Monsieur ERIK MORVAN, intitulée : VIRUS URBAIN.

La caractéristique majeure d’ERIK MORVAN consiste essentiellement dans le fait d’avoir créé une œuvre très pensée, presque « intellectuelle » dans le sens le plus noble du terme, en ce sens qu’elle est basée sur une réflexion sur l’Homme et sa destinée, axée sur la ville en tant qu’hypostase d’une planète, ravagée par les outrages d’une humanité ayant perdu toute forme sacrée de respect ancestral.

ELOGE DE LA PREMIERE ECRITURE

PENSEE VERTICALE (64 x 73 cm – huile sur toile – 1984)

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A’ partir d’une structure démembrée, la verticalité s’affirme par les mains jointes en prière vers le haut. S’agit-il d’une pensée ou d’une prière? A’ cette question, l’artiste répond, derechef, qu’il s’agit d’une pensée. Mais il est des moments où prière et pensée se confondent dans un même élan. Notons que plastiquement, les mains dépassent la montagne en hauteur. Prière ou pensée, l’artiste aborde le mysticisme par la voie royale, celle de l’accès à l’indicible : la présence des mains jointes. Celles-ci représentent la stylisation symbolique d’une union, unissant dans le même élan, l’image de la pyramide et de la montagne dans le mariage mystique entre le chtonien et l’ouranien. Une fusion entre le monde terrestre des hommes et l’univers céleste des dieux dans les mythologies proche-orientales. Les membres disloqués font partie intégrante du paysage. Ils se fondent dans l’arrière-plan, jusqu’à toucher le ciel. Le chromatisme est uniforme, essentiellement composé de blanc et de bleu-clair (en dégradés).

L’ECHIQUIER (65 x 80 cm – huile sur toile - 2003)

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Nous nous trouvons ici à la frontière avec un surréalisme « décadent », en ce sens qu’il accuse une étape « décadente » de l’humanité. Cela se voit, notamment, par quelques éléments en totale déliquescence, tels que l’escalier en colimaçon se terminant en pointe, rappelant les montres molles de la PERSISTANCE DE LA MÉMOIRE peint par Dali’ (1931) ainsi que les bords de l’échiquier, rongés par la décrépitude. Dans le bas de la composition, l’on remarque une horde humaine que l’artiste qualifie de « tribu ». Il s’agit de l’humanité plongée dans sa décadence actuelle et vouée à une (potentielle) destruction.

Bien que le style appartienne à l’artiste, les influences surréalistes propres à Dali’, telles que le bleu de la mer sont manifestes. Par contre, le buste à tête humaine, placé à l’extrémité de l’échiquier, à une forte connotation métaphysique. Il suffit de penser à Giorgio de Chirico. Il s’agit donc d’une œuvre animée à la fois par une dimension surréaliste et métaphysique.

INSTANTS D’ETERNITE (87 x 87 cm – huile sur toile - 2009)12273327488?profile=original

est une œuvre essentiellement intellectuelle. Elle présente la caractéristique affirmant l’identité de l’artiste : le décodage visuel. Par « décodage » nous entendons le rapport entre l’œuvre et l’œil du visiteur, lequel se laisse doucement apprivoiser pour permettre à l’œuvre de se révéler. Trois bateaux se profilent  dans un mariage entre entrelacs et chromatisme : les traits noirs se révèlent en s’unissant aux ondulations, mettant en exergue la couleur blanche faisant fonction de volume. Le tout se structurant sur une vue plongeante, à partir du haut à droite.

VERTIGE PYTHAGORICIEN (100 x 80 cm – huile sur toile – 1998)

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Cette œuvre présente également la même dimension intellectuelle, en ce sens qu’elle est basée sur l’opposition entre deux univers exprimée par deux couleurs antagonistes : le noir (vers le bas) et le blanc (vers le haut). Le vertige se concrétise dans cette sphère en feu, située dans une zone d’intersection, au centre de l’œuvre.

ELOGE DE LA DEUXIEME ECRITURE

Une deuxième écriture se profile. Une écriture sur la corde raide entre peinture et bande dessinée.

Cette étape trouve son assise dans un cinétisme basé sur les différentes composantes de l’œuvre, se distillant à l’œil, goutte à goutte.

LE BAISER (42 x 30 cm – encre de Chine, acrylique, dorure à l’huile - 2018)

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Les bouches, à peine unies dans le baiser, séparent la composition en deux parties. Leur visage est soutenu par une tortue stylisée, laquelle repose sur un masque primitif, tout aussi stylisé. L’ensemble est soutenu par la carapace d’une tortue. Le chromatisme, très simple (issu de sa production picturale antérieure), renforce le cinétisme décrit plus haut. Les attributs décoratifs entourant l’œil de la femme (à droite) sont réalisés avec de la dorure à l’huile. Le nez du personnage masculin (à gauche) prenant naissance à partir du front est issu de la statuaire grecque classique.

LA MACHINE HUMAINE (42 x 30 cm – encre de Chine, acrylique, dorure à l’huile - 2015) participe toujours du même cinétisme

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Le visage de l’homme-machine est séparé en deux parties. Deux zones chromatiques antagonistes (noire à droite – bleue à gauche) accentuent cette séparation. Des pièces de machinerie structurent la composition sur les deux côtés, vers le haut.

REGARD DE PROTECTION (42 x 30 cm – encre de Chine, acrylique, dorure à l’huile - 2017)

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Un élément se retrouve par rapport à la production antérieure, à savoir la horde humaine (cfr. L’ECHIQUIER), toujours placée vers le bas. Cette fois, elle se situe au-delà de l’avant-plan.

L’artiste pense continuer dans cette production extrêmement dynamique, alternant peinture et bande dessinée. Des éléments tels que de hautes tours sphériques témoignent de sa formation d’architecte et lorsqu’on lui demande s’il se sent plus architecte ou peintre, il évoque une grande vérité, à savoir qu’à la Renaissance bien des peintres occupaient également la fonction d’architecte.

Lorsque nous évoquons l’ « intellectualisme » de l’artiste, nous l’entendons en ce sens que chacun de ses dessins est le fruit d’une grande macération cérébrale. Parmi les rencontres qui ont parsemé sa vie, celle avec l’urbaniste et philosophe Paul Virilio (1932-2018) a été décisive, dans le sens que ce dernier lui a inculqué l’idée de ne jamais jeter son dessin sur la toile en attendant que quelque chose se déclenche par la suite. Mais bien de penser son dessin. De le préméditer face au discours pictural à tenir. Son intellectualisme se manifeste, une fois encore, en travaillant toujours à partir d’un « storyboard » avant de commencer son dessin. Il débute par une mise en place de chaque composante du tableau pour assurer la dynamique nécessaire à la vitalité de l’ensemble. Reçu septième sur mille huit-cent élèves à l’école artistique Met De Penningen (Paris), il s’est orienté vers les arts décoratifs, en plus de sa formation d’architecte obtenue à l’Ecole Spéciale d’Architecture de Paris. Sa technique est principalement basée sur la dorure à l’huile, l’acrylique, l’encre de Chine.

ERIK MORVAN, en se concentrant sur la « polis », la ville, redonne à celle-ci son identité ainsi que sa mission « politique ». La ville, en tant que microcosme de la planète dans ses outrages, interrogations et malheurs, fait de sorte que l’artiste remplisse son devoir humain. Son devoir de « prophète » à travers un cinétisme qui remet l’Homme au centre de la chose humaine et politique. Cela a été, de tout temps, la marque indélébile du véritable artiste.

François L. Speranza.

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Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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L'artiste ERIK MORVAN et François L. Speranza : interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles.

12273330664?profile=original     12273331101?profile=original  Photos de l'exposition de l'artiste ERIK MORVAN à l'ESPACE ART GALLERY      

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DOMINIQUE PERREARD OU L'ELOGE DU MASQUE

                                                  DOMINIQUE PERREARD OU L’ELOGE DU MASQUE

Du 03-11 au 25-11-18, l’ESPACE ART GALLERY (Rue de Laeken, 83, 1000 Bruxelles) a eu le plaisir de vous présenter l’œuvre de l’artiste français Monsieur DOMINIQUE PERREARD, intitulée : EN TETE A’ TETE.

Auréolé d’une atmosphère carnavalesque, l’univers de DOMINIQUE PERREARD arpente des dimensions rarement atteintes dans la conception du masque. En vérité, l’univers de cet artiste oscille entre la sculpture et la peinture, en ce sens que chaque masque est limité dans son espace par un cadre. A’ un point tel qu’il devient difficile pour le visiteur de définir où commence le tableau et où émerge la sculpture. L’un étant l’alter ego de l’autre. Le tableau en tant que tel est le terreau à partir duquel prend naissance le masque. Par son œuvre, l’artiste recule les frontières dans la représentation du visage humain. Il y a du burlesque qui nous replonge dans les carnavals de notre enfance, à l’instar de VISAGE 04 (109 x 90 cm - techniques mixtes, papier, pigments…).
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Mais il y a aussi de l’« abstrait » (faute de le qualifier autrement) dans cette série de visages aux traits évanescents, baignant dans un blanc laiteux, contrastant avec un chromatisme bariolé, évoluant du jaune vif vers le rouge, alterné de touches blanches, traitées au couteau dans le bas et s’évanouissant vers le haut. Remarquez de quelle façon les visages émergent de l’espace : ils ressortent à la manière des bas-reliefs expulsés de la pierre. Ceux-ci apparaissent de façon saillante, à partir du trait noir extrêmement prononcé, amplifié par du papier chiffonné.

Le visage démultiplié régit la composition de NAISSANCE (124 x 69 cm- techniques mixtes, papier, pigments…).12273328491?profile=original

Elle se situe à un stade de son évolution où « tout peut arriver ». Le visage et ses attributs se mettent en place mais leur emplacement demeure encore anarchique : tout est imbriqué dans tout. De prime abord le visiteur se trouve face à un conglomérat, une masse informe de laquelle jaillissent les éléments constitutifs du visage, lequel trouvera son aboutissement discrètement coincé entre plusieurs éléments vers la gauche, au centre de l’œuvre. Il devient, dans l’imaginaire du visiteur, la concrétisation du « naissant », en ce sens qu’à de nombreuses reprises, l’idée embryonnaire du visage achevé se profile sur divers côtés du tableau. Même discours, en haut, sur la droite de l’œuvre : le profil exprimé par le bas se manifeste, donnant à ce dernier une allure faisant penser à un visage ornant une poterie Nazca (céramique précolombienne).

La force caractérisant l’œuvre de DOMINIQUE PERREARD est constituée à la fois par le volume et par la couleur, généralement très vive, renforçant de ce fait la puissance même du volume.

Une série de six petits formats représentant des visages, évoquant la volonté de « portrait », apparaît pour la première fois dans cette exposition. A’ l’exception d’un visage campé de profil, tous les autres fixent le visiteur. Même si ces portraits sont imaginaires ou symboliques, leur conception est une réminiscence contemporaine des masques de James Ensor, tels que la FIGURE 6, particulièrement dans l’expression et le chromatisme.

FIGURE 6 (39 x34 cm - techniques misxtes, papier, pigments...) 

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Mais il y a également une évocation de l’expressionnisme allemand des années ’20 et ’30, notamment dans les FIGURE 2  et FIGURE 4  ainsi que de Francis Bacon.

FIGURE 2 (44 x 36 cm - techniques mixtes, papiers, pigments...)12273329661?profile=original

FIGURE 4 (40 x33 cm - techniques mixtes, papaiers, pigments...)

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Ces petits formats exposés ne sont qu’un échantillon de sa production, comportant quelque soixante oeuvres de cette dimension. La notion du « portrait » est flagrante, à la fois dans sa présentation que dans ses références historiques. Néanmoins, rien n’a été voulu car tout est le fruit de l’inconscient. L’importance de ces petits formats réside dans le fait de nous faire comprendre que nous sommes toujours bel et bien dans le masque dans toute sa dimension mythologique. En effet, ces visages grimaçants et déformés, drôles ou tristes ne sont que l’expression de ce qui s’abrite derrière l’écran du masque, à savoir la Persona.

Le sentiment de la pierre nous est rendu par BAS-RELIEF 0 (68 x 48 cm – techniques mixtes, papier, pigments…).

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Le côté « argileux » qui se dégage de cette pièce est dû à la magie de la technique mixte utilisée par l’artiste. Les deux visages (sculptures) ressortent au regard à partir d’un arrière-plan brun-ocre, renforçant au sein de l’inconscient l’idée tangible de la pierre sculptée.

LA DAME (94 x 74 cm – techniques mixtes, papier, pigments…) constitue l’exemple parfait du tableau sculpté.12273331070?profile=original

Des résidus de matière conçoivent et décorent la robe du personnage. Son rôle est celui d’accrocher la lumière. Des notes rouge vif affirment le corsage de sa robe.

Sa chevelure s’éparpille à l’intérieur d’un halot lumineux dominé par le jaune or, le noir le plus sombre et le rouge vif. Le visage respecte cette ligne de démarcation infime entre peinture et sculpture : jaillissant à peine de la toile, seuls le nez, les arcades sourcilières, la bouche et le menton ressortent de l’espace pictural pour trouver leur identité plastique propre, à l’intérieur de cette polysémie chromatique.

L’idée du « portrait » est à nouveau présente dans le regard de la dame fixant le visiteur. Sa particularité consiste dans le fait de s’éloigner de la toile pour que celle-ci se dévoile dans tous ses atours.

Il n’y a pas vraiment un nom pour qualifier l’art de DOMINIQUE PERREARD. « Modeleur » ferait sans doute l’affaire, puisque la construction du masque est une affaire de « modelage ». Et l’artiste s’exprime dans une discipline associant relief « sculpté » (étant donné qu’il s’agit de « bas-reliefs » en masques) et peinture, puisque l’œuvre s’enserre à l’intérieur d’une toile peinte. Il s’agit ici d’un art original puisqu’il s’écarte des sentiers battus pour avancer vers d’autres dimensions créatrices.

Avec FOULE 08, nous retournons dans l’interprétation inconsciente. En effet, parmi les visages entourant le personnage central, il y en a un dont le menton termine en pointe son faciès émacié, accusant un prognathisme prononcé. Là aussi une référence à l’histoire de l’Art proche-oriental s’affirme lorsque nous le comparons à la statuaire égyptienne de la 18ème dynastie.

FOULE 08 (118 x 75 cm - techniques mixtes, papiers, pigments...)

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FOULE 08 (autre tableau - 102 x 67 cm – techniques mixtes, papier, pigments).

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Seize variations sur le thème du masque-visage se déclinent en une infinité de modulations dans lesquelles la matière imprime l’idée de la forme, presque en s’effaçant, tellement elle devient fragmentaire sans que jamais celle-ci l’emporte sur le dessein à l’origine de la forme. Nous restons dans l’idée ou plutôt dans l’esthétique de l’idée car à chaque reprise, l’artiste s’arrête avant la forme « achevée ». Elle se suffit à elle-même, la matière, n’étant là que pour souligner l’idée : nez, bouche, regard…jamais la matière, finement étalée, presque poudreuse, ne rivalise avec le dessin servant de limite au champ expérimental.  

DOMINIQUE PERREARD peint depuis l’âge de dix-neuf ans. Bien qu’il soit passé maître dans l’art du modelage, il a peu pratiqué la sculpture.

Sa rencontre avec le masque s’est faite par le biais du théâtre en tant que scénographe. En effet, il a pratiqué le théâtre de marionnettes ainsi que celui de rues, dans lesquels le rôle du masque est fondamental depuis la tragédie grecque en passant par la Commedia dell’Arte dans la culture occidentale. Il a d’abord pratiqué la peinture avant de se diriger vers la scène. Il a d’ailleurs monté plusieurs compagnies. L’artiste ne fait aucune distinction entre peinture, sculpture et modelage étant donné qu’il les pratique indistinctement.

Lorsqu’on lui demande s’il a eu la volonté de « portraiturer », il répond par la négative. Le « portrait » se réalise donc de façon inconsciente par le biais de la culture emmagasinée dans le domaine artistique depuis des années. Le dénominateur commun à tout cela étant, évidemment, le théâtre. Néanmoins, il est indéniable que l’œuvre de l’artiste ait été influencée, notamment, par l’art brut. Cela se perçoit dans la conception plastique de cet ensemble que l’on pourrait qualifier de « peinture sculptée ». Sa technique est principalement basée sur le papier pour dessin. Il s’agit essentiellement d’une technique mixte, conçue à base de sable, de papier, de pigments, de poussière de bois et de liant. La matière (la conception même du papier), est réalisée sur base de feuilles encollées, malaxées en pâte.

DOMINIQUE PERREARD poursuit une tradition artistique et culturelle séculaire : celle de rendre vivante la partie enfouie en nous-mêmes que la tragédie et la Commedia dell’Arte ont offert au peuple pour qu’il y perçoive son reflet humain à l’intérieur de tous ses possibles.

François L. Speranza.

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L'artiste DOMINIQUE PERREARD et François L. Speranza : interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistes et littéraires au cours des deux derniers siècles

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Photos de l'exposition de DOMINIQUE PERREARD à l'ESPACE ART GALLERY 

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                    DE LA NON COULEUR A’ LA LUMIERE : LA MÉMOIRE SELON SERGE TENEZE

Du 07-O2 au 20-02-20, l’ESPACE ART GALLERY (83 Rue de Laeken, 1000 Bruxelles) a exposé l’œuvre du peintre français, Monsieur SERGE TENEZE, intitulée : MEMOIRES : ABSTRAC ET LUMIERES NOIRES.

Peindre la Mémoire! Voilà un thème fascinant. Thème ancien, par surcroît, mais qui s’avère « contemporain » dans sa façon d’aborder le sujet. Si dans le passé, la Mémoire s’incorporait spécifiquement au sein de la figure humaine idéalisée avec souvent une connotation magico-religieuse (l’image de l’ancêtre dans la Rome antique privée de regard pour garder, à travers cette cécité imposée, une distance acceptable entre le monde des vivants et celui des morts), aujourd’hui, par le biais de l’abstraction, elle devient « magnétique ». Le personnage féminin, peint à maintes reprises par Dante Gabriele Rossetti au milieu du 19ème siècle, est censé portraiturer l’épouse de ce dernier qui s’efforce à la comparer à la Béatrice de Dante. Même peinte jusqu’à l’obsession, ce fantôme, issu de la Mémoire demeure une femme. Par conséquent, cette Mémoire s’incorpore dans un sujet : un corps féminin pétrifié dans la fleur de l’âge. SERGE TENEZE, lui, peint la Mémoire dans sa manifestation à la fois humaniste et cérébrale. La couleur-support qui la sous-tend est le noir, lequel renvoie la lumière vers le regard qui en saisit les contours, jusqu’à en chercher l’origine. Temps et Mémoire se conjuguent dans un réseau d’entrelacs pareils à des ondes magnétiques dont jamais l’on n’entrevoit le point de départ ni le point final. Et ce qui frappe au premier regard c’est précisément cette ondulation sur la surface qui ramène l’œuvre à sa vérité, sinon plastique, du moins cosmique. Car ce réseau d’ondes magnétiques rappelle l’écho des signaux laissés par un astre perdu. L’artiste produit des ondulations stimulant d’autres ondulations. Aux traits finement ciselés, évoquant les lignes de l’électroencéphalogramme, se forment des ondulations provoquant des déphasages en forme de courbes, créant ainsi l’idée d’une possible élasticité spatiale. Ces deux constantes (couleur noire et lumière) assurent l’élément déterminant à la viabilité de l’œuvre, à savoir le rythme. La lumière est littéralement « propulsée » par la couleur noire. Elle devient son émanation.   

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L’artiste peint les effets produit par l’acte de la mémorisation. Les résultats sont la matière spectrale laissée par le souvenir s’imprimant sur la toile tel un négatif.

Il ne s’agit pas de la forme classique de l’électroencéphalogramme centré sur trois lignes horizontales continues. Mais bien de volutes enroulées sur elles-mêmes. Des semi-spirales fluctuantes où la Mémoire se renouvelle dans l’espace d’un éternel retour.

Peindre la Mémoire équivaut à peindre le vent. L’artiste explore les feuilles tombantes, ramassées à l’intérieur d’un tourbillon qui les rend aériennes et compactes à la fois. Forme et légèreté deviennent l’essence même du mouvement.  

Concernant les lumières noires, l’exposition présente deux écritures plastiques de l’artiste :

  • le tableau conçu comme nous venons de l’évoquer
  • le tableau « incisé »

Ce dernier, évoquant la sculpture, présente des marques et des entailles que l’on pourrait imaginer avoir été réalisées au burin sur la toile.  

LUMIERES NOIRES LAC 2 (120 x 120 cm – huile sur toile) est une œuvre où le trait se définit par des incisions au couteau, donnant vie à un cinétisme d’une géométrie inconnue où chaque forme est délimitée dans son espace sans empiéter pas sur l’autre.  

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L’œuvre de l’artiste se divise en toiles de grandes et de petites dimensions. Si le noir est la note principale, le bleu n’est nullement délaissé. Il se fond dans l’arrière-plan contribuant à faire émerger la teinte noire définitive.  

LUMIERES NOIRES LAC 14 (65 x 50 cm) 

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Quatre variations sur le gris enchantent l’exposition. La finesse du trait que nous remarquons sur les toiles noires, se perpétue dans un dédale magique d’entrelacs noirs et blancs, donnant par le biais du fond blanc de la toile, naissance à un gris, comme surgi de l’hypnose. Ces petits formats sont des travaux sur verre, Ils sont « activés » par une petite lampe située derrière chaque tableau que l’on allume pour les illuminer. La note grise se révèle comme l’apparition d’une fumée faisant, au gré du mouvement, apparaître et disparaître sa forme. Il s’agit, là encore d’une variation sur la Mémoire à la fois dans sa persistance et son absence. 

                                                          

LUMIERES DE VERRE 5 (50 x 50 cm)12273334060?profile=original

                                                        

Ce travail sur le verre, l'artiste l'a également réalisé à partir d'une dominante bleue. Ce sont des variations à la fois personnelles et contemporaines sur des vitraux d'église où nous retrouvons la même dialectique sur la Mémoire.

                                     

LUMIERES DE VERRE 7  (50 x 24 cm)

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Depuis une quinzaine d’années, l’artiste ne travaille que sur la Mémoire, à la recherche d’états d’être oubliés, conçus comme des corps vivants. Pour cela, il utilise la terminologie freudienne en parlant de « Mémoire-peau ». Ce derme  mnémonique trouve sa nourriture dans l’expérience à la fois sensuelle et mystique de la sensation, à la façon d’un Proust savourant sa madeleine. L’artiste nous donne l’exemple d’un rabot appartenant à son père décédé. Dans une toile peinte dans le passé (ne faisant pas partie de l’exposition), il décide de « portraiturer » feu son père, non pas en se référant à sa présence physique mais bien à ce qui, selon la Mémoire du peintre, le caractérisait par- dessus tout, à savoir son rabot, non pas dans sa matérialité pleine et plastique mais bien dans la forme vaporeuse du souvenir, évidée de son contenu. Forme que le regardant appréhende sans la moindre explication extérieure.

Cette Mémoire, l’artiste ne l’approche que par le biais de l’abstraction. Abstraction qui n’existe que comme simplification à son travail. Il n’hésite pas à se référer à Monnet dans sa quête vers l’essentiel. Son désir consiste à savoir comment son travail sera ressenti. En cela, il n’hésite pas à demander au regardant de toucher la toile pour qu’il en ait déjà un contact sensoriel, renforçant ainsi la possibilité d’une Mémoire tactile chez ce dernier. Car la « Mémoire-peau » se nourrit des sens. Et cette Mémoire porte en elle une couleur : le noir. Son travail est une quête qui le place dans la peau d’un archéologue à la recherche de l’idée première. Remonter le temps. Les sillons acquièrent une importance capitale car, tels les anneaux d’un arbre, ils remontent vers la surface. Ils symbolisent également l’image de l’empreinte digitale. C'est-à-dire d’une trace laissée sur la toile du temps. Mais ils symbolisent aussi une plénitude, une enveloppe, une peau. Le noir, c’est aussi la recherche de son Moi, qu’une transparence bleue, issue de la couleur maîtresse, affleure à la surface du regard, lorsque celui-ci s’efforce à la trouver.

L’empreinte de la Mémoire se manifeste également dans les titres que l’artiste donne à ses œuvres. Concernant ses petits formats, le mot « Lac » apparaît fréquemment, voulant exprimer par là l’étendue d’eau enfouissant les sentiments et que l’artiste-archéologue cherche à exhumer.

Mais l’eau c’est également, au sein de la pensée humaine, le terrain à partir duquel se fertilise l’univers cosmique, à partir de la dichotomie entre le « différencié » et l’ « indifférencié », dans bien des civilisations, notamment dans la cosmologie mésopotamienne. L’image du lac devient celle d’un bouillon de cultures fertilisant et créateur.

Le noir est depuis des décades une couleur remise à l’honneur. Cela nous le devons au centenaire PIERRE SOULAGES qui, un beau jour de 1979 la recréa au point de la faire accoucher d’une lumière jusqu’alors inconnue (« l’outrenoir »). SERGE TENEZE, quoi qu’admiratif du peintre, se sert de la lumière émise par la couleur noire mais en la contournant pour trouver sa propre vérité. En effet, essayer de comparer son travail avec celui de Soulages reviendrait à constater qu’absolument rien ne les relie. Ce qui n’est rien de plus normal puisque de tout temps l’histoire de l’Art est avant tout une histoire d’influences. De plus, l’artiste, traitant le thème de la Mémoire, vise les hauteurs mystiques, en ce sens qu’il veut transcender la couleur noir pour la recréer en une « non-couleur » comme il se plaît à le souligner, de laquelle s’exhale la lumière.   

Et d’insister en déclarant que pour lui : « la « non couleur » devient le « médium » idéal. Il ne me faut plus compter qu’avec la matière  et la lumière. Abandonnant les artifices de la couleur au profit de ce noir dense et dépouillé, sérieux, honnête et fort. Travailler cette matière pour la faire mâte ou brillante, fine ou épaisse, lisse ou accidentée. La charger d’émotion, lui donner mes impressions, mes sensations, y laisser mes traces ».  

SERGE TENEZE a fréquenté les Beaux Arts de Bordeaux, à la suite de quoi il a suivi les cours du Professeur Claude Yvel qui lui a révélé les secrets des techniques anciennes ainsi que la valeur de son travail. Ce qui a fait de lui un artiste qui perpétue des techniques ancestrales en les adaptant à un langage contemporain.

Certaines de ces techniques remontent à la Grèce antique, telles que le traitement à « l’huile noire » provenant de l’île grecque de Chios dont il se sert pour fabriquer la base de son medium, à savoir une résine appelée le « mastic en larmes ». Ces techniques, il les ressuscite pour consolider un lien non seulement technologique mais aussi humaniste et culturel avec un passé qui a vu fleurir les grandes heures de l’histoire de l’Art. En effet, le temps passé dans les ateliers de Claude Yvel et de J.P. Braz fut un complément considérable à son passage aux Beaux Arts. Ne perdons jamais de vue que l’Académie, telle que nous la connaissons aujourd’hui, remonte (du moins en France) au 19ème siècle. Autrefois et plus précisément au cours de la Renaissance, l’artiste se formait à l’intérieur même de l’atelier, sous la supervision du Maître. La formation de SERGE TENEZE porte en elle l’empreinte de cette époque.

Epoque qu’il perpétue par la grande culture de son métier qu’il témoigne à chaque œuvre créée. Tel le chef d’orchestre qui compose dans le but de diriger ses propres partitions, l’artiste à l’instar de l’alchimiste, crée pour expérimenter ses matériaux dans le processus de sa création. Œuvre et matériau ne font plus qu’un et lorsqu’il évoque sa science, il devient intarissable. Ainsi, parlant de la réalisation du tracé laissé par les sillons de la série consacrée à la Mémoire, il indique qu’il effectue un premier passage au couteau « en 8 » (c'est-à-dire que l’on passe l’outil – en l’occurrence le couteau – comme si l’on dessinait la forme d’un 8 horizontal, en suivant sa ligne tout en déplaçant le couteau sur la toile. C’est là la meilleure façon, affirme-t-il, de l’imprégner sur la totalité de son espace), afin que le support puisse accueillir les pigments noirs d’ivoire, l’essence de térébenthine bi rectifiée, mélangée à de la résine de mastic en larmes provenant de l'île de Chios ainsi qu’une petite quantité d’huile. 

Il effectue ensuite, un deuxième passage au couteau à peindre (d’une trentaine de centimètres environ) dans le but d’étaler en épaisseur ce même mélange, enrichi d’huile cuite en plus de l’adjonction d’un médium, tel que par exemple, l’essence de térébenthine bi rectifiée, mélangée à la résine de mastic en larmes de l'île de Chios. Tandis que les sillons, en tant que tels, sont créés avec différents outils, comme la large brosse plate que le pinceau reprend par la suite pour mettre en exergue la fluidité du mouvement, créant ainsi la naissance de la lumière. L’importance qu’il accorde à l’apport de couches successives est dicté par le besoin les rendre, comme il le dit, « amoureuses ». Et cette succession de couches n’existe que pour assurer à l’œuvre, par le biais de la matière épaisse, la possibilité de traverser les siècles. La création s’accorde avec le passage du temps.

Le travail sur le noir est en réalité la suite d’un travail initial ayant pour attribut la couleur dans lequel était déjà présente la nécessité d’appropriation de la Mémoire.  

ORANGE DE NOEL (64 x 54 cm – huile sur toile) est l’expression plastique d’un souvenir d’enfance appartenant à la fois à l’artiste ainsi qu’à sa mère. Petit, celle-ci lui relatait le souvenir qu’au jour de Noël, celle-ci recevait une orange. Emu par la maigreur du cadeau, cet épisode avait marqué la mémoire de l’artiste. Des ersatz de chromatisme orange parcourent, de haut en bas, l’ensemble du fond bleu, parsemé ça et là, de quelques vagues notes blanches. La couleur orange, striant la surface de la toile brille, incandescente et le souvenir se révèle de façon épidermique. 

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Dans l’œuvre précitée, l’artiste nous a conviés à la manifestation d’un épisode remontant à sa petite enfance, avec MON AUTOMNE (95 x 130 cm- huile sur toile) il aborde l’intimité d’un sujet existentiel, à savoir l’automne de la vie. Toujours dans l’abstraction, ses strates chromatiques sont considérées par lui comme des « signifiants », témoignant sous la forme de « traces », des différentes phases de sa vie. Si des ersatz de couleur jaune parsèment de haut en bas, l’œuvre précédente du peintre, MON AUTOMNE en revanche, présente une continuité linéaire, carrément progressive dans l’évolution humaine de l’artiste. Trois phases en superposition axées sur trois notes différentes (le vert à l’avant-plan, le bleu entrecoupé de noir dans la zone médiane et le rouge également entrecoupé de noir) sont clairement délimitées, face auxquelles le regardant pourra se risquer à une tentative d’interprétation subjective. Notons que cette différence organisationnelle dans la disposition chromatique concernant ces deux œuvres est d’un intérêt qui interpelle. Surtout si nous observons que le sujet de ces deux toiles se situe à la charnière de deux phases de la vie. 

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Et c’est précisément ce que nous avons souligné, plus haut, en insistant sur le fait que le rendu pictural de la Mémoire rendu par l’artiste est à la fois humaniste et cérébral. Humaniste, parce  qu’il fait appel à tout un héritage culturel séculaire. Cérébral, parce qu’il s’efforce à retranscrire tel un scribe, les signes plastiques, les « signifiants » semés par le cerveau humain.    

L’artiste a pour projet de continuer son exploration de la couleur noire. Toujours sur le thème de la Mémoire, il compte réaliser un assemblage de neuf toiles sur fond noir avec cette fois, le jaillissement d’un trait de fulgurance symbolisant l’émergence de la pensée, soit sous une forme colorée, soit par une suite de plusieurs couches de noir. 

Abstraction et Mémoire se conjuguent dans un discours qui rejoint la mythologie du Temps dans l’image expansive du sillon proche de la spirale, symbolisant l’infini. Or, l’infini annihile le temps.

Sur la toile cosmique, SERGE TENEZE nous en laisse l’empreinte.

François L. Speranza.

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Collection "Belles signatures"  ©  2019  Robert Paul

                                                      

   

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Robert Paul, éditeur responsable

A voir:

Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

   

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L'artiste SERGE TENEZE et François L. Speranza : interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles.                                               
                                                                                                                   

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Photos de l'exposition de SERGE TENAIZE à l'ESPACE ART GALLERY

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                                               LES VOIES DU SURREALISME : L’ŒUVRE DE MAX PARISOT

Du 05-10 au 25-11-2018, l’ESPACE ART GALLERY (83, Rue de Laeken, 1000 Bruxelles) a consacré une exposition au peintre français, Monsieur MAX PARISOT, intitulée : EQUILIBRE FINAL.

Nous nous situons, avec MAX PARISOT à la charnière entre surréalisme et esthétique numérique. Onirisme surréaliste et cinétisme numérique s’entrecroisent pour former un Tout paisible, annonçant déjà un premier équilibre, essentiellement stylistique. Vient ensuite un deuxième équilibre, strictement sémantique. L’œil parcourant le lexique pictural apprivoise l’univers de l’artiste, essentiellement composé de personnages tels que l’arbre, la lune et la mer.

L’arbre peut se présenter squelettique, comme dans VUE DE LA FENETRE D’UN TRAIN (65 x 95 cm).

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A’ travers une coupe radiographique évoquant l’intérieur d’une cage thoracique humaine, proposée dans POUMONS (60 x 85 cm).

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Sous la forme d’une composition cinétique blanchie par la neige à l’instar de PAYSAGE DE NEIGE AVEC LUNE (45 x 65 cm).

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La lune a pour constante d’être pleine et radieuse.

SORTIR (60 x 85 cm).  

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Malgré l'atmosphère nocturne, elle revêt totalement  son rôle d'astre, tellement sa présence est solaire. Quant à la mer, elle apparaît toujours calme pour ne pas dire immobile, sur laquelle tout ce qui s'y aventure est comme retenu en suspension. Cette oeuvre est une invitation au voyage. Une vague, d'un bleu "magrittien" déferle, à partir d'une zone obscure, renforcée en puissance dans le haut par le noir intense, vers une mer calme que l'écume engendrée par l'ivresse du bateau rend agitée. Cette vue à partir de la vague originelle est une métaphore de l'Homme qui veut sortir de sa condition pour toucher l'Absolu. Cette image porte en elle le mysticisme surréaliste. Un mysticisme axé sur l'introspection. Avec son univers filandreux, POUMONS (cité plus haut) pourrait, à l'extrême limite, être interprété comme une radioscopie de l'âme.  

La naissance de tout équilibre est garantie par le calme. Dans VUE (cité plus haut), la garantie de cet équilibre est assurée par la silhouette impassible et frêle du moine bouddhiste se profilant au loin sur la ligne d’horizon, vers la gauche de la toile. Cette œuvre est remarquable à plus d’un titre. Premièrement, elle distille un fabuleux trompe-l’œil par le fait que le cadrage de la scène se réalise, non pas à partir de l’arbre, lequel se trouverait à l’avant-plan mais bien par la présence matérielle de la fenêtre métallique, faisant office d’écran, à partir duquel l’image est, pour ainsi dire, projetée. Une autre métaphore de la présence du calme est suggérée par la nature profonde du chromatisme usité par l’artiste. Même conçus de brun vif (en dégradés), les nuages brûlés par le crépuscule, conservent une attitude de recueillement ne prêtant jamais à une narration dramatique. 

LE PRINTEMPS (45 x 65 cm) 12273316271?profile=original

nous transporte dans un monde inconnu, en ce sens que nous ne savons plus où nous sommes. Le premier plan, constitué par les fleurs rouges (des coquelicots) nous conduit vers un espace aquatique buriné par des ondulations aux tonalités bleu et vert que la lumière dorée du soleil, conçue en filigrane, a rendu brillantes comme les reflets d’un miroir.

CHAPELLE SOUS LA LUNE (80 x 120 cm)

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est une invocation à la nuit. A’ partir d’un paysage hivernal, la chapelle, traitée comme une ombre, avec sa masse architecturale sombre, surmontée d’une toiture noire, timidement illuminée par une lampe, se détache de l’arrière-plan nocturne pour acquérir son identité plastique et spirituelle propre. Aux deux extrémités de l’espace pictural, s’affirment deux formes : l’une figurative (sur la droite), l’autre abstraite (à l’avant-plan sur la gauche). La fonction du chromatisme consiste à appuyer la spécificité de ces formes. Le rouge vif indique qu’il s’agit d’une forme connue : celle d’un ensemble de fleurs (sur la droite). Tandis que le blanc à la consistance cinétique « électrise », en quelque sorte, l’idée de l’arbuste squelettique transi par l’hiver. Une opposition, à la fois symbolique et chromatique, s’installe dès lors entre le rouge de la vie (les fleurs) et le calme blanc de la mort augmentée par la conception serpentine du tronc de l’arbre. 

Conception picturale d’un rapport entre la notion d’un paysage « classique » et l’utilisation du traitement digitaliste dans son expression graphique.

EQUILIBRE FINAL (60 x 85 cm)

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synthétise tous les éléments évoqués dans l’œuvre de l’artiste, à savoir la mer, les rochers, le ciel, les nuages (ici menaçants), le bateau et la terre ferme. Un seul élément apparaît pour la première fois : la présence d’oiseaux toujours au nombre de huit, comme le montrent d’autres toiles sur lesquelles ils figurent, sans qu’il y ait (aux dires de l’artiste), la volonté d’une signification symbolique concernant le chiffre « huit ».  

Mais ce qui frappe avant tout c’est l’image du mariage mystique entre deux mondes : celui du haut et celui du bas exprimé par ces quatre rochers, divisés en groupe de deux, dont l’un provenant du haut « atterrit » sur celui du bas.

MAX PARISOT est à la base d’un mouvement qui utilise le digitalisme dont le but est celui d’assurer à l’artiste une liberté sans limites dans ses moyens d’expression. Né en 1950 du travail commun de deux mathématiciens, l’américain Ben Laposky et l’allemand Manfred Frank, cette forme d’art essentiellement numérique, peut être élaborée à partir de la scansion des photos, prises individuellement. Ce qui permet d’effectuer des retouches. Et nous savons que l’artiste dispose de toute une collection de « stills » qu’il retravaille à sa guise. Depuis maintenant des années, l’ordinateur a fait son entrée à la fois dans la peinture ainsi que dans la musique. Que ce soit dans cette deuxième discipline comme dans la peinture, cette nouvelle technologie assure leur essence contemporaine à la fois dans leur dynamique comme dans leur esthétique. De plus, le stockage des images permet à l’artiste de les modifier indéfiniment, exprimant sa volonté de les recréer. Evoluant simultanément entre surréalisme et numérique, force est de constater que ces deux écritures sont consubstantielles l’une par rapport à l’autre. Son but est, comme il le dit lui-même, celui de créer un « choc » chez le visiteur dans sa révélation de la beauté. Conscient, comme tout véritable artiste, de la complexité de la condition humaine, il s’efforce par son œuvre à donner de la joie. Cette joie, l’artiste l’exprime avant tout par sa connaissance des couleurs, laquelle lui vient de son parcours professionnel lorsqu’il s’occupait de la fabrication de meubles au sein de son entreprise familiale. Son travail consistait à s’occuper des couleurs et des formes. Sa technique se focalise principalement dans l’assemblage de photos considérées comme les collages d’antan, sur base d’une technologie nouvelle.

Il travaille, comme spécifié plus haut, à partir de sa propre photothèque en détournant les sujets de leur propre contexte pour les aligner vers une autre réalité. Surréaliste avant tout, il révère Dali (cela se voit, notamment dans la CHAPELLE, cité plus haut : sujet « classique » plongé dans une nature qui le transcende) mais il est également très attiré par les Impressionnistes (comme le démontre sa conception chromatique concernant LE PRINTEMPS (cité plus haut) ainsi que par Picasso. A’ la question de savoir s’il compte poursuivre ce chemin, il répond par l’affirmative. MAX PARISOT est un artiste qui a trouvé sa voie dans la matérialisation d’une poétique savante, héritière d’une culture qui a façonné le siècle dernier, mise en exergue par la technologie du 21ème siècle, exprimée dans l’intemporalité naturellement humaine de son essence.

François L. Speranza.

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Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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Photo de l'exposition consacrée à Max Parisot à l'ESPACE ART GALLERY

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