J'ai perdu les traces de celui qui me suivait.
Cette ombre qui disparaît puis réapparaît.
Impression que mon ombre me fait défaut.
Je me retourne trois fois et j'ai tout faux.
J'ai décidé de prendre de l'avance.
De me consacrer à un long silence.
Réception de cet emballage.
Un magnifique capitonnage.
C'est dans la nuit seul que j'ai essayé.
Ce doux linceul aux coutures dorées.
Un habillage qui donne fière allure.
Brodé en fines dentelles de Bruges.
Habillé comme un roi que l'on a adoré.
Couché à cet endroit sans me cacher.
Un portillon très chique sur la face avant.
Que l'on glisse pour me voir comme avant.
Juste essayé, pour voir ce que cela donne.
Un couvercle soigné encore sur la colonne.
Prendre place dans ce coffre en bois.
Être sûr des mesures de haut en bas.
Juste pour voir et pour m'assurer.
De ce travail précis et personnalisé.
J'ai souvent cotoyé la mort.
A mon père je pense encore.
Ma rapprocher un peu de son âme.
Me trouver bientôt parmi les sages.
Lui, là-haut depuis bien longtemps.
Mon père, installé confortablement.
Je sais qu'il m'attend à côté de maman.
Bras ouverts pour accueillir son enfant.
Une magnifique table est déjà dressée.
Un plateau de fromage de nos contrées.
Pure beurre, baguette française et du vin.
Mon entrée triomphale est pour demain.
Que de belles réjouissances à l'horizon.
Retrouvailles de jeunes filles et garçons.
Ceux qui sont partis beaucoup trop tôt.
Voix oubliées et silence de leurs échos.
Mais avant cela, ces quelques discours.
De mes amis, de mes anciens amours.
Une gigantesque cérémonie grandiose.
Où chacun apporterait quelque chose.
En costume, en robe avec un ruban jaune.
Des signes de gaieté, je vous le propose.
En ce jour, ne soyez pas triste.
Chacun se trouve sur la liste.
Venez seulement un peu plus tard.
Profitez encore, amis et camarades.
Moi, un bon petit vieux en fin de vie.
Vie pleine d'humour, mais plus envie.
J'observe de ma caisse ces nuages et ce ciel bleu.
Espérant que pour vous, tout aille pour le mieux.
Heureux, je referme enfin mes paupières.
Bercé par ce vieux carrosse noir, une trêve.
Je repose enfin près des miens.
Pour l'éternité et sans chagrins.
Au nom du Père, du fils, de tous mes amis.
Aurevoir, je vous aime tant mais c'est ainsi.
Amen.