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Luc Gazon ou l'élan vital
On peut définir l'art de Luc GAZON comme une éruption d'énergie vitale qui se canalise par le jeu des formes et des couleurs dans les méandres de la matière picturale. Un tableau de GAZON est devenu l'expression d'une force instinctive voire physique, qui par la voie de l'art s'est concrétisée en une présence quasi vivante face au spectateur.
Dans son œuvre, les formes et les couleurs s'entrelacent et s'entremêlent dans les coulées d'une matière vibrante. C'est ici qu'un des thèmes favoris de l'artiste s'incarne: l'attraction des forces antagonistes du mâle et de la femelle qui occupe toute la dimension du tableau comme champ de bataille.
C'est là que ''Les Musculations'' se déchaînent, les formes se démêlent en courbes et en cercles qui captent la force érotique de l'acte créateur. Là aussi que la matière se plie et en même temps se multiplie dans une diversité prolifique d'apparences et de nuances.
L'art de Luc GAZON se caractérise comme le contraire de l'immobilité et de la stagnation. Il exprime par de multiples et toujours nouvelles manières picturales cette vérité fondamentale: la vie est dans le mouvement.
Jan Busschaert,
Mai 1992
Luc Gazon, dix ans de dessin (extrait)
{...} Les premiers dessins de Luc Gazon, réalisés à St Luc en 1972–73 évoquent les forêts de Max Ernst.
Ces réminiscences se dissolvent dès 1974 dans une série de dessins automatiques, baptisés ''Compositions viscérales ''. L'artiste y laisse sa main et son imagination en ''liberté conditionnée'' et ''piste'' leur descente rusée, à la fois indolente et obstinée, dans des abîmes de fantasmes, où se révèlent les en-dessous agressifs et concupiscents de l'être. Peu à peu, débusquées aux frontières de l'indéterminé, se distinguent des formes vivantes immatures, membranes, veines, cartilages, muscles, tendons et téguments, larves, cellules et bacilles, yeux, bouches ou nombrils, engagés dans des affrontements plus délirants et terrifiants les uns que les autres.
Par leurs thèmes organiques, leur luxuriance et leur éloquence visionnaire, les ''compositions viscérales '' ont partie liée avec le psychédélisme, avatar du surréalisme, expérimenté, à la fin des années soixante, par de nombreux artistes européens et surtout américains, tels Allen Atwell, Arlene Sklar Weinstein et Mati Klarwein, dans la lignée d'Ernst Fuchs.
En revanche, Luc Gazon refuse deux des travers psychédéliques les plus répandus. D'une part, il n'est pas affecté par l'engouement pour le symbolisme et l'Art nouveau, et d'autre part, l'univers qu'il structure de plus en plus fermement à partir de 1975 n'est en rien un paradis artificiel. Ce monde débordant, grouillant de vitalité se révèle au contraire si peu rassurant, si dément, si morbide, que son démiurge se détermine bientôt à ne plus le considérer que par le petit bout de la lorgnette ou du microscope. Ayant sagement pris du champ, il fait mine de conjurer la menace à l'aide de symboles ''mystiques'', comme l’œil et le triangle. Mais ce n'est qu'un répit. Avec l’éloignement, l'artiste s'aperçoit que les organes indéfinis des œuvres (viscérales), qui, considérés de près, paraissaient lutter en ordre dispersé, sont en fait alliés, qu'ils sont organisés en corps humains, munis de cerveaux et de sexes.
Cette découverte s'affirme en 1977 dans Délires délices du Maroc, un des derniers dessins « psychédélisants » de Luc Gazon, et peut-être son œuvre la plus paisible et la plus douce. Dans la suite à mesure qu'ils prennent chair, l'homme, le plus souvent sous les traits de l'artiste, et la femme commencent par se chercher avec des tâtonnements d'aveugles. Qu'ils s'unissent et c'est le désastre ! Leur étreinte s'exacerbe en un spasme d'une violence formidable. Les corps se disloquent comme électrocutés. Mais il ne faut pas s'y tromper. L'anéantissement dans le rapport sexuel, au lieu d'être dénoncé est célébré comme une fête infernale, un '' ‘potlatch’ pernicieux, exalté en temps qu'accomplissement sadomasochiste.
D’œuvre en œuvre, la perversion piégée par le dessinateur pourrait tourner à l'obsession et son expression, à la formule. Pour parer le danger, Luc Gazon s’efforce depuis 1979 de ''liquider'' son idée fixe. Dans une série de dessins intitulés Les érotiques, il s’attaque à la femme, naguère complice de l'autodestruction du mâle, à présent bouc émissaire tout aussi mythique, symbole et agent de la mort « qui fait le trottoir ». Pour la neutraliser, il la transforme en un simulacre hyperréaliste, une poupée de papier, incapable de résister à ses envoûtements virils. Le 'canapé rouge', aboutissement de deux ans de travail régulier, est au départ de cette délivrance. Il a pour origine un dessin de dimension modeste, représentant une femme allongée sur un divan, apparemment endormie, inquiétante. Sur le point d'achever cette première composition, Luc Gazon décide soudain de l’amplifier. Il la relègue dans le coin inférieur gauche d'une seconde image, quatre fois plus étendue, d'où surgit, en haut à gauche, le visage harmonieux et vide d'une « cover-girl », dans une pluie de verre brisé, fragments d'un écran vitré ou d'un miroir.
Parallèlement, Luc Gazon s’attaque en 1980 à trois œuvres d'inspiration « social », les anthropophages, café de Flore et cortège à la mort.
Puisqu’elles demeurent inachevées, la discrétion s’impose. Observons seulement, d'une part, que leur auteur tire un nouveau parti de ses fantasmes agressifs ou sexuels en intégrant leur analyse dans une réflexion plus ouverte sur l'imaginaire collectif, et que, d'autre part, les figurants du Cortège à la mort appellent le souvenir de James Ensor.
Au-delà des parentés provisoires il est souhaitable de spécifier l'art de Luc Gazon à partir de ses caractères stylistiques les plus stables. Son originalité tient d'abord à un mode d'élaboration extrêmement long et scrupuleux. Luc Gazon parle d'une ''impulsion gestuelle'' qui commande le choix du motif de base. Ce premier jet n'est pas exploité pour lui-même, sauf dans quelques études, esquissées à la manière d’Alechinsky, des calligraphes zen ou des peintres expressionnistes. Le plus souvent, l'artiste le soumet à un examen minutieux, le reprend, le ressasse, le cristallise, le détourne ou le prolonge, le réduit ou le déploie, peu à peu, non pas jour après jour mais mois après mois, voire année après année, comme dans le cas du Canapé rouge. Tout aussi particulier est l'emploi du stylo à bille. Il est vrai que cet instrument roturier est utilisé par un nombre croissant de dessinateurs, mais rarement de façon aussi exclusive. Luc Gazon s’accommode bien du tracé régulier et précis, à la fois appuyé et souple de la « pointe-Bic », et de ses teintes grasses et intenses. Celles-ci ne suffisent pas à expliquer un troisième ordre de singularités, concernant la palette de Luc Gazon; Il faut ainsi noté que la couleur, qui n’apparaît qu'en 1976, est rendue par des faisceaux de lignes multicolores, superposés avec beaucoup de recherche. Invoquons enfin, que toutes les nuances, des plus vives au plus ténues, qu'elles soient obtenues au « Bic » ou par des rehauts de crayon, de pastel ou de gouache, dérivent du spectre de la flamme. Ce flamboiement des tons, digne parfois, de William Blake, leur sauvage délicatesse, leur violence sophistiquée, d'une part, la complexité des schémas graphiques, d'autre part, ne semblent justiciables, ensemble, d'aucune école d'art contemporain.
D’audaces subtiles en raffinements de provocation, Luc Gazon se joue des influences, les dépasse sans vraiment les renier, les plies à des exigences stylistiques personnelles, qui sont les fondements les plus constants et les plus convaincants de son art. Il n'est pas sûr que toutes ses idées soient à l'abri de reproches, quant à leur effronterie ou leur candeur.
Corrélativement, elles ne peuvent paraître que moins frelatées. Par ailleurs, Luc Gazon jouit incontestablement de son travail ''comme d'une possession naturelle'' (...), comme d'un de ces modes de vie et d'expression'', selon le mot de Rilke dans la première de ses Lettres à un jeune poète. L'écrivain a-t-il raison d'ajouter qu' ''une œuvre d'art est bonne quand elle est née d'une nécessité, (...), qui pousse ses racines au plus profond du cœur'' ? Au moins un tel besoin semble-t-il garantir à la production de Luc Gazon, même en son début, l’authenticité et l'intégrité de sa force d’interpellation.
Jean-Patrick Duchesne - Docteur en histoire de l'art et en archéologie de l'Université de Liège.
Art&Fact Numéro 1/1982
Merci de m'avoir demandé comme ami. Je suis particulièrement touché par votre ressenti! Bien à vous.
Cher Luc Gazon,
Désolé de ne vous répondre que maintenant.
je vous remercie pour l'amitié que vous me proposez.
Au premier coup d'oeil sur votre diaporama, on remarque l'excellente "agressivité" de votre coup de crayon, en ce qui concerne vos dessins. Tandis que concernant votre peinture, la première chose qui saute aux yeux c'est la pouvoir de la lumière qui donne un éclat sans pareil à vos couleurs. Vos thèmes concernant votre production (dessin et peinture) sont également fort intéressants. Je ne peux que vous féliciter pour votre travail.
Au plaisir de vous lire,
François
Merci à vous. Heureux de découvrir votre oeuvre., le réseau s'enrichit de telles rencontres.
Hello Luc Gazon ! J'apprécie la forte ambiance de vos œuvres.
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