Sur les sandales de tes pas, mon aimée,
Je posais mon pied menu, pour grandir de toi,
Et marcher sur tes durs sentiers, affamée,
De partager tes souvenirs avec émoi.
Ton manteau noir montait la côte du partir,
Jusqu’au chez toi non loin des châtaigneraies,
Nous séparant, désolation du repentir,
D’avoir dans tes cheveux blancs tracé des raies.
Tu te retournais sans cesse vers l’enfant blond,
Aux yeux bleus azur et griffes de tigresse,
Qui tous les jours s’impatientait, tournait en rond,
Pétillante de joie, pleine d’allégresse.
Les signes de la main et de la menotte,
S’échangeaient, hou hou, jusqu’enfin ne plus se voir,
Je rentrais triste tête de gelinotte,
Craignant à chaque fois de ne plus te revoir.
Les années passaient sur ton dos qui courbait,
La ligne du temps m’échappait et l’image,
De la séparation peu à peu se gravait,
Dans la montée de la côte de l’âge.
La douleur à l’avance de ton sourire,
Absent de ma vie à jamais, jour fatal,
Du chagrin pesant que mon âme soupire,
Me déchirait déjà le cœur de son signal.
Les jours ont séchés ton corps usé de vie,
Vaine, je te regardais mourir pas à pas,
Mèmère t’accompagner j’avais envie,
De me coucher, sur les sandales de tes pas.
Commentaires
Bonjour Rolande. C'est un plaisir de te lire et d'apprendre que toi aussi, ta grand-mère a marqué ta vie. Si tu savais comme la mienne me manque encore. Elle m'a quitté voici 45 ans et pourtant ! Merci d'être passée me voir et d'avoir laissé un commentaire. Porte-toi bien, amitiés et bisous. Claudine.
Ce poème me fait passer à ma grand-mère chérie que tous appelaient Mémère.
A qui j'ai dédié mon premier recueil de poésies.
Elle doit être très contente de me voir lire ton poème tellement évocateur qu'il m'a mis une petite larme au coin de l'oeil.
A bientôt Rolande
Bonjour Claudine
Evidemment, ton texte ne peut que me ramener à mes deux grands-mères, et à deux arrière- grands-mères que j’ai eu la chance de connaître. Toutes m’ont relié à des temps anciens, où la condition de femmes était plus difficile qu’aujourd’hui faite de longues journées de labeur, faite de solitude dans la traversée des périodes les dures et sombres, à cause de leurs maris partis à la guerre, faite de veuvage miséreux à cause de maris morts trop tôt, faite de courage hors du commun quand les ressources sont modestes et les enfants nombreux. Tu me ramènes bien sûr aux riches heures de l’enfance, à leur tendresse, à leurs boîtes à biscuits, à bonbons, à mes jeudis, à mes dimanches en leur compagnie, à des secrets joyeusement partagés, à leur tolérance amusée pour quelques bêtises, à leur fierté de mes premiers succès scolaires, de mes premiers diplômes, à leurs sourires pour moi, ce petit qui faisait parfois l’homme.
Comme toi, j’ai du me résoudre à les voir décliner, à ce qu’elles quittent ce monde. Je n’ai entendu d’elles aucune plainte, et je pense que ça m’a toujours empêché des chagrins trop lourds à porter ou qui durent, d’autant que dans les familles nombreuses on n’est guère épargné sur de longues périodes.
Comme toi, je les nommais « mémère », à la fois mot sésame et mot bannière, pour la tendresse et la compréhension qui triomphent de tout, et quelque soit sa condition.
Merci beaucoup pour ta visite ainsi que pour ton commentaire Brigitte. Amitiés à toi aussi.
Très touchant ton poème Claudine, merci pour le partage.
Amitiés - Brig.
Edmée De Xhavée, Pierre Lenfant et Chris Pollet aiment ça.
Oui, Marie-Ange, avoir connu une grand-mère comme la mienne est un cadeau de la vie, tant elle fut merveilleuse. A contrario, la perdre a été une douleur plus grande encore. Merci de ton passage.