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Publications de Patrick Chemin (10)

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Verset 44 de Patrick Chemin

VERSET 44

L’orage antique sur les temples
la solitude en versets de foudre
Il faudra vivre mille ans

Le frai des foules sur la berge
Tu devrais remonter la rivière
mais plus aucun saumon ne te connaît

Et tu dois composer tout ce temps
avec la fable de l’absence
Il faudrait un miracle

Et l’ange vient qui sait ton nom
l’exil est suspendu
et l’abandon

Tes yeux de vierge apocryphe
ouvrent le manuscrit
de nos initiations

Et puis trouver le gué
dans cette pluie mythique
qui figure le fleuve des contres

Eprouver l’ébauche des corps
toucher par le verbe le plus simple
à la grammaire des complexes

Il manque un souffleur inspiré
dans ce théâtre ciel sans Dieu
le désir est coupé du texte

La lumière du jour
la fatigue est solaire
qui épuise le tranchant

Je voudrais la paix du verbe
un autre possible
une écluse

Mais l’ange est loin déjà
intransigeant avec la frustration
la précision du chagrin

Je te sens duelle
je nous sens duel
au premier sang

Nous sommes au bord
tout au bord
j’aimerais tomber encore

Pas de seconde chance
il faudra vivre mille ans
avec

Le temps est un Dieu pervers
qui reprend sa foi
inconsolable

Nous ne sommes pas au monde
les fées se sont retirées du berceau
des surnuméraires

Quelle est la promesse des cendres
où est le bûcher de la perfection
l’accouplement du subtil

Aimer c’est donner à la douleur
la franchise de se consumer
en nommant le feu

Descendre par le chemin du thé
l’Asie des couleurs
sur un éléphant doré

Crémations sous le ciel safran
sollicitudes et résiliation
le corps est toujours ailleurs

Calligraphier le jade
sur la peau de l’autre
étoile perdue sur palimpseste

Un sentiment de perte imminent
comme à la genèse de l’amour
quand tout est possible même le néant

Et la mère crache sur l’enfant
qui vient à la vie par le masculin
la mauvaise porte des anges

Il y a tant de ciels sous le ciel
et la vie se doit de vivre
même avec un sang corrompu

Et mille femmes pour un seul baptême
je suis né par la bouche
à même la peau calligraphe

Naître ne suffit pas pour naître
il faut naître encore et encore
mourir enfin désiré

Je vais ce soir perdre mon âme
vendre au diable le minerai
la poussière des caresses

Et pour épuiser le déclin du chagrin
confier à Saturne le sanskrit du désir
ne plus vouloir traduire ce qui est trahi

Tout ce qui constitue l’éternité
la beauté terrible de l’instant
qui seule accompagne nos cendres

Perdre tout ce qui est aimé
dans le ruisseau antique
la main du sage sur les yeux

© Patrick Chemin (2002)
Extrait du livre « Ruches »

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Le Grand Soleil Ocre

Pour le soir du grand soleil ocre de la mort

 J’'irai tout seul

 Anonyme

 De la terre dans mes poches et mes poches trouées

 J'aurai pour naître encore l'oiseau grivois de mes cendres

 Toutes ces nuits d'argile où je saurai attendre

 La lente procession des pluies

 La semence et graine de paradis poivrés

 Et mon cerveau demain sera le blé ardent le blé indien

 La plaine entière où mûrit la lumière

 Sous l'œil de juillet

 Sa torpeur de pierre

 

 Pour le soir du grand soleil ocre de la mort

 J’'aurai la parole sans voix pour distraire les mots

 J’'aurai mille ans pour rire enfin de ce grand corps tout froid

 Désacraliser l'immobile

 Perdre la mémoire de chaque douleur

 

 Pour le soir du grand soleil ocre de la mort

 J’'irai m'asseoir entre mes deux dates limitrophes

 Sur le trait d'union

A califourchon sur ma tombe frugale où viendront les oiseaux

 Et je croirai nouveaux ces poèmes prêtés jadis au silence

 Qu'il me rendra peut-être comme ultime sentence

 Pour mes nuits illégales mes jours sans foi

 

 Pour le soir du grand soleil ocre de la mort

 J’'annulerai toutes les lunes par la présente

 Et tu les recevras poste restante

 Je t'apprendrai aussi la solitude

 Et tu la sais déjà

 

 Pour le soir du grand soleil ocre de la mort

 Je déchirerai le ciel en deux

 Dénonçant l'escroquerie d'un cri d'oiseau perçant

 Je tordrai le cou des nuages pour qu'il pleuve de l'eau de vie

 Des larmes en couleur sur le fard de l'horizon

 Je jouerai seul à la marelle bondissant de chaque côté des frontières

 Maquillées à la craie blanche grandeur nature

 Et puis je retournerai dans le ventre initial de chaque femme

 Fœtus inverse et multiple parmi les soleils de sang déchirés

 Saisons des pluies et moussons de corail

 

 Pour le soir du grand soleil ocre de la mort

 Je veux réinventer ton ventre littérature pour mes nuits analphabètes

 Et puis j'aurai l'enfance blonde et douloureuse comme un poème pour ma mère

 Le suicide des mots pour des secrets inutiles

 La survivance rebelle de tout mon orgueil

 Ecorché vif contre le mur vitré du temps et sa porte dérobée

 

 Pour le soir du grand soleil ocre de la mort

J'irai m'endormir seul dans une chambre toute proche de celle de l'éternité

 Pour nous rencontrer plus tard dans la nuit

Négocier au prix fort chacune de mes secondes gaspillée à vouloir comprendre

Pourquoi je vivais

 

 Et te rejoindre tout à l'heure

 Juste après le spectacle

 

© Patrick Chemin (1978)

 

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Les écrits dans l'arbre sur France Musique

France Musique consacre toute une semaine à mon dernier livre "Les écrits dans l'arbre"

C'est à retrouver sur le site de France Musique dans l'émission de Véronique Sauger "Les contes du jour et de la nuit" Du 27 au 31 mai 2013

http://sites.radiofrance.fr/francemusique/em/contes/emission.php?e_id=11&d_id=515008062

Bonne écoute à tous et mon amitié à vous

Patrick Chemin

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la fortune des puits

Je suis la pierre

 La margelle

L’âge et ses marelles

Je suis la pierre

 Le fragment

 La rivière pérenne

 Je suis le givre

La neige sur le printemps

 Le coloriste des météores

 Je suis la pierre

 Le lieu-dit de la naissance

 La margelle des morts

 Je suis ce baiser distant

 Sur les lèvres lisses

 Et loisibles de la gravité

 La jeune fiancée

 Je suis l'âge et le passé

 La cendre et le sens

 Le consentement des sages

 A l'usage du Crépuscule

 Je suis la porte de l'entre-deux

 La Tour de passe-passe des Dieux

 L'heure de la passée du bleu

 La viduité des cieux

 Je suis la pierre

 L’'eau dolente des obsessions

 La résurgence et la crue

 La touffeur et la pluie

 La saignée d'une vie

 Je suis la terre

 Le profond

 Le fatras des racines

 La fortune des puits

 

 

© Patrick Chemin (1996)

Extrait du livre « La fortune des puits »

Editions Zipoé

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L'éternité dans un souffle

Je suis allé au puits. Dans le pourpre du couchant. J’ai trouvé une femme nue. Qui es-tu femme nue ?
- Je suis ton écriture. Je suis dans tes mots. Je suis un poème. C’est toi qui m’as écrit. Tu ne te souviens pas ?
- Je n’ai plus de mémoire jeune femme. Je veux me replonger dans la profondeur et le silence du puits.
- Tu trouveras la vérité …
Je suis allé près des pierres. Dans le sanglot et la voix. Je suis allé sur le chemin de soi. J’ai trouvé un vieux moine. Qui es-tu vieil homme ? De quelle foi me parles-tu ?
- Je suis ton écriture. Je suis ce poème que tu as perdu. Tu ne te souviens pas ?
- Non je n’ai plus de mémoire vieil homme. Laisse-moi me perdre dans les pierres. Je veux revisiter la source et le don.
- Tu trouveras l’humilité …
Je suis allé près des arbres de mon enfance. Dans le rêve turquoise. Et là j’ai trouvé un grand chêne. Qui es-tu grand chêne ? Et quel langage me parles-tu ?
- Je suis ton écriture et ta frondaison. Je suis la sève de tes mots. Tu ne te souviens pas.
- J’ai une mémoire d’âne et je ne retrouve plus le chemin. Laisse-moi me perdre dans le vitrail des forêts. Je veux retrouver l’enfance.
- Tu trouveras l’innocence …
Je suis allé dans la nuit des mots et l’heure était tardive. J’ai rencontré un nain. Qui es-tu petit homme ? De quelle fin me parles-tu ?
- Je suis la mort me dit le nain. Je suis dans ton écriture depuis l’origine. Tu pensais avoir percé le mystère. Eh bien je suis là devant toi.
- Tu peux passer ton chemin petit nain. J’appartiens au pays de vivants.
- Tu trouveras l’éternité dans un souffle …
 
© Patrick Chemin (2012)   Extrait du livre « Les écrits dans l’arbre » Paru aux Editions Epingle à Nourrice   Le 17 avril 2013 © Droits réservés Editions Epingle à Nourrice
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Le collecteur de mots

C'était un collecteur de mots. Il allait par les rues du village et devant chaque porte demandait des phrases, des images, des silences. Oui des silences car il pensait que les mots étaient posés dans le vase des silences. Il allait dans le...s jardins et caressaient les plantes et susurrait des secrets aux différentes fleurs. C'était un secret différent pour chacune. Il était amoureux des ruisseaux et à chaque période de l'année il comparait leurs courants aux variations de la parole. Et parfois la sécheresse le faisait tantôt pleurer, tantôt rire aux éclats car il n'est rien qui demeure. C'était un collecteur de mots, il avait de grands trésors, un peu partout dans la vaste poche de son pantalon-mémoire. Pourtant il ne gardait rien pour lui, il était follement épris du partage. Il partageait les plus précieux, les plus rares mais aussi les mots de tous les jours. Il ne parlait pas au nom des autres, non les autres parlaient par sa voix et se reconnaissaient. C'était un collecteur des mots, un diseur de bonne aventure, un conteur de la vie dans la tristesse ou la joie. On pensait qu'il était un peu fou mais il avait sa place au sein du village. Un soir il est monté dans une étoile et c'est pourquoi il est fréquent certaines nuits d'entendre tomber des mots du ciel. Des phrases, des fragments, des poèmes, des silences. Peu importe, il faut tendre l'oreille dans l'obscurité. Il y a toujours suffisamment d'espoir et de vertiges dans cette nuit des mots
 
© Patrick Chemin (2011) Extrait du livre « Les écrits dans l’arbre » Paru aux Editions Epingle à Nourrice Le 17 avril 2013 © Droits réservés Editions Epingle à Nourrice
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Le marcheur

 
Pour celui qui gravit la montagne
il est déplacé de se prétendre le meilleur ou le seul
Mais il est sage de se concentrer sur son pas

La rumeur importe peu
pour celui qui est au plus pur de l'écriture
Peu importe son nom il écrit pour nous tous

Ecrire est un  chemin dans la montagne
Toute une vie ne suffit pas pour atteindre le sommet
Mais le bonheur du jour est là présent dans la connaissance
conscient de la douleur humaine
conscient de la beauté du monde
Vivre est ce passage abrupt
de la douleur à la beauté
de l'extase à l'impuissance
du silence à la sérénité
Ecrire concilie tous ces paysages dans le regard du marcheur



© Patrick Chemin (1993)

© Photo Cok Friess12272880681?profile=original

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