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Publications de François Speranza (134)

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Du 03 au 28-12-14, l’ESPACE ART GALLERY (35, Rue Lesbroussart, 1050 Bruxelles) termine l’année de façon flamboyante en vous présentant l’œuvre du peintre Belge LEONARD PERVIZI, laquelle n’en finira pas de vous émerveiller, tant elle déconcerte par l’élaboration de ses thématiques.

L’œuvre picturale de LEONARD PERVIZI se concrétise par un dialogue entre la forme et la matière, duquel émerge l’incision du trait. Car la caractéristique majeure de l’artiste est de se servir de la matière comme d’une sorte de voile derrière lequel apparaît la forme. Et cette forme s’avère être celle de la Femme, campée dans une série de postures évoquant le mouvement retenu à l’intérieur d’une suspension du temps.

La nature de ce mouvement oscille entre le plaisir et le tourment : l’un s’enchevêtrant souvent dans l’autre.

Les postures adoptées témoignent d’une force organiquement sculpturale. D’une lascivité à la fois crispée et relâchée, chaque partie du corps, scandée par rapport à la lumière, est mise en exergue pour faire ressortir l’ensemble de la composition à l’intérieur de l’espace.

A titre d’exemple, ANTHROPOMORPHE (90 x 70 cm – huile sur toile)

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étale le corps, alternant dans trois zones, chacune baignant dans une lumière différente. Il est rendu visible sous un éclairage constamment renouvelé pour le révéler au regard dans sa totalité sensible. Trois zones composent le corps : la tête, le coccyx (surélevé, créant une tension dans le volume), les pieds qui remontent (assurant un équilibre par rapport à la tête). Ces mêmes trois zones anatomiques s’enserrent dans trois espaces chromatiques : 1) la tête comprise dans une zone brun-foncé se mariant avec la chevelure du personnage. 2) le coccyx, à l’intersection des espaces brun-clair (en haut) et blanc (en bas). 3) une zone brun-clair comprenant les pieds. 

La signature chromatique de l’artiste se distingue par un contraste obtenu par des couleurs douces, portées par des variations sur le brun, rehaussées d’ocre et de vert réalisé à base de terre verte.  

Ce qu’il y a de fascinant dans la peinture de cet artiste c’est que, outre la mise en scène à l’intérieur du cadre, le « détail » explose littéralement aux yeux du visiteur en le laissant pantois. Cela est dû au fait que (nous l’avons mentionné plus haut) la matière sert d’écran au sujet pour que ce dernier se dévoile au visiteur. Car, ici, la symbiose entre l’œuvre et le regard s’affirme dans le temps : la seule voie menant au dévoilement d’une œuvre s’inscrivant dans une connaissance critique de l’Histoire de l’Art et de ses répercussions dans le monde contemporain.  

Mais que le visiteur ne se méprenne pas. Il ne s’agit pas d’une « visitation » des chefs- d’œuvres  d’antan mais bien de l’expression moderne d’une écriture passée.

LEONARD PERVIZI s’inscrit en droite ligne dans la lignée d’un Michel-Ange, d’un Raphaël ou d’un Leonardo da Vinci. Sa peinture est imprégnée de Renaissance, tant dans le chromatisme qu’il emploie que dans le traitement des sujets qu’il aborde.

Mais par-dessus tout, il descend du 16ème siècle par la finesse du dessin qu’il adopte avant toute réalisation finale. Car l’artiste est un dessinateur hors pair, quand nous sommes amenés à découvrir la beauté de ses dessins préparatoires*** destinés, après d’éventuelles modifications, à figurer sur la toile.

En guise de première approche avec sa filiation classique, observons EUROPE II D’ATOMIUM (140 x 220 cm – huile sur toile).

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Nous voilà plongés en pleine mythologie grecque puisqu’il s’agit d’Europe enlevée par Zeus travesti en taureau pour mieux la séduire par sa blancheur. L’œuvre nous pose la question suivante : qu’est-ce qu’un mythe ? Il s’agit d’un récit édificateur bâtit sur une légende, lequel tout en gardant les ferments de son histoire, se transforme au fil des cultures et des siècles. D’un épisode d’une grande violence (Zeus enlève Europe et du viol de celle-ci naîtra le futur roi Minos), l’artiste nous offre une vision carrément enchanteresse. L’écriture de la Renaissance se retrouve dans le traitement de la « scène répétée », en ce sens qu’Europe apparaît quatre fois dans l’espace scénique, à l’intérieur d’une farandole (trois personnages à l’avant-plan et un quatrième caché derrière les autres penché contre un mur). Observez cette scène attentivement. La nymphe évolue « à la manière » d’un Botticelli. Par la scansion des trois personnages à l’avant-plan, l’atmosphère de LA PRIMAVERA (1477-82) 

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est parfaitement palpable, avec, néanmoins, quelques légères modifications : à titre d’exemple, la posture cabrée du personnage de droite se retrouve placée à gauche dans le tableau de Botticelli. Qu’importe ? La dimension onirique d’un épisode joyeux se retrouve exprimée par l’expérience de la culture. Comme il s’agit au départ de la Grèce antique, une colonne dorique surmontée d’un chapiteau à volutes émerge comme un élément de soutien, à la droite du tableau. Et l’évolution du mythe dans tout cela ? Eh bien, il apparaît tout-à-fait à l’arrière-plan, à gauche de la toile, par une vue de l’Atomium, symbole de Bruxelles, Capitale de l’Europe. En cela, l’artiste, d’origine italienne ayant vécu longtemps en Albanie, affirme son appartenance à la Belgique dont il est devenu un ressortissant.  

INRI (200 x 250 cm – huile sur toile)

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constitue une étape importante de l’exposition. A nouveau, une interprétation contemporaine de la Renaissance est à l’honneur. A la fois par le thème abordé mais aussi par sa composition. Nous assistons à un jeu de droites et de diagonales. Les droites sont amorcées par les lances des soldats Romains, structurant le tableau en sept zones verticales. Cela est une référence discrète à la célèbre BATAILLE DE SAN ROMANO de Paolo Uccello (c. 1435), dans laquelle les lances des deux armées antagonistes structurent le tableau en une multitude de segments.

Les diagonales sont réalisées à la fois par la position oblique de la croix, laquelle laisse apparaître les pieds sculpturaux du Christ dans un rendu anatomique, accordant une part importante au supplicié dans sa souffrance corporelle ainsi que dans sa main « irradiant » le corps nu de Marie-Madeleine. Ce qui contribue à décentrer le Christ de sa croix, créant une troisième diagonale en joignant sur un même axe la main du crucifié plongée sur Marie-Madeleine à celle clouée sur la croix.  

D’autres personnages s’enserrent dans la composition. A la droite du Christ, le père de l’artiste est représenté, écrivant (il est en fait écrivain) et levant le doigt dans un geste socratique*** (dessin préparatoire),

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tandis qu’à ses côtés, apparaît la fille de l’artiste dont le prénom « Kate » est écrit dans un coin. Faisant face à Marie-Madeleine, se trouve Marie dans une gestuelle d’adoration. 

LEONARD PERVIZI associe dans un même élan créateur le corps avec le code, distillé dans une myriade de détails, enfuis sous l’écran de la matière, que le regard est censé découvrir. INRI ne fait pas exception à la règle. Une sémiologie iconographique, appartenant à l’univers de l’artiste, parcourt le tableau. A titre d’exemple, en haut, au centre de la croix, se profile un iris incrusté dans le bois. Il s’agit du symbole de la ville de Bruxelles, faisant référence à la nationalité du peintre. Dans le bas, à gauche, sous Marie-Madeleine, l’esquisse d’un petit flacon de parfum Chanel n° 5, faisant référence à la luxure de la vie antérieure de la courtisane apparaît, presque effacé par la matière. Sur le vêtement blanc de Marie, au niveau du ventre, une autre esquisse, celle d’une échographie présentant l’ombre d’un fœtus, témoin de la filiation entre Marie et Jésus, se présente au regard égaré du visiteur. Le Christ est couronné d’une auréole dont la forme rappelle celle de la cellule microscopique, à l’origine de la vie. En haut, à gauche de la toile, l’inscription latine « Legio omnia vincit » (« La Légion toujours victorieuse ») contraste avec l’acronyme « Inri » (Jesus Nazaremus, Rex Judaeorum – Jésus, Roi des Juifs).

Malgré son admiration inconditionnelle pour la peinture de la Renaissance, LEONARD PERVIZI se situe résolument dans l’art contemporain, à la fois par sa relecture personnelle du mythe mais aussi par sa définition de la forme. En quoi s’écarte-t-il définitivement de la Renaissance ? L’art classique se définit par une représentation iconographique totale, à la fois de la forme, mais aussi de ce qui l’enveloppe : la forme compte autant que le vêtement. L’art grec considère le corps aussi bien que le drapé qui l’entoure. La sculpture classique rivalise de génie dans la représentation des plis glissant sur le derme. Les siècles postérieurs à l’art grec n’ont fait que confirmer cette importance pour la forme. A certains moments de l’Histoire de l’Art, ce sont les plis qui, à l’extrême limite, rivalisent avec l’anatomie (ex. La conception du drapé dans l’art byzantin). Bien entendu, la Renaissance a amplifié cette recherche esthétique et les siècles qui l’ont suivie n’ont fait que la modaliser (ex. le drapé dans l’œuvre de Rubens).  

Concernant l’artiste, la conception des corps, dilatés dans une myriade de postures dans l’espace à l’instar de sculptures « dansantes » (car l’univers de la danse est intrinsèquement présent dans sa peinture), l’écartent du langage proprement antique.

De même, les visages conçus par lui sont « flous », presque inexistants (à l’exception de celui du personnage féminin d’ANTHROPOMORPHE, que nous avons évoqué plus haut. Il y a par rapport à ce dernier une volonté d’aboutissement). Le visage du Christ se réduit au seul volume. Aucune expression ne l’anime. De plus, il est imberbe et porte les cheveux courts, revenant ainsi vers une conception proche de l’iconographie paléo chrétienne, adepte du Jésus jeune et imberbe. S’éloignant, par conséquent, du statut iconographique néo platonicien du Christ empourpré et barbu que nous avons adopté, en Occident.  

En quoi l’artiste renoue-t-il avec la Renaissance ? Notamment avec la représentation du « jeu des mains » qu’il envisage comme un dialogue (POSE/ACADEMIE 140 x 110 cm – huile sur toile).

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Les mains sont, d’ailleurs, la « marque de fabrication » des maîtres de la Renaissance italienne : Raphaël est incontestablement le maître du genre. On parle des « mains raphaëlesques », pour désigner tel artiste concevant les mains comme le peintre. LEONARD PERVIZI éprouve, d’ailleurs, une immense fascination pour les mains, contrairement à la méfiance qu’il porte au visage (extrêmement complexe à réaliser), parce qu’il les considère comme l’extrémité du corps, ses propres limites.  

Cette peinture est une mise à l’honneur du corps, de l’anatomie considérée comme la composante majeure contenue dans l’espace. Ce qui lui permet d’effectuer une série de volutes et de contorsions, destinées à s’étirer, à se tendre et se détendre pour trouver sa propre existence spatiale. La position du corps tourmenté du Christ est fort proche de celle de la femme allongée, proposée dans INVITATION (140 x 110 cm – huile sur toile – Grand Palais 2012),

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laquelle pose nonchalamment la jambe droite sur la gauche, formant à l’instar du corps de la crucifixion, une diagonale. Le trait, sinueux, séparant la jambe de droite de celle de gauche crée le volume mis en relief par le traitement des chairs. Ce même trait sinueux se retrouve dans PEINTRE – PEINTURE (140 x 11O cm – huile sur toile – Grand Palais – 2012),

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lequel souligne, par le contour des corps, la matérialité originelle unissant dans une même argile, l’artiste et son modèle. 

Ce même corps est mis en relief par la matière, présentée ici comme une sorte de miracle réclamant sans cesse l’intervention du regard pour découvrir la forme cachée sous l’ombre. Contrairement à ce que d’aucuns pourraient imaginer, cette matière ne réclame jamais l’intervention technique du couteau : tout est réalisé au pinceau. L’on demeure abasourdi par cet amalgame pâteux, prenant à certains moments l’aspect d’une lave encore chaude mais qui déjà se fond au chromatisme et au dessin, révélant par là même, la matérialité spatiale de l’anatomie, non comme un corps perdu dans le néant mais retrouvé dans son humanité.  

L’artiste alterne entre compositions de grand format et miniatures.  

La miniature le rend plus libre dans le geste. Non pas que le résultat se réduise à l’esquisse, car les poses adoptées par les personnages sont les mêmes que celles figurant sur les grands formats, mais parce qu’une miniature lui offre l’opportunité d’exprimer quelque liberté dans la conception du dessin que ne le ferait le grand format, lequel « ne pardonne » aucune incartade, notamment dans le rendu des mains.

PEINTURE 3 (18 x 24 cm – huile sur toile)

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présente un jeu que l’on pourrait qualifier d’ « expressionniste » dans la représentation des mains et du pied, tous deux campés à chaque extrémité du corps, « divisant » ce dernier en une diagonale accentuée par la position du corporelle de la femme.

Notons que, comme à son habitude, l’artiste associe chaque « étape » de la réalisation anatomique à une zone chromatique différente : les mains (à l’avant du corps) sont irradiées de lumière tandis que le pied (à l’arrière du corps et à l’avant-plan par rapport au visiteur, est plongé dans une zone d’ombre). 

Sans doute est-il vrai de dire que si « expressionnisme » il y a dans son œuvre, il se situe dans le langage des mains : main du Christ irradiant Marie-Madeleine, l’index enlevé du père de l’artiste, geste d’adoration de Marie au pied de la croix (INRI). Pose de la main du modèle sur le coussin (POSE ACADEMIE). Atmosphère joyeuse de la farandole d’Europe enlevée par Zeus (EUROPE D’ATOMIUM). Geste de la main agrippée à la toile du peintre face à son modèle (PEINTRE-PEINTURE).

Il n’y a que dans INVITATION et ANTHROPOMORPHE que les mains disparaissent, soit derrière le corps de la femme (INVITATION) ou sous sa chevelure (ANTHROPOMORPHE), laissant le visiteur dans une interrogation rêveuse. Néanmoins, ne perdons jamais de vue que ce corps mis en exergue dans l’espace se conjugue avec toute une symbolique intérieure, laquelle s’articule dans une codification : corps et code au service de l’Art.  

LEONARD PERVIZI, qui  a adopté la technique à l’huile, peint depuis l’âge de treize ans. Il a étudié à l’Académie des Beaux Arts de Bruxelles. Depuis des années, Il participe à de nombreuses expositions (en Italie, au Palazzo Comunale, (Assises) - 2013, en France, au Grand Palais –  Salon des Indépendants (Paris) – 2011-2012, à la Galeria d’Arte Stefano Forni, à Bologne – Italie, entre autre), toujours à la recherche constante d’une communion avec les maîtres de la peinture occidentale.

L’on sent que, probablement, il ne s’écartera jamais de la figure humaine, même si ce figuratif-là offre parfois, grâce à cet écran de matière et au chromatisme tendre qui émoustillent le regard, quelque évanescence proche d’un monde aux senteurs éthérées.

 

François L. Speranza.

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Une publication
Arts
 
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Lettres

N.-B.: Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement. Mentionner le lien d'origine de l'article est expressément requis.

Robert Paul, éditeur responsable

 

A voir: 

Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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Leonard Pervizi et François Speranza: interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles 

(3 décembre  2014 - Photo Robert Paul)

Hommage à Leonard Pervizi

                                

                                                               Proposé et réalisé par Robert Paul

Vues de l'exposition: photos Espace Art Gallery


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JACQUES DONNAY : ITINERAIRES DE LA LUMIERE

                        JACQUES DONNAY :  ITINERAIRES DE LA LUMIERE 

 

Du 01-10 au 19–10-14, l’ESPACE ART GALLERY (Rue Lesbroussart, 35, Bruxelles 1050), nous présente une exposition consacrée à l’œuvre de Monsieur JACQUES DONNAY, un peintre et dessinateur Belge dont l’univers ne manquera pas de vous ravir.

Cette exposition se divise en deux thématiques. La première est intitulée EXUBERANCES. La seconde porte le titre de MARINES.

Quelle que soit la thématique envisagée, un lien esthétique les unit d’emblée, à savoir une immense maîtrise de la couleur. Il s’agit ici d’une couleur ne se suffisant pas simplement à elle-même, mais bien de l’existence d’une matière assujettie à la lumière pour créer une sorte d’état « second », donnant naissance à la luminescence. Cet état créatif, servant de base à sa recherche, est formé d’un chromatisme exacerbé, associant des tonalités volontairement imaginées comme « contradictoires », telles que le noir le plus sombre ou le rouge le plus violent.

A l’analyse du regard, le visiteur comprend que la condition sine qua non à l’existence physique de l’image c’est la lumière. Sans celle-ci, il n’y a pas d’image possible. Car elle met chacune de ses composantes en relief. (SKYLIGHT – 59 x 59 cm – huile sur toile).

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EXUBERANCES est un travail sur le choc de tonalités opposées aboutissant, par la seule maîtrise de l’artiste, à l’harmonie. Ce choc des Titans est la sève nourrissant la matière de l’œuvre. (LUMINESCENCE – 59 x 59 cm – huile sur toile).

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MARINES offre, plus que tout, une étude sur l’eau en tant que vecteur de mouvement. Le terme « étude » se révèle ici d’une incroyable exactitude, car chaque toile est pensée, en fonction de son espace scénique propre.

Les bateaux ne sont que des alibis (de première importance !), néanmoins, l’élément déterminant du discours de l’artiste s’avère  être l’eau. L’eau en tant que miroir d’où émergent d’innombrables reflets mais aussi l’eau pensée comme volume car elle occupe souvent les trois quart de l’espace scénique. (PORT DE BASTIA – 1,19 x 99 cm – huile sur toile)

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Parmi les centaines de détails qui foisonnent à l’intérieur de l’espace, il est à remarquer les deux pêcheurs, affairés à leur travail, portant chacun une marinière dont les stries rappellent les ondulations des flots. Tous deux sont figés dans leur geste, ce qui contraste avec la volonté de mouvement créée par les ondulations marines. Les bateaux, en rade, se marient à la ville, représentée à l’arrière-plan dans l’unité imposée par la note gris-blanc.

PORT DE ROUEN (99 x 79 cm – huile sur toile)

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accuse une autre conception du mouvement. Celle-ci se réalise dans la trajectoire de trois embarcations, dont chacune prend une direction différente de l’autre, trahissant la volonté de sortir du cadre.  Deux remorqueurs escortent un paquebot. Le mouvement est amorcé à la fois par celui situé à l’extrême droite du cadre qui file droit vers sa trajectoire. Tandis que le second, situé à l’avant plan, s’engage dans la direction opposée. Le paquebot, massif dans sa couleur rouge vif, file à toute allure droit vers le spectateur. L’artiste éprouve une énorme admiration pour le travail qu’effectuent les remorqueurs, d’où leur présence sur d’autres de ses toiles.

PAR BON VENT (59 x 59 cm – huile sur toile)

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propose également une étude sur le même sujet par la vue d’un bateau qui tangue. Les voiles ainsi que la partie supérieure de l’embarcation, d’un blanc laiteux, se marient à la couleur du ciel. Le mouvement se scande à la fois par le bateau qui tangue, par le vent qui gonfle les voiles ainsi que par les vagues secouant l’océan. Par opposition, les marins, immobiles sont réduits à de simples silhouettes. Ce qui accentue l’agitation émanant de la composition.

Nous avons noté, plus haut, la volonté du sujet de vouloir sortir du cadre. Il faut comprendre cela comme le dénominateur commun aux deux thématiques. Le visiteur remarquera que la composition se structure à l’intérieur de deux cadres : un cadre dans un autre. Cela exprime la volonté de l’artiste de donner différents plans à l’œuvre ainsi que d’affirmer un désir d’évasion. A titre d’exemple, les deux mâts du bateau, à l’arrière-plan du PORT DE BASTIA, dépassent du cadre, idem pour celui de l’avant-plan, à droite.

Ces deux thématiques ont un autre point commun, celui d’une interaction stylistique entre l’abstrait et le figuratif.

L’artiste s’exprime, indistinctement, dans les deux styles, à tel point que l’un s’imbrique naturellement dans l’autre.

CASQUE D’OR (59 x 68 cm – huile sur toile)

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est un excellent exemple de la présence de la figure humaine, jaillissant d’un univers abstrait, telle une épiphanie.

Qu’est-ce qui, dans cette œuvre, appartient au figuratif ? « Le corps de la femme », me direz-vous. Evidemment, néanmoins, il s’agit là d’un corps éthéré, en ce sens que ce qui relève de la dimension charnelle (le visage, les cheveux, le dos, la main), baigne dans une translucidité à la fois laiteuse (le dos) et dorée (les cheveux), répudiant le langage plastique « conventionnel » du rendu physique, pour aboutir à une dimension transcendant le simple sujet. Lorsque le regard remonte le dos pour aboutir au visage, coiffé de sa chevelure scintillante, tout se décline dans un chromatisme lumineux. Inversement, c’est dans la partie inférieure, celle qui enveloppe le corps, à dominante bleue et mauve, que nous atteignons un chromatisme sombre, délimitant drastiquement les deux zones du tableau en deux univers différents. La main, longue, d’une très grande présence plastique, assure la transition entre ces deux univers. Notez l’expression du visage : il baigne dans un calme « intemporel ». La pose inclinée du personnage est proche de la sculpture dans son rendu.

En réalité, si l’on effaçait toute trace du personnage féminin, nous nous retrouverions avec une œuvre de la même nature que SKYLIGHT. C’est par l’immersion du corps physique que le langage plastique adopte une transition esthétique concrète, à la charnière de deux écritures.

JACQUES DONNAY, qui est également un merveilleux dessinateur ainsi qu’un éminent paysagiste, a fréquenté l’Institut Supérieur Saint-Luc de Liège.

Il travaille essentiellement à l’huile. Pour maitriser la matière, il se sert aussi bien du couteau que de ses doigts. Dans le but de donner à l’œuvre la transparence souhaitée, il travaille l’huile comme l’aquarelle, cherchant constamment à conférer à la toile un fond blanc, sur lequel les couleurs se superposent.  

Sa démarche est proche de celle d’un peintre de la Renaissance, en ce sens que sa peinture fourmille de détails, maitrisés à l’extrême, en tant qu’assises du mouvement. Quant aux couleurs, la vie qu’elles secrètent atteint le seuil de leur nature.

A titre d’exemple, la note « jaune » possède, à la fois l’intensité incandescente du soleil jusqu’aux ultimes variations, aboutissant à la blancheur épurée, en tant que nature en soi. Cette alchimie savante, au sein d’une même tonalité, évoque souvent la lumière passionnée d’un Turner.

Tout cela oblige le visiteur à s’arrêter et poser son regard sur chaque œuvre qu’il rencontre.

Car il est impensable de passer furtivement devant ces toiles sans prêter attention aux infinis contours qui les parsèment et leur confèrent, à chaque arrêt, les clés humaines à leur « compréhension ».

François L. Speranza.

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Lettres

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A voir: 

Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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Jacques Donnay et François Speranza: interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles 

(1er octobre  2014 - Photo Robert Paul)

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               MIREILLE PRINTEMPS : DIALOGUE ENTRE L’ESPACE ET LE SUJET

Du 10-09 au 28-09-14, l’ESPACE ART GALLERY (35, Rue Lesbroussart, 1050 Bruxelles), en collaboration avec ASBL CANCER & PSYCHOLOGIE BRUXELLES, ont le grand plaisir de vous présenter une exposition consacrée à l’œuvre de l’artiste peintre Française Madame MIREILLE PRINTEMPS intitulée : OUVERTURE SUR L’ESPACE.

Le style de MIREILLE PRINTEMPS se singularise essentiellement, à la fois par une maîtrise de l’espace, par une écriture extrêmement lisse ainsi que par l’utilisation constante de la couleur bleu, traitée en une variation infinie de tonalités destinées à mettre en exergue le sujet.

Le sujet, envisagé par l’artiste, aborde principalement deux thématiques, à savoir la musique et la ville.

L’azur est assurément la note qui sied le mieux à l’univers sonore. Parmi les œuvres exposées, une seule fait le lien entre ces deux thématiques, à savoir NOCTURNE (80 x 67 cm – huile sur toile).

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L’artiste a été inspirée par un « Nocturne » de Chopin. Le sujet, un piano, dont nous n’apercevons que le clavier, est submergé de teintes issues du bleu pour se délier en une grisaille, rehaussée d’une note noire, étalée au centre de la toile, entrecoupée de tonalités rouge et orange.

NOCTURNE symbolise l’univers de la nuit. Univers que nous retrouvons exprimé dans la ville, tantôt en léthargie, tantôt grouillante d’activités. Mais à y regarder de près, la nuit n’a jamais quitté le discours esthétique de MIREILLE PRINTEMPS, en ce sens que le bleu usité comme tonalité majeure est un bleu « crépusculaire », non pas parce qu’il annonce la mort mais parce qu’il préfigure une mutation vivante et sensuelle vers la douceur nocturne.

Nous retrouvons cette particularité également dans SAXO (66 x 66 cm – huile sur toile).  

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SAXO représente une très belle interprétation de l’identité du sujet, en ce sens que c’est l’instrument qui est mis en valeur et non le musicien qui l’anime en le jouant. Le côté « soleil » de l’instrument éclipse totalement le musicien qui n’existe qu’en tant qu’ombre. Son visage, à peine esquissé, s’enserre entre le chapeau et le col de la veste qui le contiennent.

L’espace structure le sujet.

Dans ses vues nocturnes, l’artiste « élague », en quelque sorte la construction architecturale de la ville, pour ne la faire apparaître que de loin.

REFLETS (67 x 56 cm – huile sur toile)

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représentant la ville de New-York la nuit, peut être mis en parallèle avec PARIS – ILE DE LA CITE (87 x71 cm – huile sur toile),

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dans lesquels l’ensemble architectural se révèle comme un îlot de lumière à l’horizon, scintillant dans les reflets du fleuve. Cette « mise à distance » du sujet est en fait une façon de le circonscrire dans l’espace afin d’en faire surgir, après exploration par le regard, chacune de ses composantes, lesquelles ne se révèlent que cachées par le flou maîtrisé de la couleur.

TIME SQUARE (56 x 67 cm – huile sur toile)

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et PARIS – ARC DE TRIOMPHE (60 x 71 cm – huile sur toile),

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traduisent un aspect essentiel de la technique de l’artiste : MIREILLE PRINTEMPS déclenche tout d’abord son appareil photo afin d’obtenir un cliché. A partir de celui-ci, elle réalise sa toile. A quoi peut-on s’en rendre compte ? Tout simplement par l’observation de détails tels que les flashes imprimés par les phares des voitures la nuit, lorsque celles-ci circulent à toute vitesse.

Une œuvre tout-à-fait à part apparaît avec VENISE (56 x 67 cm – huile sur toile)

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Elle figure à part, d’abord parce qu’elle s’évade du bleu en tant que signature de l’artiste mais aussi parce que le visiteur peut se rendre compte de sa maîtrise à donner du corps et du relief avec un minimum de matière étalée au couteau. La scène baigne dans une atmosphère laiteuse que rehaussent, dans une splendide association, le brun et le rouge des toits et des murs portants des maisons. L’importance de la lumière diaphane fait émerger au regard la ville des eaux.

Malgré six longues années passées aux Beaux Arts, l’artiste n’en a gardé aucune influence. Elle ne s’exprime que par son propre langage, traduit par l’amour inconditionnel qu’elle porte à la couleur bleue.

Elle débute chaque composition en réalisant un fond lavis sur la toile et y applique par la suite un dessin au pastel gras en guise d’ébauche. Lorsqu’elle a son sujet, elle le travaille et le termine par une superposition de glacis, ce qui constitue un très long travail, pour obtenir la transparence voulue. Une fois les glacis secs elle vérifie que le sujet soit comme elle le souhaitait.

Cette attention particulière concernant l’espace ne peut s’imaginer sans la présence physique de la nuit.

Indissociable de la nuit, l’espace met la ville en relief mieux que ne le fait le jour, car il souligne quantité de détails que ne le ferait la lumière diurne.

Cela revient à dire que l’espace est le complément du sujet, en ce sens qu’il l’englobe dans un lointain assez proche pour que le regard en saisisse toutes les variantes.

Cette atmosphère lointaine résulte de l’amour que l’artiste éprouve pour l’œuvre de Turner au sein de laquelle tout évolue dans un flou magique.

Même s’il s’agit exceptionnellement d’une vue diurne, VENISE s’adapte parfaitement à cette esthétique. Travaillée avec le plat du couteau, les toits existent par leur massivité sans pour autant se distinguer individuellement. Le blanc de titane usité pour les coupoles de la Basilique de Saint Marc se fond dans la lumière diaphane.

Le nocturne REFLETS, obéit également à ce procédé car volumes et lumières, conçus à la fois avec le plat du couteau et au pinceau large, distinguent parfaitement chacun des éléments, contrairement au diurne VENISE, lequel, avec la même technique, aboutit à un résultat drastiquement différent.

En plus d’être une très grande artiste, MIREILLE PRINTEMPS se révèle être une exploratrice de la palette. A travers sa maîtrise technique et sa sensibilité, elle perce et traque la couleur bleu jusqu’à ses derniers retranchements.

François L. Speranza.

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N.-B.: Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement.

 

A voir: 

Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

 

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Mireille Printemps et François Speranza: interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles 

(10 septembre 2014 - Photo Robert Paul)

 

 

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                                 VOYAGE ENTRE LE MASQUE ET LE VISAGE

 

Dans le cadre d’une collaboration avec CANCER & PSYCHOLOGIE ASBL BRUXELLES, l’ESPACE ART GALLERY (Rue Lesbroussart, 35, 1050 Bruxelles) a le plaisir de vous présenter, du 10-09 au 28-09-14, l’œuvre du plasticien Français STEPHAN GENTET, intitulée : IMPRESSIONS SUR TOILES NUMEROTEES.

L’œuvre de Monsieur STEPHAN GENTET a de quoi désarçonner le visiteur, tant  par la force qu’elle émane que par l’élaboration, sensible et intelligente de la thématique qu’il aborde, à savoir une investigation tout intérieure du visage humain.

Il s’agit, en fait, d’une communion mystique entre le masque et le visage.  

Le sujet sur la toile évoque, notamment, l’élaboration des têtes Maoris ainsi que le masque africain, sur lequel se dynamise le mouvement par des variations chromatiques sous forme de lignes torsadées, lesquelles « circulent » sur l’ensemble du faciès. 

Ces lignes, tout en déformant volontairement les traits, affirment la psychologie du masque, manifestant par là même, la nature intime de la « persona » de celui qui le porte et que bien sûr, nous ne voyons pas.

Si le volume de la tête demeure identique, l’expression du visage change constamment par la finesse du traitement numérique, car l’artiste s’exprime principalement par cette technique. Ce qui fait que l’œuvre évite précisément le piège du motif répété jusqu’à la lassitude. Chaque masque porte en lui la nature de sa propre existence, par toute une série de signes identitaires qui lui confèrent, à chaque fois, une singulière spécificité.

Ces masques-visages sont tous burinés, labourés par des traits rappelant, notamment, les scarifications ethniques des sociétés traditionnelles africaines. Le résultat fait que chaque œuvre est différente de l’autre. Que ce soit par une série de pointillés étalés sur le visage ou par l’élaboration d’un réseau de sillons, l’expression du masque se divise, globalement, en trois catégories :

Le masque souriant – le masque triste – le masque impassible.

 

Le masque souriant associé au masque triste se retrouve parfaitement exprimé dans l’art grec, lequel par cette dualité, affirme l’antagonisme constitutif de la psyché humaine. Le comique indissociable du tragique vers un destin commun : la naissance du mythe, ciment de la conscience.

Le masque impassible accuse l’absence de passion.

Le traitement numérique est là pour appuyer ces trois attitudes.

La fonction de l’œil humain émergeant des orifices du masque est également primordiale. A l’instar du sourire, trois attitudes alternent dans le rendu du faciès :

l’œil clignotant – les yeux fermés – les yeux ouverts   

Y a-t-il une symbolique occulte derrière ces sillons lumineux ou est-ce simplement la fantaisie de l’artiste qui s’exprime sur un fond totalement noir ?

Aucune symbolique ne vient structurer ce récit de lumières et de couleurs. STEPHAN GENTET aborde par cette écriture un style lourd de conséquences parce qu’il dévoile chaque facette de son être : l’autoportrait.

Comme le soutenait si justement Germain Bazin, l’autoportrait est un pas capital dans l’histoire de l’Art car il sanctionne la manifestation périodique des états de la conscience. Plusieurs peintres ont excellé dans l’autoportrait mais deux d’entre eux l’on porté à son zénith, à savoir Rembrandt et Van Gogh.

Le miroir permet au peintre de s’abandonner à une phase introspective et réflexive dans l’action de se voir tout en se regardant. Cette symbiose entre le masque et le visage dont les yeux exorbités percent l’âme de l’artiste, exprime une étape de la conscience à chaque toile que croise le regard du visiteur. Mais ici, l’autoportrait va, si l’on peut dire, au-delà de la simple expression plastique de la conscience. Il s’agit, selon les mots de l’auteur, d’une « manifestation d’autodéfense », car en 2008, les premiers symptômes de la maladie de Parkinson commencèrent à se manifester et en 2011, il commença à peindre.

A se peindre, alliant autoportrait avec autodéfense.

 

Par son autoportrait, Rembrandt signale des étapes périodiques d’états d’être associés aux événements de sa vie, sans pour autant les enjoliver ou intervenir de quelque manière sur leur déroulement. Ces autoportraits sont des constats. Lorsque Van Gogh se représente amputé d’une oreille, il ne cherche pas à intervenir sur l’événement par le biais de la pensée magique, plastiquement restituée. Il ne « maquille » rien. Comme Rembrandt, Il constate, c’est tout. Son regard fixe le spectateur sans la moindre plainte ni la moindre volonté de questionnement.

STEPHAN GENTET, lui, « intervient » dans la manifestation du processus évolutif de l’événement. Il influe en créant, devenant ainsi le démiurge de sa propre existence. Il peint. Il se peint existant.

De ces masques-visages, empreints d’une ethnicité mythologique, se dégage une force tribale, laquelle, apporte à l’artiste une sorte de « résilience », comme il se plaît à le dire.

L’idée d’autodéfense se retrouve également dans les titres qu’il donne à ses œuvres. Le terme warriors (guerriers) revient pour chaque toile comme un leitmotiv. Ces « guerriers » symbolisent la pulsion de vie de l’artiste face à la maladie.

Mais cette force tribale qui ressort de ces masques-visages manifeste également une quête inhérente à tout artiste : celle de l’Homme universel arborant mille visages de l’humain, se démultipliant à l’infini et se projetant dans l’humanité en une sublimation du réel.

La maladie s’avère être une sorte de résurrection car elle opère sur lui une forte propension à transmettre son état psychique. De 22 heures à 4 heures du matin, il travaille, comme il le dit lui-même, dans une « attitude semi-consciente », en ce sens qu’il ressent les choses puis les dessine. Il arrive même qu’il ne soit pas très bien réveillé et le résultat devient, dès lors, aléatoire. Cela explique le fait qu’il travaille toujours en musique.

GOLDEN MASK (65 x 85 cm)

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représente un visage malade, buriné par une série de cratères de taille diverse (que l’on peut considérer comme l’image de pustules).

Dissimulé à hauteur du front, se déploie un personnage extrêmement stylisé, à la forme diabolique aux bras et au corps étirés, symbolisant la maladie installée dans l’organisme.

LIGHTNING WARRIORS (65 x 86 cm)

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représente une série de têtes « striées » par des faisceaux de lumière dorée. Ces stries symbolisent les scarifications rituelles des cultures négro-africaines que l’on retrouve tant sur le corps que sur les statuettes. Ne perdons jamais de vue que dans les sociétés traditionnelles, la statuette est le corps de l’esprit que l’on invoque.

Observons ce contraste saisissant entre l’univers lumineux de l’artiste avec le fond totalement noir du tableau. Ce dernier exprime le noir le plus primitif, celui de l’univers sidéral, à partir duquel émerge le masque-visage.

Pourquoi STEPHAN GENTET utilise-t-il le numérique ?

L’artiste avait commencé à dessiner sur un I Pad. Il aimait, par-dessus tout, le contact du crayon sur la tablette. Cette succession de masques-visages trouve son origine lorsqu’il dessinait, à ses débuts, des visages d’hommes jeunes, conçus à partir de ce qu’il nomme « une musique rythmée », à la fois souple et fluide.  

La trace de ce rythme musical se retrouve dans les scarifications actuelles, à la fois chromatiques et lumineuses. Ensuite, intervient la phase de colorisation qu’il applique sur ces visages de façon, chaque fois, différente.

Qu’est-ce qui, dans la morphologie de son œuvre, appartient au visage et qu’est-ce qui appartient au masque ?

Dans cet anthropomorphisme créateur, l’artiste, après avoir conçu les contours plastiques du masque, conserve, à partir de son autoportrait de base, le nez et la bouche pour les habiller de sillons lumineux, comparables à la patine sacrificielle usitée dans les sociétés traditionnelles. C’est à partir de la force avec laquelle il conçoit les traits du visage ainsi que par le transfert successif du dessin vers d’autres logiciels qu’il joue sur l’épaisseur du rendu en l’agrémentant d’un aspect granuleux. Une raison supplémentaire au fait qu’il aime le numérique est que cette technique donne droit à des erreurs que l’on peut rectifier en y apportant un maximum d’autres possibilités. Il lui arrive de concevoir ses dessins sur plusieurs jours et ne les retouche que très peu.

L’artiste qui s’exprime principalement à partir de la toile, aimerait s’attaquer à présent à la 3ème dimension, en envisageant la sculpture à partir de ses dessins, par le biais d’outils logiciels, car ce qu’il réalise est une extension de sa pensée qu’il aimerait voir se matérialiser.

Il est à signaler qu’il existe, sur YOUTUBE, une séquence animée dans laquelle les masques dont on perçoit derrière, la présence du visage de l’artiste, prennent vie sous forme de contorsions faciales.

                                    

Lorsqu’on lui pose la question de savoir s’il préfère voir les masques cinématographiquement animés plutôt que fixés sur la toile, l’auteur répond en affirmant sa volonté de vouloir engager une problématique philosophique, dans son refus absolu du statisme imposé par le tableau. Malgré le fait que le mouvement, en matière d’arts plastiques, résulté d’un rapport « sensoriel » entre le regard du visiteur et l’œuvre d’art, ce refus du statisme doit être compris comme un mécanisme de défense contre la maladie de Parkinson qui le fige.

STEPHAN GENTET a une formation d’économiste. Bien qu’autodidacte, il a néanmoins, pratiqué le dessin entre douze et seize ans, dans une école d’arts plastiques.

Après avoir vu ses œuvres, vous serez, à coup sûr convaincus que cet excellent artiste n’est qu’à l’aube de son existence et que bien des lumières sillonneront, à l’avenir, d’autres univers.

François L. Speranza.

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N.-B.: Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement.

 

A voir: 

Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

 

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Stephan Gentet et François Speranza: interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles 

(10 septembre 2014 - Photo Robert Paul)

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MARC LAFFOLAY : LE BOIS ET LE SACRE

L’ESPACE ART GALLERY (Rue Lesbroussart, 35, Bruxelles 1050) vient de consacrer une exposition à l’œuvre du sculpteur Français MARC LAFFOLAY, intitulée : PEINTURES ET SCULPTURES.

Titre en apparence très sobre mais qui trouve la clé de sa simplicité par la sensation qui frappe derechef le regard du visiteur, à savoir, que ce qui caractérise l’œuvre de Monsieur MARC LAFFOLAY, c’est avant tout, une dimension primitive qu’il faut comprendre dans l’acception étymologique du terme latin primitivus : originel.

Qu’est-ce qui confère à l’œuvre de ce sculpteur ce sens originel ? Assurément ce sentiment de sacralité qui se dégage de ses sculptures. Ces bois sculptés ont quelque chose de sacré, de l’ordre du mysticisme émanant des portes de greniers dogon, qu’évoquent les entrelacs conçus en clairevoie ou des fers bambara dans l’extrême finesse de leur stylisation.

Ces sculptures sont en concordance avec ce que d’aucuns nommeraient des « dessins » mais que l’artiste préfère qualifier d’empreintes.

La parenté stylistique entre les entrelacs sculptés et les motifs de ces encres est flagrante.

MARC LAFFOLAY nous offre un art brut, lequel de par sa nature, possède les traits de l’art primitif, en ce sens que l’artiste intervient de toute sa force vitale pour le façonner, lui donner une identité autre, tout en le maintenant dans la vérité de son écorce. La relation qu’il entretient avec la matière première est à la fois de l’ordre du tactile et de la verticalité.

Son travail trouve sa philosophie dans l’évidement, c'est-à-dire dans l’économie du volume. L’équarrissage du bois lui assure la forme et l’évidement lui confère une place dans l’espace. A cela s’ajoute une ultime étape : celle du feu, consistant à augmenter le dépouillement déjà amorcé dans l’évidement de la matière. L’artiste brûle le bois dans le but de provoquer des accidents qu’il faut comprendre comme des cassures destinées à éliminer les impuretés de la matière mais aussi à faire partie intégrante de la création. Car l’artiste ne répudie nullement les accidents. Il les intègre en tant que processus créatifs.

Ils deviennent, dès lors, partie constitutive de l’œuvre. En cela, son art brut trouve sa part de sacré, à l’instar des œuvres créées par les sculpteurs Africains.

En effet, lorsque ceux-ci ont fini de façonner une pièce, ils apportent une étape finale dans l’aspersion de sang sacrificiel sur la statuette pour que celle-ci s’anime de pouvoirs magico-religieux. Feu et sang revêtent la puissance vitale de l’acte créateur. Acte empreint de sacralité par excellence.

TROIS FUGUES (chêne/technique mixte/h : 196 x 1.41,5 x ép. 5 cm)

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est une pièce qui possède trois espaces évidés, conçus en clairevoie pour permettre à la lumière de la transpercer.

FLUGO (l’ENVOL, en espéranto) (chêne/technique mixte/h : 196 x 1.14 x ép. 3,5 cm)

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est une œuvre qui par sa délicate stylisation tend vers une verticalité mystique. Cette verticalité correspond à une dynamique, l’essence même de….l’envol !

L’artiste l’explique par une phrase de Teilhard de Chardin : "tout ce qui s'élève converge".

MARC LAFFOLAY est un sculpteur qui pose des empreintes sur papier. Sa démarche ne diffère pas de celle qu’il effectue face à une sculpture.

La dimension manuelle se manifeste à nouveau lorsqu’à partir de plaques de bois pensées comme surfaces, il place dessus le papier enduit d’encre. A l’aide de son poing, il frotte de toutes ses forces pour créer des empreintes, une trace, un cheminement.   

LA GRANDE ASCENSION (issue du cycle LA BALADE DU PETIT POIS) (encre sur papier/106,6 x 1.64,8 cm),

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exprime le côté aléatoire de la vie dans la progression symbolique de petits traits, du bas de la composition à son sommet. L’idée délicatement stylisée du cheminement et de la progression, apparaît en filigrane, au regard invité à le parcourir.

L’artiste, qui a une formation de pianiste de jazz, est en matière de sculpture totalement autodidacte. Il a débuté la sculpture dès l’âge de seize ans.

Cette formation de musicien de jazz n’est pas anodine dans son processus créatif.

Un mariage mystique unit le jazz à la sculpture comme à la peinture ou à la littérature. Le jazz se retrouve tant dans la peinture d’un Matisse que dans la poésie d’un Boris Vian.

FLUGO présente des réminiscences jazzistiques inscrites dans les excroissances plastiques structurant la pièce, lesquelles rappellent la particularité du staccato, en matière de musique.

Le rythme syncopé de la phrase musicale se retrouve exprimé dans le bois stylisé de cette œuvre. La phrase en staccato-stylisation conjugue mouvement et immobilité, rythme et silence.

Ces excroissances plastiques et sonores évoquent tant le monde fabuleux des esprits des origines que Miles Davis.

MARC LAFFOLAY sculpte les silences pour les rendre à la lumière du son !

N’est-ce pas là l’image du démiurge insufflant, par la lame et le feu, la vie à la matière inerte ?

François L. Speranza.

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N.-B.: Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement.

 

A voir: 

Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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Marc Laffoley et François Speranza: interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles (30 août 2014).

(Photo Robert Paul)

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                     FLORENCE PENET OU LA COULEUR FAUVE DES REVES

 

Du 21-05 au 08-06-14, se tient à l’ESPACE ART GALLERY (Rue Lesbroussart, 35, 1050 Bruxelles) une exposition consacrée à l’œuvre de Madame FLORENCE PENET, intitulée ENTRE REVES ET REALITE. Il s’agit d’une jeune peintre Française dont la sensibilité se marie à l’onirisme par une sémantique dictée par la couleur.

A l’instar du « Voyage en Italie », à la Renaissance et de celui en Orient, au 19ème siècle, l’Imaginaire est-il devenu, aujourd’hui, l’étape majeure de l’exploration créatrice ? Un imaginaire servant d’humus à un état d’Etre que FLORENCE PENET qualifie de « rêve ». La particularité de cette exposition réside dans un fait révélé de façon extrêmement discrète, susceptible néanmoins d’en dire très long au sujet de l’artiste, à savoir l’adéquation existante entre les titres et les œuvres qu’ils mettent en exergue. D’emblée dans l’intitulé de l’exposition, l’artiste donne un pluriel au mot « rêve », tandis que le mot « réalité » demeure au singulier. Est-ce à dire qu’il n’y a qu’une seule réalité dans l’univers de l’artiste ? Le terme « rêve » est fort approprié  car tout dans son œuvre se définit à partir, non pas d’un brouillard, mais bien d’une perception « brouillée », offrant une image qui ne serait pas « mise au point ». Le visiteur doit lui-même « régler » sa focale oculaire pour la rendre perceptible. Mais faut-il réellement mettre ces images « au point » ? Ne sont-elles pas assez vivantes, oniriques et réelles en leur état ? Leur « réalité » est faite de suggestions et la sensibilité du visiteur fait le reste en leur conférant une histoire, voire une fonction qui la raccroche à quelque chose de connu. L’évocation de tout ce que nous portons en nous saute aux yeux du visiteur dans toute la gamme des tonalités. L’artiste ne se cantonne pas dans la monochromie. Les couleurs qu’elle utilise varient du rouge vif : FAUVES (80 x 80 cm – huile),

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INCANDESCENCE (80 x 80 cm – huile sur toile)

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au bleu en différentes tonalités : DREAMING (73 x 92 cm – huile sur toile),

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en passant par le jaune, le blanc : PARFUM D’ORIENT II (50 x 65 cm – huile sur toile)

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et le vert en dégradés : MYSTIQUE (73 x 92 cm – huile sur toile).

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A cette vision brouillée s’ajoute, d’un point de vue conceptuel, un déphasage prémédité en ce qui concerne la mise en perspective d’une idée d’architecture planifiée dans ce que l’artiste nomme les « carrés déstructurés ».

Il s’agit d’une conception architecturale augmentant la perception d’un déséquilibre contrôlé pour mieux égarer le regard du visiteur, à l’instar de PARFUM D’ORIENT II et III (déjà mentionnés). Ces « carrés déstructurés » trouvent leur origine dans INCANDESCENCE (également mentionné), à peine perceptibles dans l’effervescence de la dominante rouge. Ces carrés servent de structure de départ pour débuter la construction picturale. Ils contribuent à donner également un côté « vieilli » (comme elle l’avoue) à la toile. Ce côté « vieilli » est intéressant car il renforce la dimension onirique de l’intemporel.

L’œuvre de FLORENCE PENET se singularise par une abstraction toute personnelle. Les teintes usitées conduisent vers un lyrisme où l’émotion se scande en motifs chromatiques à un point tel que l’on pourrait presque parler  de couleurs musicales, tellement les images sont évocatrices d’atmosphères et de sons. 

Néanmoins, dans toute création, il y a (souvent) un titre. Et ce titre fait partie intégrante de l’œuvre. Comme nous l’avons noté plus haut, il l’accompagne et dans bien des cas lui confère un sens. Concernant cette artiste, les titres deviennent des invocations.

PARFUM D’ORIENT  II (avec ses senteurs arabesques), DREAMING (évoquant une mise en scène de l’onirique -  déjà mentionnés), PORTE DE NACRE (54 x 73 cm – huile sur toile –

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où la note blanche, presque diaphane, règne en maîtresse), mettent en quelque sorte, le visiteur « sur la piste ». Bien sûr, les émotions exprimées sur la toile appartiennent à la créatrice, celle-ci insiste sur le fait que le regardant voit dans ses œuvres ce qu’il veut bien y voir. Mais le fait de les intituler avec une telle précision interprétative fait que celui qui les regarde se reconnait, indépendamment de sa volonté, dans le voyage initiatique de l’artiste. 

DREAMING offre une subtilité complémentaire concernant le titre : il est écrit au present continous de la grammaire anglaise, ce qui laisse penser que l’image ne s’arrête pas à sa seule existence : elle se poursuit à la fois par sa présence mais aussi dans le rêve du visiteur. Elle se poursuit même au-delà de toute reconnaissance, par le simple fait qu’elle a été peinte. 

FLORENCE PENET se laisse guider par la conception de couleurs « improbables » comme elle aime à le dire, pour atteindre l’harmonie.

Ce flamboyant dégradé de vert nous offrant une image paradisiaque de la vision dont l’artiste se fait du MYSTIQUE (73 x 92 cm – huile sur toile),

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plaide pour cette « improbabilité ». Une fois encore, il y a adéquation entre l’œuvre représentée et le titre qui la définit dans un imaginaire commun unissant le peintre et le spectateur.

Cette œuvre constitue à elle seule un tour de force : l’utilisation du bronze dans la partie supérieure droite obscurcit l’espace pictural à bon escient pour se répandre dans la partie inférieure droite. Le centre de la toile est irradié par le doré jusqu’à descendre vers la partie inférieure gauche. L’espace restant constitue une expérience à la fois alchimique et spirituelle dans la création d’un ensemble de dégradés de vert. Il fallait pour ce faire doser adéquatement le doré pour que le contraste avec l’ensemble chromatique aboutisse vers l’harmonie, en évitant les effets disgracieux dû au choc incontrôlé des couleurs. Remarquons l’absence de couteau pour travailler la matière : tout est lisse comme la surface d’un lac.

Ce qui contraste radicalement avec DREAMING dont la matière épaisse domine à proprement parler l’ensemble de la composition.

Il y a, outre la symbolique des couleurs, une véritable mystique de ceux-ci.

Le doré, la note jaune portée à son extrême symbolisant déjà le besoin d’amour et de chaleur humaine, transpose ici la fascination pour l’Orient mystique dans une approche participative de l’âme.

Le rouge fauve d’INCANDESCENCE nous dévoile la passion. Le bleu de DREAMING est une métaphore de l’eau conduisant au bout du rêve, lequel n’est pas encore le réveil mais l’état onirique porté à sa plénitude.

Autodidacte et fière de l’être, FLORENCE PENET peint par passion. Ayant une formation juridique, la peinture n’est pas qu’un simple « à-côté » mais bien une activité qui absorbe actuellement la totalité de son temps.

Elle a toujours baigné dans un univers où l’Art bénéficie d’une importance majeure. Sa mère a fréquenté les Beaux Arts. Ce qui, même autodidacte, lui a assuré une formation sérieuse.

Elle travaille essentiellement à l’huile. Après avoir réalisé beaucoup de glacis au niveau du fond, elle multiplie les couches en leur assurant les mêmes teintes dans le but de leur conférer une harmonie.

Elle utilise très peu le couteau. Concernant la conception de la matière, elle utilise parfois de la poudre de marbre comme pour les légers dégradés clairs de DREAMING se mêlant au bleu.

Ayant commencé par l’abstrait, elle s’est dirigée vers un univers qui fait appel à la concrétude du connu comme dans la savante utilisation du bleu rappelant un état entre le ciel et la mer.

Aucune préméditation ne l’anime. Une fois devant sa toile, elle se laisse guider par cette force qu’interprète l’instrument de la couleur. Le rêve n’est pas préconçu. Il s’agit d’un art brut, non pas dans le sens où l’entendait Dubuffet (un art conçu par un autodidacte privé de contexte culturel) mais bien dans le sens qu’il n’a subi aucune gestation intellectuelle. Comme le disait si justement Pier Paolo Pasolini : « Pourquoi peindre une image qui s’est déjà matérialisée dans le rêve ? N’existe-t-elle pas déjà ? ».   

Il n’y a plus aujourd’hui aucune ligne de démarcation entre l’abstrait et le figuratif dans le parcours de l’artiste. Et ses couleurs « improbables » rendent notre perception d’une fluidité certaine car si les rêves sont multiples, la réalité, seule et rigide, mais déformée par la force de la couleur, les transcende tous et les rend « matériels » sur la scène de la toile.

Tout dans l’œuvre de FLORENCE PENET se mélange dans la pâte de l’émotion.

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Collection "Belles signatures" (© 2014, Robert Paul)

François L. Speranza.

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N.-B.: Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement.

 

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Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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Florence Penet et François Speranza: interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles (21 mai 2014).

(Photo Robert Paul)

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                         LE SURREALISME ANCESTRAL DE WILLIAM KAYO

 

Du 30-04 au 18-05-14, l’ESPACE ART GALLERY (35, Rue Lesbroussart, 1050 Bruxelles) organise une exposition consacrée à l’artiste Camerounais WILLIAM KAYO, intitulée LES PIECES DU TEMPS.

Dire de l’art contemporain africain qu’il résulte d’un brassage entre les expressions artistiques autochtones et les principaux courants occidentaux est effectivement fort juste, néanmoins, n’en va-t-il pas de même pour toute forme d’art en pleine régénérescence ? Qu’aurait été l’art Français du début du 20ème siècle si ce dernier avait refusé d’explorer les plastiques ainsi que les mythes océanien et africain ? De quelle autre façon aurait-il pu prendre conscience de ce qu’André Malraux appelait : la prise de conscience de la totalité de l’Art ?

Il y a un certain nombre d’années, dans une galerie bruxelloise en vogue, se tenait une exposition sur l’art contemporain des Schona du Zimbabwe. C’était, à l’époque, l’une des premières tentatives de présentation d’œuvres contemporaines africaines. Et ce choix n’était en rien anodin, en ce sens que concernant l’histoire des arts traditionnels de l’Afrique Noire, l’art Schona représente une exception car il s’agit d’une des rares sculptures lithiques, par opposition à la tradition plastique sur bois, que l’on retrouve dans la totalité du continent africain. Contrairement à ce que d’aucuns imaginaient, les réactions furent pour le moins mitigées, en ce sens que le sentiment de regarder des pièces issues d’artefacta occidentaux auxquels l’on aurait apporté « une touche » africaine, se dégageait. En fait, l’idée sous-jacente au sortir d’une telle exposition était la suivante : ce qu’a fait un Brancusi, un sculpteur Africain peut le faire aussi ! Evidemment, l’Art du 20ème siècle fut régénéré par l’ « Art Nègre » mais force était de constater, à l’époque de cette exposition sur l’art Schona contemporain, que quelque soixante-dix ans plus tard, les artistes Africains assuraient un « retour à l’expéditeur » en bonne et due forme. Heureusement, et ce depuis maintenant plusieurs années, nous n’en sommes plus là ! Une voie a été tracée laquelle recule constamment les sentiers battus.

 

Et le résultat s’exprime avec un créateur tel que WILLIAM KAYO.  

De quelle manière considérer son œuvre au sein de l’histoire de l’art africain contemporain ? Il s’agit d’un artiste qui, adolescent, entra de la façon la plus anodine, en contact avec l’art de Salvador Dali tout simplement en feuilletant un journal. Ce contact, absolument fortuit, le conduisit à aimer follement le Surréalisme, au point de s’engouffrer dans cette voie comme première approche créative jusqu’à trouver, au fil du temps, son propre langage à l’intérieur d’un substrat culturel fourmillant de traditions à la fois orales, musicales et plastiques.

Au premier regard, une alchimie subtile entre l’Afrique et l’Occident perce des œuvres de ce plasticien. Nous somme subjugués par la maitrise avec laquelle ce dernier appréhende l’espace et la lumière.

SOLITUDES (80 x 80 cm – technique mixte)

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est une évocation scénique d’une Afrique ancestrale, enveloppée dans un halo en fusion, composé de blanc évanescent se mariant au vert virant vers le jaune-clair. Les personnages évoluent dans un décor rural. Dans cette œuvre, l’on remarque une interpénétration réussie entre le dessin (ce fut sa première forme d’expression) et la peinture. Cela apparait flagrant avec le rendu physique du jeune agriculteur, lequel est très peu atteint par la polychromie dont les contours à la mine structurent les lignes directrices, tant pour l’anatomie que pour les vêtements. Une zone se révèle vers le haut, à droite du tableau, laissant apparaître ce qui ressemble à une ferme, auréolée d’une lumière flamboyante. Une portion de la toile a été soulevée et travaillée vers la droite, accentuant  l’impression d’une construction architecturale.

La conception des personnages est caractéristique de l’œuvre de WILLIAM KAYO, en ce sens qu’à l’exception de PORTRAITS (65  x 70 cm – technique mixte),

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présentant des femmes Africaines souriant ainsi que pour SOLITUDES, où le jeune agriculteur a manifestement été portraituré, les personnages conçus par l’artiste se réduisent à la plus simple expression de silhouettes, frêles et diaphanes, souvent campées debout, toujours baignées d’une lumière enveloppante, mises en exergue par un contour extrêmement appuyé, conçu à la sciure de bois.    

« Les silhouettes nous suivent », affirme l’artiste, en pointant son doigt vers le sol pour désigner nos ombres. Ce sont là les traces que nous laissons de nous-mêmes ».

Dans HORIZONS (90 x 90 cm – technique mixte),

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les silhouettes se dressent au loin. Une zone rouge incandescente, comprise entre des notes bleues, en dégradés et jaunes, fait irruption au centre du tableau.

Est-ce l’horizon qui se dessine ? Toujours est-il que dans cette œuvre les personnages féminins, plutôt stylisés, « regardent » au loin. Sauf que nous ne voyons pas leur regard, nous le devinons. En fait, nous le devinons parce que nous substituons le nôtre au leur. Et cette boite de cirage rouillée, campée au cœur d’une zone noire, à hauteur du regard, que l’artiste a trouvée au fond d’une poubelle, arrive dans la composition comme un imprévu, un élément volontairement perturbateur, censé brouiller la magie du moment. Où se situe-t-elle face à l’horizon ? Où se place-t-elle face à nous-mêmes ? Et cet horizon qui divise le tableau, qu’est-il réellement ? Le visiteur se situe précédant les personnages mais de quel côté de l’horizon est-il lui-même ? L’horizon est une vue de l’esprit car il change selon les latitudes. Selon que l’on se situe d’un côté ou de  l’autre. Observez cette série de collages, à peine perceptibles, réalisés de façon minimaliste, se fondant dans les diverses zones chromatiques, sous-tendant à l’instar d’un muret imaginaire, le haut et le bas du tableau, tel l’horizon définit le ciel et la terre. Le titre de l’œuvre se décline au pluriel. Sa lecture nous en fournit les clés.

Les couleurs ont une grande importance. Celles utilisées par l’artiste peuvent globalement être rangées en deux catégories :

Couleurs tendres : PORTRAITS (mentionné plus haut) - SOLITUDES (mentionné plus haut) – JOUEUSES DE NGONI (65 x 70 cm – technique mixte)

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Couleurs vives : TOTEMS (90 x 90 cm – technique mixte)

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HORIZONS (mentionné plus haut) – SCENES (50 x 90 cm – technique mixte)

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Mais il y a aussi (cela arrive souvent) une catégorie intermédiaire dans laquelle couleurs tendres et vives se côtoient dans un résultat surprenant :

JUST FOR DREAM (65 x 70 cm – technique mixte)

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retient notre attention parce  qu’il pose une question cruciale : y a-t-il un surréalisme « à l’africaine » ?

Ou le surréalisme est-il définitivement universel, susceptible d’être interprété selon chaque sensibilité culturelle ? La force du surréalisme est qu’il nous révèle un autre Sacré : celui du quotidien transcendé par le pouvoir d’une démarche immanente.

Grand amoureux de René Magritte, l’artiste garde un lien à la fois affectif et esthétique avec le surréalisme classique. 

Quelles sont les particularités du style surréaliste de WILLIAM KAYO ?

Surréalisme classique : statisme des personnages, encadrés dans cinq zones compartimentées, telle en architecture en suspens. A l’instar du « surréalisme » magrittien, le personnage est, avant tout, statique, voire impassible. Il évolue, soit en dehors de tout cadre architectural, soit au sein d’une architecture qui ne s’impose nullement par rapport au personnage.

William Kayo : les personnages sont en habits traditionnels – utilisation de la lumière (vive et chaleureuse) par rapport à celle de Magritte (relativement tiède ou objet d’analyse psycho-chromatique : cfr. L’EMPIRE DES LUMIERES (1953-54).   

Il s’agit, chez l’artiste, d’une conception plastique de l’onirique qui envisage le rêve que pour ce qu’il est. Non pas d’une arme contre un système d’idées. Il est vrai que si la symbiose entre surréalisme et art africain interpelle à plus d’un titre, c’est parce qu’elle exprime cette volonté de rapprochement interculturel, désormais ancrée dans le siècle. Une démarche que l’artiste qualifie de Modernité : un brassage des meilleures influences culturelles venues de l’extérieur, enrichissant le substrat culturel vernaculaire.

Quiconque connait un tant soit peu les arts traditionnels de l’Afrique Noire, ne peut séparer les productions artistiques d’avec leurs composantes magico-religieuses. C'est-à-dire, les réalisations plastiques, d’une haute perfection technique du monde fabuleux des esprits ayant souvent revêtu le statut d’Ancêtres. Un monde tel que celui-là peut aisément se passer de « surréalisme » car ses racines baignent dans une spiritualité immémoriale. Un monde dans lequel l’Homme, passant de classe d’âge en classe d’âge, se fond dans une conception de l’Histoire tendant vers l’Humanisme comme finalité. L’Humanisme africain ! 

WILLIAM KAYO assure ce rapprochement interculturel en le considérant comme un « engagement », qu’il fait vivre pleinement au visiteur, en interpellant ses interrogations propres sur le Monde. Les messages  culturels qu’il met en exergue sont exprimés de façon subtilement politique.

Nous le constatons dans  JOUEUSES DE NGOMI (déjà mentionné). Le « ngomi » est un instrument à deux cordes, typique de la région de l’artiste.

Jadis, il était joué exclusivement par les femmes. Désormais, ce sont les hommes qui se le sont approprié et voient d’un très mauvais œil les femmes qui le pratiquent.

Précisons, néanmoins, que si les hommes l’ont adopté, c’est essentiellement en tant qu’ « arme » pour exprimer un message de paix. La sœur cadette de l’artiste joue d’ailleurs de cet instrument, de façon professionnelle, en dépit de l’interdiction dictée par les hommes.

L’artiste qui a réalisé ses études artistiques à l’IFA (INSTITUT DE FORMATION ARTISTIQUE de Mbalmayo, au Caméroun), ne s’abandonne jamais à une surcharge de matière pour attaquer la toile. Tout « excès » existant se justifie dans sa fonction créatrice : conception du volume pour les tissus (cfr. TOTEMS), structures portantes pour chaque cadre (cfr. JUST FOR DREAM).

Il retravaille toujours ses tableaux à la sciure de bois et n’hésite jamais à utiliser des éléments extérieurs tels que le papier ou divers accessoires en fer, interagissant avec la perception immédiate du visiteur.

Bien que jeune, il totalise déjà vingt-six ans de travail et nous avoue qu’il n’aurait jamais pensé trouver dans la peinture l’objet de sa vocation.

Lorsqu’on lui demande ce qu’il espère de l’art africain contemporain, il axe ses espoirs sur une amélioration concernant les structures existantes permettant d’élargir les possibilités à l’accès au Marché de l’Art pour les artistes Africains qui se battent face à ce qu’il qualifie de « chasse gardée ».

WILLIAM KAYO se bat avec son art pour permettre au Monde d’accéder à la classe d’âge du dépassement.

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Collection "Belles signatures" (© 2014, Robert Paul)

François L. Speranza.

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Une publication
Arts
 
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Lettres

N.-B.: Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement.

 

A voir: 

Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza


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  François Speranza: interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles (30 avril 2014).

(Photo Robert Paul)

Au vernissage du 30 avril 2014:

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Madame Fadila Laanan, Ministre de la culture et William Kayo

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William Kayo et Robert Paul

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CLARA BERGEL : DE L’EXISTENCE DU SUJET

                                   CLARA BERGEL : DE L’EXISTENCE DU SUJET

 

Du 19-03 au 06-04-14, L’ESPACE ART GALLERY (35, Rue lesbroussart, 1050 Bruxelles) se propose de nous faire découvrir une exposition consacrée à l’œuvre de l’artiste Française CLARA BERGEL.

Il y a dans la peinture de CLARA BERGEL une dialectique ressentie du décor, en ce sens qu’au contact avec sa peinture, le visiteur se trouve plongé dans un univers où le temporel et l’intemporel se confondent dans un même élan. Ses œuvres représentent souvent un décor divisé en son centre par une immense baie vitrée servant d’écran imaginaire, lequel, par le traitement délicat des couleurs, se confond avec ce qu’il y a au-delà de celui-ci, c'est-à-dire l’extérieur. Intérieur et extérieur deviennent consubstantiels, mariés par des couleurs tendres, parfois blafardes, ex. : CUPIDON (60 x 60 cm – technique mixte),

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lesquelles « séduisent » dans l’acception latine du terme (trahissent) le regard en l’égarant dans une myriade de reflets changeants, comme une image issue de la réalité qui se réfléchirait sur l’eau d’un lac. 

Deux visions fort sensibles de la ville de Londres, l’une diurne (CUPIDON), l’autre nocturne NUIT A LONDRES (60 x 60 cm – technique mixte),

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produisent le même effet diaphane. Cet effet est obtenu par une luminosité à outrance provocant un véritable éblouissement. Une fête des sens, car même si les personnages sont absents de ces deux toiles, celles-ci grouillent de vie. Les objets disposés dans l’espace adoptent carrément le statut de sujets.

Entre l’intérieur et l’extérieur, la frontière est fort ténue. Pour nous l’indiquer, un ensemble de pilastres en assurent la démarcation tout en accentuant la verticalité de la composition. Cette verticalité témoigne de la « réalité imaginaire » d’un écran lequel prolongerait le regard du visiteur.

La vue extérieure de CUPIDON nous offre une vision de l’architecture victorienne surmontée de l’Union Jack. De même que, sur la droite de la composition, une cabine téléphonique, d’un rouge éclatant, typiquement londonienne nous rappelle dans quelle ville nous nous trouvons.

Tandis que NUIT A LONDRES nous donne à voir un univers saisissant, baigné par un éclairage fauviste, unissant dans une même féerie chromatique intérieur et extérieur.

Il y a manifestement une opposition dynamique entre ces deux vues. Malgré le côté fauviste de la réalisation nocturne, il règne dans cette toile une atmosphère à la fois chaude et calme. Tandis que dans la vue diurne, l’opacité volontaire de l’œuvre provoque chez le visiteur un sentiment plus mitigé. Il y a plus de vie, peut-être même moins de « retenue », en ce sens que certains éléments, adéquatement placés, suscitent un semblant de « désordre » : la paire de chaussures rouges, un peu en retrait sur la droite de la composition - la statuette ailée de Cupidon, trônant en oblique, décentrée par rapport à son axe, sur son socle. Cela provoque un sentiment de « nonchalance » qui confère à l’ensemble une irrésistible légèreté.

TORII (60 x 60 cm – technique mixte)

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est à la fois une opposition ainsi qu’une symbiose entre cette haute civilisation ancestrale qu’est le Japon avec la civilisation occidentale.  La présence de personnages évoluant au cœur de la ville de Tokyo sur la droite (en extérieur), écrasés par une architecture de conception occidentale, symbolise le stress ainsi que l’impact de la société de consommation. Tandis que l’intérieur (lequel trouve également une partie de son espace sur la droite) évoque la civilisation ancestrale par le biais d’un intérieur traditionnel sobre, presque minimaliste. Sur la gauche de la composition, l’extérieur engage un dialogue avec la nature par une évocation de la végétation ainsi que par les poissons rouges nageant dans un étang. Entre les parties intérieure et extérieure, l’artiste confère une place d’importance à la culture par la présence de l’écriture hiéroglyphique. De même qu’à l’arrière-plan, une symbiose entre cette même écriture et la topographie (le plan de la ville de Tokyo) éclot dans le mystère d’un flou opaque. 

MANNEKEN (50 x 65 cm – technique mixte)

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nous présente un intérieur cossu (paire de chaussures à l’avant-plan cfr. CUPIDON), assez morne par opposition à l’extérieur où divers symboles de la ville de Bruxelles sont évoqués : Tintin et Milou ainsi que la Grand-Place et le Manneken Pis, un plan de la ville et bien sûr, l’empreinte du bilinguisme : un panneau de signalisation écrit dans les deux langues nationales.

Au vu de son œuvre, CLARA BERGEL nous pose, a posteriori, un questionnement, à savoir qu’est-ce qu’un sujet ? Est-ce la présence de personnages fait le « sujet » ou bien est-ce notre imaginaire qui le crée ? C’est là toute la problématique qui régit, notamment, l’art « abstrait ».

Bien que loin d’être « abstrait » au sens où l’Histoire de l’Art l’entend communément, l’œuvre de cette artiste recèle une « abstraction » toute personnelle dans la dimension onirique de son univers pictural. Ce sont les objets, chargés de rêve, sans être « surréalistes » à proprement parler qui participent de l’abstraction du quotidien jusqu’à le circonscrire dans une intemporalité abolissant l’espace et mettant en exergue un temps rêvé : la présence de pilastres sveltes, grimpant vers le haut, souligne le côté subtil et ténu de la ligne de démarcation entre l’intérieur et l’extérieur. Il est à noter qu’à l’exception de TORII (pour des raisons évidentes), tous les intérieurs se ressemblent, tant dans l’espace que dans l’architecture. Les objets suggèrent une atmosphère menant à l’action. Dans le cas de CUPIDON, ce sont la statue ainsi que les chaussures de couleur rouge, agencées à l’avant-plan, à droite, associés à la couleur laiteuse baignant le tableau qui donnent non seulement une atmosphère onirique, mais aussi une idée progressive du sujet en développement dans l’imaginaire du visiteur. Mais il s’agit ici d’un sujet non agissant physiquement : Cupidon tient son arc de la main gauche. L’artiste se permet une licence picturale en ceci que dans l’iconographie antique, le fils de Vénus s’apprête à décocher sa flèche fatale au bout d’un arc bandé. Ici, la flèche a manifestement atteint un cœur et l’action a déjà été accomplie. Le « sujet » a déjà agi. Il se situe au-delà de l’acte posé. C’est au regardant, à présent, de le poursuivre et le terminer. Par conséquent, le « sujet » est double : personnage et visiteur se complètent dans la même aventure. Rappelons, d’emblée, que dans toute forme de création, la démarche est identique : le récepteur complète par l’imaginaire l’action du personnage. Mais dans l’œuvre de CLARA BERGEL, cette démarche est flagrante.

De plus, le sujet est un thème qui dans sa peinture prête à discussion : que ce soit dans CUPIDON (où les personnages brillent par leur absence) ou dans TORII dans lequel une foule compacte évolue dans l’univers extérieur, le sujet, à proprement parler, est tué dans l’œuf, en ce sens que son identité est absente. L’artiste nous dépeint une foule anonyme où l’individu n’existe pas.

Lorsque l’on interroge cette artiste autodidacte sur la pertinence du regard  dialectique qu’elle pose sur l’existence des espaces intérieur et extérieur qui régissent la philosophie de son œuvre, celle-ci argumente sur le fait qu’il s’agit de « portraits » personnels, réfléchissant des pulsions intérieures et que l’antagonisme entre ces deux espaces souligne le mystère de l’inconnu (vue extérieure) opposé aux traces de vie, même les plus infimes (vue intérieure). Elle ne part jamais d’idées préconçues car les villes qu’elle peint, malgré qu’elles soient connues, demeurent imaginaires, précisément dans la magie de l’agencement de ces deux espaces, pensés comme deux univers à la fois antagonistes et complémentaires, car ils nous parlent de l’univers intime de l’artiste.

Sa technique est mixte et peut inclure, entre autres, la photo, le collage et l’acrylique. Elle dirige sa propre école de peinture à Grenoble, le « Studi02 ».

Si le sujet n’agit pas physiquement, il agit plastiquement, en ce sens que l’artiste fige son acte dans une intemporalité dialectique (un dialogue avec sa propre existence), offrant ainsi l’opportunité au visiteur d’être son alter ego dans l’action de compléter son acte par la pensée qu’il suscite en le conscientisant.

François L. Speranza.

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Lettres

N.-B.: 

Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement.

 

A voir: 

Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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Clara Bergel et François Speranza: interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles (19 mars 2014).

(Photo Robert Paul)

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Collection "Belles signatures" (© 2014, Robert Paul)

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GERT SALMHOFER OU LA CONSCIENCE DU SIGNE

                          GERT SALMHOFER OU LA CONSCIENCE DU SIGNE

 

Du 26-02 au 16-03-14, l’ESPACE ART GALLERY (35, rue Lesbroussart, 1050, Bruxelles) propose l’œuvre de l’artiste Autrichien GERT SALMHOFER dans une exposition intitulée PALIMPSESTE.

Quelle est la nature profonde des œuvres de GERT SALMHOFER ? Cette question est fascinante par l’impact de l’interrogation que chacune d’elles suscite. Au-delà de la dimension symbolique et humoristique qui se dégage de ses thématiques, c’est avant tout une mise en conscience que l’artiste provoque chez le visiteur. Et cette interrogation sur la nature profonde de ses œuvres se retrouve exprimée par une savante technique mixte qui brouille les pistes du regard. Car brouiller les pistes s’avère être la mission première de l’artiste, précisément pour inciter le regardant à prendre conscience par la réflexivité issue de l’œuvre (servant de miroir), de sa propre condition humaine, laquelle par toute une myriade de symboles, devient à la fois philosophique, par conséquent politique. Cette technique mixte déconcerte le visiteur dans la perception de ce qu’il a sous les yeux car à de nombreuses reprises, la tentation de vouloir toucher la surface du tableau le saisit, exaspéré par la nature, en apparence absconse de ce qu’il voit. L’artiste insiste, d’ailleurs, pour que l’on touche ses œuvres afin que la dimension tactile fasse partie du vocabulaire cognitif. Est-ce encore de la peinture que le visiteur regarde ou bien est-ce autre chose ? Au fur et à mesure qu’il s’avance, des détails prenant la forme de ciselures et de fines incrustations apparaissent, révélant plus que de la peinture au sens classique du terme, de la matière peinte, donnant naissance à une œuvre dont la consistance est pleinement picturale dans laquelle chaque élément occupe son propre espace.

EUROPICTUM (60 x 85 cm – technique mixte – 2003)

 

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Avec GERT SALMHOFER, le « tableau » perd de son esprit strictement esthétique pour aborder une dimension essentiellement tactile. Cette dimension tactile se décline à partir d’un cinétisme presque abyssal où tout se confond dans tout, créant un sentiment d’effondrement.

PALIMPSESTE SPIRALE XVIII (75 x 74 cm – technique mixte – 2013)

 

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ainsi que STELE (65 x 85 cm – technique mixte)

 

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mettent en exergue la problématique de l’écrit.

PALIMPSESTE SPIRALE XVIII prend, de prime abord,  l’aspect d’une sorte de jeu de l’oie pour former une spirale à l’intérieur du cadre. L’artiste nous offre un panorama historique de l’écriture. Il aborde le hiéroglyphe égyptien, l’écriture cunéiforme des cylindres-sceaux mésopotamiens, les glyphes aztèques, la calligraphie chinoise, etc. Notons la présence de la figure humaine comme référant à la fois historique et discursif accompagnant les glyphes égyptiens et aztèques ainsi que sur des coupures de presse contemporaines.

Même discours avec STELE qui nous montre une pièce antique rappelant vaguement la pierre de Rosette égyptienne avec son cortège d’écritures appartenant à l’Histoire, encadrée d’une page de journal.

URBANO (104 x 95 cm – technique mixte -   1996  )

 

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est une symbiose entre une coupe de Sainte-Sophie de Constantinople et deux buildings modernes. Les couleurs sont tendres : le blanc pour les immeubles, le bleu pour le ciel ainsi que pour l’édifice byzantin, le jaune – de part et d’autre de la composition – pour renforcer le rythme ascendant de l’ensemble scandé par la présence des fenêtres. Le rouge vif de la grue précise toute la symétrie de l’immeuble. Conçue en plan, l’artiste confère à Sainte-Sophie le rôle d’arrondir les angles en la contenant à l’intérieur d’une structure carrée, elle aussi de couleur bleu.  Juste en dessous de l’édifice figure, en relief, le plan basilical d’origine de l’actuelle mosquée.

PICTOTHEQUE (91 x 100 cm – fermé) – (45 x 100 – 90 x 105 cm) (45 x 100 cm – ouvert –technique mixte – 2001)

 

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Ce triptyque est un condensé de symbolisme. Il pourrait même être l’expression d’une parabole, en ce sens qu’il appelle de ses vœux un futur lequel verrait l’Art contemporain atteindre la sphère du Sacré, en se libérant du Musée, que l’artiste considère comme une boîte de conserve. Cette œuvre est une satire sociale prenant la forme d’un empilement de musées (le profane), matérialisé à l’intérieur d’un retable (le sacré). La partie  extérieure des panneaux nous montre la façade du Louvre devant laquelle trône la fameuse Pyramide de l’architecte Leoh Ming Pei. En haut, à droite sont représentés le devant et l’arrière du Centre Beaubourg.
Tandis qu’en haut, à gauche figurent la coupe du Musée Guggenheim de Bilbao ainsi que celle du Musée Ludwig de Cologne. 

 

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L’intérieur du triptyque est parsemé d’images-référents faisant partie du patrimoine mondial de l’Art, telles que le DAVID de Donatello, l’HERMES de Praxitèle, La BATAILLE de Paolo Uccello, le portrait d’ELIZABETH TAYLOR de Warhol ou l’URINOIR de Marcel Duchamp. Des phrases issues de propos d’artistes majeurs sont reprises ça et là à l’intérieur du triptyque : il y a plus d’esthétique dans un sous-marin nucléaire que dans tout l’art contemporain. (Joseph Beuys).

Comme nous l’avons spécifié plus haut, le pilier qui soutient l’édifice créatif de GERT SALMHOFER, c’est la force du symbole : la symbolique est une signature récurrente dans l’œuvre de cet artiste. Elle est à la fois discrète et présente. Néanmoins, transcendant un langage déjà évocateur, à l’exemple de la structure en plein effondrement d’EUROPICTUM,

 

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cette symbolique trouve sa destination percutante dans la présence de ce drapeau de l’Union Européenne flottant en haut à droite de la composition : le symbole est l’image d’une E.U. en pleine déliquescence. Il en va de même pour URBANO où la référence : « une réalisation SALM et HOFER – SARL promoteurs » associe, par le biais de l’humour, le sacré de la basilique primitive de Sainte-Sophie convertie en mosquée avec le gratte-ciel moderne, aliénant et concentrationnaire, défigurant le paysage humain. Le symbole parcourant l’ensemble de sa peinture est politique au sens étymologique du terme : dans le premier cas, il dénonce l’instabilité de l’U.E. Dans le second cas, il prend en compte la polis (la cité), dans son acception humaine, intellectuelle et dynamique. Bien que l’artiste n’ait jamais étudié l’architecture, il ne cesse de s’y intéresser car ce qui est urbanistique témoigne de l’activité humaine.  Sa démarche, comme nous l’avons souligné, se distingue par le désir de créer de la confusion en brouillant les pistes cognitives tout en aboutissant vers une lecture simple. Une foule de signes constellent son œuvre. Ces signes, posés pêle-mêle dans l’espace pictural, sont les composantes d’une sémantique appartenant à l’Histoire, dans une perspective laquelle ne devient évolutive que dans la culture personnelle du visiteur. Aucune chronologie ne régit ses tableaux. Ici encore, le symbole se manifeste dans la représentation : la spirale constituant l’œuvre éponyme, formée d’une myriade de signes est une image de l’infini dans de nombreuses mythologies. Il y a, par conséquent, une adéquation entre le bouillonnement créatif de l’écrit à l’intérieur de la forme et la spirale aboutissant sur l’infiniment possible. Il en va de même avec STELE où le réceptacle du signe (la pierre – l’archaïque) débouche sur la souris de l’ordinateur censée contenir le support technologique moderne ordonnant le savoir.

Comme à son habitude, l’humour n’est jamais loin : une image de Dominique Strauss-Kahn sert de clin d’œil au regardant. Cet engouement à brouiller les pistes est un incitatif à l’endroit du visiteur à rechercher la vérité du discours par lui-même. On retrouve cette volonté de l’égarer volontairement même dans la façon qu’a l’artiste de cacher sa propre signature apposée sur le tableau, en la « symbolisant » par le monogramme « S » atrocement déformé, placé généralement du côté gauche de la composition, auquel répond sur la droite, la date d’achèvement. 

La consistance des tableaux exposés qui fait que l’œil du visiteur est trompé par ce qu’il voit, en ce sens qu’il n’arrive pas toujours à déterminer la matière avec laquelle l’œuvre a été réalisée, est en fait une pâte que l’artiste fabrique lui-même. Lorsque celle-ci est sèche, il taille dedans et la ponce ensuite. De sorte qu’il n’est pas toujours aisé de reconnaître l’élément peint du sculpté, comme pour EUROPICTUM, où l’architecture enchevêtrée est en réalité, un collage extrêmement subtil, associant peinture, bois et pâte (la colonne de droite, contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, n’est pas de la peinture à l’huile mais bien de la pâte travaillée). D’où une forme de cinétisme qui n’a rien à voir avec la perspective proprement dite.

Sa peinture est également une œuvre philosophique, en ce sens qu’elle propose tel thème, préalablement exploré, pour le reproposer sous un éclairage nouveau, d’où l’intitulé de son exposition : PALIMPSESTE, à savoir, un     manuscrit sur parchemin dont on a préalablement gratté le contenu existant pour en rédiger un  autre. Cette technique était usitée par les moines du 7ème au 12ème siècle. L’inconvénient majeur à cette façon de procéder est que tout ce qui fut écrit auparavant s’avéra définitivement perdu.

Du grec ancien, « Palipsêstos » signifie « gratter à nouveau ». Or, le grattage fait précisément partie de la technique d’approche du matériau par l’artiste, lorsque la pâte qu’il a conçue est à demi-sèche et prête à être poncée.

Le parcours  de GERT SALMHOFER est typique de l’artiste ayant fréquenté les Beaux Arts mais qui pour trouver sa propre voie a dû s’en distancier.

Excellent orfèvre au demeurant, il habite Bordeaux. Lorsqu’on lui demande de nous parler de ses projets immédiats, il nous répond tout de go : « retourner à Bordeaux ! »  Humour quand tu nous tiens…

PALIMPSESTE participe d’une volonté de connaissance dans laquelle le signe, produit culturel, renouvelé par l’œuvre dans son intemporalité, devient, par le biais d’une fine poésie, le véhicule d’une conscience qui nous implique, au détour de chaque regard que nous portons sur l’œuvre profonde et prolifique de GERT SALMHOFER.

François L. Speranza.

 

 

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Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement.

 

A voir: 

Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

 

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François Speranza et Gert Salmhofer: interview et prise de notes sur le déjà réputé carnet de notes Moleskine du critique d'art dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles (26 février 2014).

(Photo Robert Paul)


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                    ALFONSO DI MASCIO : D’UNE TRANSPARENCE, l’AUTRE

 

Du 05-02 au 23-02-14, l’ESPACE ART GALLERY (Rue lesbroussart, 35, 1050 Bruxelles) organise une exposition essentiellement centrée sur l’œuvre de Monsieur ALFONSO DI MASCIO, un sculpteur et dessinateur Italien vivant en Belgique, intitulée AU-DELA DE LA TRANSPARENCE.

La transparence est, selon l’étymologie scientifique, la propriété qu’a un corps de laisser passer les rayons lumineux afin de révéler ce qu’il y a derrière sa structure. Formé du latin « trans » (au-delà) et de « parere » (paraître). A l’analyse du mot, on s’aperçoit qu’il revêt une étymologie fort vaste, laquelle embrasse tant la sphère scientifique que philosophique et politique.

L’Histoire de l’Art s’intéresse également à la transparence mais essentiellement pour mettre en exergue certains aspects techniques essentiellement liés à la peinture, en ce qui concerne la pertinence de tel procédé dans le rendu des couleurs associés à la forme. Il n’est pas fréquent de la voir prise comme sujet d’étude sur lequel bâtir une œuvre. Surtout une œuvre aussi riche que celle de cet artiste à la démarche très intellectualisante, laquelle exige du visiteur qu’il déploie sa palette de réflexion face à l’œuvre qui l’interroge.

Pour ALFONSO DI MASCIO, la transparence est le véhicule servant d’intermédiaire entre ce qu’il voit et ce qu’il y a derrière le miroir. Et ce véhicule faisant office de messager entre l’Homme et l’inconnu, c’est le verre. Le verre mettant en évidence notre première réalité en tant que phénomène sensible. L’artiste utilise le symbole pour donner corps à sa recherche. Le symbole est, par excellence, le pare-brise, lequel est extrapolé de sa fonction première pour servir d’intermédiaire entre un intérieur (celui de la voiture) et l’extérieur, exprimé par une réalité en continuelle métamorphose. De ce fait, le visiteur doit impérativement prendre son temps de réflexion face aux surprises que dévoile cette démarche à la fois artistique et philosophique. Mais une fois le seuil franchi, la découverte est fascinante !

La première constatation est que le verre est un corps. Un corps avec une peau.

La matière usitée est le verre feuilleté à l’intérieur duquel se trouve une membrane (la peau) insoupçonnée. Ce derme est l’expression de la réalité que la transparence rend évidente.

Si généralement l’aspect technique est révélé à la fin, dans la démarche d’ALFONSO DI MASCIO, il ne peut qu’être au centre de la recherche car il explique toute sa philosophie. L’artiste exploite les deux surfaces du verre (le côté recto et le côté verso) en les traitant au marteau et au burin pour enlever la matière qu’il qualifie d’ « indésirable » parce qu’elle le sépare de la peau, intermédiaire vers la réalité. Une fois la membrane atteinte, il la travaille en son centre, jusqu’à la faire sortir de son cadre, en la transformant en une fine pellicule blanche. Une sorte de pâte laiteuse (VERRE + GALET).

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Un aspect que nous avons cité plus haut, à propos de l’artiste, doit être absolument souligné, à savoir son immense talent de dessinateur.

L’on peut dire que son talent de dessinateur est une conséquence de son être sculpteur. Il suffit d’observer la position du dos féminin ainsi que l’échancrure profonde assumée vers le bas par l’écartement des jambes que rappelle le demi-cercle abritant la pièce oblongue qui termine VERRE + GALET. De même les nervures « badigeonnant » le verre que l’on retrouve, réalisées au fusain, sur le dos du personnage féminin, mettant en relief la nervosité du trait dans un contraste d’ombres/lumière.

Les PENDUS constituent une réflexion sur le tout dans le tout.

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Fin connaisseur de l’Histoire de l’Art, l’artiste s’inspire du peintre et théoricien de l’Art Italien du 16 siècle Giorgio Vasari. Cette œuvre, conçue par trois pare-brises enroulés à la main, met en exergue la peau des suppliciés s’échappant de l’encadrement noir, enserrée dans la peau du verre de laquelle elle est issue. Enroulée à mains nues, la peau maintient le verre et permet son pliage. Dans cette œuvre, la transparence est, de fait, le maître mot régissant la composition. Tout fuse à travers le verre. Lumière et couleur naissent au jour. A ce stade, une question doit nous interpeller : quel est l’élément chromatique à prendre en considération ? S’agit-il d’un chromatisme essentiellement centré sur le noir ou bien est-ce la brillance du verre enroulé sur lui-même, exposé sur un support de bois également de couleur noire qui doit retenir le regard du visiteur ?

Tout est à prendre au premier degré car, une fois encore, tout est dans le tout : la transparence donne vie à la matière profonde du verre, tout en révélant au regard la brillance du noir.

Les dessins réalisés par l’artiste sont de conception baroque. Le jeu des contrastes, la peau plissée, les postures torsadées sont (toutes proportions gardées) proches de celles d’un Michel-Ange. Cet engouement pour la forme torsadée se retrouve, notamment dans ROUGE + NŒUD + BARRE.

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Dans cette œuvre, la membrane (la peau expulsée du verre) trouve précisément cette dimension baroque dans ce côté torturé que présentent les sculptures de cette époque, elles-mêmes héritières de la sculpture antique, particulièrement dans la réalisation des plis des vêtements. Dans cette pièce, la présence de verre réduit en fines brisures à l’intérieur de la peau, évoque la pluie, donnant à la matière un côté lisse et mouillé.

Ce qui saute immédiatement aux yeux du visiteur c’est l’absence de visage sur les dessins de l’artiste représentant des torses. En effet, ce dernier prive les corps d’identité, les cantonnant à de simples réceptacles dynamiques, destinés à être engendrés par le tracé du fusain.

DESSIN 10

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représente une coupe de membrane. Remarquons le traitement de la matière. La consistance de la chair, l’élasticité des tissus puissants comme des muscles en extension. Le trait au service de la matière règne en maître.

Ce qui prouve que les dessins d’ALFONSO DI MASCIO ne sont pas simplement l’œuvre d’un dessinateur mais bien celle d’un sculpteur qui dessine.

Formé à l’Académie de Watermael-Boisfort par le Professeur Gérald Dederen, il a une formation de dessinateur en architecture, ce qui l’a conduit au dessin technique, pour se tourner par la suite vers le dessin artistique avec bonheur.

Un dénominateur commun lie sa production au fusain avec celle sur verre, à savoir qu’à l’instar des dessins, ses sculptures peuvent être accrochées au mur. Ce qui signifie qu’en dernière analyse, la ligne de démarcation intellectuelle entre l’image sur papier et celle sculptée demeure extrêmement floue, pour ne pas dire inexistante, puisque l’une complète l’autre.

 

La transparence, l’artiste veut la dépasser pour atteindre une métaréalité. Le visiteur qui la reçoit est conduit au-delà de lui-même, au travers de sa transparence propre, par le biais de la nature physique inchangée du matériau usité par l’artiste, lequel, même torsadé, martyrisé, réduit en brisures scintillantes, n’en demeure pas moins…du verre.

François L. Speranza.

 

 

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 Alfonso Di Mascio et François Speranza: interview et prise de notes sur son déjà réputé carnet de notes Moleskine dans la tradition des avant-gardes artistiques et littéraires au cours des deux derniers siècles (5 février 2014).

N.-B.: 

Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement.

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Focus sur les précieux billets d'Art de François Speranza

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LESLIE BERTHET-LAVAL OU LE VERTIGE DE L’ANGE

L’Année 2014 s’ouvre par une très belle exposition intitulée DIFFERENTS REGARDS SUR L’ART : PEINTURES ET SCULPTURES, qui se tient dans le cadre du 26ème anniversaire d’ALZHEIMER BELGIQUE asbl, du 15-O1 au 02-02-14 à l’ESPACE ART GALLERY (Rue Lesbroussart, 35, Bruxelles 1050).

Cette exposition nous invite à découvrir l’œuvre de Madame LESLIE BERTHET-LEVAL, une peintre Française qui nous propose une vue personnelle d’une des plus hautes dimensions du surnaturel : celle de l’ANGE.

Par tous les siècles et dans toutes les cultures, la figure de l’ange a servi d’intermédiaire invisible entre l’humain et le divin, par le biais de formes les plus inattendues.

Le thème de l’ANGE se décline chez LESLIE BERTHET-LAVAL d’une façon qui abandonne le discours mythologique classique pour aborder les méandres d’une mythologie personnelle, laquelle comme toute mythologie qui se respecte, transforme le récit initial pour le restituer à mesure des fluctuations de son vécu et de sa sensibilité.

La signature de l’artiste se retrouve dans une écriture virevoltant dans un méandre labyrinthique à la géométrie axée principalement sur le module du cercle tantôt abouti, tantôt inachevé. Au centre de cette écriture faussement confuse et festive, la figure humaine évolue dans un cinétisme personnel, scintillant de mille couleurs, dans lequel les personnages se perdent et ressuscitent, émergeant du trait, conçu comme une infinité de sillons, à partir desquels la figure s’incarne dans son propre volume. (MES ANGES – huile sur toile – 165 x 260). 

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Cette communion entre trait et matière se perçoit surtout dans ce diptyque*
12272988466?profile=originalreprésentant un personnage en mouvement (panneau de gauche), répondant à un cheval bondissant (panneau de droite). Cette œuvre est une invocation au mouvement à l’intérieur duquel, le trait assurant la viabilité de l’action est précisé par un apport considérable de matière étalée au couteau assurant une totale mise en relief.

L’ensemble se présente comme un véritable réseau de pistes polychromées à dominante jaune, blanche et bleue, conférant à l’ensemble l’essence même du mouvement.

Entre les deux panneaux un rapport dialectique s’installe : le chromatisme de la  scène de droite répond à celui de la gauche. Les zones blanche et jaune du panneau de droite répondent à la haute note mauve parsemant la presque totalité du panneau de gauche.

Il est impératif de prendre son temps avec une artiste telle que LESLIE BERTHET-LAVAL, car une myriade de détails construisent le tableau, notamment cette foule de segments conçus à la matière étalée au tube (considéré par l’artiste comme le prolongement de sa main) qu’elle vide frénétiquement, d’un coup, lorsqu’elle crée « en apnée » comme elle le dit elle-même. Il s’agit, avant tout, d’une peinture intuitive que l’artiste amorce au fusain : l’ébauche de la courbe restée parfaitement visible sur la toile. Ce trait qu’elle exprime frénétiquement, met en exergue son incontournable talent de dessinatrice. Le trait, appuyé dans sa matière par le couteau, précise, explore les contours du corps en dynamisant le mouvement. Ce dernier galvanise à la fois la courbure du cheval (panneau de droite) ainsi que la posture du personnage du panneau opposé. Ce même mouvement a une fonction antithétique, en ce sens qu’il est formé de demi-cercles brisés en leur milieu (la séparation entre les deux panneaux). Le mouvement rotatoire de droite répond à celui de gauche exactement comme pour les couleurs. L’artiste puise également dans la culture iconographique du passé : la tête du cheval s’inspire de l’esthétique baroque de Rubens. 

Le mouvement ne peut à lui seul dynamiser l’espace de la toile. Il faut un autre élément qui le révèle au regard : la lumière.

La particularité de L’ANGE PORTEUR DE LUMIERE (huile sur toile – 150 x 50 cm)

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réside dans le fait que cette œuvre peut être regardée sous divers éclairages. L’artiste précise d’ailleurs que ce tableau a été conçu pour être observé la nuit. Et ce n’est nullement une fantaisie car cette étude est avant tout une réflexion sur la lumière en tant que matière à la fois tactile et visuelle : la lumière existant dans sa matière propre naissant du cœur de la nuit.

Le sujet même « baigne » pour ainsi dire dans la lumière : LUCIFER que les Romains associaient à Venus, l’étoile du matin et que le Livre d’Hénoch de la tradition biblique assimile à Satan (l’ange déchu).   

Même dans l’obscurité la plus dense, cette œuvre brille de tous ses feux car la  lumière transperce l’ombre faisant de sorte que l’image existe : il n’y a pas d’image sans lumière !

« Que la lumière soit et la lumière fut » n’est pas une banalité rhétorique. Elle est au centre d’un phénomène à la fois physique et philosophique : celui du visible.

Avec L’ANGE PORTEUR DE LUMIERE, tout brille, tant dans les couleurs que dans le trait accentuant la pose ainsi que le visage de l’ange. L’artiste a fait appel à un modèle pour prendre la pose voulue. De même qu’il a fallu un long travail de mémorisation concernant le dessin préparatoire pour pouvoir le restituer. Œuvre à dominante rouge, ce tableau marie une symphonie de tonalités audacieuses : le jaune, le violet, le bleu, le vert et le noir. Savamment agencés, ils sont portés au regard par la couche d’huile étalée à la brosse, révélant à l’œuvre le soleil qu’elle porte en son sein. Notons que la position des bras de l’ange rejoint celle du personnage du diptyque. Ils sont écartés, presque en signe d’accueil, terminés par des mains tendues dans un état de grâce. D’ailleurs, c’est l’état de grâce qui caractérise Lucifer. Il faut le considérer comme un ange baignant encore dans sa pureté originelle. Il se trouve au cœur d’une spiritualité en dehors des sentiers battus, car si l’on y regarde de près, on s’aperçoit que Lucifer fut, au regard de la tradition biblique, la première créature souffrante. Une créature qui, en quelque sorte, préfigure l’Homme dans ses pulsions narcissiques.

Les anges de LESLIE BERTHET-LAVAL participent des ancêtres illuminant notre mémoire. Ils se manifestent dans nos rêves, transportés par le véhicule de l’imaginaire. Ils nous définissent et nous protègent. Bien que l’artiste s’émeuve devant les manifestations de spiritualité exprimées par les croyants de toutes confessions, ses propres anges sont issus d’un élan immanent, se nourrissant de problématiques universelles.

L’artiste qui affectionne l’huile, a travaillé souvent la nuit, la plupart du temps inspirée par la voix de Luc Arbogast, un chanteur du répertoire médiéval et classique, pour mieux s’imprégner de l’atmosphère du sacré.

C’est une autodidacte qui  a étudié l’architecture d’intérieur, ce qui lui a permis de se familiariser avec les plans, les courbes, les divers problèmes de perspective ainsi qu’avec le dessin qui (comme nous l’avons spécifié plus haut) la définit d’emblée.  

L’artiste fut initiée à la peinture par sa grand-mère, elle-même peintre. La restauration du patrimoine fait partie de ses intérêts les plus brûlants.

Formée sur le terrain, elle a participé à la restauration de nombreux sites, tels celui de la galerie Apollon du Louvre ainsi que ceux d’églises et de châteaux de la région lyonnaise.

Lumière et couleur sont pour elle synonymes d’énigmes et de vibrations. Ce qui a fini par influer sur des concepts tels que l’Impressionnisme qu’elle identifie à la pâte utilisée ainsi qu’à la préparation des couleurs et aux détails. Et à l’Expressionnisme qu’elle associe au sentiment impalpable qui nous renvoie à notre propre histoire.

C’est le propre des ANGES de LESLIE BERTHET-LAVAL qui sondent notre part divine. Ce sont nos pulsions originelles, qu’emporte au gré de la lumière, l’Ange dans un vertige de grâce.

François L. Speranza.

 

 

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Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement.

         

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L'ange porteur de lumière (version nocturne)

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                     SWERTS : L’EAU ENTRE L’ABSTRAIT ET LA MATIERE
L’ESPACE ART GALLERY (35, Rue Lesbroussart, 1050 Bruxelles), termine l’année présente par une exposition (qui se termine le 22 - 12 -13) intitulée AU FIL DE…L’EAU, consacrée à Madame  SWERTS, une peintre Belge fascinée par les reflets multiples à la surface de l’eau.

L’eau a toujours fasciné par sa symbolique (ou pour mieux dire, ses symboliques) car, à y regarder de près, elle est à l’intersection entre la vie et la mort (l’on s’y baigne, s’y baptise mais l’on s’y noie aussi). Il existe, par contre, un univers sur lequel elle règne en maîtresse, c’est celui de l’intemporel. L’eau existe et a toujours existé tout en étant constamment différente dans la consistance de son élément : « on ne se baigne jamais dans la même eau de la rivière » (Héraclite – Panta Rei), « la mer, éternelle et toujours renouvelée » (Paul Valéry – Le Cimetière Marin). 

A la question « quelle symbolique voyez-vous dans l’eau ? », TINE SWERTS répond sans la moindre hésitation : « le mouvement insaisissable, le changement, la vie sans fin ». L’artiste obéit à une idée, une impression. Son geste débutant sur la toile ignore sa finalité, « comme si la peinture commence à se peindre d’elle-même ».

Son travail est axé à la fois sur la transparence (l’eau) et sur la forme (la plastique de cette eau). A la question : « qu’est-ce que la forme ? », elle avoue qu’au début, ce concept reprenait les termes dictés par l’académie (la conception classique), c'est-à-dire, la chose visible mais qu’au fur et à mesure, ce même concept s’est transformé en une interprétation personnelle qui couvre toutes les dimensions offertes par la perception. On peut l’interpréter dans tous les sens car il y a avant tout cette antithèse fascinante qu’est la matière de l’eau. Et cette antithèse nous conduit vers l’abstrait. La forme devient une interprétation de la nuance dans une tentative de transposition du mouvement sur la toile. La captation de ce mouvement s’exprime dans toutes les toiles exposées, en particulier dans ANNEVOIE I (11O x 170 cm – huile sur toile)

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au cours de laquelle elle se réalise à la fois par la lumière irradiant le centre de la toile, ainsi que par toute une série de segments, occupant les deux extrémités de l’espace pictural, créant des ondulations travaillées au pinceau et au couteau, pour restituer l’énergie du flux.

De même avec VENISE (120 x 95 cm – huile sur toile),

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la dynamique est restituée par les zones noire, verte et blanche, soulignant la matérialité des vagues issues du reflux créée par le vaporetto fendant l’eau.

IMPRESSION D’ISLANDE (56 x 59 cm – huile sur toile)

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s’appuie sur l’utilisation de notes blanches répétées, recouvrant la presque totalité de la toile. Elle demeure volontairement dans la transparence pour célébrer le mystère de l’eau.

L’artiste, dilettante à un moment de sa vie, a fini par fréquenter sérieusement l’académie. Elle peint depuis l’An 2000. Et cette entrée en création est selon ses propres termes « la réalisation d’un rêve ».

Lorsqu’elle commence une œuvre, elle travaille au couteau pour établir une couche de base (le gris pour ANNEVOIE I), concentrée en huile miscible pour obtenir les effets changeants de l’eau. Elle laisse ensuite sécher cette première couche pour se rendre compte du résultat puis elle en ajoute d’autres. Elle commence par aborder la note transparente pour l’amplifier par d’autres éléments. Des variations chromatiques peaufinent le travail final.

Le visiteur remarquera sans peine que sa couleur préférée est le vert. Cette tonalité recouvre la majeure partie de son œuvre exposée. Le vert est, à l’instar du noir,  une couleur excellente pour souligner l’eau capturée au moment où elle se cabre ou se déploie. Elle devient à la fois figée et élastique. Mais surtout, elle devient solide tout en conservant sa fluidité liquide qui finit par la rendre abstraite.

 SWERTS relève un terrible défi : figer l’eau dans le récipient du regard !  Marcher sur l’eau participe de l’exploit…christique mais la peindre relève de la folie de l’instant créateur. Un instant isolé dans le gouffre pulsionnel de l’Etre vivant.

 

François L. Speranza.

 

 

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Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement.

 

J'ai désigné Albertine (Tine) Swerts, peintre comme l'invitée télévision d'arts et lettres de février 2014

R. P.

 

Albertine Swerts: un document initié par arts et lettres et réalisé par Actu-TV

 

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François Speranza et Tine Swerts (Photo: Robert Paul)

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ELODIE HASLE : EAU EN COULEURS

                                       ELODIE HASLE : EAU EN COULEURS          

En guise de dernier évènement pour l’année 2013, l’ESPACE ART GALLERY (Rue Lesbroussart, 35, 1050 Bruxelles) vous propose, par le biais de l’exposition intitulée EAU EN COULEURS, de visiter les œuvres de Madame ELODIE HASLE, une jeune peintre Française qui explore les tréfonds de la nature de l’huile et de l’aquarelle.

Avec ELODIE HASLE, nous assistons à l’ébauche d’une écriture plastique, laquelle paraît, dans un premier temps confuse, parce qu’en formulation, pour aboutir par la suite à un schéma extrêmement construit, dans lequel le trait appuie la trajectoire des droites, des horizontales et des obliques : LES DISPARUS (80 x 80 cm – acrylique sur toile)

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FEMME QUI PLEURE (80 x 80 cm – acrylique sur toile).

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Dès l’approche de sa première époque, l’on sent que les couleurs se bousculent, presque anarchiques. Prises isolément, ces premières œuvres peuvent laisser le visiteur pantois. Le regard est saisi par des éclats de bleu, de rouge ou par cette explosion lumineuse émergeant d’un chromatisme en fusion où la matière pâteuse s’accroche à l’eau de l’aquarelle. L’eau et la matière. La communion d’une antithèse explosant sur la toile par la magie du vert marié au jaune (zone centrale), encerclé par le bleu (partie gauche), le rouge - en dégradés - et le brun, étalés sur la partie droite de la toile  (VIVRE !  80 x 80 cm - technique mixte).

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Alchimie savamment dosée, donnant le sentiment d’un univers chaotique, cet ensemble vivant d’huile et d’aquarelle nous fait sentir l’opposition organique entre ces deux matières : la consistance pâteuse de l’huile, travaillée tant à la brosse qu’au couteau, opposée à la fluidité de l’aquarelle, dont la technique (pour ne pas dire la nature) consiste, rappelons-le, en un dosage dans lequel la quantité d’eau est supérieure à celle de la couleur.

Néanmoins, considérés, non plus individuellement mais comme une entité, ces tableaux forment une étape, la première manifestation d’un langage en formation, lequel au fil du temps, va se structurer en un dialogue réunissant géométrie et couleurs, l’une participant de l’autre. 

A l’origine de la période actuelle de l’artiste, cette écriture trouve son aboutissement dans ces ensembles géométriques structurés par les droites, les verticales et les diagonales (mentionnées plus haut), conférant simultanément à l’ensemble un équilibre ainsi qu’une dynamique empêchant l’œuvre de sombrer dans le statisme.

L’art d’ELODIE HASLE est avant tout abstrait. Néanmoins, des ersatz de formes connues surgissent presque inopinément au regard du visiteur lorsque celui-ci se perd dans ses toiles. Tel est le cas pour VISAGES (80 x 60 cm – acrylique sur toile)

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ainsi que pour L’ARBRE (50 x 100 cm – acrylique sur toile).

Si la figure humaine n’est exprimée que par des silhouettes définissables (à la fois absentes et présentes), émergeant d’un contraste fortement étudié, créé par des zones noires et blanches (VISAGES), L’ARBRE

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porte en lui l’écho du temps fossilisé convié au regard par une série de segments stylisés, réalisés à la couleur noire, scandant des formes circulaires, vestiges des anneaux de jadis.

L’artiste, autodidacte et animatrice d’ateliers en arts plastiques auprès des jeunes, peint depuis sept ans. Elle a délaissé le figuratif pour aboutir à l’abstrait parce que, dit-elle, le visiteur avait du mal à se projeter dans son œuvre. Chose habituelle chez tout artiste, elle sait d’où elle part mais elle ignore où elle va. Quand on lui parle de langage pictural pour la définir, elle préfère parler en termes de « plaisir de travailler l’eau », transposant le mouvement dynamique en poésie.

La poésie est d’ailleurs son deuxième moyen d’expression. Aucun lien n’existe entre ses écrits et son œuvre picturale. A titre d’exemple, son recueil intitulé A CONTRE-JOUR. POESIES POUR PETITS ET GRANDS (Edilivre.com – 2010), dont nous présentons un texte, a été présenté par la CELLULE CULTURE - ENSEIGNEMENT comme un excellent outil pour faire découvrir la poésie aux jeunes.

 

TA  BOUCHE

Ta bouche

Me touche

Ta bouche

M’émeut

Je la goûte

Et l’écoute,

Je l’embrasse

Ne m’en lasse

 

Bouche cousue

Moue boudeuse,

Bouche rieuse

Moue rêveuse

 

Ta bouche

Je goûte

Elle me touche

Elle me déroute

 

L’artiste est aussi l’auteur des illustrations qui parsèment son recueil. L’on retrouve son style où les couleurs se télescopent. La page de couverture nous montre une figure torsadée. Un buste humain dont les habits volent au vent dans une dynamique où les couleurs s’opposent tout en s’unissant. L’auteur chavire entre peinture et poésie avec le même bonheur vers une même recherche esthétique. Les mots s’entrelacent dans la musique et le sens. A l’instar des couleurs qui se nouent dans un même accord.

ELODIE HASLE qui a définitivement aboli la figure humaine de son répertoire, se consacre désormais à l’abstrait pensé comme terrain d’exploration créative où acrylique et aquarelle s’opposent dans leur nature à la fois physique et philosophique : l’acrylique chargée de matière et l’eau qui métamorphose les couleurs vers le cheminement créatif.

 

François L. Speranza.

 

 

Une publication
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Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement.

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         RACHEL TROST : FLOATING MOMENTS, IMPRESSIONS D’INSTANTS


Du 06 – 11 au 24 – 11 – 13, l’ESPACE ART GALLERY (35, Rue Lesbroussart, 1050 Bruxelles), nous offre l’opportunité de découvrir l’œuvre de l’artiste suédoise, Madame RACHEL TROST par une exposition intitulée FLOATING MOMENTS.

Une constante soutient l’œuvre de RACHEL TROST (qui signe toutes ses toiles par un R), à savoir une dilution extrêmement contrôlée du sujet sur la toile. A tel point que le visiteur se trouve dans l’incapacité totale de l’identifier, tellement celui-ci se trouve dilué dans la couleur.

En effet, le sujet se trouve être précisément la forme diluée. Une forme flottante comme l’indique le titre de l’exposition. Il y a dans son œuvre, toutes proportions gardées, une atmosphère « impressionniste ». Toutes proportions gardées, parce qu’il s’agit, en fait, d’un impressionnisme abstrait, en ce sens que se déploie sur la toile un langage au service d’une impression exprimée dans la translucidité d’une abstraction, au travers de laquelle se meuvent des silhouettes indéfinissables.

Faut-il donc que le visiteur « comprenne » ce qu’il voit ? Nullement. La « compréhension » s’accomplit par le simple éveil du regard. Est-ce un bateau glissant sur l’eau que l’on voit au loin ? Ou simplement cinq traits verticaux reposant sur un axe horizontal noyés dans la brume ? TENEBRES SUR L’ABIME (80 x 100 cm – huile sur toile).

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Si nous évoquons une atmosphère « impressionniste », c’est parce que la philosophie des impressions exprimées, notamment, par un Monnet au 19ème s. (dans un langage plastique n’ayant, bien sûr, aucun rapport avec celui de l’artiste), prend avec RACHEL TROST l’aspect d’instants, inscrits dans le flottement d’un moment intérieur qui se réfléchit dans la réalité immédiate de l’acte créateur, vécu par l’artiste comme par l’imaginaire du visiteur qui le réinterprète et le prolonge.  

Chose extraordinaire, la lumière issue des notes embrumées n’est pas le résultat de couleurs vivaces mais bien d’un chromatisme terne, presque immatériel, réalisé dans des couleurs telles que le violet, le bleu-pâle, le noir, le rose-clair, le rouge avec des dégradés. Ce langage se développe chez l’artiste de façon analogue sur toute l’œuvre exposée : la composition se structure souvent à partir d’une forme, sombre et incertaine, généralement campée au centre du tableau, entourée de zones claires, sans excès, assurant à l’œuvre son climat tempéré. VISION I (80 x 100 cm – huile sur toile) –

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VISION II (80 x 100 cm).

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FRAGMENTS (80 x 100 cm)

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est sans aucun doute l’œuvre la plus polychromée que l’artiste ait exposée. On y retrouve les couleurs qui sont sa signature mais pensées d’une façon plus « joyeuse », avec une note rouge, au milieu du tableau, donnant à l’ensemble une touche manifestement lumineuse.

RACHEL TROST, qui vit à Bruxelles depuis maintenant quinze ans, s’est toujours trouvée à la charnière d’un discours agençant abstraction et art figuratif. Elle a débuté en peignant des fleurs dans un style où la forme trahissait déjà les prémisses du paysage abstrait. Au début, elle faisait se superposer les couleurs. Aujourd’hui, sa technique est basée sur le mélange, souvent à l’huile dilué. L’artiste a effectué ses études artistiques à Jérusalem. Elle s’est perfectionnée en fréquentant des ateliers d’artistes. En plus de sa formation artistique, elle a étudié la Littérature à l’Université Hébraïque de Jérusalem. Elle a également enseigné cette matière. Car elle est aussi une poétesse malgré le fait qu’elle n’écrit plus. Sa poésie s’est déplacée du papier vers la toile. Les mots ont pris la matière de la couleur et les images de la pensée ont fondu sur la fenêtre du tableau où l’impression se dilue en instants flottants.

 

François L. Speranza.

 

 

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VILLES DE L’AME : L’ART DE NATHALIE AUTOUR

                          VILLES DE L’AME : L’ART DE NATHALIE AUTOUR

 

Du  06 – 11 au 24 – 11 – 13, l’ESPACE ART GALLERY (35, Rue Lesbroussart, 1050 Bruxelles), nous fait découvrir l’œuvre de Madame NATHALIE AUTOUR, une artiste Française qui nous dévoile un univers personnel fait de reflets mouvants et de lumières lointaines.

L’art de NATHALIE AUTOUR est un art qui se distingue dans un trompe-l’œil, non pas pictural mais intellectuel, en ce sens que le sujet de ses études devient un prétexte à développer des formes connues, presque archétypales, aboutissant à des compositions à caractère monothématique. 

Chaque tableau exposé a pour sujet la ville. Mais il ne s’agit pas ici de la ville prise dans son acception topographique mais bien d’un ensemble de gratte-ciels vus de loin, comme enserrés dans un cadrage photographique.

Il s’agit de vues diurnes et nocturnes d’une métropole surgie du rêve, offrant  au peintre une possibilité à créer une adéquation picturale entre la géométrie du sujet traité (les gratte-ciels) et celle de la toile contenue dans le tableau. Les deux sujets s’étirent vers une même verticalité : la hauteur de la toile met en exergue celle des gratte-ciels. Car il s’agit maintenant de trois sujets et non plus d’un seul que l’artiste nous dévoile! La ville qui n’est pas une. La hauteur presque gothique des gratte-ciels. Les dimensions de la toile en tant que réceptacle et dénominateur commun d’un même discours.

A la question : « recherchez-vous des effets cubistes dans votre démarche ? », l’artiste répond par la négative. En aucun cas elle n’a voulu « jouer » sur la géométrie dans le but de rechercher un cubisme qui ne dirait pas son nom. Bien que pour le diptyque intitulé LES GRANDES TOURS (116 x 81 cm - x 2 – acrylique sur toile),

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elle s’adonne à une étude de perspective à la fois présente mais discrète, mettant en relief, grâce au traitement de zones d’ombre traitées à la couleur noire, les bâtiments se trouvant à l’avant-plan de la composition. Il s’agit d’un diptyque qu’il faut comprendre comme une entité, une continuité que la démarcation entre les deux panneaux ne vient pas interrompre.

Même démarche pour ILLUSION III (100 x 50 cm – x 3 – acrylique sur toile),

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un triptyque dans lequel cette continuité apparaît dans la zone médiane des panneaux.

Si ILLUSION III (le triptyque) et LES GRANDES TOURS (le diptyque) ont pour dénominateur commun la continuité dans le prolongement du récit scénique, TRANSPARENCES IVV - VI (40 x 120 cm x 3 – acrylique sur toile)

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est un triptyque qui ne présente aucune volonté de continuité dans le sujet. Il s’agit en fait, d’une œuvre finement élaborée tant dans le traitement des couleurs que dans la conception des formes, allant jusqu’à créer, savamment disposées, des fausses ombres, situées, ou pour mieux dire, cachées dans les zones inférieures des panneaux.

Dans quel univers nous trouvons-nous face à l’œuvre de NATHALIE AUTOUR ?

Nous sommes plongés dans un monde où le jour se mêle à la nuit, dans lequel la réalité des gratte-ciels se réfléchit dans l’eau scintillante du fleuve, à l’origine d’une réalité parallèle faisant partie du même élan créateur.

Des variations sur le thème similaire existent, telles que cet ensemble de tours peintes comme si elles étaient reprises au téléobjectif : LE SILENCE DES TOURS (92 x 73 cm – acrylique sur toile).

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Le traitement chromatique est des plus intéressants. Il s’agit globalement d’un contrepoint conçu dans des couleurs vives (telles que le bleu foncé, le noir, le blanc) unies à des couleurs tendres (bleu clair, jaune clair), non pas dans un esprit antagoniste mais bien dans la volonté de créer les conditions pour un éveil onirique.

Deux types de compositions structurent l’exposition de NATHALIE AUTOUR :

1)    une série de toiles de grandes dimensions

2)    une série de petites toiles intitulées PETITES CITES ENCADREES (46 x 38 cm – acrylique sur toile),

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à l’instar de celle que nous présentons, à savoir une étude nocturne où le noir l’emporte sur le reste de la palette.

Le bleu, le vert, le jaune, le blanc s’effacent, occultés par l’impact de la matière noire qui imprime le presque totalité de l’ensemble.

A noter que même la couleur du cadre est le noir : l’œuvre en est circonscrite.

 

L’artiste qui vit à Montmartre a fréquenté l’Ecole Supérieure des Arts Modernes (Paris). Elle s’est formée à l’architecture d’intérieurs et a travaillé quelques années dans le monde du design.

Ce fut pour elle une expérience déterminante, car de cet apprentissage, la notion de rigueur est venue cimenter la conduite de son travail. Sa technique se distingue par un apport de la matière finement travaillée au couteau comme en témoigne TRANSPARENCES IVVVI dans lequel l’artiste la pèse et la soupèse pour plonger la scène dans une suite de variations chromatiques.  Cette matière, accentuée dans son volume diminue la transparence - panneaux gauche et droit : mélange de noir et de blanc - pour créer les contrastes du clair-obscur. Tandis que l’utilisation du blanc pur, toujours en couches épaisses, accentue cette même transparence.

Les œuvres de NATHALIE AUTOUR, de conception récente, sont le reflet d’une ville intérieure qui scintille et s’obscurcit au fil de l’état de l’âme.

 

François L. Speranza.

 

 

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                 CHRISTIAN LEDUC OU LA MUSIQUE D’UNE RENAISSANCE

 

Du 16 – 10 au 03 – 11 -13, l’ESPACE ART GALLERY (35 Rue Lesbroussart 1050, Bruxelles), se propose de vous faire découvrir les œuvres de Monsieur CHRISTIAN LEDUC, un peintre Belge à la croisée de deux styles fort distincts, dans une exposition dont l’intitulé se justifie amplement au fur et à mesure de la découverte, à savoir LA SECONDE VIE.

Il faut comprendre la création de CHRISTIAN LEDUC comme la prise de conscience d’une seconde chance, traduite dans un langage plastique, que la vie a offert à ce dernier. En effet, ayant récemment bénéficié d’une greffe du foie, l’artiste renaît, si l’on peut dire, de ses cendres.

Le terrain sur lequel germe cette renaissance, ce sont les sujets touchant à l’existentiel. Toute sa production exposée à l’EAG est centrée à la fois sur les thèmes de la recherche, de l’interrogation et de l’aboutissement.

Il n’est pas exagéré de qualifier chacun de ses tableaux comme des « paraboles symboliques » dans leur expression discursive. La recherche (notamment celle du temps passé),  l’interrogation, l’aboutissement (image de la liberté), se déclinent d’un point de vue technique en deux langages, parfois séparés, parfois enchevêtrés, laissant apparaître un style surréaliste « classique » (en référence à Magritte, LA SECONDE VIE (80 x 60 cm – huile sur toile)

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et un style cubiste de conception cinétique faisant penser à Vasarely, LE VIRUS PICTURAL (60 x 80 cm –huile sur toile).

 

Une symbiose entre ces deux styles trouve également son expression dans LA FEMME PAON (60 x 60 cm – huile sur toile)

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ainsi que dans LE MUR DU TEMPS (60 x 50 cm – huile sur toile).

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Son langage s’exprime dans un jeu savant de perspective, par la présence, notamment, de sols en damier, parfois creux (comme dans LA FEMME PAON), symbolisant la difficulté de gravir un chemin tortueux. De même que dans LE MUR DU TEMPS, le personnage se fondant dans l’arrière-plan disparaît absorbé dans le mur, dont la construction géométrique évoque un ensemble cubique, contre lequel évoluent des montres signalant chacune une heure différente, jusqu’à vouloir comme le désire le personnage-créateur, quitter le temps. L’œil pleurant, à la fois dans et hors le cadre – effet en trompe-l’œil – pleure le temps défunt.

Cette construction cubiste se retrouve dans LA FEMME PAON dont le chapeau en éventail fait la roue.

Elle se trouve au bout d’un chemin initiatique semé d’embûches que le visiteur doit suivre pour pouvoir l’atteindre. Le trompe-l’œil du sol en damier confine avec le mur de briques ce qui confère à l’œuvre  son atmosphère labyrinthique.

LA SECONDE VIE est une parabole « surréaliste » au sens premier du terme. L’œil sorti de l’œuf, ne pleure plus (contrairement au MUR DU TEMPS) mais rayonne, témoignant de l’avènement d’une vie nouvelle. Tout dans cette œuvre est surréaliste. Le cadre « démultiplié » au centre duquel surgit l’œil, placé entre ciel et mer, se confondant dans le même chromatisme. Le lierre grimpant symbolisant la vie. Le livre de l’existence dont les pages s’envolent vers le ciel. Tout cela témoigne de la projection d’un Sacré personnel.

LE REVE OU LA LIBERTE (60 x 60 cm – huile sur toile)

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a été inspiré à l’artiste par la mise en détention de l’un de ses amis. Le rêve est en lui-même une forme de liberté mais ici il est pensé comme la liberté du pauvre : l’individu est enfermé dans la cage tandis que l’oiseau, lui, se trouve dehors. Bien que la cage soit ouverte le personnage semble pris à l’intérieur d’une pomme tel un fœtus dans un ventre de femme. Il faut considérer cette image comme une allégorie : pour l’artiste, la liberté s’exprime dans l’innocence de mordre dans une pomme, c'est-à-dire dans la jouissance de la liberté d’y mordre. Nous retrouvons à l’intérieur d’un jeu de perspective, le sol en damier. Le personnage dédoublé, campé en plan dans le corps de la pomme.

Le cubisme « pur », si cubisme « pur » il y a, se remarque dans LE VIRUS PICTURAL (60 x 80 cm – huile sur toile)

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ainsi que dans LE KALEIDOSCOPE (60 x 60 cm – huile sur toile).

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Un cinétisme vasarélyen (LE VIRUS PICTURAL) « déconstruit » l’image en l’évidant de l’intérieur, créant ainsi des formes géométriques nouvelles, à l’origine d’autres perspectives.

Construit dans l’esthétique du jeu de l’oie, KALEIDOSCOPE est l’expression à la fois ludique et géométrique d’un souvenir d’enfance.

LE TIGRE MAGIQUE (40 x 50 cm – huile sur toile)

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est un masque conçu de la forme jaillissant dans la forme en un enchevêtrement conduisant au Tout. Comment entrer dans ce masque ? La ligne est construite de telle façon qu’elle forme une série de barrières laquelle à la fois construit la structure de la gueule tout en la camouflant  au regard du visiteur. Un fil d’Ariane invisible conduit le regard dans les méandres du félin.

La palette des couleurs utilisée par l’artiste est une musique joyeuse témoignant de la joie de vivre (de revivre !).

Il s’agit de couleurs à la fois tendres et vives (sans jamais être féroces), savamment orchestrées sur la toile, impulsant la sève vitale dans chacune de ses créations.

CHRISTIAN LEDUC qui a été formé à l’Académie de Bruxelles peint depuis dix-huit ans. Il affectionne la technique à l’huile. Son discours dépasse le cadre personnel. Certes, il s’agit de l’œuvre d’un homme qui revient de loin : il est redevable à la greffe qu’il l’a sauvé. Néanmoins, au-delà de son vécu personnel, son œuvre nous parle d’un autre Sacré : celui de l’Homme élémentaire.

 

François L. Speranza.

 

 

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Il s'agit là d'un précieux corpus qui amplifie nos connaissances et enrichit indubitablement le réseau.

Robert Paul

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        CHRISTIGUEY : MATIERE ET COULEUR AU SERVICE DE L’EXPRESSION

 

Du 16-10 au 03-11-13, l’ESPACE ART GALLERY (35, Rue Lesbroussart, 1050 Bruxelles) organise une exposition proposant les œuvres picturales ainsi que les bijoux des CREATIONS CHRISTIGUEY.

La peinture de CHRISTIGUEY, alias Madame Christine Guérit, une peintre Belge dont le talent éclot au fur et à mesure que l’on découvre l’œuvre, se définit au premier contact, par l’importance de l’apport de la matière, considéré comme un élément solide « accroché » à la surface de la toile, pensée comme un terrain de recherche. Des apports de matière filandreuse (dont l’artiste ignore elle-même l’origine), trouvée ça et là sur plusieurs œuvres, attestent de l’existence d’un dialogue en perpétuel mouvement entre le peintre et la matière. Il s’agit d’un dialogue plastique fort pertinent entre la peinture, pensée en tant qu’élément liquide et la volonté d’un apport sculptural apporté à la toile, par la présence de la matière solide.

Mais quel rapport l’artiste entretient-elle avec la matière ? Est-ce un rapport plastique ressenti ou simplement l’idée de la matière en tant que servante de l’expression ? A cette question, elle répond en insistant sur le fait qu’à aucun moment elle n’a voulu ajouter de la matière pour la seule envie d’en mettre. Il faut que cette matière obéisse à un impératif créateur.

Il y a manifestement la volonté de prolonger l’œuvre peinte par un apport sculptural certain. Cela n’est nullement étonnant, puisque le mouvement est le point central de son art. Qu’il s’agisse de sculpture ou de peinture, le mouvement, celui qui oblige le visiteur à circuler physiquement autour de la pièce ou celui qui conditionne le regard par des perspectives ou des points de fuite, ce mouvement là se retrouve, en quelque sorte, « figé » par la main de l’artiste qui le fixe dans l’instant où le visiteur l’appréhende. C’est en se décomposant en images étrangères à l’esprit du visiteur que ce même mouvement prend forme.

 

Une belle connaissance des couleurs mise en exergue par le contraste sur des notes de même tonalité, telles que le bleu EMOTIONS (50 x 100 cm – photo-acrylique),

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TRAPEZISTE (70 x 90 cm – tableau-sculpture),

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le vert FRUIT DEFENDU (80 x 80 cm – photo-acrylique)

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VOLTIGEURS (80 x 110 cm – photo-acrylique), témoigne de son désir d’allier couleur et mouvement dans un même élan dynamique.

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L’univers du cirque est (comme pour beaucoup de plasticiens) prétexte à décomposer le mouvement en un compromis savant entre abstraction et art figuratif sans qu’aucune ligne de démarcation vienne scinder les deux styles. Ce besoin de le cerner s’est amplifié par l’intérêt qu’elle a toujours porté à Maurice Béjart, par conséquent, à la danse laquelle permet au peintre, au sculpteur ou au cinéaste de décanter ce même mouvement en segments figés dans l’instant.

CHRISTIGUEY a d’abord commencé son travail par le figuratif pour se diriger par la suite vers un abstrait qui ne n’en est pas vraiment, en ce sens que tout est interpellé (« tant la feuille qui tressaille sous le vent que son ombre », comme elle se plaît à dire), tout ce qui est apparemment « inutile », à la recherche constante de la 3ème dimension.

Sa rencontre avec Chagall, à Paris fut pour elle un cap déterminant, car à l’observation du peintre, elle fut fascinée par tout le déploiement de techniques ainsi que par la variété de ses matériaux. Cette rencontre fut hautement bénéfique puisque alors qu’elle était encore élève à l’Académie de Mons, on la qualifiait de « touche à tout ». Ressentant précisément ce besoin de « toucher à tout » pour des raisons esthétiques, elle fut en quelque sorte « libérée » par Chagall qui par ces paroles : « tu le fais quand tu as envie de le faire » la désinhiba et l’encouragea à poursuivre sa route.

 

TRAPEZISTE est une œuvre alliant peinture, orfèvrerie et sculpture. L’orfèvrerie domine en quelque sorte la composition puisqu’elle représente, à l’intérieur d’un premier cercle, trois trapézistes prêts à se lancer dans le vide. Le second cercle évoque le Monde. Un troisième cercle symbolise le monde intérieur des artistes réalisé à l’aide d’un vinyle 33 tours brûlé à l’acide, conférant à ce dernier l’aspect d’une forme torturée. Cet ensemble de trois cercles symbolise à la fois le Monde ainsi que l’éternel retour.

 

A son contact, VOLTIGEURS procure une foule de sentiments et d’aperceptions possibles. Il suffit juste de savoir, sans rompre la magie poétique, qu’il s’agit d’une pomme coupée au couteau. La forme enlevée du sujet nous plonge dans mille et une interprétations possibles.

MAIN A MAIN (80 x 80 cm – photo-acrylique)

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 – SUSPENSION (80 x 80 cm – photo-acrylique)

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reprennent l’univers du cirque. Les couleurs sont tendres ou fortement atténuées comme le rouge qui revêt une tonalité légère. L’utilisation du blanc usitée dans le rendu du corps du trapéziste (MAIN A MAIN) fait écho avec l’éclat de lumière jaillissante de SUSPENSION, lequel donne à la composition une dimension diaphane.

 

CHRISTIGUEY qui fut, notamment, l’élève d’Edmond Dubrunfaut et de Gustave Camus à l’Académie de Mons, utilise pour sa peinture une technique mixte. Elle a étudié la céramique et la conception des émaux. L’orfèvrerie est sa deuxième voie d’expression. Elle la conçoit comme une forme de sculpture, recherchant là aussi la 3ème dimension, accentuée par la recherche du mouvement fixé dans l’éphémère. Son geste est guidé dans l’espace par la musique et par la poésie. Son crédo se limite à ceci : « le visiteur doit se reconnaître dans son œuvre ».

Quelques belles pièces d'orfèvrerie:

Pendentifs

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Liens d'amour

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Bijoux

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François L. Speranza
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Les billets critiques de François Speranza deviennent de plus en plus connus et attendus avec impatience par les artistes qui font l'objet de commentaires ainsi que par ceux qui ont pu contempler de visu toutes les oeuvres mentionnées et qui attendent des suppléments d'informations afin de compléter leurs ressentis, et d'approfondir leur rencontre avec les artistes.

Il s'agit là d'un précieux corpus qui amplifie nos connaissances et enrichit indubitablement le réseau.

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             HENRIETTE FRITZ-THYS : DE LA LUMIERE A LA LUMINESCENCE

 

Du 16 – 10 au 03 – 11 – 13, l’ESPACE ART GALLERY (35, Rue lesbroussart, 1050, Bruxelles), a le plaisir de vous présenter une exposition consacrée à l’œuvre de Madame HENRIETTE FRITZ-THYS, intitulée LUMINESCENCE.

HENRIETTE FRITZ-THYS est une artiste Belge, qui au cours d’un long cheminement, est passée d’un style à un autre pour aboutir aujourd’hui à un langage où la lumière prime dans sa dynamique.

Elle a débuté par le figuratif, particulièrement en tant que portraitiste, en se basant sur des photos de famille et des tableaux de Maîtres pour découvrir et affiner sa technique. A partir de là, elle a dû trouver sa voie personnelle. Et cette voie ce fut celle d’une abstraction donnant libre cours à un univers de formes inconnues de la culture figurative du visiteur.

Les moteurs qui animent sa création sont essentiellement la Philosophie et la Psychanalyse. La Philosophie lui a fourni les questionnements sur la notion du mouvement. Quant à la Psychanalyse, elle lui a posé la question du transfert dans l’exploration picturale du manque pour en cerner ses arcanes.

L’élément architectural n’est pas exclu de son œuvre (HELICE – 100 x 120 cm –huile – 2010)

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exprime le sentiment du refuge. Cette composition à l’architecture affirmée se veut la projection d’un désir, celui d’un bungalow issu du tréfonds onirique de l’artiste. L’élément poétique anime l’architecture. La géométrie assure la spatialité de la surface picturale. L’œuvre, témoigne d’une subtilité des couleurs très tendres, telles que le vert-clair, le rose ou le bleu azur. Elle assume une volonté cubiste créée à la base tel un socle qui nous propulse vers le haut, là où se trouve précisément l’hélice, laquelle fait penser à une aile calme et majestueuse. Il y a là l’expression d’une recherche de la sérénité, soit acquise, soit sur le point de l’être. Jamais l’élément figuratif n’est recherché.

La spécificité de cette exposition est celle de distinguer deux périodes cruciales de l’artiste : celle qui a trouvé son expression picturale de 2002 et l’actuelle.

Un premier exemple illustre éminemment cette première période, celui de OSIRIS (80 x 100 cm – huile - 2002),

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lequel repose sur une structure mythique dont la base (que l’on retrouvera, bien qu’exprimée différemment, dix ans plus tard dans l’œuvre précitée, HELICE, sur laquelle repose la composition) représente un pentagramme en attente de notes musicales.

La cosmologie égyptienne est représentée par le disque solaire (celui du dieu Râ). Une dynamique sous-tend l’ensemble de l’œuvre, une rythmique musicale, soulignée par le papier à musique. La musique est d’ailleurs le compagnon de l’artiste lorsque celle-ci s’adonne à la création. Face à la toile, elle affectionne surtout le Baroque (particulièrement Haendel).

Il s’agit d’une œuvre à la fois sobre et extrêmement structurée. Une œuvre où l’on sent l’apport granuleux de la matière déposée sur la toile. Adéquation totale entre matière et géométrie, ce tableau évoque le mariage mystique entre le chtonien (la Terre) et l’ouranien (le Ciel), en une musique qui se nourrit des éléments. La Terre, proche de l’œil du visiteur (de sa perception) par rapport au soleil, situé plus loin dans le cosmos. Cette matière, travaillée et tactile ajoute à la dimension mystique de l’image.

OSIRIS est le produit d’une technique mixte, composée notamment, de sable, de plâtre et de fusain pour la division de l’espace. A partir de cette étape, un duel s’impose entre l’artiste et la matière qu’elle manipule, en ce sens que comme celle-ci sèche très vite, une lutte contre le temps s’engage pour la vie de l’œuvre. Cette lutte contre les éléments chimiques se retrouve très souvent dans le processus créatif de beaucoup d’artistes. On ressent physiquement la matière labourer la toile. La même démarche technique se retrouve avec PYRRHON (80 x 100 cm –huile – 2002).

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Démarche technique mais aussi philosophique car si Osiris est le dieu de la vie, de la mort ainsi que des crues du Nil, s’unissant à Isis, symbolisant l’harmonie cosmique, le philosophe Grec du 2ème s. Av. J. C., Pyrrhon d’Elis, représente l’intrusion du doute dans sa consistance philosophique et créatrice.

En ce qui concerne la période actuelle (2012-13), le même rapport vital à l’œuvre  s’installe mais il diffère néanmoins, dans le soin apporté à la recherche pour le déplacer vers plus de mécanicité. Il n’est plus question de mettre en avant une quelconque notion de transfert mais bien de se poser un questionnement sur le monde moderne, « froidement » comme le dit l’artiste, « statistique », « calme », car tout est à plat.

Nous avons dit plus haut qu’outre la Psychanalyse, la Philosophie guidait également sa quête. Ce passage entre l’extériorisation du transfert vers le questionnement calme sur le Monde, s’apparente à la conception nietzschéenne du dionysiaque vers l’apollinien. Le calme se manifeste ici par un agencement recherché des couleurs en quête d’équilibre.

TUMULTE (80 x 100 cm –huile – 2013)

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Tout baigne dans la brillance. La forme éclatée, au centre de la composition, assure une dynamique centrale, interagissante, qui se propulse sur le reste. Ce tableau constitue d’un point de vue chromatique une véritable mosaïque aux multiples couleurs vivaces, avec en son centre, une forme dilatée qui par le jeu précis du trait s’ « agrippe » à la toile, telle une araignée pour la coloniser.

Nous sommes frappés par la mise en contraste entre les couleurs, rehaussées par la brillance apportée. L’artiste est ainsi passée d’une démarche personnelle aux extrêmes les plus fous. Elle invoque Gustav Klimt qui fait habiter des espèces avec des mondes différents qui n’ont plus rien à voir avec l’idée de la forme conçue à l’origine. A titre d’exemple, si l’on observe LE BAISER (1907-8), nous nous rendons compte de l’existence de deux dynamiques : une dynamique du geste (l’homme enlaçant la femme – premier tableau) et une dynamique des couleurs, vibrant dans leur brillance, créant à elle seule un second tableau. C’est une dynamique du geste et de l’enveloppant. L’artiste appuie son propos en évoquant la lumière d’une bougie que l’on fixe jusqu’à ce qu’elle ne soit plus elle-même mais bien une forme distordue.

FACETIES (80 x 100 cm –huile – 2012)

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constitue également une mosaïque faite  de contrastes, mais bien plus calme, travaillant principalement sur les tonalités bleu, vert et violet, où chaque tesselle se fond dans l’autre, créant des modulations vibratoires.

Si pour la période précédente l’artiste a dû se battre contre le temps, dévoreur de matière, cette nouvelle phase la voit dans la contrainte de devoir s’adapter aux propriétés des produits chimiques trouvés sur le marché, censurés pour des raisons de sécurité mais avec lesquels elle assurait un travail excellent, ce qui l’oblige à une réadaptation forcée.

 

LA NAPPE (80 x 100 cm – huile – 2011)

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est inspirée de l’esthétique du Bauhaus, étape artistique pour laquelle l’artiste éprouve un grand respect. Si elle s’est permise de surenchérir sur l’esthétique de Klimt, en ce qui concerne l’étape du Bauhaus, axée sur le côté artisanal, très proche du peuple dans son design, elle ne change rien et l’accepte pleinement. Par la représentation d’un outil domestique, l’artiste aborde le langage d’un mouvement artiste et intellectuel, une étape au service du peuple, alliant pour le bonheur collectif, esthétique et fonctionnalité.

 

Pratiquant également la sculpture, HENRIETTE FRITZ-THYS qui a été formée à l’Ecole Nationale Supérieure d’Arts Visuels de la Cambre de Bruxelles, est avant tout une peintre de la lumière, ou comme l’explicite éminemment l’intitulé de l’exposition qui lui est consacrée, de la luminescence.  Lumière-luminescence. L’une peut-elle aller sans l’autre ? La luminescence est l’explosion de la lumière. Sa force atomique. Elle exprime l’infini de son origine. Sa cosmicité.

 

François L. Speranza.

 

 

Arts 
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Lettres

 

N.-B.: 

Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement.

 

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Il s'agit là d'un précieux corpus qui amplifie nos connaissances et enrichit indubitablement le réseau.

Robert Paul

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LA FORME ENTRE RETENUE ET DEVOILEMENT : L’ART DE JEAN-PAUL BODIN

 

Du 25–09 au 13-10-13, l’ESPACE ART GALLERY (Rue Lesbroussart, 35, 1050, Bruxelles), nous propose de découvrir les nouvelles créations de Monsieur JEAN-PAUL BODIN, artiste Français que l’EAG avait déjà eu le plaisir d’exposer en 2011.

SURREALISTE ET SUAIRIQUE. Tel est le titre de cette exposition. Titre qui soulève un questionnement bien légitime. Doit-on voir dans le terme SUAIRIQUE la volonté d’un quelconque néologisme ?

Le style suairique résulte de la complexité du mystère, offert dans son expression. Largement inspirée de l’image radiographique que l’on a du Saint Suaire de Turin, l’œuvre de JEAN-PAUL BODIN se veut une iconographie de l’onirique où la forme corporelle, diluée dans l’éphémère du linceul, se mélange à la matière translucide, matérialisée par le « suaire », lui-même traité comme une réalité évanescente et fuyante. Car il s’agit, pour le propos, d’une « forme corporelle » ainsi que d’un « suaire » rêvés, exprimés dans la réalité d’une vision plastique.

Cette expression des formes offre des moments où la dimension mystique se reflète dans le travail de l’œil à découvrir la genèse de la matière, progressivement et partiellement révélée. Partiellement, parce que toujours enveloppée dans la chrysalide du « suaire », traité comme une matrice, à travers laquelle apparaît l’image en suspension du mystère.

Les œuvres se scandent sur un chromatisme de fond, monochrome, tel que le bleu, le jaune ou le rouge, sur lequel se déploie le trait.

Est-ce, d’un point de vue technique, un travail sur le relevé photographique de la fin du 19ème siècle, laissant apparaître la forme humaine qui justifie ce néologisme d’art suairique, en rapport avec le Saint Suaire de Turin? Oui et non. Car l’aventure créatrice aboutissant à ce résultat a commencé par une erreur de manipulation de la part de l’artiste. Des produits chimiques tombés sur les glacis à même la toile ont fait, le plus accidentellement du monde, apparaître la silhouette d’un visage humain. En travaillant sur cet accident de parcours, l’artiste a élaboré progressivement un langage fouillé et personnel, aboutissant vers un univers fantastique CITE ENGLOUTIE (150 x 120 cm – huiles sur toile)

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et abstrait LE GUERRIER (65 x 81 cm – huiles sur toile).

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A la question, subsiste-t-il encore des traces (même subconscientes) de surréalisme dans son art suairique, l’artiste répond par l’affirmative, en insistant sur le fait que ces traces demeurent néanmoins passagères mais bien réelles pour certains tableaux, tels que précisément CITE ENGLOUTIE (cité plus haut), lequel nous offre une vision apocalyptique d’un moment absolument intemporel, puisque la cité n’en finit pas d’être engloutie dans les flots, que le visiteur pourrait aisément interpréter comme des flots de feu, suggérés par la couleur rouge fauve qui se déploie sur la partie inférieure de la composition symbolisant l’abîme.

Cette atmosphère tragique est obtenue par une longue succession de couches, étalées les unes sur les autres, comme autant de compositions chromatiques superposées, assurant à la fois transparence et lumière par superposition des glacis.

L’artiste s’intéresse-t-il à la photo, comme certaines œuvres pourraient le laisser penser ?  EMOTION  (33 x 41 cm – huiles sur toile).

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A cette question, ce dernier avoue, plus que tout, son intérêt affirmé pour les représentations stylisées qu’offre la technique de la radiographie médicale. Bien entendu, il s’agit, en ce qui concerne son œuvre, de la radiographie d’un monde intérieur, qui se décline à travers les nuances infinies du pathos.

Loin du discours tournant autour du mystère du Saint Suaire de Turin, son œuvre émane d’une démarche mystique, nourrie de questionnements existentiels, qu’une écriture basée sur une approche abstraite, sans aucune influence essentiellement chrétienne, affirme au sein d’un mystère conçu en formes vaporeuses et confuses. Une grammaire axée sur l’antiforme (par opposition à la notion de la forme conventionnellement pensée).   

JEAN-PAUL BODIN insiste sur le fait qu’au début, il n’aimait pas vraiment l’abstrait mais qu’au fil de son évolution personnelle, il a fini par y trouver une voie créatrice.

Venons-en à un autre aspect de la palette créatrice de cet artiste, à savoir sa dimension surréaliste.

Il s’agit d’un surréalisme personnel tendant vers le naïf, tant dans le style que dans le référant iconologique, exprimé dans sa symbolique.

Avec LE PARADIS  (72 x 112 cm - x 2) – (132 x 112 cm), l’artiste a voulu, dans son propre langage pictural, rendre un hommage vibrant à Breughel l’Ancien

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Il s’agit d’un triptyque où le panneau central est axé sur la présence d’Eve évoluant au cœur de l’Eden. Celle-ci figure au centre d’une bulle, en bas sur la gauche de la composition, émergeant dans sa nudité, entourée d’une végétation assez tourmentée. Chose inhabituelle, la présence d’Adam n’est signalée à aucun moment. Sa moitié évolue au cœur d’un univers lacustre, où les tonalités chromatiques majeures sont le bleu, le jaune et le vert, conjugués en dégradés. Elle ne semble pas naître pas d’une côte d’Adam mais de la Nature même.

Le panneau de gauche est exclusivement consacré aux mondes animal et végétal.

Ce n’est que dans le panneau de droite que le couple mythique fondateur, Adam et Eve apparaît.

Celui-ci est, entre autre, représenté dans un premier médaillon, en bas à gauche (comme pour le panneau central avec Eve) ainsi que dans un second médaillon, en bas à droite de la composition. De plus, ce panneau revisite dans une écriture contemporaine, une forme esthétique issue de l’art religieux de la Renaissance qui consistait à « démultiplier » les mêmes personnages sur une même surface, évoluant dans des scènes différentes. Adam et Eve sont ici représentés, soit accouplés, soit individuellement, à l’intérieur du même cadre scénique mais plongés au sein de situations différentes.

Cette œuvre est une réinterprétation du PARADIS TERRESTRE de Breughel l’Ancien (ca. 1607–08 – 48 x 65 cm). Une réinterprétation qui « déséquilibre » tout en « rééquilibrant » l’œuvre originale, en ce sens que le tableau de Breughel, construit en un plan d’ensemble dans lequel figurent tous les éléments, est si on le regarde de près, un triptyque qui ne dit pas son nom. En effet, l’œuvre initiale est construite en trois plans : 1) les animaux de la création, en avant-plan

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2) la création d’Eve sortie de la côte d’Adam, au centre

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3) le reste du paysage lacustre confinant avec le ciel, à l’arrière-plan.

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JEAN-PAUL BODIN a, dans un premier temps, « désarticulé » l’ensemble original pour le « réarticuler » en un triptyque, comportant trois ensembles distincts. On peut même dire qu’il l’a « amplifié », en ce sens qu’à partir d’un tableau d’aussi petites dimensions (48 x 65 cm), il en a fait une œuvre d’aspect presque monumental.

Qu’est-ce qui dans ce triptyque est surréaliste et qu’est-ce qui est naïf ?  

Rappelons qu’il s’agit ici de l’expression d’un langage personnel, lequel s’écarte singulièrement des conventions formelles du surréalisme.

Dans le panneau central, cette pénétration du soleil (en jaune très vif) dans la mer au large (dans un bleu presque blanc), renoue avec le vocabulaire surréaliste « classique », tout en demeurant très personnel. Tandis que ce même bleu de la mer devient de plus en plus épais, au fur et à mesure qu’il s’approche de la présence physique d’Eve et de celle du visiteur qui entre en contact visuel avec le tableau, c'est-à-dire avec la réalité picturale du récit symbolique.

La dimension naïve, elle, se manifeste surtout d’un point de vue stylistique dans l’élaboration de la végétation, inquiétante, fantastique et luxuriante ainsi que par le rendu plastique des animaux. Ce choix stylistique n’est pas sans rappeler l’art du Douanier Rousseau. Un art ancré dans un fantastique tendre et joyeux.

La présence de ce triptyque s’explique en tant que facteur de comparaison entre les styles surréaliste et le suairique de l’artiste. Cela s’imposait, surtout si l’on songe que JEAN-PAUL BODIN a eu l’occasion de pratiquer un surréalisme plus conventionnel proche, notamment d’un Magritte, pour des œuvres qui ne sont pas exposées actuellement à l’EAG et qui mériteraient pleinement d’y figurer.

Autodidacte de formation, JEAN-PAUL BODIN a néanmoins fréquenté les Beaux Arts où il s’est formé dans la technique du dessin. Il peint essentiellement à l’huile, dans une technique axée sur un mélange savant d’huiles diverses.

Ce qui fait de lui un véritable maître dans la brillance de la lumière, grâce à la maîtrise qu’il a de la composition des glacis.

Un dénominateur commun réunit les styles surréaliste et suairique : une recherche absolue du sacré dans ses formes les plus insensées.

Artiste de l’introspection mais aussi du rêve en fête, son art entretient le dialogue séculaire entre l’Homme et ses fins dernières.

François L. Speranza.

 

 

Arts 
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Lettres

 

N.-B.: 

Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement.

 

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Il s'agit là d'un précieux corpus qui amplifie nos connaissances et enrichit indubitablement le réseau.

Robert Paul

 

 

 

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L’ART DE LINDA COPPENS : LA COULEUR ET LE TRAIT DANS LE DIALOGUE DES SENS

 

Pour inaugurer la rentrée, l’ESPACE ART GALLERY (Rue Lesbroussart, 35, 1050 Bruxelles), a le plaisir de vous présenter (du 04-09 au 29-09-13), les œuvres de Madame LINDA COPPENS, une peintre Belge qui ne manquera pas de vous fasciner, tant son univers interpénètre celui du visiteur.

Cette exposition intitulée LOST AND FOUND, est axée sur une peinture de l’intime. Une peinture qui se noie dans une brume de sensations, déclinées en dégradés chromatiques, à la charnière entre un abstrait dicté par la teneur émotionnelle et un figuratif qui n’en est pas un à proprement parler, mais un avatar de l’abstraction, en ce sens que l’artiste s’engage dans une voie où la forme, prise au sens générique du terme et la silhouette, produit d’une sensation évanescente, ne font plus qu’un.

LOST AND FOUND n° 1 (acrylique sur toile – 100 x 80 x 4 cm)

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Cet univers insolite, fait de couleurs tendres, telles que le bleu, le rose ou le brun-clair, vivent au cœur d’une alchimie savante, de laquelle se détache pour s’inscrire sur la rétine de l’œil explorateur, des traces évocatrices, lesquelles engagent l’imaginaire à l’aperception, jusqu’à concevoir des ersatz d’humanité dans ce mariage quasi mystique entre forme anarchique et silhouette humaine, scandés ça et là sur l’espace de la toile.

LOST AND FOUND n° 9 (acrylique sur toile – 100 x 80 x 4 cm)

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Peinture de l’intime et de l’extase sensorielle, l’œuvre de LINDA COPPENS se veut vivante et joyeuse. « Ensoleillée » serait le terme exact car les couleurs qu’elle utilise ont la chaleur du soleil. Sa lumière embrasse le monde onirique qui voyage autour de sa tête et illumine la toile de fête.

Adepte de l’acrylique, ses œuvres sont parsemées par tout un réseau de traits extrêmement fins qui se profilent comme des repères, invitant le visiteur à dilater le regard sur la totalité de la toile. Ce dernier peut envelopper l’œuvre non seulement à partir de son centre mais aussi en se décentrant par rapport à son axe pour mieux appréhender certains détails qui la constituent.

Il y a, néanmoins, des œuvres où la volonté de marier les couleurs pour le plaisir de les conjuguer est manifeste dans l’interpénétration calme et harmonieuse de plages chromatiques enveloppées de brume et de mystère. (LOST AND FOUND n°12 - acrylique sur toile – 1OO x 80 x 4 cm).

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BENEATH THE SURFACE n° 3 (huile et cire froide sur bois – 40 x 30 x 3 cm)

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constitue une série de quatre petites pièces globalement bi-chromatiques que l’artiste a réalisées dans un mélange d’huile et de cire froide pour leur assurer la brillance et la transparence nécessaires. Cette série est centrée sur l’interpénétration de deux couleurs opposées dont le résultat est une symbiose onirique qui fascine le regard.

LINDA COPPENS, qui a fréquenté l’Académie de Liedekerke dans le Brabant flamand, a passé six ans à étudier la peinture et cinq ans à étudier le dessin. Son art est un hymne à la complexité de la vie. Et cette vie débute sur la toile par ce que l’artiste qualifie de « rien du tout », c'est-à-dire une couche de couleur étalée, comme embryonnaire, laquelle en appelle une autre et une autre encore, comme une tranche de vécu humain en appelle une autre, pour arriver à formuler des phrases picturales, étalées l’une sur l’autre pour former une entité créatrice. Elle considère la création comme une bataille face à cet océan pulsionnel qu’est le geste créateur et s’efforce à trouver l’équilibre dans le chaos.

Elle considère sa peinture comme résolument abstraite car elle ne conçoit pas le figuratif comme suffisamment parlant.

Ses principales influences picturales sont tournées, notamment, vers RICHARD DIEBENKORN et MARK ROTTKO (deux figures principales de l’expressionnisme abstrait américain des années ’50 et ’60), tout en trouvant une voie personnelle pour s’en distancier singulièrement.

En effet, si sa peinture peut, à certains égards, rappeler celle de DIEBENKORN par le traitement de la figure humaine, celle de LINDA COPPENS n’accuse aucune volonté de représenter l’Homme. Une fois encore, tout se joue dans l’imaginaire du visiteur et dans son habileté à découvrir des formes et des silhouettes rassurantes et familières.

Quant à MARK ROTTKO, sa manière de diviser l’espace du tableau en deux zones de couleurs opposées, peut effectivement évoquer la série BENEATH THE SURFACE n° 3 (dont nous avons parlé plus haut) avec, néanmoins, cette différence notoire que dans ces œuvres (comme dans toutes celles de l’artiste), le trait domine, parsemé dans l’espace. Ce qui s’écarte considérablement de la peinture de ROTTKO, laquelle ne fait pas aussi ostensiblement l’apologie du trait.

L’art de LINDA COPPENS est une perpétuelle interrogation sur le monde sensible dans un partage humain avec le visiteur : à ce dernier de le prolonger en lui apportant un peu de son jardin secret.

François L. Speranza.

 

 

Arts 
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Ce billet est publié à l'initiative exclusive de Robert Paul, fondateur et administrateur général d'Arts et Lettres. Il ne peut être reproduit qu'avec son expresse autorisation, toujours accordée gratuitement.

N.D.L.R:

Linda Coppens est l'artiste peintre que j'ai désigné en ce début de rentrée 2014 pour faire l'objet d'un reportage par Actu-tv.

Linda Coppens, lover of sensory ecstasy

 

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